Lettre ouverte à Monsieur Michel Jobert

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Lettre ouverte à Monsieur Michel Jobert
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Lettre ouverte à Monsieur Michel Jobert...
Par Zeinab ABDELAZIZ
Oui, c’est avec une « très forte dose de déception » pour reprendre votre expression, que je
réponds à votre article, publié cette semaine du 9-15 novembre 1994, dans l’Ahram-Hebdo,
en langue française, ayant pour titre : Regards sur l’intégrisme de la Dar al-Harb. Je
réponds non seulement en tant que musulmane, faisant partie de « cette foule » que vous
dédaignez tellement, mais surtout en tant que Professeur de Civilisation française, ayant passé
sa vie à se nourrir d’une source qui se veut intarissable, mais combien illusoire hélas : la
France des Lumières, la France de la dite Liberté, Egalité et Fraternité !
Permettez-moi de commencer par dire : Quand on a été ministre, et surtout ministre aux
Affaires Etrangères, c'est-à-dire un des postes les plus représentatifs de son pays, où Culture,
Connaissances et Courtoisie s’imposent avant de joindre le politique, on n’a pas le droit
d’adopter une attitude bancale qui induit le lecteur en erreur, surtout lorsque ce lecteur se
compose en premier lieu, en Egypte, du corps diplomatique vivant dans ce pays, ce qui veut
dire que vous leur passez le « la » pour continuer votre attaque !
Dès le choix du titre on voit que vous chantez à l’unisson avec cette campagne ravageuse que
mène la France, la fille aînée de l’Eglise, pour extirper l’Islam non seulement de son
hexagone, mais de toute la Terre, puisqu’elle le fait de pair avec l’Eglise vaticane. En fait,
vous n’avez fait que mâcher les mêmes accusations bon marché des orientalistes et consorts,
avec un style hautain et blasphématoire, visant à bafouer l’Islam, son prétendu « fanatisme »
et surtout « son invocation à conquérir le monde », prenant le Jihad comme matière principale
pour cette supercherie !
Vous n’ignorez point, je suppose, que l’attaque contre l’Islam a commencé depuis Jean
Damascène, et se mène jusqu’à nos jours, en passant par Vatican II (1965), décrétant
l’évangélisation du monde, et imposant la participation de tous les chrétiens à cette maléfique
évangélisation. Rôle peu honnête et dégradant pour quiconque accepte de le jouer.
L’Islam, Monsieur, n’est pas « la troisième religion du Livre comme on dit », l’islam est
effectivement la troisième Révélation du monothéisme. La première ayant été le Judaïsme, et
lorsque les juifs dévièrent, reprirent le veau et tuèrent les Prophètes, Jésus, le Prophète, n’est
« venu que pour les brebis égarés de la maison d’Israël » (cf. votre Bible). Et lorsque les
adeptes tombèrent dans le polythéisme en le déifiant au premier Concile de Nicée, en 325,
puis inventèrent et imposèrent la Trinité, au premier Concile de Constantinople, en 381,
l’Islam a été Révélé pour ramener tous ces fraudeurs vers le vrai monothéisme, où la
transcendance d’Allah, Le Dieu, est absolue.
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Grace au Qur’ân, Révélé et Révéré, où pas une seule lettre n’a été changée depuis sa
Révélation jusqu’à nos jours, nous avons appris toutes les manipulations qu’a subies le texte
de la Bible, Ancien et Nouveau Testament, bien avant les luttes et les critiques internes de
l’Eglise, bien avant les auteurs du Siècle des Lumières, de la Crise du Modernisme et du
Fondalisme, qui a failli déraciner le Christianisme, et bien avant le fameux Jesus Seminar,
aux Etats-Unis, qui a annoncé récemment que 86% des paroles attribuées à Jésus il ne les a
point dites, et 82% des actes qui lui sont accordés il ne les a point faits. C’est la raison pour
laquelle le fanatisme ecclésiastique s’acharne à déraciner le Qur’ân, Texte Immuable et
Véridique.
Le Jihad n’est pas un plat que l’on « choisi à la carte », Monsieur, mais une ligne de conduite
ayant plusieurs composantes et deux divisions principales : le grand et le petit Jihad. Le grand
Jihad est celui que tout musulman se doit de mener contre soi-même dans tous les domaines
pour s’améliorer, évoluer et s’élever au plus haut degré de la dignité humaine ; le second, le
petit Jihad, est celui que l’on mène pour la défense de la Religion et de la Patrie. L’exemple
que vous citez mal, dit : « Le meilleur du Jihad est une parole de Vérité face à un gouvernant
injuste ». Et je vous cite : « Il y a, parait-il, une parole célèbre d’un homme qui dit », ce qui
sous-entend que c’est la parole qui est célèbre et l’homme un inconnu. Eh bien, Monsieur, cet
homme que vous n’avez même pas daigné prononcer son nom, c’est le Prophète Mohammad.
Et si vous vous étonnez encore du fait que l’Islam ait eu « besoin de très peu de temps pour
s’installer [que] tout était fait quasiment en un siècle ou un siècle un quart », c’est que les
manipulations ecclésiastiques étaient de fraîche date, les gens se souvenaient encore du vrai
message du Prophète Jésus, qui marquait une grande différence entre lui et le Créateur, et
adhérèrent volontairement à la juste rectification, d’autant plus que les adeptes d’Arius,
refusant la déification de Jésus, étaient à l’époque, en grande majorité. Il n’y avait pas encore
cette machine de guerre manipulable, intitulée mass-média ou satellites pour façonner les
gens selon une planification requise, ni ce fameux rouleau-compresseur, comme disent vos
journaux, que le pape Jean-Paul II tient en main pour écraser l’Islam.
Quant à cette « immense méditation un peu rageuse sur ce qu’est l’Occident » ou que vous
êtes « toujours incriminés d’avoir pris, successivement, les ressources matérielles et les
ressources humaines », ce n’est point une persuasion mais la Vérité toute crue. Inutile
d’ajouter qu’elle vient d’être soulevée dans l’allocution du Commandand Cousteaud, lors de
son intervention à la Conférence du Caire ayant pour titre : Population et Développement.
Intervention qui fut reproduite par vos journaux. A quoi il n’est point nécessaire d’ajouter que
cinq siècles de colonisations, à ne citer que la toute dernière en date, l’Algérie, et tous les
massacres honteux que la politique de votre pays imposa ou impose encore, lui ont permis
d’extirper les ressources matérielles et humaines.
Ce n’est pas « seule la mer [qui] a pu arrêter le pas des chevaux de Musulmans qui s’étaient
avancés jusqu’aux limites connues de l’univers », mais les coalitions chrétiennes politiques et
ecclésiastiques. Il me peine d’ajouter revoyez, Monsieur l’ex-ministre, vos livres scolaires
d’histoire et de géographie !
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