maladie de Still

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maladie de Still
Reçu le :
3 novembre 2009
Accepté le :
2 avril 2010
Disponible en ligne
2 juin 2010
Disponible en ligne sur
www.sciencedirect.com
Recommandations
Recommandations pour la prise en charge de
la forme systémique l’arthrite juvénile
idiopathique (maladie de Still)
Guidelines for diagnosis and treatment in systemic-onset
juvenile idiopathic arthritis
B. Bader-Meuniera,1*, C. Woutersa,b,1, C. Job-Deslandrec,1, R. Cimazd,e,1,
M. Hoferf,1, P. Pilletg,1, P. Quartiera,1
a
Service d’immunologie, hématologie, rhumatologie pédiatriques,
hôpital Necker–Enfants-Malades, Assistance publique–Hôpitaux de Paris,
université Paris V, Paris, France
b
Service de pédiatrie, hôpital universitaire, Leuven, Belgique
c
Service de rhumatologie, hôpital Cochin, Assistance publique–Hôpitaux de Paris, Paris,
France
d
Service de pédiatrie, hospices civils de Lyon, Lyon, France
e
Service de rhumatologie pédiatrique, université de Florence, Florence, Italie
f
Départements de pédiatrie, service de rhumatologie pédiatrique, CHUV, Lausanne et HUG,
Genève, Suisse
g
Urgences pédiatriques, hôpital Pellegrin, Bordeaux, France
Summary
Résumé
A guideline group of pediatric rheumatologist experts elaborated
guidelines related to the management of idiopathic juvenile arthritis
in association with the Haute Autorité de Santé (HAS). A systematic
search of the literature published between 1998 and August
2008 and indexed in Pubmed was undertaken. Here, we present
the guidelines for diagnosis and treatment in systemic-onset juvenile
idiopathic arthritis.
ß 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Le centre de référence « Arthrites juvéniles » a élaboré en 2009 en
lien avec la Haute Autorité de santé (HAS) un protocole national de
soin concernant la prise en charge des principales formes d’arthrite
juvénile idiopathique (AJI) en consultant les principales références
de la littérature publiées en langues anglaise et française indexées
dans Pubmed de 1998 à août 2008, à partir des mots clés « systemic
juvenile arthritis, Still disease, juvenile arthritis ». Nous présentons
les recommandations concernant le diagnostic et le traitement d’une
forme systémique d’AJI.
ß 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Arthrite juvénile idiopathique, Maladie de Still, Corticoı̈des, Anti-interleukine 1
1. Introduction
* Auteur correspondant.
e-mail : [email protected]
1
Tous les auteurs sont rédacteurs du Protocole national de soin
(PNDS) « Arthrite juvénile idiopathique » publié par la Haute Autorité
de santé.
0929-693X/$ - see front matter ß 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
10.1016/j.arcped.2010.04.001 Archives de Pédiatrie 2010;17:1090-1094
1090
Le centre de référence « Arthrites juvéniles » a élaboré en
2009 en lien avec la Haute Autorité de santé (HAS) un
protocole national de soin concernant la prise en charge
des principales formes d’arthrite juvénile idiopathique (AJI)
Maladie de Still
[1]. Selon la classification de l’International League of Associations for Rheumatology (ILAR), l’AJI comporte 7 entités
cliniques. Celles-ci comprennent la forme systémique d’AJI
(FS-AJI) dite maladie de Still (environ 4–17 % des cas), la forme
oligoarticulaire (environ 27–56 % des cas), la forme polyarticulaire sans facteur rhumatoı̈de dite séronégative (11–28 %),
l’AJI associée aux enthésopathies (3–11 %), l’AJI associée au
psoriasis (2–11 %), la rare polyarthrite rhumatoı̈de (forme
polyarticulaire avec facteur rhumatoı̈de) (2–7 %), et les arthrites indifférenciées [2]. Nous exposons dans ce document les
principaux points de ces recommandations, concernant la
prise en charge de l’AJI dans sa FS-AJI (maladie de Still).
2. Méthode
Le groupe de travail a consulté les principales références de la
littérature (méta-analyses, essais cliniques et études de cohortes) et les principaux ouvrages de rhumatologie pédiatrique
publiés en langues anglaise et française indexés dans Pubmed
de 1998 à août 2008, à partir des mots-clés « systemic juvenile
arthritis, Still disease, juvenile arthritis ». Seuls les articles
concernant les manifestations cliniques et la prise en charge
ont été retenus. L’ensemble des recommandations formulées
dans ce document repose sur des ‘‘avis d’experts’’ du fait de
l’absence ou insuffisance des données de la littérature.
3. Diagnostic et bilan initial
Le diagnostic initial de FS-AJI doit être fait en lien avec un
centre de référence ou de compétence en rhumatologie
pédiatrique. Il s’agit d’un diagnostic d’élimination qui repose
sur un ensemble d’éléments cliniques et paracliniques. La
FS-AJI survient préférentiellement entre l’âge de 1 et 5 ans ;
elle s’observe rarement avant l’âge de 1 an et à l’adolescence.
Le diagnostic de FS-AJI nécessite la présence :
d’une fièvre quotidienne pendant au moins 15 j : typiquement, la courbe thermique prise et notée toutes les 4 h
comporte 1 à 2 pics supérieur ou égal à 39 8C quotidiens, avec
retour rapide à une température normale ou basse (typiquement inférieur à 37 8C entre les pics) ;
d’une ou plusieurs arthrites (qui peuvent cependant
parfois n’apparaı̂tre qu’après plusieurs mois ou années),
souvent associées à des arthralgies ou myalgies sévères ;
et au moins de l’un des éléments suivants :
éruption cutanée : typiquement macules transitoires
survenant lors des pics fébriles. Sa présence associée à
celle d’arthrite(s) est particulièrement évocatrice du
diagnostic. Un dermographisme ou un aspect urticarien
sont plus rares,
hépatomégalie, splénomégalie et/ou adénopathie,
sérite (épanchement péricardique, épanchement
pleural, épanchement péritonéal).
Certaines formes sont atypiques ou révélées par une
complication :
les formes incomplètes ou atypiques se manifestent par
une courbe thermique non typique, l’absence d’arthrite
pendant plusieurs mois ou années, une absence d’éruption
maculeuse typique, une éruption urticarienne. Ces formes
doivent bénéficier d’une prise en charge similaire à celle des
formes typiques. Le diagnostic de FS-AJI ne peut être affirmé
que lors de l’apparition d’une véritable arthrite. En l’absence
d’arthrite documentée, le diagnostic de FS-AJI est considéré
comme probable, mais non certain ;
certaines formes sont révélées par une complication :
insuffisance cardiaque secondaire à une myocardite (rare),
syndrome d’activation macrophagique (SAM) [3], première
cause de mortalité aiguë au cours de la FS-AJI du fait
essentiellement d’hémorragies sévères. Il représente donc
une urgence vitale nécessitant une corticothérapie immédiate.
Aucun examen paraclinique n’est spécifique. Dans les formes
typiques on observe une hyperleucocytose avec élévation des
polynucléaires neutrophiles, une hyperplaquettose, une anémie inflammatoire, une élévation du fibrinogène, une vitesse
de sédimentation (VS) accélérée et une protéine C réactive
(CRP) augmentée. L’échographie cardiaque peut montrer une
péricardite et plus rarement une myocardite. Dans une forme
compliquée de SAM, on observe une thrombopénie, une
leucopénie et une fibrinopénie. Peuvent également être
observées une élévation des triglycérides sanguins, des transaminases, de la ferritinémie, une hyponatrémie et une
hypoprotidémie ; typiquement, le myélogramme montre la
présence d’hémophagocytose.
Dans les formes incomplètes ou atypiques, les diagnostics
différentiels à éliminer sont nombreux et dépendent de l’âge,
de l’anamnèse personnelle et familiale et des signes cliniques
et biologiques. Les principaux diagnostics différentiels sont :
une infection bactérienne, virale ou parasitaire ; une arthrite
réactionnelle, un rhumatisme articulaire aigu ; une affection
maligne : leucémie aiguë, lymphome, neuroblastome ; une
maladie systémique : maladie de Kawasaki dans une forme
incomplète (surtout avant l’âge de 2 ans), maladie inflammatoire chronique intestinale (MICI) en particulier une maladie
de Crohn, plus rarement lupus érythémateux disséminé (surtout chez une fille âgée de plus de 8 ans), dermatomyosite,
périartérite noueuse, maladie de Takayasu, maladie de
Castleman ; un syndrome auto-inflammatoire d’origine
génétique ; un SAM non lié à une FS-AJI, notamment déficits
immunitaires héréditaires. Devant une fièvre prolongée, on
évoque surtout une infection, une maladie systémique ou une
néoplasie et devant une fièvre récurrente, un syndrome autoinflammatoire.
L’évaluation clinique initiale nécessite un interrogatoire et un
examen clinique complets avec une étude de la courbe de
croissance staturopondérale.
1091
B. Bader-Meunier et al.
Archives de Pédiatrie 2010;17:1090-1094
Les examens complémentaires indispensables sont : un
hémogramme avec étude du frottis sanguin, une mesure
de la VS, de la CRP, des transaminases, du fibrinogène, de
la créatininémie, de la protidémie, un ionogramme sanguin,
des hémocultures, une bandelette urinaire (dépistage d’une
protéinurie, hématurie), en fonction du contexte, des sérologies virales (virus d’Epstein-Barr [EBV], cytomégalovirus
[CMV], griffe du chat. . .) et une échographie cardiaque.
Les examens complémentaires recommandés dans les formes
typiques et indispensables dans les formes atypiques sont : un
dosage de la ferritinémie dont l’élévation très marquée doit
faire suspecter un SAM, de lactate déshydrogénase (LDH) dont
l’élévation franche devra faire évoquer le diagnostic de pathologie maligne alors qu’une élévation modérée peut être
observée au cours d’une authentique FS-AJI, des catécholamines urinaires chez le jeune enfant, une recherche de facteurs antinucléaires (surtout après l’âge de 8 ans), d’anticorps
antisaccharomyces cerevisiae (ASCA) pour éliminer une MICI
en cas de symptomatologie digestive, d’anticorps associés à
des vascularites ou des maladies auto-immunes en fonction
du contexte, un myélogramme (en cas de douleurs osseuses,
d’anomalies du frottis sanguin, d’un taux de leucocytes inférieur à 8000 par millimètre cube ou de plaquettes inférieur à
250 000 par millimètre cube, notamment), une radiographie
de thorax, une radiographie et si possible échographie de
l’articulation atteinte en cas d’atteinte monoarticulaire
(lorsque plusieurs articulations sont atteintes, l’indication
de l’imagerie doit se discuter en fonction du contexte clinique
avec un centre spécialisé en rhumatologie pédiatrique), une
échographie abdominale (recherchant un épaississement des
anses digestives en cas de douleurs abdominales, diarrhée ou
infléchissement staturopondéral à la recherche d’une MICI),
un examen ophtalmologique.
Les examens inutiles sont : le dosage de la fraction glycosylée
de la ferritine, peu sensible et peu spécifique pour le diagnostic de FS-AJI, de la procalcitonine et des facteurs rhumatoı̈des, et la recherche du HLA B27.
4. Prise en charge thérapeutique
La prise en charge thérapeutique est multidisciplinaire. Les
coordonnées des associations de patients concernées par la
pathologie sont transmises à la famille (association Kourir,
http://www.kourir.org).
Les principaux traitements utilisés figurent dans le tableau I.
Les anti-inflammatoires non stéroı̈diens (AINS) sont indiqués en
première intention, en l’absence de contre-indication et de
critères de gravité. On propose un essai de 1 à 4 semaines de
traitement pour évaluer l’amélioration des manifestations
systémiques, de la fièvre et des douleurs. L’effet antiinflammatoire sur les arthrites est moins marqué. Lorsque
l’enfant est traité à domicile par AINS seuls, sa famille doit
être en mesure de pouvoir joindre un médecin en urgence,
Tableau I
Principaux traitements généraux disponibles utilisés dans la forme systémique de l’arthrite juvénile idiopathique (FS-AJI).
Traitement
Dose initiale
Modalités de prescription
AINS
Indométacine
Naproxène
2–3 mg/kg/j en 2–3 prises p.o. (dose maximale : 150 mg/j) Hors AMM avant 15 ans
20–30 mg/kg/j en 2 prises (dose maximale : 2400 mg/j)
Hors AMM pour les doses
préconisées
Ibuprofène
30–40 mg/kg/j en 3–4 prises dose maximale : 2400 mg/j) Hors AMM pour les doses
préconisées
Diclofénac
3 mg/kg/j en 2 prises (dose maximale : 225 mg/j)
Acide acétyl salicyliquea
75–100 mg/kg/j (maximum 3 g/j) en 6 prises régulières
taux de salicylémie max 150–200 mg/ml 2 h après la prise
Corticoı̈des systémiques (prednisone, Doses variable selon la présentation clinique
AMM
prednisolone, méthylprédnisolone)
Méthotrexate
Une fois par semaine : 10–15 mg/m2 (sans dépasser
AMM. p.o. le matin à jeûne ou sc
25 mg/semaine)
Thalidomide
3–5 mg/kg/j
Prescription hospitalière
Ciclosporine
2 à 3 mg/kg/j
Hors AMM
AMM pour l’enfant âgé de
Etanercept
0,4 mg/kg sc 2/semaine (sans dépasser
plus de 4 ans pour les formes
25 mg 2/semaine)
polyarticulaires
Ou 0,8 mg/kg sc 1/semaine (sans dépasser
50 mg/semaine)
Anakinra
2 mg/kg/j (maximum 100 mg) sc
Hors AMM
Tocilizumab
8 à 12 mg/kg/14 j iv
Hors AMM (étude en cours)
Canakinumab
4 mg/kg sc toutes les 4 semaines
Hors AMM (étude en cours)
Rinolacept
Non encore disponible en France
AMM : autorisation de mise sur le marché ; AINS : anti-inflammatoires non stéroı̈diens ; p.o. : per os ; sc : voie sous-cutanée ; iv : voie intraveineuse.
Prescription devenue rare dans les arthrites juvéniles infantiles, sauf quelques formes systémiques du très jeune enfant.
a
1092
Maladie de Still
notamment en raison du risque de survenue de SAM. La
molécule la plus efficace chez la plupart des patients est
l’indométacine (avis d’expert) à la dose quotidienne de 3 mg/
kg en 2 ou 3 prises (hors autorisation de mise sur le marché
(AMM) avant l’âge de 15 ans). Cependant, l’utilisation de ce
traitement chez l’enfant jeune nécessite une concertation avec
un pédiatre expert de la maladie. Les doses préconisées pour
certains autres AINS sont supérieures à celles de l’AMM (avis
d’expert). La prise d’AINS nécessite une surveillance étroite des
éventuels effets indésirables cliniques et biologiques qui ne
seront pas abordés dans ce document [1]. La survenue d’un SAM
nécessite une prise en charge en urgence. En cas de rémission
sous traitement pendant 4–6 mois, les AINS sont diminués
progressivement en quelques mois en fonction de l’évolution
clinique jusqu’à un arrêt éventuel.
La corticothérapie par voie générale est indiquée, après avis
spécialisé, pour le traitement des manifestations systémiques
(extra-articulaires) dans les cas suivants (avis d’expert) : toxicité hépatique (élévation des transaminases) nécessitant la
réduction de la dose ou l’arrêt temporaire du traitement par
AINS si les taux des transaminases dépassent 2 fois la limite
supérieure de la normale, efficacité insuffisante des AINS (en
cas d’efficacité partielle et de bonne tolérance, l’association
AINS-corticostéroı̈de est à recommander pour permettre dans
certains cas le recours à une corticothérapie générale à doses
plus faibles ; elle nécessite une attention particulière à la
tolérance digestive), intolérance digestive aux AINS, présence
de signes de sévérité : altération de l’état général importante,
perte de poids, anémie sévère, sérite symptomatique significative, persistance de la fièvre, SAM. La corticothérapie générale par voie orale est administrée initialement en 2 prises à
une dose de 1 à 2 mg/kg par j (maximum 60 mg/j) de prednisone ou équivalent puis en une prise matinale (avis
d’expert). L’intérêt des bolus de corticoı̈des (méthylprednisolone 15–30 mg/kg) en phase aiguë reste discuté. Si la maladie
est contrôlée, la dose de corticoı̈des est progressivement
diminuée en quelques mois en fonction de l’évolution des
manifestations systémiques cliniques et biologiques. La prise
de corticoı̈des par voie générale nécessite une prévention et
une détection de ses effets secondaires classiques. Une corticodépendance élevée impose l’instauration d’un traitement
de fond suivant avis spécialisé.
Une évaluation par un centre spécialisé est indispensable
pour l’indication d’un traitement de fond dont l’introduction
n’est en général à envisager que chez un patient ayant au
minimum 3 mois de recul par rapport aux premières manifestations de la maladie. Son principal critère d’introduction
en 2010 est l’existence d’une corticodépendance problématique après 3 mois d’évolution de la maladie (avis d’expert),
notamment devant une difficulté à diminuer la corticothérapie générale quotidienne à moins d’1 mg/kg d’équivalent
prednisone (ou 30 mg/j chez les grands enfants) après 3 mois
de traitement ou à moins de 0,3 mg/kg (ou 10 mg/j chez les
grands) après 6 mois. Il ne faut pas freiner la décroissance de
la corticothérapie générale ni prendre la décision d’introduire
un traitement de fond sur des paramètres uniquement biologiques. Toute introduction d’un traitement de fond nécessite d’informer les parents et l’enfant sur les risques liés aux
immunosuppresseurs et aux biothérapies et sur la nécessité
de prendre un contact médical très rapide en cas d’événement
indésirable notamment infectieux (dont la varicelle). Tous ces
traitements entraı̂nent un risque accru d’infection.
Dans les formes avec signes systémiques persistants, le traitement de fond à privilégier en 2010 en première intention est
le récepteur antagoniste de l’IL-1 anakinra (KineretW) (avis
d’expert), dont l’efficacité a été mise en évidence dans 2 études
prospectives d’un petit nombre d’enfants [4,5], une étude
rétrospective [6] et une étude prospective randomisée [7]
(Niveau 1). La tolérance de ce traitement est bonne. Les effets
secondaires fréquents rapportés sont la survenue d’une réaction au point d’injection de type rougeur et gonflement, qui a
tendance à diminuer avec le temps, et, plus rarement, un risque
d’infection possiblement grave, de neutropénie, d’hépatite. Les
2 autres axes thérapeutiques les plus prometteurs pour les
années à venir sont des antagonistes de l’IL-1 plus puissants
actuellement à l’étude (rinolacept, canakinumab) ainsi que le
tocilizumab (Actemra), anticorps monoclonal anti-récepteur de
l’IL-6 dont l’efficacité a été démontrée dans une étude prospective randomisée [8] (Niveau 1). Les traitements de fond
classiques de l’AJI tels que le méthotrexate et les anti-TNF
alpha ne sont à considérer que dans des formes d’évolution
essentiellement polyarticulaires et peu inflammatoires.
Dans les formes réfractaires aux traitements précédents avec
signes systémiques persistants le traitement par thalidomide
est le principal à envisager (avis d’expert) (Niveau 4) [9]. Sa
tératogénicité et sa toxicité neurologique constituent cependant des facteurs limitant son utilisation. La réalisation d’un
électromyogramme avec mesure des vitesses de conduction
nerveuse tous les 6 mois et l’arrêt du traitement en cas
d’anomalie sont recommandés.
L’injection intra-articulaire de corticoı̈des (en privilégiant
l’héxacétonide de triamcinolone pour les grosses articulations) a une efficacité moindre que dans les autres formes
d’AJI lorsqu’il existe des signes systémiques. Elle peut être
proposée en cas d’atteinte articulaire unique ou dans les
formes d’évolution oligo- ou polyarticulaire. En cas de douleur
liée aux arthrites, un traitement antalgique utilisant des
produits non opioı̈des, opioı̈des faibles ou opioı̈des forts selon
le niveau de la douleur évaluée sur une échelle visuelle
analogique adaptée doit être associé au traitement spécifique. Les douleurs liées aux injections sous-cutanées doivent
être limitées par l’application de crème lidocaı̈ne-prilocaı̈ne
ou de froid avant injection.
Certaines complications (articulaires, ophtalmologiques,
rénales, cardiovasculaires, SAM, retard de croissance
secondaire à une corticothérapie prolongée et ostéoporose)
peuvent survenir au cours de l’évolution. Leur prévention et
prise en charge ne seront pas abordées dans ce document.
1093
B. Bader-Meunier et al.
Le calendrier vaccinal usuel doit être suivi, conformément aux
recommandations en vigueur. En cas de traitement par immunosuppresseur ou biothérapie, la vaccination contre la grippe
et le pneumocoque est recommandée, et celle par les vaccins
vivants est contre-indiquée. La vaccination du patient, de ses
parents et de sa fratrie contre la varicelle doit être discutée en
fonction des traitements reçus (contre-indication en cas de
traitement immunosuppresseur ou de biothérapie), du statut
sérologique et de l’âge du patient (vaccination possible à
partir de l’âge de 9 mois).
Une à plusieurs consultations annuelles doivent être effectuées en fonction de la sévérité de la maladie tant qu’il y a des
signes de maladie active, un traitement médical ou des
séquelles à prendre en charge.
Archives de Pédiatrie 2010;17:1090-1094
Conflit d’intérêt
Aucun conflit d’intérêt n’est à déclarer pour aucun auteur.
Références
[1]
[2]
[3]
[4]
Participants à la relecture du Protocole
national de soins
[5]
Mme Claude Andrieux, Association Inflamoeil, Paris ; Dr
Catherine Adamsbaum, Hôpital St Vincent de Paul, Paris ;
Dr Bahram Bodaghi, Hôpital Pitié Salpêtrière, Paris ; Dr Michel
Fischbach, CHRU, Strasbourg ; Dr Martine Grall-Lerosey, CHU,
Rouen ; Mr Anton Gruss, Association Kourir, Paris ; Dr Laurent
Kodjikian, Hôpital de la Croix Rousse, Lyon ; Dr Sarah Koné,
HAS, St Denis la Plaine ; Dr Isabelle Koné-Paut, Hôpital Bicêtre,
le Kremlin-Bicêtre ; D,r Lionel de Lumley, Hôpital de la mère et
de l’enfant, Limoges ; Dr Françoise Mazingue, Hôpital Jeannes
de Flandres, Lille ; Dr Richard Mouy, pédiatre, Paris ; Dr
Georges Picherot ; CHU, Nantes, Dr Mathide Risse, CNAMTS,
Paris ; Dr Bertrand Roude, médecin généraliste, Thorigné Dr
Jean Sibila, CHRU, Strasbourg ; Dr Isabelle Yoldjian, AFSSAPS,
St Denis.
1094
[6]
[7]
[8]
[9]
ald_31_pnds_arthrite_juvenile_web.pdf.
Petty RE, Southwood TR, Manners P, et al. International League
of Associations for Rheumatology classification of juvenile
idiopathic arthritis: second revision. Edmonton 2001 J Rheumatol 2004;31:390–2.
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