Moi, mon Métier, ma Profession

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Moi, mon Métier, ma Profession
Ces éditions (à suivre) proposent une carte blanche
aux identités, parcours, opinions et différents
métiers composant la diversité et la richesse du
notariat d’aujourd’hui. En période de mutation,
il nous semblait plus nécessaire que jamais de
donner à droit à l’ensemble de ces visions et retours
d’expériences de terrain, au travers d’une parole
authentique.
Dans ce premier opus : rencontre et échanges libres avec Marie Boulay, Clerc de Notaire à Nancy et Maryse Peron
Formaliste des études à Brest.
Marie Boulay - 39 ans - titulaire d’un double master en droit
et d’un DEA - 12 années d’expérience.
Salariée de Notaire à Nancy
Votre conseil autenthique
Moi, mon Métier, ma Profession
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« N’ayons pas peur du changement »
Professionnelle authentique
Depuis 12 ans, Marie Boulay, mère d’un petit Léon
de 9 ans, travaille pour la SCP Cuif-TourrandHemmer, l’une des 3 grandes études de la place
nancéienne. Très engagée dans les valeurs de
sa profession, elle refuse la « mauvaise guerre »
que pourraient se livrer avocats et notaires, « si
passait d’aventure », le décret d’application de la
loi Macron. Un point de vue aiguisé et éclairant
sur la condition de salarié de notaire, en forme
de donation-partage. Le temps d’un café, entre
deux actes parfaitement préparés.
Marie apprécie le travail en « ruche » de sa profession,
en faisant le constat d’une charge de travail croissante
conditionnée par l’évolution des lois, exigeant plus
d’études et d’investigations. « Si la loi Macron passe, la
profession sera entièrement bouleversée. Maintenant,
on agite le spectre de licenciements massifs, mais je
préfère y voir une nouvelle opportunité de pouvoir
m’installer. Je ne crois pas que les études historiques
très implantées, en ville comme en à la campagne
souffrent aussi fort qu’on veut bien le dire aujourd’hui.
Elles ont une légitimité d’accompagnement des
familles depuis si longtemps, une solennité de l’acte
très rassurante pour une grande partie de la clientèle.
Maintenant, nous vivons également dans une
époque de disparités, et les
gens comparent les prix.
Aussi, je crois que les deux
systèmes peuvent coexister. Quitte, à ce que des
salariés comme moi rejoignent de grands cabinets
d’avocats, ou créent de lieux de mutualisation de
compétences entre avocats, comptables et notaires sur
la base de spécialités. Je veux y voir une opportunité.
Personnellement, je fais tout, de l’investigation en
passant par la recherche de pièces jusqu’à la rédaction
de l’acte. Nous avons les mêmes compétences que les
notaires. Comme les avocats d’ailleurs. Nous sommes
juristes de formation. Demain, je pourrais m’installer et
tout faire », évoque Marie.
C’est précisément cette polyvalence du notariat
qui a séduit Marie au terme du cursus général. La
perspective de faire du droit de la famille, immobilier
comme des affaires, allait comme un gant à cette
jeune messine, élevée entre littérature classique,
humanités…. « Mais c’est le côté impartial, objectif,
qui a fait naître ma vocation. C’est dans mon caractère
de ne pas juger les gens et d’essayer d’être juste.
Et un contrat doit toujours l’être », affirme Marie en
saluant un ami avocat entouré d’agents immobiliers. Et
d’enchaîner : « on peut toujours se dire que les avocats
sont naturellement moins enclins à cette objectivité,
de part leur positionnement de défense du client. Mais
nous-mêmes nous travaillons souvent à plusieurs
notaires pour assurer la représentation des parties.
Par contre, je relève souvent des erreurs dans les
actes d’agents immobiliers » sourie-telle à l’encan, en
affirmant sans amertume, travailler plus et pour gagner
moins que ces équipages.
Avec en poche une double maîtrise de droit notarial
et de droit des affaires, sans oublier un DEA d’histoire
du droit et science juridique, Marie reconnaît avoir
toujours su qu’elle s’orientait vers une belle profession
sanglée dans un « monopole historique ». Mais
elle comptait sur des vents plus favorables que la
professionnelle avertie regarde aujourd’hui avec une
lucidité clinique. « Beaucoup de juristes, peu d’études
disponibles, sauf à s’exiler, et des besoins de capitaux
importants ». Un constat largement partagé par ses
collègues, y compris, paradoxe de la représentation par
des salariés, parmi les manifestants antis loi Macron. Si
Marie exerce sa vocation avec une foi certaine alliée
à une rigueur de chaque instant, c’est la capacité à
sceller des actes concrets dans la vie de ses clients qui
continue de la motiver au bout de 12 ans. « J’ai de beaux
souvenirs de relations de confiance dans des dossiers
épineux, des sommes importantes, quand on trouve
une position forte pour le client, il m’est arrivé au terme
de ces actes de recevoir assez de fleurs pour masquer
tous les fauteuils de notre accueil », raconte Marie, en
regrettant que ce face
à face avec le client lui
soit si rare, alors qu’elle
prépare comme tout salarié de notaire, la quasi totalité
des actes. « Je pense que nous devrions faire évoluer
nos pratiques. Nous sommes une profession de force
de loi solennelle pétrie de contradictions pratiques.
Par exemple, je ne gagne rien de plus à emmener des
clients à mon étude. Un détail révélateur de l’ensemble
des changements que nous devrions embrasser au
lieu de nous en prémunir. La société a changé. L’esprit
de mise en concurrence des tarifs signe moins la
mort d’une profession qu’une segmentation de ses
typologies de services », conclue-t-elle.
Ce métier silencieux, profondément inscrit au
carrefour des grandes étapes de la vie, avec ces jeunes
mariés, les premiers achats, les ventes, la famille, le
décès, Marie l’a choisi par raison autant que par cœur
pour contribuer à établir des fondations solides à
chacune de ces étapes. Mais aujourd’hui, c’est elle
qui souhaiterait en franchir une nouvelle, pour avoir le
droit, à niveau de compétence égal, d’incarner en face
à face, pour elle-même et ses clients, cette marque
de confiance qui constitue le seul vrai sceau de sa
profession.
De la reconnaissance !
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Maryse Peron - 49 ans - titulaire du bac, d’un CAP secrétariat, formée en
interne - 27 années d’expérience
Formaliste des Études à Brest
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«Nous sommes les garants de l’authenticité»
Gardienne d’expérience
Maryse Peron est entrée dans le notariat à 22 ans
comme sténo, puis rédactrice, jusqu’à devenir
formaliste des études chez Gestin-Legall, la
plus grande étude de Brest, qui lui a donné sa
chance à ce poste. Mère de 2 grands enfants, elle
pourrait envisager aujourd’hui une validation
des acquis de l’expérience pour devenir Clerc,
mais confie son attachement à sa fonction
actuelle : formaliste des études. Un travail de
recherche, de rigueur et de « gendarme qui,
loi Macron ou pas, demeurera en fin de chaîne
comme la garantie de l’authenticité ». Un clou
ne chasse pas l’autre…
Avec ses grand yeux verts, Maryse est une fille de la
mer. Elle aime cette ville, qu’elle connait en actes et par
cœur. Curieuse, elle vérifie régulièrement sur « google
view » si la valeur d’un immeuble correspond bien
aux moyennes du quartier,
note ses spécificités, tout
en se tenant au courant
de toutes les évolutions
juridiques, à commencer
par les lois de finances.
« Aujourd’hui je suis
dans une étude avec un
spécialiste par type d’acte, mais j’ai commencé en
faisant de tout, de la rédaction du compromis aux
formalités postérieures. C’était très formateur, aussi j’ai
pris l’habitude de suivre le client de bout en bout. Et
puis j’aime fouiller, contrôler, ce qui est très important
dans mon métier », confie Maryse qui ne sait pas si son
parcours serait possible pour un jeune actuel avec le
resserrement des profils. Après 2 ans d’études de droit,
son père ouvrier à l’Arsenal lui dit qu’il est « temps de
cesser d’user les bancs de la fac ». Direction le CAP
de secrétariat. La fille d’une amie de sa mère, Danièle
Lazennec, récemment retraitée après 40 années en
tant que Clerc de Notaire, occupant aujourd’hui des
fonctions à la fédération, lui glisse d’envoyer son CV à
l’étude de Maître Boulch où elle travaillait. Le courant
passe, et les 2 femmes deviennent amies. De sténo
impliquée, elle passe à secrétaire juridique et prend en
charge de petits actes. « J’ai arrêté 3 ans pour suivre
mon mari boulanger avec lequel nous avons ouvert un
magasin. Çà a été très dur. Une expérience de terrain
qui me fait comprendre les soucis de mes patrons
et ceux des clients », explique Maryse sans détour.
L’entreprise passe en redressement judiciaire, alors elle
envoie son CV à la Chambre de Notaires de Quimper
qui lui renvoie des offres. Maryse devient rédactrice
d’actes à l’étude de Maître Berthou à Quimper, et
s’ajoutent 140 km par jour, pendant 2 mois, avant de
rejoindre chaque soir son mari pour fermer la boutique.
C’est à cette époque, dans cette étude sans formaliste,
qu’elle découvre toute la polyvalence de la profession,
et le contact avec les clients aux moments clés de leur
vie. En 2004, elle s’adresse à nouveau à la Chambre
des Notaires qui lui retourne plusieurs propositions.
Sa longue expérience commence à parler. Elle entre
donc chez Gestin-Legall qui compte une vingtaine de
salariés spécialisés avec notamment 3 formalistes.
Après un décès et un départ en retraite, on lui dit
« vous savez faire », Maryse passe alors à la rédaction
et aux formalités postérieures à mi-temps, puis plein
temps. Un poste qui voit passer tous les actes. « Nous
contrôlons tout en profondeur, et traquons les erreurs,
y compris liées aux évolutions juridiques, nous sommes
toujours sur le pont,
puisqu’il n’y a jamais
deux actes similaires
et que leur validité est
systématiquement
en jeu », exprime-telle avec conviction.
Maryse vérifie avec
minutie : l’état civil, l’orthographe, la date de naissance,
le bien, le cadastre, le règlement de copropriété,
la fiscalité. Elle trie ce qui va aux hypothèques, aux
impôts, aux simples copies destinées aux clients. « On
se déplace, mais nous avons aujourd’hui la possibilité
de passer par les téléactes. Cette dématérialisation qui
fait gagner un temps précieux à tout le monde. Puis
on cloute avec la machine en apposant la bande bleu
auto-collante qui garantit l’authenticité, la conformité
et donc la certitude qu’aucune page ne peut-être
ajoutée. C’est pour cette raison que je trouve la loi
Macron ingérable telle qu’elle est présentée. Je trouve
ridicule qu’un avocat puisse faire le travail pour au
final nous le transférer en bout de chaîne pour garantir
l’authenticité. D’autant que les notaires ont beaucoup
investi dans la dématérialisation et même la signature
numérique. Cela m’étonnerait que les avocats se
lancent dans de pareils investissements…. », énumère
Maryse qui en comprend parfaitement l’attrait pour
les Clercs. Mais de là à remplacer l’efficacité d’une
fonction spécialisée et 27 années d’expériences…
Fédération générale des clercs et employés de notaire
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des Employés et Cadres Force Ouvrière
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Ne pas jeter sur la voie publique - réalisation textes et photographies : Sébastien Di Silvestro.
Loi Macron : quel intérêt
puisque nous sommes la
garantie finale ?