RACINES168 -fev07 - Magazine Racines

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RACINES168 -fev07 - Magazine Racines
Magazine Racines, le temps de vivre près de chez vous
Dossier coordonné par
Nos ancêtres
Christine Grandin
du Québec
(Champlain et les portes du Nouveau monde, Geste éditions)
Liens régionaux
et nationaux
À l'instar de 63 autres
“régionales”, regroupées dans l’association nationale France- Québec
d’amitiés franco-québécoises départemantales ou régionales, l'association Vendée-Québec promeut le Québec sous
toutes ses formes : recherches historiques
et généalogiques, échanges d'étudiants,
jumelages de villes, voyages scolaires,
suivi des dossiers d'immigration, événementiels, la liste est longue.
Voici leurs contacts dans notre
région :
• Anjou-Québec : Nathalie Girard,
(Angers). Tél. 06 74 92 19 17. Courriel :
[email protected]. Site internet :
www.anjou-quebec.asso.fr
• Vendée-Québec : Daniel Chiron,
(Apremont). Tél. 02 51 55 73 59. Courriel : [email protected]
• Gâtine-Poitevine- Québec :
Nicolas Gamache (Coutières). Tél. 05 49
63 74 82. Courriel : nicolas.gamache@
orange.fr
Ils sont partis de l'Ouest par familles entières
vers la Nouvelle France et y ont fait souche.
Qui étaient ces pionniers qui nous reviennent
aujourd'hui en “cousins” ?
Principales
régions de
départ en France
des immigrants
vers la Nouvelle
France.
(D'après Harris, R. Cole et
coll., Atlas historique du
Canada vol 1, 1987)
(Champlain et les portes du Nouveau monde, Geste éditions)
Comment débuta
la
saga des Vendéens au Canada et au Québec ?
Daniel Chiron, président de
l'association Vendée-Québec :
Lors de son premier voyage en
1534, Jacques Cartier sillonne le
golfe du Saint-Laurent, berceau du
Canada français. La Vendée débute déjà sa longue histoire avec ce
qui n'est pas encore la Nouvelle
France : c'est Philippe de Chabot de
Brion, châtelain vendéen d'Apremont, alors amiral de France, qui
signa ses trois ordres de mission.
Mais la Nouvelle France ne prit naissance véritablement qu'avec la fondation de la ville de Québec, en
1608, par Samuel Champlain.
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D'abord balbutiante, la première
grande vague d'immigrants s'accentue entre 1621 et 1699. On a besoin
de peupler ce nouveau territoire de
pionniers, d'autant plus que la pêche
et le commerce des fourrures y sont
florissants. Plus de 500 Vendéens ont
(officiellement) été répertoriés à cette
époque, au départ de la traversée.
Mais il y en eu certainement beaucoup plus qui tentèrent l'aventure,
seuls ou en couple, dont on n'a pas
toujours retrouvé la trace.
Le gros de la troupe dans notre
région rayonne autour de Fontenayle-Comte, alors capitale du Bas-Poitou. On y ralliait en charrette des
gabarres qui descendaient des ports
de Saint-Michel-en-l'Herm ou de
février 2007
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80% des immigrants du
centre-ouest partaient du port de La
Rochelle vers la Nouvelle France.
(Vue du port de La Rochelle par Joseph
Vernet en 1762, copie par E.Pinel, 1866)
Luçon vers La Rochelle, port d’embarquement vers le Nouveau Monde.
80 % des civils et des filles du Roi
(orphelines recueillis chez les religieuses) s'y embarquaient. Les militaires
partaient de Rochefort-sur-Mer.
L'immigration vers le Canada ou
vers le Québec n'a pratiquement
jamais arrêté. Il y avait encore des
grands départs en paquebot dans
les années 1871-1900, quand le
Québec a commencé à prendre son
essor industriel. Et puis le Pays d'en
haut et ses grands espaces font
encore rêver les gens. Et comme, en
plus, on y parle notre langue …
Cette émigration a-telle concerné d'autres départements dans notre région ?
Les fondateurs “picto-charentais” (1), ont été les plus nombreux des
familles souche de la Vallée du SaintLaurent, dont on retrouve aujourd'hui
les descendants. Entre 1621 et 1699
sur un total de 4 148 Français partis, 235 étaient Vendéens, 102 DeuxSévriens, 131 de Charentes et 701
de Charente-Inférieure, 156 de la
Vienne. À la vague suivante, entre
1700 et 1765, 64 % seront des Charentais, 15 % Vendéens, 13 % Poitevins et 9 % des Deux-Sévriens. La
plupart sont paysans, manouvriers,
et surtout artisans.
D'autres sources historiques parlent de 478 pionniers partis de 240
communes différentes dans les Pays
de la Loire et de 926 Poitevins au
départ de 258 communes dans le Poitou-Charentes. 80 % des départs se
faisaient de la façade atlantique et
du port d'attache de La Rochelle.
Qui s'embarquait pour
la Belle province ?
Un seul membre d'une famille ou
des familles entières, des couples,
quelquefois avec des enfants en bas
âge. Il y avait des rabatteurs qui portaient la bonne nouvelle des terres
riches et libres qui attendaient de
l'autre côté de l'océan. Cultivateurs
et laboureurs, mais aussi charpentiers, meuniers, charretiers, menuisiers, pelletiers, maçons, étaient
engagés à La Rochelle pour le
compte d'un noble ou d'une personne déjà établie au Québec.
Et puis, il y avait les cadets des
familles, qui n'avaient aucun avenir
en France, la misère et la famine,
la soif de l'aventure, et les guerres
perpétuelles qui incitaient aussi à
faire son baluchon. Parmi les premiers pionniers, un François Deschalets de Fontenay-le Comte, veuf
avec ses trois filles, Elisabeth, Claude et Madeleine, filles du Roi, arrivés en 1668 à Québec. La grande
famille Jousselot, partie du Langon,
également déjà présente en 1669,
avec leurs cinq enfants…Et tellement
d'autres.
On ne savait pas si on partait
pour revenir un jour. Un tiers des
passagers décédaient pendant la
longue traversée (entre 45 et 90
jours). Des deux tiers qui restaient,
quelques-uns mourraient aussi massacrés par les Indiens ou de maladie. Mais l'avenir était à qui voulait
bien retrousser ses manches, et on
pouvait, tel Paul Vachon de La Copechagnière, arrivé maçon en Nouvelle France en 1650, se tracer un
destin hors du commun. On lui
confia la charge de notaire simple-
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ment parce qu'il savait écrire et il
devint plus tard le premier notaire
de l'Île-d'Orléans.
Sait-on ce que sont devenus
ces Vendéens ou ces habitants
de l'Ouest ?
Généralement, lorsqu'on y faisait
souche, il n'était pas rare qu'à la
seconde génération déjà, l'arbre
comportât déjà 15 voire 20 nouvelles branches. Il y a un grand
engouement généalogique, depuis
plusieurs années, de part et d'autres,
en France et au Québec, pour
remonter la filiation de ces ancêtreslà. On retrouve beaucoup de noms
bien de chez nous dans la petite histoire, mais aussi dans la grande Histoire du Québec: Henri-François des
Herbiers de L'Étenduère, mousse du
Roi, puis cartographe du Saint-Laurent. L'ascendant du premier ministre Robert Bourassa (chef du parti
libéral, élu en 1970) était François
Bourassa (déformation orthographique de Bourasseau) natif de SaintHilaire-de-Loulay. Mgr Jean-Claude
Turcot, un descendant d'Abel Turcot,
meunier, arrivé en 1652, est évêque
de Montréal depuis 1987.
Aujourd'hui, tout cela est encore
très vivant avec les associations qui
fédèrent ces souvenirs, les rassemblements de famille souche, mais
aussi des échanges, les voyages, les
jumelages entre la France et le Québec. Avec un temps fort en 2008,
pour les festivités des 400 ans de la
fondation de la ville de Québec.
(1) Source chiffres : origine provinciale et
départementale des fondateurs picto-charentais, in Champlain et les portes du
Nouveau monde, Geste éditions.
Vous pouvez aussi lire…
Champlain et les portes du nouveau Monde (2004), Geste éditions, format album, 414
pages, nombreux documents d'époque, 50 € ;
Ces Bretons d'Amérique du Nord (2005),
collection Mémoires, aux
éditions Ouest-France,125
pages illustrées, 15 €.
février 2007
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“Bonjour les cousins !”
“Dans son livre Vendéens au Canada aux 17e
et 18e siècles (paru en 1990),
l’abbé Léon Auger mentionne que 414
Vendéens sont partis, engagés, vers la
Nouvelle France à cette époque. Parmi
tous ces Vendéens et Vendéennes, cinq
étaient de Saint-Philbert-du-Pont-Charrault: Jean Allaire, Charles Allaire, Jacques Grignon, Pierre Brion et Françoise
Tourrault. Leurs descendants se comptent par milliers au Canada et dans toute
l’Amérique du Nord. Il est fréquent, à
Saint-Philbert de recevoir des demandes de renseignements de la part de
Canadiens désireux de s’informer sur
les origines de leurs ancêtres. Il n’est pas
rare de les rencontrer, venus à l’improviste sur la terre ancestrale.
Ayant beaucoup d’intérêts pour le
passé historique de Saint-Philbert, j’ai
eu l’avantage d’être informé, dès 1958,
de recherches demandées au curé de
l’époque (l'Abbé Rondeau) par des
Québécois, descendants Allaire. L’abbé Rondeau après de minutieuses
recherches a trouvé les registres de
baptême de Jean et Charles Allaire
(année 1632 et 1637) ainsi que l’acte de mariage de leurs parents. Ces
registres ont été déposés aux archives
de la Vendée. Elles ont contribué, en
partie, à l’élaboration de l’ouvrage en
deux tomes de Violette Allaire, Les
Familles Allaire et Dallaire, paru
au Québec en 1962 à l’occasion d’un
grand rassemblement des descendants
de Jean et Charles Allaire à Saint-François, dans l’Île d’Orléans.
Plus de 1500 participants y ont inauguré un mémorial sur cette terre d’accueil des ancêtres appartenant toujours
à un descendant. On doit remarquer
que le nom Allaire, à une époque, s’est
transformé pour certaines branches
familiales en Dallaire.
Les Drapeau… du Canada
par Norbert Drapeau (Boulogne)
“Antoine Drapeau et Charlotte Joly ont planté notre arbre généalogique au bord du Saint-Laurent. Antoine
fut baptisé le 11 janvier 1648 à l'église
Notre-Dame de Fontenay-le-Comte. La
trace de son arrivée en Nouvelle France
se retrouve sur les registres du recensement de février 1666, à Sainte-Famille de
l'Île d'Orléans. À cette époque, il fut engagé dans une ferme pour effectuer pendant 36 mois les travaux les plus durs.
En 1995, le groupe des Drapeau du
Canada est venu dévoiler une plaque
commémorative sur la maison natale
d'Antoine : événement qui a permis de
chaleureux échanges entre tous les Drapeau du Canada et de France. En 1997,
nous sommes allés sur les lieux où ont
vécu Antoine et Charlotte, dont les épousailles furent célébrées le 20 août 1669.
À cette occasion, une stèle a été installée
à l'entrée du manoir de Beaumont, à la
mémoire de ses ancêtres pionniers.
Ce fut pour nous aussi, le prétexte, lors
du dîner qui a suivi, de créer une chora-
le entre “cousins et cousines” pour interpréter la chanson, composée par Michel
Drapeau de Paris” :
Refrain
C'est un arbre, un arbre formidable
Robuste et indéracinable.
C'est un arbre qui est né
Aux confins de Charente et de Vendée
De cet arbre, un beau jour une graine
Partit vivre en terre lointaine
Un autre arbre, un géant
Prit racines au bord du Saint-Laurent
Ces deux arbres n'en font qu'un
Et ses branches poussent bien.
Immortel, magnifique
C'est un arbre magique
Notre arbre généalogique
Et le nom de Drapeau
Claque fort et très haut
Vrai symbole d'espérance,
D'amitié, de vaillance
Au Québec aussi bien qu'en France.
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Il y a quelques années, le directeur
du service des migrations à Paris se
nommait Alain Allaire, un Québécois
dont l’ancêtre était de Saint-Philbert.
La descendance Allaire-Dallaire compte de nombreuses personnalités politiques ou religieuses (plus de 400
religieux en 1962).
Le 31 mai 1993, la municipalité de
Saint-Philbert a reçu de façon très officielle le premier descendant Grignon
retrouvant la terre de son ancêtre. Philippe Grignon (72 ans), venant de Toronto a reçu la médaille du Département.
Ce fut pour lui l’occasion de faire don,
à la mairie de Saint-Philbert, d’une peinture de son fils, artiste, établi en Colombie Britannique (Île Gabriola). Combattant
dans la Royal Air Force pendant la guerre 1939-1945, Philippe Grignon a participé au bombardement de Saint-Nazaire
avec une émotion toute particulière car
croyant détruire le pays des ses ancêtres.
Confondant Saint-Philbert-de-GrandLieu et Saint-Philbert-de-Bouaine avec
Saint-Philbert-du-Pont-Charrault.
La descendance de Jacques Grignon
compte de nombreux écrivains et personnalités (militaires, politiques, médicales, administratives) qui ont marqué
l’histoire du Québec et qui sont cités
parfois dans notre Petit Larousse !
C’est vraiment formidable de pouvoir renouer avec le passé pour tisser
des liens parfois très étroits avec nos
“cousins d’Amérique” et principalement les Québécois qui ont encore
gardé le langage de nos grandsparents. Un descendant Allaire, habitant l’Alberta, par la cabine téléphonique de Saint-Philbert a réussi à
faire entendre les cloches de l’église
où leur ancêtre a été baptisé, à son
père âgé resté au Québec !
Nous trouvons très constructif d’entretenir des relations suivies avec tous
ceux qui sont venus découvrir notre
Vendée pays de leurs “racines”. Et par
expérience, je peux affirmer que les
Vendéens sont très chaleureusement
accueillis par un retentissant : "Bonjour les Cousins" !”
René Bely
(Saint-Philbert-du-Pont-Charrault)
février 2007
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