La mission du Carnaval de Québec
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La mission du Carnaval de Québec
FSS, Département de sociologie La mission du Carnaval de Québec Offre de service Proposée à : Monsieur Luc Fournier D.G. du Carnaval de Québec Par : Marie-Ève Blackburn Et Patrick Codère ctobre 1998 À propos du Carnaval… Le Carnaval de Québec est présenté pour la toute première fois en 1894; il a alors pour but d’égayer les longs hivers québécois, de se rassasier et de s’amuser une dernière fois durant les jours gras qui précédent les quarante jours de jeûne du carême. Ensuite, le Carnaval a lieu de façon sporadique jusqu’en 1954. Cette année-là, il se renouvelle et s’ajuste à une réalité contemporaine. Il se donne alors comme principales fonctions de susciter une activité commerciale au creux de l’hiver, qui est la saison touristique la plus calme, et d’apporter une certaine féerie à la population confrontée au rude hiver québécois. Il se maintient, jusqu’à ce jour, grâce aux nombreux commanditaires et au comité organisateur. En 1954, c’est aussi l’arrivée du Bonhomme Carnaval, qui est devenu, au fil des ans, l’image officielle du Carnaval de Québec. De 1954 à 1996, le Carnaval n’a pas connu de véritables bouleversements quant à sa mission et à la présentation des différentes activités. Au début des années 1990, le Carnaval se retrouve dans une impasse, c’est-à-dire qu’on constate une diminution très importante de la participation à ses différentes activités. Par conséquent, il se voit obligé de se remettre en question. L’organisme tente, par divers moyens, d’augmenter la participation des gens de la région (par exemple il amène les personnages de Walt Disney au Carnaval de Québec en 1996). Ces tentatives échouent. En 1997, il décide donc de se donner une nouvelle vocation qui se résume aux aspects suivants : familial, accessible, populaire et hivernal. Une étape importante de ce virage est sans doute l’abolition des duchesses et de la reine. Celles-ci étaient devenues de véritables symboles de «l’ancien» Carnaval. L’organisme a voulu ainsi démontrer le sérieux de ce nouveau virage. Cette orientation est soutenue par l’arrivée, en 1998, du commanditaire en titre Kellogg’s Canada. Ce changement de vocation entraîne une hausse considérable de la participation sur les différents sites. Étant donné ces circonstances, l’organisme voudrait savoir si, aujourd’hui, ce nouveau discours à saveur familial et accessible permettra de raviver le sentiment d’appartenance des gens de Québec envers le Carnaval, sentiment qui était en déclin ces dernières années. La problématique Tout d’abord, pour bien saisir l’enjeu de ce renouveau du Carnaval, il est important de préciser ce qu’est un carnaval. L’origine du mot carnaval semble venir du latin «carne» signifiant «chair» et «vale» qui signifie «adieu». On peut donc dire que le carnaval serait «l’adieu à la chère» avant les privations alimentaires ou autres du carême. En effet, à son origine le carnaval était un moment de relâche et de festivités avant le long jeûne du carême. Il est à noter que le carnaval est inséparable de la religion dans le monde occidental, et ce depuis le moyen âge. En 1894, lors du premier Carnaval de Québec, l’aspect religieux de la fête prend une grande importance. C’est-à-dire que les Canadiens français ont pris l’habitude de se rencontrer avant le carême pour fêter, manger et boire. À cette époque, on peut dire que le carnaval relève davantage d’un acte spontané de la population que d’une fête organisée. Le Carnaval constitue un événement propice à rassembler les gens de la région. En plus, il devient un attrait touristique majeur dans la période hivernale. Cependant, en 1954, les aspects traditionnel et religieux du Carnaval semblent être délaissés pour une fête davantage axée sur les valeurs d’un monde moderne. Dès lors, le Carnaval devient plutôt une fête organisée par un comité organisateur que par la population elle-même. Sa dissociation à l'égard du calendrier religieux en témoigne bien. Depuis ce temps, le Carnaval apparaît avoir progressivement perdu ses racines populaires. Nous pourrions ainsi affirmer qu’il existe une opposition entre les valeurs modernes et le carnaval dans le sens traditionnel du terme. Analyse conceptuelle Afin de bien «contextualiser» notre recherche, nous devons mieux saisir quel type de fête est le Carnaval de Québec. Dans le cadre de cette recherche, certains concepts doivent être définis. Ici, nous présenterons une définition rapide et provisoire de ces concepts. Carnaval et fête populaire Comme nous l’avons préalablement évoqué, le concept de carnaval est indissociable de la religion, car le carnaval s’affirme en opposition au carême. Il s’agit d’une fête venant de la population ayant pour principal objectif un renversement, une transgression des normes établies par la religion. Contrairement au carnaval, la fête populaire est organisée par un comité organisateur. Elle n’émerge pas de la population elle-même mais plutôt d’une organisation. L’organisation est au cœur de la programmation des activités proposées par la fête. Société traditionnelle et société moderne Afin de bien distinguer les valeurs traditionnelles des valeurs modernes, nous devons préciser les concepts de société traditionnelle et de société moderne, voire post-moderne. Pour bien définir ces concepts, nous utiliserons la notion de contraintes (normes sociales) car, comme nous l’avons souligné, le carnaval est à son origine un moment de transgression des normes établies. Par conséquent, il devient important d’identifier, de façon socio-historique, la source des contraintes qui règle une société. Dans une société dite traditionnelle, les contraintes sont imposées par une autorité de droit divin. Dans la société moderne, cet ordre social n’est plus aussi visible. Les contraintes ne sont plus imposées par la religion, mais bien par une rationalisation du monde. Nous avons aussi mentionné l’idée d’une société post-moderne. Cette notion sera définie au cours de l’élaboration de notre recherche. . Une fois ces concepts clairement définis, nous pourrons faire un lien entre l’évolution du Carnaval et celle des valeurs de la société québécoise au XXième siècle. Nous avons donc modifié quelque peu notre question de recherche qui est devenue : est-ce que la nouvelle orientation du Carnaval concorde avec les attentes actuelles de la population de la région de Québec à l’égard d’une fête hivernale ? Cette nouvelle question de recherche nous amènera à définir deux autres concepts : ceux d’attentes et de sentiment d’appartenance. Le premier de ces concepts, soit celui d’attentes, se résume au fait de compter sur quelque chose ou sur quelqu’un; avoir une espérance, un souhait. Quant au concept de sentiment d’appartenance, c’est le fait pour un individu d’appartenir à une collectivité et de s’identifier à elle. Objectifs de la recherche En établissant une analogie entre l’évolution des valeurs sociales et les changements survenus dans le Carnaval, il nous sera possible de déterminer si le virage commencé ces dernières années correspond bien aux valeurs du monde actuel. Étant donné le succès obtenu l’an passé, il semble que la population de la région de Québec ait été conquise par la nouvelle formule du Carnaval. Dans ces circonstances, nous posons donc l’hypothèse suivante : la nouvelle orientation stratégique du Carnaval concorde avec les attentes actuelles de la population de la région de Québec envers une fête hivernale. En spécifiant ce que sont les attentes de la population régionale, nous pourrons clairement identifier les points positifs et négatifs concernant l’évolution de la présentation du Carnaval. 1) D’une part, cela nous permettra de voir comment la population se représente cette fête et son évolution. 2) D’autre part, nous pourrons connaître sa réaction face au virage familial entrepris depuis 1996. 3) Finalement, cela nous permettra d’informer l’organisme sur la pertinence des stratégies prévues dans sa planification des futurs Carnavals, tel l’ajout d’un volet international. Méthodologie Pour répondre à notre question de recherche, il est nécessaire de consulter la population de la région de Québec parce qu’elle est directement visée par la nouvelle orientation du Carnaval. La méthode qui convient le plus à notre recherche est l’entrevue semi-dirigée. En effet, ce type d’entrevue permet à l’individu enquêté de s’exprimer plus librement qu’à partir d’un questionnaire. Aussi, nous jugeons que l’entrevue semi-dirigée constitue la meilleure méthode pour répondre aux objectifs que nous avons préalablement exposés. 1- L’entrevue sera dirigée de façon à nous donner un maximum d’informations concernant la représentation du Carnaval que se fait le répondant. De plus, nous pourrons lui poser des questions quant à sa perception de l’évolution du Carnaval au cours des dernières années. 2- Cette méthode nous permettra de voir comment le virage familial est perçu chez les répondants. Cette nouvelle orientation amènera-t-elle un plus fort sentiment d’appartenance dans l’avenir ? 3- Nous croyons aussi que cette méthode nous permettra de voir si la planification stratégique des prochaines années, tel l’aspect international, concorde avec les attentes de la population. Ce nouvel aspect s’oppose-t-il au virage familial ? Afin de bien cerner ces objectifs, nous devons premièrement faire 4 ou 5 entrevues de type exploratoire. Celles-ci préciseront les questions des véritables entrevues semi-dirigées que nous allons réaliser. Nous prévoyons effectuer une vingtaine d’entrevues. L’échantillonnage demeure encore à déterminer. Cependant, nous savons que nos enquêtés seront des adultes (18 ans et plus), résidant dans la Communauté urbaine de Québec (CUQ). Nous ne pourrons, dans le cadre de cette recherche élaborer un portrait statistique des participants au Carnaval. Nous utiliserons, avec précaution (notamment en ce qui à trait à la méthodologie utilisée), le profil effectué l’année dernière (1998) par l’agence Préambule communication. Évidemment pendant la période du Carnaval, c’est-à-dire du 29 juillet au 14 février, nous serons sur place à faire de l’observation participante. Nous pourrons ainsi nous imprégner de l’ambiance sur les différents sites et évaluer le type de participation. Par exemple, savoir quels participants fréquentent le Carnaval. Sont-ils des touristes étrangers (d’après la langue parlée) ? Quel âge ont les participants ? Viennent-ils majoritairement en famille, en groupe d’amis, en couple ou seul ? etc. Échéancier Octobre/novembre : entrevues exploratoires Décembre : remise du rapport d’étape Janvier/février : début du terrain (entrevues semi-dirigées) 30 Avril 1999 : remise du rapport final