Focus sur la filière des eaux
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Focus sur la filière des eaux
P PCI TM&L | Focus sur.... La filière des eaux – Juillet 2012 La filière des eaux Depuis quelques années, le marché des boissons d'une part, et le marché du transport de boissons d'autre part, doivent s'ajuster à certains bouleversements. Les conditions météorologiques inhabituelles observées depuis le début des années 2000 perturbent les flux logistiques de certains biens de consommation. Parmi ceux-ci, les boissons, le textile, les articles de sport, et les glaces sont les plus touchés. Pour les boissons, le problème est d'autant plus complexe que le nombre des références se multiplie. De fréquentes ruptures en linéaires ont été constatées lors de certains pics de chaleur, qui détériorent le taux de service et bouleversent les plannings de production ; en effet, pour pallier les ruptures les plus importantes, certains industriels délaissent la fabrication des références les moins demandées. La contraction de l'offre de transport ne facilite pas les choses. La pénurie structurelle et saisonnière (congés des périodes estivales) de conducteurs routiers, conduisent à ne pas négliger la constitution des stocks. Les bouleversements dans l'offre ferroviaire modifient également les demandes de transport de la part des chargeurs. Enfin, toutes ces difficultés d'ajustement de l'offre à la demande s'accompagnent d'un changement majeur dans les rôles des acteurs impliqués dans la distribution des boissons, à cause de modifications législatives concernant les pratiques de la grande distribution. Depuis 2005, utilisant le cadre législatif de la loi en faveur des PME, dite loi Dutreil II, les industriels prennent en charge la logistique des boissons précédemment assumée par les distributeurs. Le passage du prix départ usine au prix franco a sensiblement modifié les organisations logistiques. Dans le secteur des boissons, l'analyse se concentre sur les eaux minérales et de source. Indépendamment de son caractère d'eau plate ou d'eau gazeuse, l'eau peut être une eau de source ou une eau minérale, être aromatisée ou non, être naturelle ou non. La réglementation impose le conditionnement de ces eaux sur le site de production, don à la source. En France, selon l'INSEE, la consommation annuelle moyenne de ces eaux embouteillées a plus que quadruplé entre 1970 (40 litres par personne) et 2006 (175 litres par personne). En 2007, les importations d'eaux (0,37 milliard de litre) ne représentent que 15% des exportations (2,6 milliards). La France est donc massivement exportatrice d'eaux embouteillées, ce qui génère des flux terrestres intraeuropéens vers les autres pays de l'UE, et des flux massifiés vers les ports maritimes. Outre l'Union Européenne, les destinations concernent l'Amérique du nord et l'Asie (essentiellement l'Extrême-Orient). 1 P PCI TM&L | Focus sur.... La filière des eaux – Juillet 2012 Industries ea ux de ta ble N AF 15.9 S Les approvisionnements et le recyclage La fabrication des granulés de PET, complexe, a lieu dans des usines spéciales. En Europe, les fabricants, qui sont des grands groupes chimiques, se trouvent en Allemagne (Bayer, Hoechst, ICI,..) , en Italie, en Grande Bretagne. Les fabricants PET hors Europe se trouvent en Chine, en Inde, aux Etats-Unis. Depuis que l'Union Européenne a imposé une taxe à l'entrée en Europe sur ce produit il y a environ 10 ans, les acheteurs achètent en Europe. Chiffre d'affaire s 3754,3 m illions e uros V ale ur ajouté e 965,9 m illions e uros Effe ctifs 8678 N om bre d'e ntre prise s 42 Effe ctifs par e ntre prise s 206,62 Matiè re s pre m iè res/CA 20,60% Im m obilisations par pe rsonne 248,9 m illie rs e uros Frais de pe rsonnel/V A 46,10% Ré sultats ne ts/EBE 4,40% Production totale 12,237 m illiards litre s Solde com m e rcial Taux e xportation +354,517 m illiards e uros 17,80% Les bouteilles d'eau sont intégralement recyclables, de la bouteille en PET à son bouchon en polyéthylène haute densité (Pehd). Le taux de recyclage de la bouteille en plastique a progressé de 9 % à 51% sur la période 1997-2006 ; le recyclage réduit l'impact écologique et présente un gisement important de matière première pour l'industrie Les granulés sont envoyés chez les transformateurs, dans des sacs d'une tonne ou dans des containers. Ces transformateurs ont des presses à injection pour fabriquer les préformes, et ils stockent ces préformes. La production Le captage et l'embouteillage La production d'eaux embouteillées utilise peu matières premières: l'eau, captée par forage général, des bouteilles de verre (neuves consignées), du plastique (préformes pour bouteilles d'une part, bouchons), étiquettes. de en ou les Les industriels L'industrie des eaux minérales naturelles est très concentrée en France. Trois groupes dominent ce marché: Nestlé Waters, Danone et Alma. La première bouteille en polyvinyle de chlorure (PVC) apparaît à la fin des années 1960. Puis, au début des années 1990, le polyéthylène téréphtalate (PET) remplace le PVC. Plus léger, flexible et résistant, il réduit le poids des bouteilles d'environ un tiers. Une trentaine d'entreprises de dimension régionale ou locale assurent l'exploitation des eaux de source. Elles sont généralement contrôlées par la Compagnie Générale des Eaux de Source ou la société Roxane (groupe Alma) qui se partagent la moitié du marché. Le stockage Le stockage de l'eau de source sortant du forage peut se faire dans des réservoirs en acier inoxydable; en général cela correspond à 24 heures ou 48 heures de production. Le débit maximum horaire autorisé est précisé dans l'arrêté d'exploitation. E u ro p e 2 004 2005 2 006 C o n s o m m a tio n to ta le ( m i ll io n s l4itre 7276 s ) ,4( 1) 488 29 5107 5,2 Les variations saisonnières de production sont sensibles; au printemps et en été, lorsque la production augmente, l'eau peut être embouteillée jour et nuit. En prévision de la hausse saisonnière, les industriels commencent à stoker les eaux embouteillées dès le printemps. Les stocks des régions du sud de la France sont les premiers à être approvisionnés. En septembre, la demande ralentit, sauf dans le sud de la France; et en octobre, la production ralentit. E a u x m in é ra l e s n a tu re l le s E a u x d e s o u rc e E a u x d e ta b l e 8 4,80% 8 4,60% 84,80 % 1 1,60% 1 1,90% 11,70 % 3,60% 3,50% 3,40 % 100,0 0% 10 0,00% 100 ,0 0% E a u x p l a te s Eau x gaze u se s 54,6 5 5,6 5 6,1 45,4 4 4,4 4 3,9 100,0 0% 10 0,00% 100 ,0 0% P o p u la tio n e n m i ll i o n s d 'h a b i ta n ts 488,09 C o n s o m m a tio n to ta le p a r h a b ita n96,86 t 2 48 9,41 9 9 ,77 490 ,1 6 104 ,2 P PCI TM&L | Focus sur.... La filière des eaux – Juillet 2012 La logistique Le transport La densité Les quantités expédiées, particulièrement pour l'eau sont importantes, ce qui, a priori, joue en faveur du recours au transport ferroviaire. Malheureusement, pour ces envois de forte densité en grandes quantités, l'offre de transport ferroviaire est insuffisante. Les eaux appartiennent à la catégorie des produits d’épicerie les plus denses. Une unité de charge (palette plus palettée) pèse environ une tonne et que la quantité habituelle chargée est de 24 palettes d’1m x 1,20m dans un camion de PTAC de 40 tonnes. De ce fait, la charge utile d'un camion (24,6 tonnes) est atteinte avant le remplissage du volume. Un PTAC de 44 tonnes permettrait de charger trois palettes supplémentaires. La pénurie de wagons, la fermeture des installations terminales embranchées, et la pénurie saisonnière de véhicules/conducteurs routiers, s'ajoutent aux contraintes logistiques des produits eux-mêmes. La pénurie peut conduire à des solutions spécifiques. Par exemple, le groupe Alma, a créé en 2007 sa propre filiale spécialisée dans le transport et l'affrètement routier pour assurer quotidiennement 1000 expéditions. La localisation de unités de production Les distances à parcourir sur le territoire national sont fréquemment très longues. Par exemple, en France, la distance moyenne pour le transport de l'eau minérale est de 682 kilomètres. Les principaux industriels sont plutôt localisés à l'est de l'axe Seine/Loire, où la population est nombreuse; l'approvisionnement des populations de l'Ouest pose un réel souci logistique, ce qui conduit à la mise en oeuvre de solutions spécifiques. La part relativement élevée du coût de transport dans le prix de vente final explique la vigilance des logisticiens dans l'examen des solutions possibles: la fourchette varie de 10 à 25 % selon les références. L'exportation Le trafic du port de Marseille domine largement celui des autres ports français: les sorties d'eaux minérales ont représenté, en 2006, 521 800 tonnes, et, en 2007, 587 926 tonnes; on observe une croissance nette de 2005 à 2007. L'entrepôt spécialisé de Distriport, géré par SDV, sur le site de Fos sur mer, dédié aux exportations d'eaux du groupe Danone (notamment bouteilles d'Evian vers le Moyen-Orient), explique l'importance de ces flux. Toutefois, d'autres chargeurs du sud de la France contribuent aussi à ce trafic La saisonnalité Si le stockage nécessite des conditions d'entreposage relativement peu exigeantes, comparées à d'autres produits, les variations saisonnières imposent une flexibilité et gestion des stocks rigoureuse et concertée entre producteurs et distributeurs. En effet, les pics saisonniers de consommation, de mai à septembre, obligent à constituer des stocks chez les producteurs et /ou les distributeurs. Les pics saisonniers dépendent des variations météorologiques et de l'afflux de touristes dans certaines zones géographiques. Les principaux circuits de distribution Parmi les différents distributeurs, on note la domination des grandes et moyennes surfaces (GMS) qui concentrent 80% des volumes d’eau embouteillées, et 65 % des ventes de boisson en France. L'entrepôt de Casino situé à Toulon, qui expédie environ 1000 à 1500 palettes de boissons par jour, peut en expédier jusqu'à 5000 en saison estivale. Par ailleurs, le débit de certaines sources et la nécessité de préserver la ressource (quantités captables maximales autorisées) peuvent conduire à certaines ruptures de livraison en haute saison; c'est par exemple, le cas de la source Perrier. Pour un hypermarché, l'approvisionnement en boissons représente en moyenne deux semi-remorques par semaine, soit 24 à 50 palettes. En grande distribution, la capacité de stockage d'un entrepôt correspond à 25/30 hypermarchés, et à 100 supermarchés. L'entreposage de boissons est généralement associé à celui de l'épicerie sèche. 3 P PCI TM&L | Focus sur.... La filière des eaux – Juillet 2012 Les stratégies des acteurs Le contrôle des industriels sur la distribution L'évolution des systèmes productif et logistique En matière d'eaux embouteillées, la proximité des sources avec les acheteurs est un atout incontestable, qui simplifie les flux logistiques et réduisent la facture correspondante, surtout en période de crise. La réduction des ventes d'eaux embouteillées provoquée par la crise économique ouverte à l'été 2008 conduit à des changements chez les industriels et les distributeurs. : les grands groupes tels Nestlé Waters et Danone se désengagent de certaines petites sources régionales, tandis que les distributeurs concentrent leurs approvisionnements sur des eaux embouteillées dans leurs propres régions. Il en résulte des modifications de flux de transport. Historiquement, les liquides étaient enlevés chez l'industriel, avec la pratique des achats « départ ». Depuis 2005, utilisant le cadre législatif de la loi en faveur des PME, dite loi Dutreil II, les industriels ont pris le contrôle de la distribution des boissons. Les ventes des industriels aux grands distributeurs se font maintenant en « franco presté »; les industriels contrôlent le transport des boissons grâce à des ventes « franco », mais le confient aux distributeurs (devenus prestataires de transport). Les stocks saisonniers Pour répondre à la hausse saisonnière de la demande, il faut augmenter les stocks, et pratiquer ce que les professionnels appellent « l'écrêtage ». Il s'agit pour les industriels d'expédier une partie de leurs productions dans les entrepôts des distributeurs, tout en restant propriétaires des liquides. Puis, à partir d'une date donnée, le 1er juillet par exemple, les distributeurs deviennent propriétaires. Dans le domaine des boissons, les solutions « multienlèvements » et « multi-points de livraisons» semblent a priori impertinentes, compte tenu du caractère suffisamment massif des envois. En revanche, la mutualisation de moyens ferroviaires (pour constituer en commun un train complet) et de moyens de stockage (pour des entrepôts multi-fournisseurs, concernant des produits compatibles), et l'adoption de gestion partagée des approvisionnements mutualisée représentent des solutions propres à réduire considérablement les coûts. Le groupe Alma se distingue des autres industriels en ne pratiquant ni stock avancé, ni écrétage. Il ajuste l'offre à la demande, en utilisant au maximum la souplesse de ses outils industriels. La massification et les entrepôts régionaux La raréfaction de l'offre de transport routier et ferroviaire conduit les industriels à ouvrir des lieux de stockage régionaux qui leur permettent, à la fois, de maintenir le taux de service en rapprochant les stocks des lieux de vente, et de massifier les transports en utilisant le transport ferroviaire, au moyen de trains complets. L'eau minérale naturelle : un produit naturel et protégé, une industrie responsable, un emballage recyclable, Chambre syndicale des eaux minérales Livre blanc : favoriser le transport durable dans le commerce et la distribution, Fédération du commerce et de la distribution 4