Le lancer du disque - L`Athleblog du groupe d`Olivier Lessire
Transcription
Le lancer du disque - L`Athleblog du groupe d`Olivier Lessire
L’apprentissage du lancer du disque en U.R.S.S. : la bonne méthode ? Par Robert VAN SCHOOR Chargé de cours Solidarité olympique (C.I.O.), Expert I.A.A.F. – Lancers lourds. Selon les critères déterminés par les différentes études et données pratiques, le lancer du disque avec volte fournit un gain de 15 à 20% par rapport au lancer sans volte. Cependant, tout entraîneur qui s’occupe de lanceurs a pu rencontrer des cas où son élève, lançant avec volte, atteigne des résultats à peine supérieurs, cas rencontrés le plus fréquemment en Belgique. La cause est à rechercher dans le travail dominant des muscles rapides du bras pendant tout le lancer. L’absence de coordination correcte entre le travail des jambes et celui des bras s’explique de la façon suivante. La majorité des muscles des jambes, du bassin et du dos – dont une unité motrice possède une concentration allant jusqu’à 3.000 fibrilles musculaires – ont une coupe physiologique importante. D’un autre côté, les muscles des bras et en particulier ceux du poignet, d’un diamètre inférieur aux précédents, possèdent 10 à 25 fibrilles musculaires dans une unité motrice. Par conséquent, les muscles des bras, dirigés avec plus de précision, sont plus rapides comparativement à ceux des jambes. Ceci fait que, pendant la finale, il se produit une intervention précoce des muscles du bras, qui cherchent à laisser en arrière ceux des jambes. A ce moment précis apparaît une des particularités fonctionnelles des muscles rapides : la faculté d’intervenir vite, même quand cela n’est pas nécessaire. D’autre part, l’augmentation de l’activité des muscles rapides réduit fortement celles des muscles lents des jambes. Il en résulte que le travail des jambes reste peu efficace et que le lancer avec volte sera à peine supérieur à celui sans volte. L’intervention inopportune des muscles des bras est due, non seulement à la nature physiologique du travail des muscles, mais aussi à une méthode d’enseignement lacunaire. Toutefois, les groupes musculaires des jambes, plus lents et massifs, restent perdus de vue. Ainsi donc, dès le début de l’apprentissage, dans la conscience du débutant se forme la notion que l’élément majeur de la technique est le travail du bras. Plus tard seulement, l’entraînement verra s’adjoindre des exercices exigeant la participation des jambes : entrée dans la volte, rotation sur la jambe droite, mouvement du bassin et du tronc, effort verticaux des jambes, soit tout le travail qui doit précéder le fouetté final du bras. Pendant ce temps, le débutant se convainc toujours plus de l’importance du travail du bras car l’apprentissage du tour représente de sérieuses difficultés et au début, ne s’accompagne pas d’une amélioration notable des résultats. Avec le temps se forme finalement une technique de lancer avec volte mais les traces qui restent dans la conscience de l’élève d’une possibilité de réaliser une performance à l’aide du bras l’inhibent et perturbent le geste global. Cet ordre de succession indésirable du travail des bras et des jambes apparaît nettement lors des épreuves importantes. Cette instabilité de l’habitude motrice qui se manifeste dans l’intervention prématurée du bras, peut-être réduite de beaucoup grâce à la formation de meilleurs conditions de son établissement. Tout jeune lanceur de disque se souvient qu’au début de son apprentissage technique, il devait exécuter des exercices tels la tenue du disque, le faire rouler, le lancer en l’air par l’index, pratiquer le lancer d’engins divers, … Il passe ensuite au lancer sans volte afin d’apprendre la finale. Il n’est pas difficile de remarquer que toute l’activité initiale des futurs lanceurs sera axée sur le travail du bras, à l’aide duquel il atteint des résultats déterminés. http://lessireteam.athleblog.eu 1 Dans le but de vérifier en pratique un ordre de déroulement de l’apprentissage quelque peu différent, l’Institut des Sports de Smolensk en U.R.S.S. réalisa une expérience fort édifiante. Pendant la période initiale, les entraîneurs ont imposés aux élèves de concentrer leur attention essentiellement sur le travail des jambes et du bassin. En d’autres termes, la formation de l’habitude motrice se produisit en accord avec la façon dont elle doit intervenir dans le lancer avec volte. Voilà l’expérience : • Un groupe effectuait des exercices qui excluaient la possibilité d’intervention prématurée du bras, où l’ordre d’intervention des jambes, du tronc et du bras était clairement défini ; • Un autre groupe orthodoxe ; • Une troisième groupe, de contrôle, était composé de lanceuse de Moscou. suivait l’enseignement L’expérience et les observations se déroulèrent pendant trois années. Nous présentons, ci-dessous, une série d’exercices destinés à l’apprentissage du lancer du disque et utilisés par le groupe expérimental. Par la suite, ces exercices furent effectués avec d’autres engins (bâton, anneau, barres de fer, tuyaux flexibles, etc.). 1. – Se placer devant un espalier, prendre un barreau placé au niveau de la ceinture, jambes demi-fléchies. Faire les mouvements des jambes qui précèdent la finale. La jambe droite se tourne genou vers l’intérieur avec simultanément écart de la jambe gauche en arrière et rotation de la cuisse. 6. – Dos contre l’espalier. Saisir un sandow fixé à gauche. Faire un pas en avant avec la jambe droite et faire la volte, comme dans le lancer, passer dans la position qui précède la finale. La cuisse gauche doit jouer le rôle essentiel dans ce mouvement de torsion. 7. – Même exercice mais avec une flexion plus forte de la jambe droite. 8. – Face à l’espalier, prendre avec la main droite, devant soi et la cuisse gauche, un sandow partant du mur, fixé derrière l’élève et à sa droite. Les jambes sont écartées à la largeur des épaules demi-fléchies. EN déplaçant le côté gauche sur la jambe droite et en tournant simultanément le genou de l’autre jambe à 180°, faire un pas en avant avec la jambe droite et effectuer ensuite l’exercice n° 5. 9. – Marcher et faire des voltes, comme en lançant, jambes légèrement fléchies. Même exercice mais jambes fortement fléchies. 10. – Position initiale, pieds bien écartés, jambes demi-fléchies. Imitation de la rotation de la jambe gauche à 180°, sur le côté intérieur de la pointe du pied. Même exercice mais ensuite avec rotation du tronc à 360°. Tout ces exercices ont pour but d’étudier le travail des jambes, en excluant le lâcher de l’engin. 2. – Même exercice mais avec redressement des jambes et déplacement du bras gauche par le coude, en haut et en arrière. 3. – Même exercice mais en se tenant par la main droite à un sandow. 4. – En position initiale, venir frapper vigoureusement avec le bassin un ballon placé au niveau de la ceinture, en se tenant de côté par rapport au ballon, jambe droite fléchie. Commencer le mouvement avec une rotation de la cuisse gauche. 5. – Même exercice mais avec un sandow fixé au bassin et attaché à l’espalier. http://lessireteam.athleblog.eu 2 L’expérience ainsi menée, à montré que le fait de ne pas lancer le disque directement pendant cette période d’apprentissage exige beaucoup de tact et de savoirfaire pédagogique, ceci afin que les futurs lanceurs ne perdent pas l’intérêt qu’ils montrent à l’égard de leur spécialisation. L’exécution régulière de ces exercices, en suivant strictement le rythme du geste, discipline l’habitude motrice et crée les conditions propices à sa bonne fixation. L’emploi d’exercices d’introduction, ou éducatifs d’initiation, effectués à l’aide de sandows, de bâtons lestés, d’haltères et d’autres charges additionnelles permet, dans une mesure, de résoudre la question de l’action réciproque de la formation de l’habitude technique et du développement de la force. Outre le perfectionnement technique des jeunes lanceurs, il faut accorder une grande attention au développement de la vitesse, de la force et à la faculté de mobilier sa volonté. A cette fin, il est indispensable de faire largement appel au sprint et aux haies, aux sauts en longueur et en hauteur et à un nombre considérable d’exercices de sauts. COMMENTAIRE DE TECHNICATH Cette expérience soviétique rapportée par Robert VAN SCHOOR constitue, en fait, un réquisitoire contre l’utilisation de la méthode globale pour enseigner les lancers. Le problème posé est essentiellement pédagogique. Il s’agit de faire admettre à un enfant de 12 à 14 ans (voire moins), pour lequel l’aspect ludique de toute activité est fondamental, qu’il ne progressera que … trois ans plus tard ! La réalisation d’un tel objectif pédagogique, indépendamment de la qualification indispensable de l’entraîneur, nécessite, à notre avis, quatre conditions préalables : 1. Il faut que l’apprentissage se déroule dans un contexte qui mette plus particulièrement en valeur les performances des lanceurs ; 2. Le groupe d’initiation ne peut se composer que de débutants peu nombreux disposant des qualités morphologiques, neuromusculaires et psychologiques requises ; 3. Chaque débutant faisant partie du groupe doit avoir la conviction qu’il possède les qualités nécessaires et le gabarit adéquat ; 4. Chaque débutant doit, en plus, avoir acquis la certitude que c’est en se spécialisant dans les lancers qu’il finira par s’exprimer au mieux au travers de l’athlétisme. Le travail effectué par le groupe expérimental de Smolensk n’exerça pas d’influences rapides sur les résultats pendant la période initiale d’apprentissage, ce qu’on ne peut dire du groupe qui suivait la méthode orthodoxe. Au bout d’une année, le groupe de contrôle venait largement en avant de l’expérimental quant aux performances en lancer du disque. La seconde année égalisa les performances des groupes. La troisième année vit se modifier considérablement le rapport entre les résultats, cela en faveur du groupe expérimental. L’observation du troisième groupe révéla la présence de défauts dans le travail des jambes ce qui est la cause de la progression ralentie des athlètes. En conclusion, il faut signaler que cette expérience réalisée à la fin des années soixante est, depuis, devenue la seule méthode d’enseignement du disque de l’école soviétique. Les résultats ne se sont pas fait attendre : les Soviétiques trustent les titres et les records de la discipline. Sources : Ces quatre conditions préalables sont rarement réunies en Belgique. Au contraire, nous constatons que c’est la réalisation immédiate d’une performance qui amène généralement les jeunes à notre sport. Or, il est clairement démontré ici que l’exploitation pédagogique de cette satisfaction précaire, consistant à mettre l’accent sur les mouvements qui favorisent une progression rapide engendre des défauts techniques irrécupérables au moment de la maturité du lanceur. Cette situation pédagogique défavorable ne se retrouve qu’à un degré moindre dans d’autres disciplines. La régression due à l’acquisition d’un geste technique nouveau n’y dure que quelques semaines ou mois au maximum, pour certaines spécialités, et pour autant qu’on ait à s’occuper d’éléments doués, il peut même y avoir progression immédiate sans risque d’acquisition ou défauts ultérieurs. Ceci explique en grande partie, selon nous, le retard des lancers dans notre pays. - LIEGKAYA ATHLETIKA n°5 - DOCUMENT INS 780 http://lessireteam.athleblog.eu 3