William Seward Burroughs

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William Seward Burroughs
William Seward Burroughs
Plus connu sous son nom de plume William S. Burroughs, né le 5 février 1914 à
Saint-Louis (Missouri), mort à Lawrence (Kansas) le 2 août 1997, est un
romancier américain.
Principalement connu pour ses romans hallucinés mêlant drogue, homosexualité
et anticipation, il est associé à la Beat Generation et à ses figures emblématiques
(Jack Kerouac, Allen Ginsberg). On retient aussi de lui son utilisation littéraire du
cut-up, technique (mise au point dans une petite chambre d'hôtel rue Gît-le-Cœur
à Paris avec Brion Gysin) qui consiste à créer un texte à partir d'autres fragments
textuels de toutes origines (littérature, articles de presse, catalogues de vente par
correspondance...), découpés de manière régulière et remontés selon une
logique prédéfinie, afin de faire émerger l'implicite, l'inavoué des textes de départ.
Associé aux "routines", récurrences de fragments du texte, tout au long d'une
oeuvre, le cut-up a également pour objectif de briser la cohérence logique
imposée au discours par l'empoi du langage, considéré comme une structure
structurante. L'impression de semi-chaos généré par les cut-ups et de déjà-vu
initié par les routines permettent de se rapprocher, au plan formel, de la logique
de perception d'un individu plongé dans un environnement dont il ne maîrise par
définition pas les stimuli. L'ensemble a pour ambition de faire faire à la littérature
la même révolution que celle de la peinture, avec le passage à l'abstrait.
Citation extraite du livre Queer Beats de Regina Marler : « Alors que Kerouac
retourna vivre avec sa mère dans les années 60 et épousa la sœur d’un ami
d’enfance, et que Ginsberg régna pendant les années hippies, ce furent les
années 1980 et 1990 […] qui allaient être l’ère de William Burroughs, le plus
sombre des trois anges de la Beat Generation. »
William Seward Burroughs naît dans une famille bourgeoise. Il est le petit-fils d'un
autre William Seward Burroughs, l'inventeur de la première machine comptable et
fondateur de la « Burroughs Adding Machine Company ». Sa mère, Laura Lee
Burroughs, est la fille d'un homme d'Église dont la famille se réclamait de
l'ascendance de Robert E. Lee. Burroughs étudie la médecine à Vienne,
expérience dont il garda toute sa vie un goût prononcé pour la chirurgie et les
modifications du corps, la chimie du cerveau et les drogues. Il entre à l'université
Harvard pour une licence de littérature anglaise dont il sort diplômé en 1936. Son
expérience à Harvard est résumée au début de Junky : « J'ai détesté l'université
et la ville dans laquelle je vivais. Tout en elle était mort. L'université était un faux
décor anglais entre les mains de diplômés de faux collèges anglais. »
En 1944, Burroughs vit avec Joan Vollmer dans un appartement partagé avec
Jack Kerouac et sa première femme Edie Parker. C'est à cette période qu'il
entame sa consommation d'héroïne. Il épouse Joan en 1946 avec le projet de
fonder une famille. Leur fils William S. Burroughs Jr. naît en 1947, au Texas. Le 6
septembre 1951, en voyage à Mexico, Burroughs, ivre, tue accidentellement sa
femme d'une balle en pleine tête alors qu'il essayait de reproduire la performance
de Guillaume Tell, qui fendit d'une flèche la pomme posée sur la tête de son fils.
Burroughs est inculpé pour homicide involontaire. Il choisit la fuite. Commencent
alors des années d'errance : il parcourt l'Amérique du Sud à la recherche d'une
drogue hallucinogène du nom de Yagé, puis l'Afrique du Nord avant de s'installer
à Tanger, au Maroc.
En 1956, il entame une première cure de désintoxication avec l'aide de John
Dent, un médecin londonien qui inventa la cure d'apomorphine, la seule cure
efficace en matière de désintoxication selon Burroughs. À l'issue du traitement, il
emménage au légendaire « Beat hotel » à Paris où il accumule des masses de
fragments de pages manuscrites. Avec l'aide de Ginsberg et Kerouac, il fait éditer
Le Festin nu par Olympia Press. Les fragments deviennent de leur côté les trois
épîtres d'une trilogie : La Machine molle, Le Ticket qui explosa et Nova express.
Après sa sortie, le Festin nu est poursuivi pour obscénité par l'État du
Massachusetts puis de nombreux autres. En 1966, la Cour Suprême du
Massachusetts déclare finalement le livre « non obscène », ce qui ouvre la porte
à d'autres travaux comme ceux d'Henry Miller (en particulier son Tropique du
Cancer).
Burroughs part pour Londres en 1960 où il publie de nombreux petits textes dans
des magazines "underground", travaillant dans le même temps sur un projet qui
est publié en trois parties : Les Garçons sauvages, Les cités de la nuit écarlate et
Havre Des Saints. Il retourne à New York en 1974 où il devient professeur
d'écriture pendant quelque temps, avant de réaliser que l'écriture ne peut être
enseignée.
Dans les années 1980 et 1990, Burroughs commence à attirer de nombreuses
icônes de la culture Pop. Il apparaît notamment dans le film Drugstore Cowboy de
Gus Van Sant. En 1990, sa collaboration avec Bob Wilson et Tom Waits donne
naissance à la pièce Black Rider qui fut jouée la première fois au Thalia Theatre
de Hambourg, le 31 mars 1990. Burroughs participe aussi à des enregistrements
de ses textes pour Industrial Records, le label de Throbbing Gristle ("Nothing
Here Now But The Recordings"), Sonic Youth ("Dead City Radio"), Kurt Cobain
("The Priest They Called Him"), R.E.M., Ministry et Bill Laswell, entre autres. Il est
décoré de l'ordre de Chevalier des Arts et Lettres en 1984, lors de sa venue en
France au Printemps de Bourges avec Brion Gysin.
Burroughs est considéré comme un des écrivains les plus influents du xxe siècle.
Que l'on privilégie ses idées ou sa prose, on ne peut que voir un homme aussi
brillant et fulgurant que chaotique et auto-destructeur. Ceux qui l'ont connu le
décrivent comme un gentleman intelligent et calme, s'intéressant à la sciencefiction, aux chats et aux armes à feu. Un cahier de l'Herne lui fut consacré par
[Dominique de Roux] qui fut son premier éditeur chez Christian Bourgois.
Il meurt dans sa propriété de Lawrence (Kansas) le 2 août 1997, de
complications liées à une crise cardiaque. En France, le journal Libération lui
rend hommage le lendemain en lui consacrant sa une, un fusil à la main. Le
Festin nu a été traduit de manière éblouissante en France par Eric Kahane,
traducteur de Lolita de Nabokov.