Homélie des funérailles de Catherine, mardi 6 mars 2007. Messe

Transcription

Homélie des funérailles de Catherine, mardi 6 mars 2007. Messe
Homélie des funérailles de Catherine, mardi 6 mars 2007.
Messe célébrée par le Père Patrick Gaso, à Villard-de-Lans.
Job 19, 1. 23-27a. Saint Matthieu, les Béatitudes 5, 1-12.
En découvrant le texte de ce jour, texte que vous avez choisi pour Catherine, j’ai été très frappé, car
d’un seul coup, il m’est revenu en mémoire que ce texte des Béatitudes, avait déjà été choisi pour le papa
de Catherine. Je ne sais pas si vous l’avez encore présent à l’esprit…
En priant hier, pour Catherine, pour sa famille, pour chacun de nous, il me semblait qu’il était
important pour nous, de comprendre davantage, avant d’arriver au chemin des Béatitudes, ce que voulait
dire la souffrance.
Le premier texte que vous avez choisi, celui de Job, nous montre une page éloquente, sur la
souffrance. Il me semblait bon, peut-être de relire avec vous, non pas tout le livre de Job, mais quelques
extraits, quelques passages…, pour essayer de comprendre, ce que veut dire Dieu, ce que peut dire
l’homme, ce que veulent dire le malheur et la maladie.
Vous savez, Job est un homme juste, et il aime Dieu.
Catherine, aussi, aime et aimait Dieu.
Mais, dans la maladie, Job est éprouvé. Ce qu’il nous faut entendre déjà, c’est que Dieu ne met pas
Job, à l’épreuve, comme Dieu n’a pas mis Catherine à l’épreuve, tout au long de sa maladie. Cependant, la
même question retentit : « Pourquoi ? Pourquoi la maladie ? Pourquoi la mort ? »
La question fondamentale est posée.
C’est l’interrogation d’un homme qui connaît Dieu, qui a cru Le connaître et qui veut essayer de
comprendre, afin de pouvoir vivre, afin de pouvoir et savoir mourir. La souffrance, aussi difficile, aussi
dure soit-elle, révèle l’homme à lui-même. C’est la première confidence que nous livre le texte de Job.
Pour ce champion de Dieu qu’est Job, l’épreuve est radicale : Il n’a plus rien, il n’est plus qu’une
plaie ! Mais sa foi est intacte, et elle transparaît immédiatement, dans les deux réponses que nous
connaissons bien, et qui s’élèvent de sa bouche, comme une reconnaissance que Dieu est Dieu.
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Il dit : « Nu, je suis sorti du ventre de ma mère, et nu, j’y retournerai.
Dieu a donné, Dieu a repris. Que le nom du Seigneur soit béni ! »
Il faut un grand courage, et en même temps être très réaliste, pour prononcer une telle phrase !
C’est vrai que nous sommes arrivés nus, dans ce monde, et c’est nu, que nous repartons. Nous
n’emportons pas grand-chose, en tout cas, rien de cette vie terrestre, pas de bien matériel. La seule chose
que nous emportons, c’est ce qui tient dans notre cœur : cette capacité que j’ai eu d’aimer, de me laisser
aimer ! C’est vrai : Nu, je repars, vers le Créateur.
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Il dit encore, c’est la deuxième phrase, et il m’a fallu, personnellement du temps, pour la
comprendre : « Si nous accueillons le bonheur comme un don de Dieu, comment ne pas accepter, de même,
le malheur ? »
En tout cela, Job ne pécha point, et il ne proféra aucune remontrance, aucun chantage, aucune injure,
à l’adresse de Dieu.
Attention ! La sérénité de Job, face à la souffrance, n’est pas une raideur stoïcienne, elle s’enracine
dans la confiance en Dieu. Sa relation à Dieu se noue désormais consciemment au plan de sa pauvreté, de
sa nudité.
- Si nous n’avions pas cette foi en Dieu, quel serait le sens de notre vie ?
- Si nous n’avions pas, en chacun de nous, cette capacité de croire en la vie éternelle, quel serait
le sens de cette vie ?
- Quand bien même notre vie nous paraîtrait banale, au point de pouvoir en désirer la fin, (parce que
nous avons l’impression de ne servir à rien !), si nous n’avions pas cette capacité de la prière, cette capacité
d’intercession, quel serait le sens de notre vie ?
La souffrance, comme la mort, révèle à l’homme la fragilité de son lien aux choses, nous révèle la
force inexorable du temps et de sa solitude irrémédiable face à la mort.
Certes, chez un croyant, l’épreuve peut faire jouer des réflexes insoupçonnés de faculté
d’assentiment, et j’ai vu maintes fois, des personnes, au cœur de la maladie, montrer une sérénité, une paix,
un encouragement, un abandon extraordinaire. Mais quand la durée de la maladie pèse très lourd, (plus de
dix ans pour Catherine !), même l’homme de foi est amené à reconnaître que son “OUI“, est
fondamentalement traversé par mille refus, par mille questions. Il faut alors qu’en lui, les révoltes trouvent
le chemin de la Parole.
C’est souvent à ces moments-là que nous pensons que Dieu est absent, alors qu’Il se tient à côté de
nous. Au cœur même de la maladie, Dieu est toujours présent et nous porte. Nous n’en avons pas
forcément conscience, mais Il est là.
Dès que la souffrance s’installe dans la vie de Job, sa relation à Dieu devient comme conflictuelle : la
déception nourrit l’impatience, et l’impatience s’exaspère en désespoir ! Par tous les moyens, Job essaie de
percer la nuit, de comprendre l’attitude de Dieu, de deviner ses intentions….Cela est humain ! Dans ces
moments-là, sans doute, la tentation était-elle grande de tout rejeter. Certains sont capables d’oublier Dieu,
de Le croire cruel, ou indifférent à leur malheur.
Le choix de Job, comme celui de Catherine, me semble-t-il, est : la confiance.
Voici la profession de foi de Job, entendue dans les dernières lignes de la première lecture : « Je sais
moi, que mon libérateur est vivant ! » (N’oubliez pas que Job écrit cinq siècles, avant la naissance du
Christ). « …et qu’à la fin, il se dressera sur la poussière des morts. Avec mon corps, je me tiendrai debout,
et de mes yeux de chair, je verrai Dieu. Moi-même, je le verrai, et quand mes yeux le regarderont, Dieu ne
se détournera pas. »
Au moment des funérailles d’Yves, (le papa de Catherine),la question que j’avais posée était :
« Que nous donne Dieu, en ce moment ? »
Au cœur même de notre souffrance, quand l’absence se fait sentir, quand l’être aimé n’est plus
devant nos yeux, que nous donne Dieu, aujourd’hui ?
Au moment de la messe de funérailles du Docteur Hamoniaux, je me souviens d’avoir suggéré :
- D’accueillir Jésus chaque jour, de tout Lui donner, tout Lui demander, de tout Lui remettre, de Lui
faire confiance en tout !
- De nous aimer les uns les autres, en étant particulièrement attentifs, à ceux qui auront besoin de
notre attention discrète et fidèle.
- De veiller à garder cette unité qui vous est donnée aujourd’hui (et cela concerne votre famille), de
veiller à la conserver, pour qu’elle puisse rayonner, comme la vie de Catherine a rayonné.
J’avais terminé en disant : voilà notre joie, voilà ce qui nous est donné, aujourd’hui, ce que nous
recevons de Jésus, dans les larmes et dans la joie, dans l’épreuve et dans l’espérance !
Puissions-nous rendre grâce pour la vie de Catherine, pour ce qu’elle est pour chacun de nous, pour
ce qu’elle demeure !
Puissions-nous aussi, être animés de cette confiance en Dieu, quelles que soient nos vies, quelles que
soient les épreuves que nous pourrions ressentir en notre chair !
Dieu est présent !
Dieu est le Dieu de la vie !
AINSI SOIT-IL !