Maladies respiratoires : La planète a le souffle

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Maladies respiratoires : La planète a le souffle
Maladies respiratoires
La planète a le souffle court
La charge mondiale de morbidité des maladies respiratoires
occupe la première place de l’ensemble des pathologies. La planète
manque de souffle, l’OMS se mobilise.
M
obilisation planétaire pour les maladies respiratoires chroniques. Les maladies respiratoires
chroniques, l’asthme, les Broncho pneumopathies chroniques obstructives (BPCO), les
allergies respiratoires, les pneumopathies professionnelles
et l’hypertension artérielle pulmonaire atteignent plus d’un
milliard de personnes dans le monde. La tuberculose, quant
à elle, est un fléau dans les pays les plus pauvres qui tue
deux millions de personnes chaque année. L’OMS estime à
quatre millions le nombre de décès liés aux affections respiratoires chroniques en 2005. Si rien n’est fait pour prendre
à bras le corps ce fléau de toute urgence, le nombre de décès
lié à ces maladies augmentera de 30 % dans les 10 prochaines années à venir.
Face à cette épidémie mondiale de maladies respiratoires,
l’OMS se mobilise et crée, en 2006, l’Alliance mondiale
contre les affections respiratoires chroniques (GARD- Global Alliance against chronic Respiratory Diseases), qui réunit 70 organisations nationales et internationales et coordonne leurs actions. Le slogan de l’Alliance, « Un monde
où chacun peut respirer librement », résume clairement les
objectifs. L’Alliance a ainsi pour objectif principal la mise
en œuvre d’une approche globale de lutte contre les maladies respiratoires chroniques afin de mieux les comprendre,
les prévenir et les traiter. Elle prône une approche intégrée
qui tire parti des synergies entre maladies respiratoires
chroniques et les autres maladies chroniques.
Les plus pauvres respirent le plus mal
Contrairement à une idée reçue, ce sont les pays pauvres
qui paient le plus lourd tribut aux maladies respiratoires
Des chiffres à couper le souffle
DR
LA FUMÉE TUERA
10 MILLIONS
DE PERSONNES
EN 2030.
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PHARMACEUTIQUES - FÉVRIER 2008
L’ensemble des maladies respiratoires chroniques concerne plus
d’un milliard de personnes dans le monde. Chaque année quatre
millions en meurent.
Sur la planète, on dénombre ainsi :
• 300 millions d’asthmatiques (260 000 en meurent)
• 210 millions de BPCO (3 millions de morts)
• 400 millions de rhinite
• 100 millions d’apnéiques du sommeil.
1,3 milliard de personnes sont exposées au tabac, cinq millions en
meurent chaque année. La fumée tuera 10 millions de personnes
en 2030.
Le tabac est la deuxième cause de mortalité parmi les maladies
chroniques, après l’hypertension et avant le cholestérol (source
OMS).
Trois milliards de personnes sont exposées à la pollution atmosphérique des villes et chacun est exposé en permanence à des
allergènes.
Les BPCO deviendront la 3ème cause de décès dans le monde en
2030.
Respiratoire Dossier
chroniques, puisque 87 % de tous les décès imputables à
ces maladies surviennent dans les pays à faible revenu, les
femmes et les enfants étant les premiers touchés. La cigarette est le premier responsable des maladies respiratoires
chroniques dans les pays à haut revenu, alors que dans les
pays à bas revenu, c’est la combustion de la biomasse à l’intérieur des habitations qui est
responsable de plus de la moitié des décès.
Les interventions du GARD tiennent
La prise
compte du niveau économique des différents pays en distinguant les pays à
de conscience
niveau économique faible, ceux à nimondiale
veau économique intermédiaire et ceux
à
niveau élevé.
augmente
Dans les pays à niveau de vie intermédiaire et à niveau de vie faible, la majorité des patients ne reçoit ni diagnostic, ni
traitement. Le premier objectif du GARD est
d’augmenter le nombre de diagnostics et le second est
de rendre accessibles les traitements aux populations dans
une approche syndromique adaptée aux nécessités locales
et à la politique de santé des différents états. L’Alliance a
décidé de consacrer prioritairement ses efforts aux besoins
de ces pays.
Dans les pays les plus riches des progrès restent à faire.
Les maladies respiratoires sont sous-diagnostiquées et sous-
traitées. Dans ces pays, le GARD a pour objectifs d’améliorer les diagnostics, les traitements et d’éduquer les patients,
dans une approche spécifique de chaque pathologie. La
prise de conscience de l’importance mondiale des maladies
respiratoires chroniques sur le plan de la santé publique
augmente rapidement. 33 pays et une vingtaine de gouvernements se sont joints aux actions du GARD (voir encadré) depuis sa création, précise son président, le Pr. Jean
Bousquet (CHU Montpellier).
Une tueuse ignorée
En France, la BPCO (broncho-pneumopathie chronique
obstructive), qui tue chaque année 17 000 personnes, touche 5 à 10 % de la population (600 000 ont une BPCO
sévère). Pourtant, il s’agit d’une maladie largement ignorée.
Le tabac en est la cause principale, mais durant les campagnes antitabac, les medias, comme notre ministre de la
Santé, parlent davantage du cancer du poumon que de
cette maladie. Les médecins, quant à eux, n’en font pas le
diagnostic sept fois sur dix. Pourtant, cette maladie respiratoire sera la 3ème cause de mortalité dans le monde en 2020
(voir encadré page précédente). n
Emmanuel Cuzin
Le GARD : le souffle en actions
Rapide voyage respiratoire à travers
le monde et les actions entreprises.
• Chine : la lutte contre les maladies respiratoires chroniques a été intégrée au plan
2008-2022 consacré aux maladies chroniques. Le souffle en Chine est un problème
majeur. 360 millions de chinois fument,
mais les programmes de lutte antitabac
sont difficiles à mettre en place en raison
d’intérêts divergents entre les contraintes
de santé et les contraintes économiques.
L’enfumage des habitations est également
un énorme problème : on estime qu’il sera
responsable de la mort de 10 millions de
personnes en 2030 dans le monde, c’està-dire autant que le tabac. Aujourd’hui,
en Chine, le nombre de femmes non fumeuses atteintes de BPCO en milieu rural est égal à celui des hommes ayant une
BPCO qui vivent en ville, où la pollution
de l’air s’ajoute à celle du tabac. L’enfumage
est aujourd’hui reconnu par les autorités
sous l’impulsion du GARD. Des solutions
simples sont possibles. Une étude scientifique a en effet démontré que l’installation
de cheminées dans les habitations réduit
considérablement la morbidité respiratoire.
• La Corée du Nord a décidé de consacrer trois
millions de dollars par an pendant trois ans
à des programmes d’éducation sur l’asthme.
• La Géorgie s’est rendue compte de la
gravité de la situation respiratoire du
pays après les résultats d’une enquête qui
montre que 30 % de la population est atteints de problèmes respiratoires. Le gouvernement a alors décidé la mise en œuvre d’un plan GARD pour y faire face.
• Le Canada crée un système standardisé de recueil des données respiratoires chroniques destiné à être utilisé par les pays qui le souhaitent.
• Brésil, province de Bahia : une asso-
ciation de bêta2-mimétiques et de corticoïdes inhalés est mise à disposition gratuitement des asthmatiques sévères dans
un hôpital. Celui-ci forme et sensibilise à
l’asthme les autres centres de soins de la
province. Aujourd’hui, après cette campagne le nombre d’hospitalisations pour
asthme a baissé de 80 % dans la province.
• Paraguay : le gouvernement décide
d’ajouter les corticoïdes inhalés à la liste
des médicaments essentiels. Ces médicaments indispensables pour traiter l’asthme sont maintenant accessibles à tous.
• En Finlande un programme, sous l’égide de GARD, destiné à réduire à zéro la
mortalité par asthme va bientôt débuter.
• En Afrique du sud, un programme
est spécifiquement destiné aux personnes ayant des problèmes respiratoires et infectées par le VIH (plus de
12 % de la population est infectées)
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