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«Il y a un véritable mystère Mozart» - La Liberté
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«Il y a un véritable mystère
Mozart»
Le chœur Arsis en répétition lundi, sous la direction du chef Pierre-Fabien
Roubaty. © Charly Rappo
26.06.2014
Fribourg • Le chœur Arsis, accompagné de l’orchestre baroque
Capriccio, interprétera samedi et lundi la «Messe en ut mineur» de
Mozart. Le musicologue Gilles Cantagrel précise l’importance de
cette œuvre majeure.
THIERRY RABOUD
Le chœur est jeune, son chef aussi. Qu’importe, nul besoin d’attendre
les blanches cimes de l’âge pour se lancer à la conquête des plus
éminents sommets de la musique. En la basilique Notre-Dame de
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Fribourg samedi prochain, le jour de ses 30 ans, le chef Pierre-Fabien
Roubaty guidera sa belle cordée vocale vers ces chefs-d’œuvre que
sont le «Psaume 42» de Mendelssohn et la «Messe en ut mineur» de
Mozart, avant de redonner ce même programme le lundi 30 juin à
Villars-sur-Glâne.
Les trente chanteurs du chœur Arsis, fondé en 2006 et déjà figure
marquante du paysage vocal fribourgeois, seront accompagnés par
l’orchestre baroque Capriccio de Bâle et par les sopranos Charlotte
Müller Perrier et Hélène Walter, ainsi que par le ténor Jonathan
Spicher et le baryton Jean-Luc Waeber. Un plateau de choix pour un
concert que viendra présenter le grand musicologue français Gilles
Cantagrel, une venue destinée aux sponsors, mécènes et amis du
chœur. «La Liberté» a saisi l’occasion d’interviewer ce spécialiste
reconnu de l’œuvre de Bach, pas moins fin connaisseur de celle de
Mozart.
- La «Messe en ut mineur», composée à Vienne, est souvent
considérée comme un sommet de l’œuvre mozartienne. Qu’est-ce
qui la rend si marquante?
Gilles Cantagrel: Tout d’abord, c’est une messe inachevée, mais qui
n’en demeure pas moins très longue! Alors qu’il était à Salzbourg,
Mozart ne pouvait écrire que des messes brèves. Le princearchevêque demandait alors que la messe ne dure pas plus de
45 minutes, ce qui ne réservait qu’une vingtaine de minutes à la
musique. A son arrivée à Vienne en 1781, Mozart est beaucoup plus
libre. Cette «Messe en ut mineur» est donc deux ou trois fois plus
longue que ses messes salzbourgeoises.
- Il faut dire que la période viennoise est pour Mozart le début
d’une nouvelle liberté…
Mozart quitte son employeur à Salzbourg pour s’installer à Vienne en
tant qu’indépendant. C’est la première fois dans l’histoire de la
musique qu’un compositeur majeur doit sa subsistance uniquement à
son travail de composition! Même Haendel, lorsqu’il était à Londres,
recevait une pension. Mozart devient alors libre de gérer sa vie et
d’écrire ce qu’il a envie d’écrire.
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- Cette œuvre sera donc le fruit d’une volonté personnelle, et pas
une commande. Pourquoi est-elle restée inachevée?
On ne connaît pas bien la raison de cet inachèvement. En 1782,
Mozart prend pour épouse Constance Weber, malgré la
désapprobation de son père. Alors que cette dernière tombe
gravement malade, il fait le vœu de lui écrire une grande messe si elle
guérit. Constance se remet et, fervent catholique, il compose donc
cette messe votive, qui restera inachevée. La partition qui nous est
parvenue s’arrête au milieu du Credo, sans que l’on sache bien
pourquoi. Mozart était-il pris par d’autres commandes? Il en fera
pourtant l’exécution publique quatorze mois après la composition, avec
Constance chantant la partie de soprano. Comme il est inimaginable
que l’acte de foi du Credo ne fût pas mené à son terme lors de la
célébration, l’on suppose que Mozart a complété sa partition pour
l’occasion, mais on ne sait pas avec quel matériau.
- Quelle a été l’influence de Bach dans l’écriture de cette messe?
En arrivant à Vienne, quelques semaines avant de composer la
«Messe en ut mineur», Mozart découvre les «Préludes et fugues» de
Bach, une vraie révélation. Alors que les messes précédentes de
Mozart, certes ravissantes, étaient marquées par le style italien, l’on
découvre ici une intensité, une densité, un engagement humain et
spirituel tel qu’on ne l’avait jamais entendu dans la musique religieuse
de Mozart, et qui lui vient de Bach.
- Qu’est-ce qui rend la musique de Mozart si immédiatement
accessible et touchante?
Je ne suis pas capable de répondre à cette question, et personne ne le
peut! Il y a là un mystère Mozart, le mystère de cet enfant qui
composait avant même de savoir écrire, et qui dictait ses premières
compositions à son père. Sa musique est un mélange de densité
spirituelle et d’une ineffable grâce. Chacune de ses phrases musicales
paraît un miracle: on peut décrire fort bien son œuvre mais pas
l’expliquer, bien heureusement!
- Tant le «Psaume 42» de Mendelssohn que la «Messe en ut
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mineur» de Mozart sont composés à la suite des noces de leur
compositeur. Pourtant ces deux pièces sont de tonalité mineure…
Oui, c’est vrai, mais c’est surtout le signe d’une recherche de
profondeur spirituelle plus qu’une marque de tristesse. Une phrase de
Sénèque le dit fort bien, non que je lise Sénèque tous les jours, mais
elle est inscrite au fronton du bâtiment du Gewandhaus de Leipzig:
«Res severa verum gaudium», la véritable joie est une chose
sérieuse… I
> Sa 20 h Fribourg à la Basilique Notre-Dame.
> Lu 20 h Villars-sur-Glâne en l'église St-Pierre-et-Paul.
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