Moi, mon Métier, ma Profession
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Moi, mon Métier, ma Profession
Ces éditions (à suivre) proposent une carte blanche aux identités, parcours, opinions et différents métiers composant la diversité et la richesse du notariat d’aujourd’hui. En période de mutation, il nous semblait plus nécessaire que jamais de donner à droit à l’ensemble de ces visions et retours d’expériences de terrain, au travers d’une parole authentique. Dans ce premier opus : rencontre et échanges libres avec Marie Boulay, Clerc de Notaire à Nancy et Maryse Peron Formaliste des études à Brest. Marie Boulay - 39 ans - titulaire d’un double master en droit et d’un DEA - 12 années d’expérience. Salariée de Notaire à Nancy Votre conseil autenthique Moi, mon Métier, ma Profession www.fgcen-fo.com - https://fr-fr.facebook.com/Fgcen-Fo - @FGCENFO « N’ayons pas peur du changement » Professionnelle authentique Depuis 12 ans, Marie Boulay, mère d’un petit Léon de 9 ans, travaille pour la SCP Cuif-TourrandHemmer, l’une des 3 grandes études de la place nancéienne. Très engagée dans les valeurs de sa profession, elle refuse la « mauvaise guerre » que pourraient se livrer avocats et notaires, « si passait d’aventure », le décret d’application de la loi Macron. Un point de vue aiguisé et éclairant sur la condition de salarié de notaire, en forme de donation-partage. Le temps d’un café, entre deux actes parfaitement préparés. Marie apprécie le travail en « ruche » de sa profession, en faisant le constat d’une charge de travail croissante conditionnée par l’évolution des lois, exigeant plus d’études et d’investigations. « Si la loi Macron passe, la profession sera entièrement bouleversée. Maintenant, on agite le spectre de licenciements massifs, mais je préfère y voir une nouvelle opportunité de pouvoir m’installer. Je ne crois pas que les études historiques très implantées, en ville comme en à la campagne souffrent aussi fort qu’on veut bien le dire aujourd’hui. Elles ont une légitimité d’accompagnement des familles depuis si longtemps, une solennité de l’acte très rassurante pour une grande partie de la clientèle. Maintenant, nous vivons également dans une époque de disparités, et les gens comparent les prix. Aussi, je crois que les deux systèmes peuvent coexister. Quitte, à ce que des salariés comme moi rejoignent de grands cabinets d’avocats, ou créent de lieux de mutualisation de compétences entre avocats, comptables et notaires sur la base de spécialités. Je veux y voir une opportunité. Personnellement, je fais tout, de l’investigation en passant par la recherche de pièces jusqu’à la rédaction de l’acte. Nous avons les mêmes compétences que les notaires. Comme les avocats d’ailleurs. Nous sommes juristes de formation. Demain, je pourrais m’installer et tout faire », évoque Marie. C’est précisément cette polyvalence du notariat qui a séduit Marie au terme du cursus général. La perspective de faire du droit de la famille, immobilier comme des affaires, allait comme un gant à cette jeune messine, élevée entre littérature classique, humanités…. « Mais c’est le côté impartial, objectif, qui a fait naître ma vocation. C’est dans mon caractère de ne pas juger les gens et d’essayer d’être juste. Et un contrat doit toujours l’être », affirme Marie en saluant un ami avocat entouré d’agents immobiliers. Et d’enchaîner : « on peut toujours se dire que les avocats sont naturellement moins enclins à cette objectivité, de part leur positionnement de défense du client. Mais nous-mêmes nous travaillons souvent à plusieurs notaires pour assurer la représentation des parties. Par contre, je relève souvent des erreurs dans les actes d’agents immobiliers » sourie-telle à l’encan, en affirmant sans amertume, travailler plus et pour gagner moins que ces équipages. Avec en poche une double maîtrise de droit notarial et de droit des affaires, sans oublier un DEA d’histoire du droit et science juridique, Marie reconnaît avoir toujours su qu’elle s’orientait vers une belle profession sanglée dans un « monopole historique ». Mais elle comptait sur des vents plus favorables que la professionnelle avertie regarde aujourd’hui avec une lucidité clinique. « Beaucoup de juristes, peu d’études disponibles, sauf à s’exiler, et des besoins de capitaux importants ». Un constat largement partagé par ses collègues, y compris, paradoxe de la représentation par des salariés, parmi les manifestants antis loi Macron. Si Marie exerce sa vocation avec une foi certaine alliée à une rigueur de chaque instant, c’est la capacité à sceller des actes concrets dans la vie de ses clients qui continue de la motiver au bout de 12 ans. « J’ai de beaux souvenirs de relations de confiance dans des dossiers épineux, des sommes importantes, quand on trouve une position forte pour le client, il m’est arrivé au terme de ces actes de recevoir assez de fleurs pour masquer tous les fauteuils de notre accueil », raconte Marie, en regrettant que ce face à face avec le client lui soit si rare, alors qu’elle prépare comme tout salarié de notaire, la quasi totalité des actes. « Je pense que nous devrions faire évoluer nos pratiques. Nous sommes une profession de force de loi solennelle pétrie de contradictions pratiques. Par exemple, je ne gagne rien de plus à emmener des clients à mon étude. Un détail révélateur de l’ensemble des changements que nous devrions embrasser au lieu de nous en prémunir. La société a changé. L’esprit de mise en concurrence des tarifs signe moins la mort d’une profession qu’une segmentation de ses typologies de services », conclue-t-elle. Ce métier silencieux, profondément inscrit au carrefour des grandes étapes de la vie, avec ces jeunes mariés, les premiers achats, les ventes, la famille, le décès, Marie l’a choisi par raison autant que par cœur pour contribuer à établir des fondations solides à chacune de ces étapes. Mais aujourd’hui, c’est elle qui souhaiterait en franchir une nouvelle, pour avoir le droit, à niveau de compétence égal, d’incarner en face à face, pour elle-même et ses clients, cette marque de confiance qui constitue le seul vrai sceau de sa profession. De la reconnaissance ! www.fgcen-fo.com https://fr-fr.facebook.com/Fgcen-Fo @FGCENFO Maryse Peron - 49 ans - titulaire du bac, d’un CAP secrétariat, formée en interne - 27 années d’expérience Formaliste des Études à Brest Votre conseil autenthique Moi, mon Métier, ma Profession www.fgcen-fo.com - https://fr-fr.facebook.com/Fgcen-Fo - @FGCENFO «Nous sommes les garants de l’authenticité» Gardienne d’expérience Maryse Peron est entrée dans le notariat à 22 ans comme sténo, puis rédactrice, jusqu’à devenir formaliste des études chez Gestin-Legall, la plus grande étude de Brest, qui lui a donné sa chance à ce poste. Mère de 2 grands enfants, elle pourrait envisager aujourd’hui une validation des acquis de l’expérience pour devenir Clerc, mais confie son attachement à sa fonction actuelle : formaliste des études. Un travail de recherche, de rigueur et de « gendarme qui, loi Macron ou pas, demeurera en fin de chaîne comme la garantie de l’authenticité ». Un clou ne chasse pas l’autre… Avec ses grand yeux verts, Maryse est une fille de la mer. Elle aime cette ville, qu’elle connait en actes et par cœur. Curieuse, elle vérifie régulièrement sur « google view » si la valeur d’un immeuble correspond bien aux moyennes du quartier, note ses spécificités, tout en se tenant au courant de toutes les évolutions juridiques, à commencer par les lois de finances. « Aujourd’hui je suis dans une étude avec un spécialiste par type d’acte, mais j’ai commencé en faisant de tout, de la rédaction du compromis aux formalités postérieures. C’était très formateur, aussi j’ai pris l’habitude de suivre le client de bout en bout. Et puis j’aime fouiller, contrôler, ce qui est très important dans mon métier », confie Maryse qui ne sait pas si son parcours serait possible pour un jeune actuel avec le resserrement des profils. Après 2 ans d’études de droit, son père ouvrier à l’Arsenal lui dit qu’il est « temps de cesser d’user les bancs de la fac ». Direction le CAP de secrétariat. La fille d’une amie de sa mère, Danièle Lazennec, récemment retraitée après 40 années en tant que Clerc de Notaire, occupant aujourd’hui des fonctions à la fédération, lui glisse d’envoyer son CV à l’étude de Maître Boulch où elle travaillait. Le courant passe, et les 2 femmes deviennent amies. De sténo impliquée, elle passe à secrétaire juridique et prend en charge de petits actes. « J’ai arrêté 3 ans pour suivre mon mari boulanger avec lequel nous avons ouvert un magasin. Çà a été très dur. Une expérience de terrain qui me fait comprendre les soucis de mes patrons et ceux des clients », explique Maryse sans détour. L’entreprise passe en redressement judiciaire, alors elle envoie son CV à la Chambre de Notaires de Quimper qui lui renvoie des offres. Maryse devient rédactrice d’actes à l’étude de Maître Berthou à Quimper, et s’ajoutent 140 km par jour, pendant 2 mois, avant de rejoindre chaque soir son mari pour fermer la boutique. C’est à cette époque, dans cette étude sans formaliste, qu’elle découvre toute la polyvalence de la profession, et le contact avec les clients aux moments clés de leur vie. En 2004, elle s’adresse à nouveau à la Chambre des Notaires qui lui retourne plusieurs propositions. Sa longue expérience commence à parler. Elle entre donc chez Gestin-Legall qui compte une vingtaine de salariés spécialisés avec notamment 3 formalistes. Après un décès et un départ en retraite, on lui dit « vous savez faire », Maryse passe alors à la rédaction et aux formalités postérieures à mi-temps, puis plein temps. Un poste qui voit passer tous les actes. « Nous contrôlons tout en profondeur, et traquons les erreurs, y compris liées aux évolutions juridiques, nous sommes toujours sur le pont, puisqu’il n’y a jamais deux actes similaires et que leur validité est systématiquement en jeu », exprime-telle avec conviction. Maryse vérifie avec minutie : l’état civil, l’orthographe, la date de naissance, le bien, le cadastre, le règlement de copropriété, la fiscalité. Elle trie ce qui va aux hypothèques, aux impôts, aux simples copies destinées aux clients. « On se déplace, mais nous avons aujourd’hui la possibilité de passer par les téléactes. Cette dématérialisation qui fait gagner un temps précieux à tout le monde. Puis on cloute avec la machine en apposant la bande bleu auto-collante qui garantit l’authenticité, la conformité et donc la certitude qu’aucune page ne peut-être ajoutée. C’est pour cette raison que je trouve la loi Macron ingérable telle qu’elle est présentée. Je trouve ridicule qu’un avocat puisse faire le travail pour au final nous le transférer en bout de chaîne pour garantir l’authenticité. D’autant que les notaires ont beaucoup investi dans la dématérialisation et même la signature numérique. Cela m’étonnerait que les avocats se lancent dans de pareils investissements…. », énumère Maryse qui en comprend parfaitement l’attrait pour les Clercs. Mais de là à remplacer l’efficacité d’une fonction spécialisée et 27 années d’expériences… Fédération générale des clercs et employés de notaire 31, Rue du Rocher - 75008 PARIS Tél : 01 44 90 89 89 - Fax : 09 70 62 37 03 www.fgcen-fo.com Syndicat national affilié à la Fédération des Employés et Cadres Force Ouvrière https://fr-fr.facebook.com/Fgcen-Fo @FGCENFO Ne pas jeter sur la voie publique - réalisation textes et photographies : Sébastien Di Silvestro. Loi Macron : quel intérêt puisque nous sommes la garantie finale ?