Vaut mieux prévenir que puni - Réflexions de Raymond Gravel

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Vaut mieux prévenir que puni - Réflexions de Raymond Gravel
Chronique # 1 : Vaut mieux prévenir que punir.
Pour définir le « vivre ensemble dans une société démocratique », les mots répression, punition,
condamnation, exclusion, ne devraient pas être utilisés; ils ne protègent aucunement la société, ne
favorisent pas la dissuasion de la criminalité et n’aident surtout pas à la réinsertion des responsables des
actes de violence qui font malheureusement trop de victimes innocentes. On doit parler plutôt de
prévention, d’éducation, de responsabilisation, d’accompagnement et même de pardon.
Que le gouvernement conservateur propose un durcissement de la loi sur les jeunes contrevenants, ça
prouve jusqu’à quel point ces tenants de la loi et de l’ordre sont loin des préoccupations québécoises et
se foutent éperdument des politiques de prévention, de réhabilitation et de réinsertion adoptées par les
gouvernements du Québec. Il y a contradiction entre répression et réhabilitation, punition et réinsertion
sociale. Comme la violence engendre la violence, si la réponse aux actes criminels n’est que vengeance
selon la loi du Talion, elle ne fera que multiplier les actes violents et amplifier la criminalité.
C’est évident que ce débat est émotif et irrationnel, surtout lorsqu’il s’agit des proches des victimes qui
ont perdu un être cher. Rappelons-nous ce jeune qui a été décapité froidement dans un autobus au
Manitoba. Au lendemain de la tragédie, on était prêt à blinder les autocars et à mettre des policiers
armés dans chaque véhicule de transport public. Dans ces moments d’indignation, on imagine, à tort,
qu’en durcissant la loi, on peut endiguer la criminalité. Mais il n’en est rien. Et si on se rend, sans plus,
aux arguments tout à fait légitimes, des témoins et des victimes de tels drames, on ne fait que répondre
à une sorte d’hystérie collective qui rejoint un populisme sécuritaire, selon Me René Binet, du droit de la
jeunesse. Un gouvernement responsable ne peut justifier des modifications à la loi, uniquement à partir
des revendications des victimes; il lui faut l’expertise des personnes qui travaillent à la prévention et à la
réhabilitation des jeunes délinquants.
Au Québec où la justice mise davantage sur la prévention plutôt que sur la punition, le taux de violence
est le plus bas de toute l’Amérique du Nord. Selon Richard Nadeau, professeur en Sciences politiques à
l’Université de Montréal, au Canada, sauf au Québec, l’appui en faveur d’un durcissement de la loi sur les
jeunes contrevenants est majoritaire. Le gouvernement conservateur ne peut que faire des gains
politiques en proposant la punition à la place de la prévention. Emprisonner un jeune délinquant, c’est
l’envoyer nécessairement à la meilleure école du crime qui soit et c’est réduire d’autant plus ses chances
d’intégration sociale.
Personnellement, je n’ose pas croire que nous en sommes rendus là. Pour un parti qui se targue de ses
valeurs religieuses chrétiennes, il me semble qu’il y a là contradiction entre les valeurs évangéliques de
pardon, de réconciliation et de non jugement et la condamnation sans appel d’un jeune de 14 ou 16 ans
qui aurait besoin beaucoup plus d’être responsabilisé que condamné. Ça me rappelle cette phrase de
saint Alphonse de Liguori qui disait : « Si on devait se tromper sur Dieu, vaudrait mieux le faire en
exagérant sa bonté qu’en durcissant sa justice ».
Raymond Gravel ptre

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