avec le temps a4

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N°7 Juillet/août 2012
Réfléchir, comprendre, analyser et pratiquer
Editorial
Il ne s’agit que d’une réflexion sur le
temps. Le temps qui passe, le temps qui
court. Réaliser un dossier sur cette question
est un défi. Un défi parce que le reproche le
plus fréquent qui est fait aux dossiers du
psychologue, au delà du fait qu’ils sont trop
longs, trop inaccessibles, trop compliqués,
c’est qu’on n’a pas le temps de les lire ! Voilà
pourquoi c’est un vrai challenge ! Pourtant,
prendre le temps de la réflexion n’est jamais
du temps perdu à mon sens, bien au
contraire, cela permet de penser, de prendre
des distances avec le travail et enfin, de
laisser son cerveau s’organiser et trouver ses
propres réponses aux questions posées par le
quotidien.
Sachez simplement qu’il n’est pas
nécessaire de tout comprendre d’une lecture
mais plutôt de se laisser porter, de lire et de
se fier à ses propres capacités inconscientes
à intégrer et à saisir l’important de ce qui est
lu. C’est cela, la magie de la lecture...
Le temps nous touche tous. Qu’il
vienne à passer trop vite, qu’il vienne à
manquer et nous sommes stressés ! Qu’il
vienne à s’arrêter et nous nous ennuyons !
Mais avant tout, dans l’institution, le temps
est coupable de tout. Nous sommes toujours
en train de lui courir après. Il ne sait que nous
manquer. Et puis, par moments, nous avons
l’impression d’en voler, d’en prendre trop, et
ce temps volé vient soulever notre
culpabilité.
Enfin, il y a le temps de toutes ces
personnes dont nous nous occupons et qui
ne semble pas être le même que le notre.
Curieux temps que celui du grand âge. Temps
à la fois trop long créant de l’impatience et
trop court créant de la léthargie.
R. S.
avec le temps...
« Parler du temps, c'est perdre son temps car on ne peut rien y faire. »
Michel Guyau
Une autre patience…
...nous paraît possible. Elle n’est pas maîtrise, mais
accueil du temps. Elle ne consiste pas à répondre à
la puissance du temps par la puissance de la volonté,
mais par une volonté de non-puissance. Elle n’est ni
cet orgueilleux déni de l’attente dont les stoïciens
firent l’éloge, ni impuissance, mais manière
paradoxale d’attendre, manière de prendre plaisir à
l’attente. N’est-ce pas en apprenant la patience que
le jeune homme devient un bon amant ? Être
patient, c’est savoir attendre,
c’est ne pas imposer son
chronos, c’est laisser advenir le
temps de l’autre, c’est se
laisser envahir par le temps de
l’autre, c’est donner du temps
au temps de l’autre. Et voilà
pourquoi elle fut si souvent
dite vertu féminine ! Pénélope
à sa manière, la femme
enceinte à la sienne savent que
patience et longueur du temps
font plus que force et que
rage… Elle n’est cependant pas
passivité, mais passion de la
durée
consentie,
accueil
aimant du présent, vertu qui
donne au temps sa chance : on
admet que le temps se vit au
pluriel, on se laisse altérer par
le temps. Et si l’attente
impatiente nous met à distance de nous-mêmes et
fait de tout délai une souffrance, la patience
attentive nous réconcilie avec nous-mêmes et fait
du
délai
une
source
de
plaisir,
et
d’approfondissement.
Et de même que la nostalgie ne va pas sans
plaisir, de même l’attente patiente ne va pas sans
plaisir : d’un côté, manière de goûter encore à
l’accompli, et de l’autre, manière de goûter déjà à
l’inaccompli.
Les philosophes sont-ils plus patients ? Ce
n’est certes pas sûr. Mais gageons que la patience
est peut-être une vertu pour notre temps… La
plupart des hommes occidentaux n’ont tout
simplement pas le temps, comme si, à force de
vouloir le maîtriser et se l’approprier, ils l’avaient
perdu : la patience est une manière de retrouver le
temps. Ce n’est pourtant pas à Proust que nous
emprunterons notre conclusion, mais à Rousseau.
Dans une admirable page de La nouvelle Héloïse,
notre auteur y montre comment la réalisation
immédiate de tous nos
désirs, la rencontre d’un
état de béatitude qui ne
laisserait plus rien à
attendre, nous rendraient
paradoxalement malheureux. Il y est en effet
question de Julie, laquelle,
constatant qu’elle devrait
être comblée (elle a autour
d’elle tout ce qu’elle aime,
et d’abord son amant),
s’étonne de ne pas l’être. Et
Julie de s’écrier :
“Tant qu’on désire, on peut
se passer d’être heureux : on
s’attend à le devenir. Si le
bonheur ne vient point
l’espérance se prolonge, et
le charme de l’illusion dure
autant que la passion qui le cause. Ainsi cet état se
suffit à lui-même, et l’inquiétude qu’il donne est une
sorte de jouissance qui supplée à la réalité. Malheur
à qui n’a plus rien à désirer ! Il perd pour ainsi dire
tout ce qu’il possède : on jouit moins de ce que l’on
possède mais de ce que l’on espère, et l’on n'est
heureux qu’avant d’être heureux.”
La patience est la plus belle manière d’espérer…
Eric Fiat, philosophe
« La vie humaine se compose de deux parties : on tue le temps, le temps vous tue. »
Rastignac
2
« Le temps est une lime qui travaille sans bruit. »
Et si on arrêtait enfin de courir après le
temps
A force de vouloir tout réussir — travail, vie sociale
ou culturelle, famille...—, les Français disent n'avoir
plus le temps de rien. C'est ce que révèle une étude
Ipsos dévoilée ce lundi (22.11.2010) dans Le Parisien
et Aujourd'hui en France.
Vie de couple, vie de famille, vie professionnelle, culturelle,
associative, sportive… Jamais nous n'avons eu autant de
vies à réussir en une seule. Les avancées technologiques
ont accéléré le temps, élargi le champ des possibles. Mais
ces vies s'imbriquent et s'additionnent parfois de façon
chaotique. Une étude Ipsos réalisée pour l'observatoire du
bien-être Bion-Merck, que nous dévoilons en exclusivité,
révèle que jamais nous n'avons eu autant l'impression de
manquer le temps, de nous éparpiller. Bref, de passer à
côté de notre vie. A tel point que 47% des personnes
interrogées disent avoir déjà frôlé le « burn out »,
l'épuisement nerveux. Nous mettons la barre trop haut
Plusieurs causes expliquent ce sentiment diffus d'échec
chez les Français. D'abord, le fait que nous sommes sans
doute trop exigeants, trop avides d'épanouissement et de
réussite, partout et tout le temps. La barre est placée trop
haut : il faut être « au top » au travail, vivre un amour
épanouissant, être socialement « populaire » en
collectionnant par exemple des centaines d'« amis » sur
Facebook… Or, en réalité, tout le monde a des coups de
fatigue, des jours « avec » et des jours « sans ». Et pas tant
de vrais amis que ça. La deuxième cause qui alimente ce
sentiment frustrant de courir vainement après le temps est,
à en croire l'étude Ipsos, la détérioration des conditions de
travail. Pour près d'un actif sur deux, révèle l'enquête, il est
de plus en plus difficile de s'épanouir au boulot. Pour le
sociologue Eric Donfu, «le temps qu'on a pour soi, le temps
de développement, est devenu aujourd'hui pour nous
crucial, une absolue nécessité pour développer notre
individualité». Nous sommes de plus en plus nombreux à
nous toquer de cuisine, à devenir marteau de bricolage, à
nous passionner pour la déco ou le jardinage. «On a le
sentiment que, en réalité, plus le temps libre augmente,
plus les contraintes horaires sont perçues comme des
oppressions temporelles insupportables.» Au point, pour
beaucoup, de vouloir changer de vie. Et vous, avez vous le
sentiment de manquer de temps pour faire ce que vous
aimez ?
Extrait d’un article du Parisien du 22.11.2010
Un peu de philosophie...
L’idée passionnante du texte qui suit réside dans
la perception de la mort comme la perte de ce qui
est derrière nous dans le temps et non dans ce qui
nous attend au bout du chemin. Cela donne à
penser...
Sénèque est un philosophe grec (-4 avt JC/65 ap.JC).
“Oui, c’est cela, mon cher Lucilius,
revendique la possession de toi-même. Ton temps,
jusqu’à présent, on te le prenait, on te le dérobait, il
t’échappait. Récupère-le, et prends-en soin. La vérité,
crois-moi, la voici : notre temps, on nous en arrache
une partie, on nous en détourne une autre, et le reste
nous coule entre les doigts. Pourtant, il est encore
plus blâmable de le perdre par négligence. Et, à y
bien regarder, l’essentiel de la vie s’écoule à mal
faire, une bonne partie à ne rien faire, toute la vie à
faire autre chose que ce qu’il faudrait faire.
Tu peux me citer un homme qui accorde du
prix au temps, qui reconnaisse la valeur d’une
journée, qui comprenne qu’il meurt chaque jour ? Car
notre erreur, c’est de voir la mort devant nous. Pour
l’essentiel, elle est déjà passée. La partie de notre vie
qui est derrière nous appartient à la mort. Fais donc,
mon cher Lucilius, ce que tu me dis dans ta lettre :
saisis-toi de chaque heure. Ainsi, tu seras moins
dépendant du lendemain puisque tu te seras emparé
du jour présent. On remet la vie à plus tard. Pendant
ce temps, elle s’en va.
Tout se trouve, Lucilius, hors de notre portée.
Seul le temps est à nous. Ce bien fuyant, glissant,
c’est la seule chose dont la nature nous ait rendu
possesseur : le premier venu nous l’enlève. Et la folie
des mortels est sans limite : les plus petits cadeaux,
ceux qui ne valent presque rien et qu’on peut
facilement remplacer, chacun en reconnaît la dette,
alors que personne ne s’estime en rien redevable du
temps qu’on lui accorde, c’est-à-dire de la seule
chose qu’il ne peut pas nous rendre, fût-il le plus
reconnaissant des hommes.”
Senèque, Apprendre à vivre, Lettres à Lucilius, Alea,
1990.
« Qui donne à temps donne deux fois. »
Yvan Krylov
3
De la valeur du temps à l’hôpital...
La valeur que chaque
individu accorde au temps est très
variable en fonction de quelques critères
fondamentaux. Dans l’hôpital, ces critères
concernent tout à la fois les résidents et les
agents. Je vous propose donc de parcourir
ensemble cette question.
L’être humain est certainement un
des rares animaux à pouvoir apprécier la
longueur du temps. Un chien qui reste seul à
la maison ne réalise pas vraiment le temps
qu’il passe à attendre. Est-ce qu’il attend
d’ailleurs ? Il ressent sans doute l’absence du
maître, et la douleur qu’il éprouve doit être
plus ou moins continue, mais il n’est pas
capable de mesurer la longueur du temps qu’il
patiente. Par contre, il peut certainement
évaluer le moment proche du retour du maître
par des sens que nous ne connaissons pas ou
que nous n’utilisons pas.
Or, nous savons pertinemment que
le temps ne se modifie pas d’un quart de
seconde. Il est toujours égal à lui-même. Rien
ne peut le rallonger ou le raccourcir. C’est
juste le contexte, nos activités, nos sentiments
qui lui donnent une valeur, rien d’autre.
Lorsqu’on attend, sans avoir une idée précise
de la durée de temps que l’on doit attendre,
on s’impatiente. Toutes les “hotlines” du
monde commercial savent cela. C’est pour
cette raison que, lorsqu’un répondeur
automatique vous met en attente, et ce
Le saviez-vous ?
Les chiens qui souffrent
d’angoisses de séparation font souvent de nombreux
degâts dans la maison lorsque le maître sort. Une
des façons de corriger cela est d’entrer et de sortir de
la maison comme si l’on devait ne sortir que
quelques minutes, afin de ne pas faire sentir une
différence à l’animal, qui lui n’est pas capable
d’évaluer le temps de la sortie du maître. Si l’on fait
beaucoup de calins de culpabilité avant de partir
lontemps, le chien va s’angoisser encore plus. Si on
lui fait sentir qu’une sortie courte est de même
valeur qu’une sortie longue alors il saura peut-être
être plus patient. Il n’a aucune notion de temps.
L’homme, par contre, est capable
d’évaluer le temps par un décompte des
heures, des minutes ou des secondes. C’est
parce que nous sommes capables de cette
évaluation que nous allons donner une qualité
au temps qui passe. Mais pour autant, nous ne
sommes pas des horloges vivantes. La
sensation du temps qui passe sera donc
dépendante de notre capacité à regarder un
instrument de mesure de celui-ci. La qualité de
ce temps sera quant à elle liée à notre
sentiment présent.
Le temps qui fait languir
Si nous devons attendre un certain temps et
qu’en plus à l’issue de cette attente se profile
un événement important ou attendu alors
nous trouverons le temps long. Ce temps sera
caractérisé par l’impatience. Nous aurons le
sentiment qu’il a du mal à passer.
Le temps qui fait stresser
Si nous sommes en retard à un rendez-vous
important alors nous trouverons que le temps
passe à une vitesse phénoménale. Le temps
deviendra alors très court, trop rapide et nous
nous mettons à courir pour tenter de le
rattraper.
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depuis quelques années, il vous annonce :
“votre temps d’attente sera d’environ X
minutes”. C’est le moyen clair et précis de
déjouer votre impatience. A l’époque où rien
n’était annoncé, nous avions tout simplement
l’impression d’attendre des heures !
Ceci est d’autant plus important
pour les personnes âgées qui, en plus, ont
quelquefois des difficultés à contenir leur
impatience. De fait, nous avons le réflexe,
souvent face à une impatience, à juste
demander de la patience et à dire que l’on va
venir, au mieux “bientôt” quelquefois “un peu
plus tard” ou enfin “dès que possible”. Pire
encore, il s’agit des fois d’une “petite minute”
qui peut durer jusqu’à dix ou quinze minutes
sans même que nous en soyons conscients,
car, bien souvent, à ce moment précis, pour
nous, le temps n’a absolument pas la même
valeur puisqu’il est très court et très rempli.
Résultat, lorsque nous revenons vers la
personne, elle est en colère. L’attente doit
donc être cadrée. Cela demande de
l’organisation. Mais il faut évaluer le temps
d’attente avec honnêteté (envers soi-même
avant tout, probablement) et donner une
durée aproximative à la personne âgée en
tâchant de s’y tenir pour établir du coup un
climat de confiance. Eventuellement, on peut
aussi donner une heure précise en montrant le
réveil du résident et en lui expliquant à quel
moment nous reviendrons. Ce type de
comportement, si l’on s’y tient, peut apaiser
les attentes et du même coup les tensions et
le
stress.
Il
ne
fonctionne
pas
systématiquement chez les personnes
souffrant de troubles spatio-temporels car, de
toute évidence, elles ne mesurent plus le
temps et ne se souviendront pas de votre
promesse. Mais pour les autres... pensons-y.
La valeur du temps d’attente est plus longue
si l’on ne sait pas précisément le temps que
l’on est supposé attendre.
Le temps dans l’organisation du
travail doit être aussi précis que possible. En
effet, lorqu’un agent entre dans une chambre
pour une toilette, il ne s’est pas forcément
donné un objectif de durée précis. Il a
vaguement l’idée qu’il est pressé, mais cette
sensation ne s’amplifie qu’au fur et à mesure
qu’il avance dans les différentes toilettes. Les
premières seront plus tranquilles mais
lorsque, petit à petit, il s’aperçoit que le temps
passe, il accélère au point que les dernières
seront souvent trop rapides et réalisées dans
la panique, générant en plus de l’angoisse chez
le résident et devenant du même coup plus
complexes à gérer. Une manière de lutter
contre cela serait de se donner un objectif
temps précis. Calculer le délai imparti pour
toutes les toilettes, le diviser par le nombre de
toilettes pour avoir un temps moyen. Puis
réaliser que ce temps moyen doit rester une
moyenne sachant que certaines toilettes
seront plus longues que d’autres. Néanmoins,
il faudra entrer dans une chambre en sachant
que l’on a quinze minutes, regarder sa montre,
avoir conscience que c’est possible dans cette
durée ou que ce sera un peu compliqué, et
vérifier de temps à autre que l’on se tient à sa
perspective sans stresser outre mesure. Car, si
l’on dépasse les limites, il faut garder
confiance, la prochaine toilette sera peut-être
plus rapide, le résident étant plus autonome,
par exemple. C’est comme cela que
fonctionnent les soins en humanitude. Chaque
résident a besoin d’un temps qui lui est propre
en fonction de ses capacités et de son
autonomie. Chaque rythme est différent. Il n’y
a pas d’obligation d’équité de durée des
toilettes entre les résidents. Par contre, il y a
un temps moyen à calculer pour s’en sortir.
Temps formel et temps informel
Il existe deux formes de temps dans
le monde institutionnel. Le temps formel est
ce temps qui est comptabilisé, qui permet
d’imaginer des quotas de soignants en
fonction du nombre de résidents, temps qui
crisconscrit les tâches de chacun, la durée des
réunions, des pauses, des interventions. En
bref, il s’agit bien du temps organisé pour
chacun d’entre-nous, planifié 24h/24 pour
l’ensemble
du
fonctionnement
de
l’établissement.
Et puis il existe un temps informel.
Ce temps est celui de ces innombrables
moments de discussions, réflexions, pauses
cigarette ou autres moments pris pour
souffler, prendre des distances, se relaxer un
peu, plaisanter, parler quelques minutes avec
un résident, un accompagnant ou un autre
professionnel. Ce temps-là n’est pas compté
ou prévu dans l’organisation officielle du
travail. Mais il existe malgré tout. Si l’hôpital
était une usine, avec un travail à la chaine, ce
temps informel serait largement réduit. Mais
l’hôpital est un lieu de soins et de relations
humaines. Or, ce temps informel n’est pas
valorisé, bien au contraire, il est en
permanence mésestimé en quantité comme
en qualité. Il s’agit d’un temps parasite qui
vient perturber la comptabilité rigide du
temps de travail. Ce temps est donc
aujourd’hui générateur de stress au travail, de
culpabilité avec toutes les conséquences que
cela peut entrainer.
Il est donc utile que chacun d’entrenous puisse se poser la question de ce temps
informel, de sa qualité, de sa nécessité. Me
fait-il perdre du temps ? Est-il productif ? Me
permet-il de me sentir mieux après ou me
rend-il plus mal à l’aise ? Car un temps
informel peut être extrêmement destructeur
s’il est pris avec la sensation d’être volé à
l’organisation du travail. Eliminer le temps
informel de la journée de travail est une
illusion. Le combattre est un guerre sans fin.
Mais en abuser est un fléau dont on ne mesure
pas les effets désatreux sur l’organisation. Il
faut donc en tenir compte, le valoriser, lui
donner un cadre aussi clair que possible et ce,
sans pour autant le formaliser complètement.
Il s’agit d’une sorte de temps intermédiaire,
transitionnel (oui, exactement comme le
doudou d’un jeune enfant). Il doit avoir une
valeur mais ne peut être formalisé, c’est-à-dire
comptabilisé.
Il reste donc à chacun de trouver les
limites de ce temps informel pour lui-même.
Sans le compter vraiment, on peut déjà
l’évaluer. Une fois que l’on a pris conscience
de la quantité de temps informel que l’on
utilise, il faut à la fois dse poser la question de
sa quantité autant que de sa qualité.
Le temps informel doit être assumé et vécu
dans la solidarité du groupe de soignants, car
c’est aussi une nécessité. Mais il doit être
loyal par rapport au temps formel de
l’organisation du travail.
Au même titre que le temps
d’attente que l’on demande à la patience des
résidents, l’objectif temps du soignant gagne à
être pensé, précisé, régulé et enfin énoncé.
Une fois posé, ce temps doit être respecté
avec une certaine rigueur. Et il ne s’agit pas là
de dicter une quelconque règle d’efficacité ou
de rentabilité dans le travail. Mais il s’agit
simplement de donner les pistes d’un mieuxêtre au travail. Ce bien-être dépend avant tout
de la capacité des uns et des autres à
s’organiser, à être rigoureux et surtout
honnête envers soi-même. On a trop souvent
tendance à confier les questions du bien-être
au travail à ses supérieurs hiérarchiques
quand une partie de la question nous revient
(même si la hiérarchie y joue aussi un rôle
important, bien sûr). Chaque agent est en
partie responsable de son organisation et de
son bien-être professionnel. L’institution est
responsable de bien des choses, mais gardons
toujours à l’esprit que nous devons nous aussi
lutter pour créer et préserver ce bien-être.
Cela passe entre autre par l’organisation. Dans
la panique, dans la plainte, rien n’aboutit, tout
s’amplifie. La protection psychique que
chacun d’entre nous met en place face aux
difficultés de nos tâches passe avant tout par
nous-mêmes. Elle doit être aussi soutenue par
l’institution et les hiérarchies, c’est une
condition importante pour la rendre efficace.
Penser les choses dans ce sens-là, en
matière de temps surtout, est un
bouleversement important des attitudes au
travail. Dans un monde où l’usager est
dépendant des professionnels, ces derniers se
sentent, de façon réactionnelle, dépendants
des hiérarchies et s’en remettent à elles pour
tout organiser. Comme la tâche est
insurmontable lorsqu’il s’agit de satisfaire tout
les agents en même temps, les difficultés de
l’encadrement reviennent via l’insatisfaction
des agents et en retour aux premiers
concernés par la dépendance, les personnes
âgées. Aux prises entre les demandes des
résidents et les demandes institutionnelles,
les soignants se sentent alors paralysés,
souvent dans l’attente que s’apaisent les
pressions de chaque côté. Or, elles ne
s’apaisent pas... Cela signifie que si nous ne
prenons pas en charge notre propre
organisation du temps de nos tâches, nous
allons forcément nous trouver dans un grand
malaise. Sans doute que tout va dépendre de
la capacité des uns et des autres à trouver les
meilleures organisations pour réaliser un
travail de qualité avec des moyens, au mieux,
constants. On peut imaginer que ce serait plus
facile si nous étions plus nombreux bien qu’il
n’y ait rien d’évident dans cette logique. Mais
la réalité est là.
Le temps n’est plus à la multiplication des
pains, mais bien à la récolte des arbres qui
sont plantés. Nous devons donc prendre en
main cette situation et envisager une gestion
du temps plus raisonnable et plus durable.
L’évolution de notre propre cahier
des charges est inexorable. A nous de nous
adapter, sans doute, et à l’institution de
reconnaitre et stimuler nos capacités
d’adaptation. Dans le cadre de cette
évolution, il me semble qu’il est fondamental
de ne pas opposer la qualité du travail avec la
quantité. Chacun est prêt à reconnaitre que la
qualité de notre travail ne saurait être
menacée par la quantité demandée, pour une
raison simple : nous travaillons avec des êtres
humains. Le taylorisme n’est pas de mise avec
le travail hospitalier, il faut donc trouver
d’autres pistes de rentabilité. Car c’est bien de
cela dont il s’agit, de rentabiliser notre travail
tout en conservant son humanité. Les limites
de cette rentabilité sont inscrites dans
l’intervention des Services Qualité des
établissements. Il est nécessaire, dans ces
limites-là, de penser notre organisation pour
préserver au mieux la bienveillance dans notre
tâche.
L’organisation du temps de travail
est fondatrice d’un rapport qualité/quantité
raisonnable. Pour cela nous devons sans doute
professionnaliser notre capacité relationnelle.
En effet, utiliser à bon escient nos approches
relationnelles, les rendre systématiques et
appropriées, éviter tout type d’emportement
ou d’absence de distances avec les pressions
liées aux attentes de nos usagers, trouver
enfin un équilibre stable qui nous permette à
tout moment d’appréhender les situations
pesantes, difficiles et complexes de notre
métier, sont des actes dépendants de notre
volonté d’assumer une position adéquate.
C’est bien cela qu’il faut mettre en oeuvre
pour survivre et éviter la souffrance au travail.
L’impatience, l’emportement, la
plainte, le manque, la culpabilité tout cela
nous empêche d’envisager l’organisation de
notre travail de façon sereine et du coup
d’être capable de mener à bien nos objectifs.
Nous pourrions aller jusqu’à dire que la prise
de distances professionnelles dans notre
travail génère inévitablement un gain de
temps précieux. En effet, si l’on est capable de
ne pas se sentir visé personnellement par
l’expression d’un reproche ou d’une
impatience de la part d’un résident, alors on
évite : le stress lié à la vexation, le temps que
l’on va passer à s’en remettre, le temps que
l’on va passer à le raconter et le commenter,
le temps que l’on va passer à devoir du coup
rétablir une relation de confiance avec le
résident, etc... Donc, plutôt que de se sentir
vexé ou attaqué par un reproche, nous devons
toujours penser avec distance à ce qui vient
d’être dit, essayer d’en comprendre le sens,
analyser ce qui a pu faire que la personne vient
de nous parler de la sorte, se demander si on
n’y est pas un peu pour quelque chose (cela
arrive aussi), trouver la réponse la plus
adéquate et la moins stressante pour tout le
monde, éviter de réagir en réprésailles et enfin
garder son calme.
C’est bien en régulant notre
réactivité à tous les événements de la journée
que nous parvenons à gagner beaucoup de
temps, car si la sensation de manquer de
temps est un symptôme du stress au travail, le
stress au travail provoque aussi une perte de
temps importante. C’est là que le serpent se
mord la queue. Ainsi, retrouver le cercle
virtueux de notre engagement professionnel
passera inévitablement par une attitude
professionnelle, non pas distanciée ou froide,
mais empathique, bienveillante et solide du
point de vue de notre capacité à ne pas se
sentir personnellement atteint par les
agressions de l’environnement.
R. Salicru
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« Le temps de la réflexion est une économie de temps. »
Publius Syrus, poète latin.
L’article suivant est extrait d’un ouvrage s’intéressant au stress au travail. Parmi la liste des conséquences
mentales du stress, on trouve aussi la sensation de manquer de temps. Il n’est pas étonnant de retrouver
ce type de manifestation dans un milieu professionnel extrêmement stressant comme celui de la prise en
charge de personnes souffrant de troubles cognitifs graves, par exemple.
Voici les principales conséquences du stress sur le plan mental et émotionnel :
L’irritabilité. La mauvaise humeur, l’irascibilité et l’impression de “sauter une coche*” à la moindre
provocation peuvent être la conséquence d’un cas de stress chronique.
L’épuisement émotionnel. La personne se sent épuisée, dénuée de l’énergie vitale nécessaire aux activités
quotidiennes, en particulier celles qui sont extérieures au travail, notamment en lien avec la famille (partenaire,
enfants) et les amis.
La volonté d’un changement de vie radical. L’individu stressé tend à avoir des idées polarisées et inflexibles,
ce qui limite son aptitude à voir le côté relatif des choses. Il a ainsi tendance à faire des efforts excessifs pour s’adapter
à son travail ou à sa vie en général. Le fait de se sentir stressé le pousse à désirer un changement de vie radical,
notamment face à son partenaire et à sa profession. Des idées stressantes telles que “ça ne peut plus continuer” ou
“il faut que je me sépare” surgissent couramment dans ce genre de situation.
La procrastination chronique. L’individu stressé a tendance à remettre à plus tard des actions et des tâches
qu’il considère comme importantes. Il se dira par exemple : “un de ces jours, je vais arrêter de fumer” ; “il faut que je
passe plus de temps avec mes enfants.” Toutefois, le moment opportun risque fort de ne jamais se matérialiser.
L’impression de manquer de temps. Les gens qui souffrent de stress ont tendance à penser qu’ils vont
manquer de temps pour s’acquitter des tâches qui les attendent et atteindre leurs objectifs. Cette impression est une
source de malaise et de déception de soi. Le fait d’avoir davantage à l’esprit ce qu’ils n’ont pas réussi à faire que ce
qu’ils ont accompli risque de leur laisser une appréciation médiocre de leurs actions.
Le cynisme et la méfiance. L’individu stressé a tendance à être pessimiste, frustré et soupçonneux envers les
autres. Ce type de comportement est généralement une conséquence d’une agression réprimée intérieurement.
Texte extrait de : Stress, Estime de Soi, Santé et Travail, Shimon Dolan, André Arsenault, Presse de l’Université du Québec.
* Perdre son sang-froid en faisant une crise de colère ou d’indignation (expression du Québec).
Temps de l’âge, temps de la jeunesse...
Le rythme des personnes âgées n’est pas le même
que celui des plus jeunes, c’est une évidence qu’il faut
apprendre à admettre. Bousculer, houspiller, c’est à coup
sûr aggraver les déficits intellectuels et fabriquer des
déments supplémentaires. On doit le dire tout net, il ne
peut pas y avoir de soins de qualité pour les personnes
âgées sans qu’on y mette le prix. Prendre son temps coûte
cher. Il faudra choisir et vite. Il faudra savoir dépenser du
temps pour ceux qui n’ont plus beaucoup de temps à vivre
et qui l’économisent. Ils sont lents, ils ont peur d’aller vite,
d’aller de l’avant. Ils ralentissent leurs gestes, ils se
réfugient dans leur passé, leurs souvenirs ; les jeunes sont
pressés, ils courent dans l’autre sens, vers l’avenir.
La rencontre est difficile entre les générations
montantes et les anciens. Plus les malades sont lents, plus
les soignants s’activent et tendent à agir à leur place.
Démunis de toute initiative personnelle, les déments se
replient à la mesure de la hâte de ceux qui les entourent.
Ces derniers se hâtent d’autant plus qu’ils ne trouvent
rien à dire à ces vieillards sans avenir. Pas d’échange, le
temps est interminable, vivement l’heure de la relève... La
désorientation temporelle des déments ne peut que
s’aggraver du choc de ces rythmes opposés. Les uns, les
plus jeunes, veulent voir passer le temps le plus vite
possible, les autres, les plus âgés, voudraient le voir
s’arrêter.
Extrait de l’ouvrage de Jean Maisondieux, “Le crépuscule
de la raison”. 2001
« Quand Dieu créa le temps, il en créa... beaucoup. »
Proverbe irlandais
6
LE TEMPS QUI RESTE
Combien de temps...
Combien de temps encore
Des années, des jours, des heures combien?
Quand j'y pense mon coeur bat si fort...
Mon pays c'est la vie.
Combien de temps...
Combien
Je l'aime tant, le temps qui reste...
Je veux rire, courir, parler, pleurer,
Et voir, et croire
Et boire, danser,
Crier, manger, nager, bondir, désobéir
J'ai pas fini, j'ai pas fini
Voler, chanter, partir, repartir
Souffrir, aimer
Je l'aime tant le temps qui reste
Je ne sais plus où je suis né, ni quand
Je sais qu'il n'y a pas longtemps...
Et que mon pays c'est la vie
Je sais aussi que mon père disait:
Le temps c'est comme ton pain...
Gardes en pour demain...
J'ai encore du pain,
J'ai encore du temps, mais combien?
Je veux jouer encore...
Je veux rire des montagnes de rires,
Je veux pleurer des torrents de larmes,
Je veux boire des bateaux entiers de vin
De Bordeaux et d'Italie
Et danser, crier, voler, nager dans tous les océans
J'ai pas fini, j'ai pas fini
Je veux chanter
Je veux parler jusqu'à la fin de ma voix...
Je l'aime tant le temps qui reste...
Combien de temps...
Combien de temps encore?
Des années, des jours, des heures, combien?
Je veux des histoires, des voyages...
J'ai tant de gens à voir, tant d'images..
Des enfants, des femmes, des grands hommes,
Des petits hommes, des marrants, des tristes,
Des très intelligents et des cons,
C'est drôle, les cons, ça repose,
C'est comme le feuillage au milieu des roses...
Combien de temps...
Combien de temps encore?
Des années, des jours, des heures, combien?
Je m'en fous mon amour...
Quand l'orchestre s'arrêtera, je danserai encore...
Quand les avions ne voleront plus, je volerai tout seul...
Quand le temps s'arrêtera..
Je t'aimerai encore
Je ne sais pas où, je ne sais pas comment...
Mais je t'aimerai encore...
D'accord?
Serge Reggiani (Paroles: Jean-Loup Dabadie)
L’âgé et le temps
La réalisation pour l’individu que la vie se finit et que le
temps de survie est plus court que le temps vécu a des
conséquences très personnelles. Ceux qui sont très alertes
et ont des projets inachevés peuvent être stimulés pour agir
et même devenir hyperactifs. La prise de conscience de la
réduction du temps à vivre peut, au contraire, constituer
une barrière à toute activité. Rendre l’individu capable de
substituer des projets à court terme à des projets à long
terme est une des missions à poursuivre, en particulier dans
l’âge avancé. L’influence de cette prise de conscience de
l’activité a été peu étudiée. Il en est de même du fait de
savoir si l’estimation subjective du temps passé augmente
avec l’âge. Le temps accompli, qui s’enrichit d’expériences
variées, passe plus vite et paraît rétrospectivement plus
long. Les âgés donnent habituellement plus de valeur au
temps,
soit
parce
qu’ils
perçoivent qu’il en reste moins à
vivre, soit parce qu’ils anticipent
un événement inattendu, soit
parce qu’ils sont heureux.
L’estimation du passage du
temps ne semble pas lié à l’âge
en lui-même (R.G.Kuhlen, 1968).
Il est corréllé avec la relativité de
la vitesse de son écoulement, le
temps perdu, le sentiment d’être
pressé par le temps, la
valorisation du temps passé et le
haut degré de bonheur. . La
sensation de rapidité de passage du temps est liée au degré
de réalisation de projets et à la perception de son effet
positif. La qualité des projets, l’impression d’être heureux et
l’enthousiasme semblent inversement proportionnels à
l’âge. Quant au sentiment d’être poussé par le temps, il
pourrait être dû au rappel de la finitude prochaine.
La perception par l’âgé du temps perdu devient d’autant
plus aiguë que l’âge progresse (V.W. Marshall, 1975). Elle est
probablement fonction de celle de sa santé et de ses
habitudes et besoins antérieurs. L’âgé estime que la valeur
du temps diminue avec l’approche de la mort ou de l’âge de
décès de ses parents. La finitude est plus appréciée sur la
manière dont les individus vivent leur santé que sur leur âge
proprement dit. L’attitude vis-à-vis de l’avenir est meilleure
chez les hommes que chez les femmes. Elle retentit sur la
satisfaction de vivre, le niveau d’activité, l’humeur et
l’affectivité. Chez les plus jeunes, la bonne santé et le niveau
socio-économique sont les éléments de prédiction les plus
convenables. Les jeunes adultes voient le présent meilleur
que le passé et le futur meilleur que le passé (R.W. Bortner,
1972). Aux environs de la soixantaine, passé, présent et
futur apparaissent d’égale valeur. A 70 ans, le passé est
préféré au présent et le présent au futur. La multiplicité des
expériences et la pression du temps ont plus d’impact chez
l’homme que chez la femme. Ces différences dépendent
probablement plus des niveaux d’éducation, intellectuel et
socio-économique.
J. Richard, E. Biand-Pikl, “Conation et vieillissement”, in
Psychogérontologie, Masson.2004
7
Les dossiers du psychologue,
pourquoi ?
LE THEME DU PROCHAIN DOSSIER
Peut-être parce que je n’ai pas le temps, moi
non plus. Pas le temps de me consacrer
suffisamment à vous, à vos demandes, à vos
nécessités, à vos aspirations personnelles et
professionnelles, à vos fragilités, à vos ras-lebol, à vos colères, à vos espoirs, à vos idéaux.
“L’idéal thérapeutique est quelque chose d’exigeant
et la pratique gériatrique va en permanence prendre
en défaut l’image du soignant idéal pour renvoyer à
une image de mauvais soignant.
Une journée de travail en gériatrie est caractérisée par
le fait d’être soumis, à une multiplication des
informations à enregistrer, à une multiplication des
demandes, toutes plus pressantes les unes que les
autres, émanant d’êtres qui se sentent seuls au
monde.
Travailler en gériatrie implique de ne pas céder à la
culpabilité, liée à l’écart qu’il y a entre l’idéal soignant
et sa pratique, avec le piège qui consiste à faire
beaucoup pour les patients sans jamais rien faire avec
eux.” Dr Louis Ploton, “la personne âgée”
L’intervention du psychologue est très
diversifiée. Elle ne se réduit pas à de simples
consultations de patients, ou à des groupes de
paroles pour les soignants. Ce serait oublier
toute la partie institutionnelle qui n’est pas la
moindre. La clinique institutionnelle implique
une remise en question permanente du
fonctionnement même de l’établissement et
ce, tous types de services confondus. Il n’est
pas question de bousculer quoi que ce soit du
fonctionnement mais d’interroger continuellement les routines, les habitudes, les
contraintes dès lors qu’elles ont des
conséquences sur le bien-être des usagers de
l’institution.
La position n’est pas simple, souvent en franctireur face aux ancrages institutionnels qui ne
se laissent en général pas déranger sans réagir.
Et avec cela, ne pas oublier une goutte de
neutralité et un verre plein de bienveillance !
Alors, les dossiers du psychologue, c’est
simplement le moyen de donner à lire à tous ce
qui inspire cette clinique et ce questionnement
permanent. C’est partager avec ceux qui
veulent se donner le temps de lire et de
comprendre. Partager pour mieux saisir notre
rôle, notre mission et nos idéaux
professionnels communs.
être soignant en gériatrie, un défi ?
Oui, on demande de plus en plus aux soignants,
l’exigence de qualité des soins implique en
permanence un investissement psychique important
pour chacun d’entre-nous. Mais le sentiment de ne
pas y parvenir, le stress provoqué par les urgences des
demandes et l’effroi permanent de la mort et de la
maladie, transforme peu à peu le travail en une
routine peu gratifiante, épuisante et ingrate. Il nous
faut nous blinder alors que simultanément ce blindage
nous fait peur : jusqu’à quel point d’indifférence à la
souffrance sommes-nous capables d’aller ? Et pour
combien de temps ? Enfin, quel prix psychique
devons-nous payer pour maintenir ce blindage sans
qu’il se fissure ?
A paraître
en septembre.
R. S.
« Le temps des hommes est de l'éternité pliée. »
Jean Cocteau
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