Les automates donnent un nouveau souffle

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Les automates donnent un nouveau souffle
Reportage
Vu
chez
Pininfarina
Solutions
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AUT O M A T I S M E S
Les automates donnent
un nouveau souffle
H
Le constructeur italien Pininfarina a choisi les solutions de
GE Intelligent Platforms pour automatiser la soufflerie de son
centre de recherche en acoustique et aérodynamique.
Depuis les automates, qui ont la lourde tâche de réguler des
flux d’air allant jusqu’à 250 km/h, jusqu’au logiciel de pilotage, chargé de minimiser les temps d’attente entre deux
essais, toute l’application est axée sur la performance. Visite
guidée des dernières solutions mises en œuvre chez
Pininfarina pour modéliser avec toujours plus de précision
le comportement des véhicules.
Q
uel est le point commun entre
Peugeot, Ferrari, Fiat, Lancia ou
­encore Alfa Romeo ? Tous ces
constructeurs automobiles font
régulièrement appel à Pininfarina pour le
­design de leurs modèles. Si les carrosseries
conçues par la société italienne rencontrent
systématiquement un
grand succès, c’est
L’essentiel
bien sûr grâce au ­talent
des dessinateurs, mais
PPour la modernisation
c’est aussi parce ce que
de son centre de recherche
Pininfarina dispose du
en aérodynamique,
centre de recherche
Pininfarina a choisi
aérodynamique le plus
la gamme de solutions
d’automatisation de GE
avancé au monde. Il a
Intelligent Platforms.
en effet été doté ces
dernières années de
P Parmi les travaux réalisés :
l’augmentation de la vitesse
nouvelles fonctions
du flux d’air, la création d’un
relativement innogénérateur de turbulences
vantes.
et la modernisation du tapis
Les travaux d’améliopour la mesure de l’“effet
ration ont commencé
de sol”.
par la création d’un
P Après cinq ans de travaux,
générateur de turbule centre d’essais
lences (appelé TGS,
en soufflerie a gagné
p o u r Tu r b u l e n c e
en efficacité
Generation
System). La
et les constructeurs
soufflerie rendait déjà
automobiles peuvent aller
possible possible
plus loin dans la conception
l’étude de l’écoulede leurs modèles.
ment de l’air sur les
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carrosseries, mais
ces tests réalisés
avec un vent direct
(on parle de flux
“laminaire”) ne Dans son centre de recherche aérodynamique et aéroacoustique, Pininfarina réalise des essais en soufflerie
permettaient pas de pour des voitures, mais également des avions et des objets divers. Construite en 1972, la soufflerie a subi
de nombreuses transformations pour satisfaire les exigences des constructeurs. Dernière innovation en date :
simuler des condi- un tapis roulant breveté pour des analyses aérodynamiques beaucoup plus poussées.
tions de roulage
très réalistes. Il fallait pouvoir simuler le passage des autres donc dimensionné la partie automatismes
véhicules, mais aussi les arbres et les bâti- de manière à déplacer ces ailes gigantesques
ments qui bordent la route et qui, à haute avec rapidité et précision. Son choix s’est
vitesse, peuvent conduire à des réactions non porté sur un automate programmable 90-30
prévues de la caisse du véhicule . Pour conce- de GE Intelligent Platforms, assorti à des variavoir ce générateur de turbulences, Pininfarina teurs de vitesse VAT2000, les variateurs dits
fait appel à Sacimex, un intégrateur turinois “hautes performances” du constructeur
spécialisé dans la conception et la réalisation américain. « Bien entendu, nous avons été mis en
de machines et appareils pour souffleries. Ce concurrence avec d’autres fabricants lors du choix
dernier met au point un système composé du fournisseur d’automates, déclare Alberto
de cinq couples d’ailes mobiles qui s’ouvrent Griffini, responsable produits Automatismes
ou se ferment indépendamment les uns des chez GE Intelligent Platforms. Mais la technicité
autres afin de créer diverses perturbations des produits ainsi que notre forte présence en Italie
dans le flux d’air principal. Evidemment, ont fait pencher la balance en notre faveur. »
pour que les ingénieurs de Pininfarina puissent continuer à étudier leurs véhicules sous Réguler des flux d’air à 250 km/h
un écoulement d’air laminaire, les ailes peu- Les simulations ont gagné en précision et en
vent s’escamoter dans le sol. Et afin que le réalisme grâce auTGS, mais les constructeurs
temps de déploiement des ailes n’ait pas trop en demandent toujours plus. Principalement
d’impact sur le nombre de tests réalisés ceux qui participent aux courses automochaque jour dans la soufflerie, le cahier des biles. Pour eux, les études en soufflerie
charges imposait que le TGS soit opération- ­permettent de gagner quelques précieux
nel en moins de deux minutes. Sacimex a ­kilomètres/heure. Mais la vitesse d’écouleMESURES 834- avril 2011 - www.mesures.com
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Ce système révolutionnaire à
l’époque comportait deux
dispositifs distincts : des rouleaux, qui font tourner les
roues de la voiture à la même
vitesse que le flux d’air
­généré par les ventilateurs, et
un tapis roulant d’un mètre
de large installé sous le véhicule. Ce dernier, en simulant
le « défilement » de la route
sous la voiture, aide en
quelque sorte l’air à s’engouffrer sous la caisse pour
simuler des conditions de
roulage plus réalistes.
Mais la course à la perforDans cette armoire électrique, on aperçoit deux des huit automates 90-30 de GE Intelligent Platforms. En dessous du simulateur d’effet de sol, on peut
mance ne s’arrête jamais, et
Il s’agit d’automates modulaires auxquels sont accolés les variateurs de vitesse, les cartes de contrôle voir (en jaune) les servomoteurs brushless Beta IS
les constructeurs ont besoin
d’axes et certaines cartes d’entrées/sorties.
qui entraînent les tapis roulants.
de dimensionner les éléments aérodynamiques de
ment de l’air dans le tunnel était limitée à fidèlement au comportement réel à haute leurs véhicules avec toujours plus de préci200 km/h. Pour gagner en performances, le vitesse. En revanche, la simulation est moins sion. C’est pourquoi le designer italien a
designer italien a donc décidé de la faire pro- réaliste pour tout ce qui se passe en dessous récemment entrepris une nouvelle modergresser jusqu’à 250 km/h. Une véritable de la voiture.Tout d’abord car en conditions nisation de son GESS. Le tapis roulant est
prouesse technique sachant que le flux d’air réelles, la rotation des roues entraîne à elle remplacé par un nouveau modèle plus long
présente une section de pas moins de 11 m2. seule des turbulences non négligeables. (6,70 m), qui peut désormais déboucher à
Pour ce faire, un système spécifique ­composé Ensuite car le tunnel ne permet pas de ­recréer l’arrière de la voiture. De plus, pour que l’efd’un ventilateur principal et de 13 hélices l’“effet de sol”. Ce phénomène, reposant sur fet soit uniforme sur toute la partie avant du
secondaires a été conçu. Le choix de la partie le même principe physique que la “por- véhicule, deux tapis secondaires d’1,5 m de
matérielle se porte à nouveau sur un auto- tance” des ailes d’avions, est dû aux turbu- long sont installés de part et d’autre du tapis
mate 90-30 de GE Intelligent Platforms, et l’ap- lences générées à haute vitesse par le passage principal, le tout formant une structure en
plication de régulation est réalisée avec le de l’air sous la caisse. En fonction de la “T”. A l’avant de la voiture, les trois tapis
logiciel Proficy. Alberto Griffini (GE Intelligent conception du châssis et des éléments de placés côte à côte forment une bande de
Platforms) se souvient que « les vitesses de rota- carrosserie, il aura pour conséquence de 2,50 m de large qui défile à la même vitesse
tion de tous les ventilateurs ont dû être synchronisées “plaquer” le véhicule au sol ou au contraire que l’air de la soufflerie (si l’ancien système
pour arriver à générer un flux d’air uniforme. Mais de le faire décoller. Cet effet de sol est consi- GESS ne pouvait pas dépasser 200 km/h, le
c’est la partie puissance qui donna le plus de fil à déré avec une très grande attention par les nouveau système à trois tapis peut aller
retordre aux ingénieurs : les ventilateurs secondaires constructeurs qui conçoivent des voitures de jusqu’à 250 km/h pour s’adapter à la noutournent à une vitesse telle qu’il a fallu améliorer course car il est déterminant pour le dimen- velle soufflerie). Les mesures de l’effet de ➜
la stabilité du courant électrique pour arriver à les sionnement des ailerons,
piloter suffisamment finement ».
extracteurs et autres diffuL’amélioration des performances de la souf- seurs chargés d’améliorer
flerie s’est accompagnée d’une réduction la tenue de route. On veut
importante du bruit. Auparavant, l’hélice éviter que la voiture
principale générait un bruit de 89 dB à ­“décolle” à haute vitesse,
100 km/h. En choisissant une nouvelle comme ce fut le cas lors
­hélice à 29 pales (contre 4 pales sur l’an- d’une session de la course
cienne), le bruit descend à 68 dB à 100 km/h. Le Mans Series en 2006. Le
Une réduction de 20 dB qui améliore nette- problème en soufflerie est
ment les conditions de travail des opérateurs que l’air a du mal à s’enen charge des tests aérodynamiques.
gouffrer sous le véhicule,
et du coup l’effet de sol est
Simuler des “effets de sol” de plus très difficile à mesurer.Afin
en plus complexes
d’y remédier, voilà déjà
Lors des tests en soufflerie, l’air prend le une dizaine d’années que
­chemin le plus court pour contourner le Pininfarina a équipé sa soufvéhicule qui est placé dans le tunnel dos au flerie d’un simulateur d’ef- Placées à l’entrée du tunnel de la soufflerie, ces gigantesques ailes constituent le générateur de turbulence
(TGS, pour Turbulence Generation System) chargé de reproduire les conditions de roulage les plus réalistes
ventilateur. Pour la partie supérieure du fet de sol (Ground Effect possibles. Les ailes peuvent s’ouvrir ou se fermer en fonction du type de turbulences à générer, ou s’escamoter
­véhicule, les essais réalisés correspondent Simulation System, ou GESS). entièrement en rentrant dans le sol de la soufflerie.
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La salle de commande de la soufflerie est située derrière cette paroi de verre. A gauche, des vues d’écrans de l’application de supervision réalisées avec le logiciel Cimplicity de GE Intelligent Platforms.
La fenêtre en haut à gauche donne à l’opérateur une vue globale des tests en cours, tandis que celle en bas à gauche est spécifique à la gestion des tapis roulants.
➜ sol deviennent de ce fait beaucoup plus
réalistes. Mais la mise au point de ce système
ne fut pas si simple. De véritables défis
­technologiques ont dû être relevés.
Les choix techniques
Nous avons vu que les constructeurs cherchent à maîtriser l’effet de sol dans le but de
plaquer au maximum le véhicule sur la
route. Or, avec un système GESS comprenant
des tapis roulants, au lieu d’assister à un
­affaissement de la voiture c’est le tapis, plus
léger, qui se retrouve aspiré par l’effet de sol
et se soulève… La longueur du tapis, tout
comme sa vitesse de rotation très élevée, ont
tendance à aggraver ce phénomène. Pour y
remédier, des aspirateurs sont intallés en dessous des trois tapis roulants. Leur gestion a
demandé beaucoup d’efforts et un travail
conjoint avec les automaticiens de GE
Intelligent Platforms. A 250 km/h, aucune
­erreur n’est permise. Si l’aspiration n’est pas
assez puissante, les vibrations et les tensions
générées par le soulèvement du tapis sont
suffisamment fortes pour le déchirer. A l’inverse, en cas d’aspiration trop puissante, le
tapis aurait tendance à se coller aux aspira-
Les véhicules mesurés sous tous les angles
Dans le centre de recherche en aérodynamique de Pininfarina, on ne fait pas qu’étudier l’écoulement du flux d’air sur les carrosseries. Les véhicules
en test sont entièrement instrumentés de manière à offrir aux ingénieurs une multitude d’informations. Voici quelques exemples des principales
mesures effectuées sur les véhicules.
Mesure des écoulements aérodynamiques. Trois techniques
sont disponibles :
- Visualisation de l’écoulement du flux d’air grâce à un générateur de fumée et mesure de la vitesse d’écoulement par une sonde laser.
- Cartographie des vitesses d’écoulement et des pressions appliquées sur différents points de la carrosserie grâce à une sonde
spéciale dotée de 14 capteurs différents.
- Mesure PIV (Particle Image Velocimetry) : cartographie complète
des écoulements avec visualisation des vitesses moyennes des particules d’air (zone de mesure limitée à 350 x 1200 mm).
 Capacité de refroidissement : en installant un radiateur instrumenté
à la place du radiateur du véhicule, il est possible de mesurer la capacité de refroidissement du radiateur en fonction de sa position et des ouvertures placées dans le bouclier avant.
 Mesure de refroidissement des freins : pour les véhicules dotés
d’écopes de ventilation pour les disques de freins, des capteurs 
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sont installés afin de mesurer l’efficacité du dispositif.
 Mesure des turbulences dans l’habitacle : pour les voitures
découvertes ou découvrables, les ingénieurs utilisent un casque instrumenté qui relève la force du vent appliqué sur la tête du pilote.
 Mesure de déformation des éléments de carrosserie :
à très haute vitesse, de nouvelles perturbations sont générées en raison de la déformation de certains éléments, notamment le capot et les ailerons.
 Mesure des bruits aérodynamiques à l’extérieur
du véhicule, par un réseau de micros placés à l’extérieur
du flux d’air.
 Mesures acoustiques à l’intérieur du véhicule grâce à une sonde
sphérique spéciale composée de 31 micros et 12 caméras.
 Mesure du couple résistif généré sur les roues par les écoulements
aérodynamiques, grâce à des capteurs de couple placés sur les roues.
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teurs, et la surchauffe serait telle qu’il pourrait être endommagé irrémédiablement en
quelques secondes. A cela s’ajoutent des exigences de synchronisation plus “traditionnelles” : entraîner un ruban de près de 14 m
de long à 250 km/h demande une application de contrôle de traction très avancée.
Pour résoudre ces problèmes d’aspiration et
de contrôle de traction, les ingénieurs ont
développé une application dont le temps de
cycle ne dépasse pas 100 ms. Côté matériel,
un nouvel automate 90-30, assorti cette fois
d’un contrôleur de mouvement DSM324i,
est mis en oeuvre. Précis au micron, ce dernier gère les échanges entre pas moins de
450 entrées/sorties. Le contrôle de traction
des tapis est confié à six servomoteurs sans
balais Beta IS (deux par tapis). Et pour
­garantir à ce système une immunité contre
les perturbations, GE Intelligent Platforms met
en place un réseau à base de fibre optique
entre l’automate, le contrôleur de mouvement et les servomoteurs.
Pour Antonello Cogotti, directeur du centre
de recherche en aérodynamique et aéro­
acoustique de Pininfarina, grâce à ces évolutions successives la soufflerie est aujourd’hui
beaucoup plus homogène et beaucoup plus
efficace. « Tout d’abord, l‘allongement du tapis nous
ouvre la porte à de nouvelles applications comme les
essais sur camions, explique-t-il. Ensuite, les trois
tapis couvrent entièrement la partie avant des véhicules, ce qui est pour nous un argument de poids face
à la concurrence, car la majeure partie des pertes
aérodynamiques d’un véhicule est due aux roues
avant et aux perturbations dans les passages de roues.
Or notre nouvelle soufflerie permet une conception
beaucoup plus avancée de ces passages de roues avant.
Il en va de même pour le design des faces avant des
véhicules, que ce soient les boucliers, les lames de
bouclier, les écopes de radiateur, les diffuseurs et depuis peu les systèmes de freinage à refroidissement
par air forcé. »
poste esclave dédié à la visualisation.
Depuis les stations de contrôle, les techniciens pilotent les huit automates 90-30
­nécessaires au fonctionnement de la soufflerie et surveillent tous les capteurs placés sur
la voiture. Au total, la soufflerie modernisée
regroupe pas moins de 27 axes contrôlés,
1 800 entrées/sorties numériques, 200
­entrées/sorties analogiques et 6 000 variables pour l’application de supervision. « Au
final, la soufflerie est plus rentable car nous avons
Dans la salle de contrôle
Pour exploiter pleinement les nouvelles
fonctionnalités de son centre de recherche,
le designer italien a confié à la société Ansea
la conception de l’application de supervision. Cette dernière est développée sous
Cimplicity, le logiciel SCADA de GE Intelligent
Platforms, afin d’offrir des temps de latence
minimum pour la communication avec les
automates. Des stations Cimplicity sont disposées de chaque côté du tunnel de la soufflerie : d’un côté la salle de contrôle et ses
huit postes depuis lesquels les techniciens
paramètrent et surveillent les essais, de
l’autre une salle réservée aux démonstrations
pour les clients, qui ne comporte qu’un
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réduit les temps morts entre les essais, conclut
Antonello Cogotti (Pininfarina). Dans son état
actuel, l’application tourne depuis une vingtaine de
mois et on a pu constater une amélioration de la
disponibilité globale des équipements. Et aujourd’hui, nous sommes en train d’évaluer la
­nouvelle génération d’automates de GE Intelligent
Platforms, le PAC Systems RX3i, pour éventuellement remplacer les 90-30 par ces nouveaux
­modèles. »
Frédéric Parisot
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