Le mot du juriste

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Le mot du juriste
Le mot du juriste
L’œuvre audiovisuelle
Définition de l’œuvre audiovisuelle
Le droit de la propriété intellectuelle donne une liste non limitative d’œuvres de l’esprit protégeables par le
droit d’auteur, parmi celles-ci, les œuvres audiovisuelles . Pour être qualifiée d’œuvre audiovisuelle, la
création doit présenter une succession linéaire d’images (scènes filmées ou images de synthèse) en
mouvement. Faute d’images en mouvement, la création pourra être assimilée à une œuvre photographique.
La sonorisation des images importe peu, ce qui permet de protéger les films muets. Le fait que les
séquences animées d’images soient linéaires implique pour les tribunaux que la plupart des créations
multimédias, en raison de leur interactivité qui rend le spectateur actif, ne puissent pas être qualifiées
d’œuvres audiovisuelles.
Détermination des auteurs
L’élaboration d’une œuvre audiovisuelle nécessite la participation d’une multiplicité d’intervenants qui rend
complexe la détermination des coauteurs. Seules peuvent se prévaloir de la qualité d’auteur les personnes
physiques, à l’exclusion des personnes morales, qui accomplissent un acte de création originale, reflétant
l’empreinte de la personnalité de l’auteur. Il en résulte que ne peuvent se prévaloir de la qualité d’auteur les
personnes qui jouent un rôle d’investisseur ; celles qui assurent un rôle technique ; celles qui se contentent
de fournir une idée ou de simples directives ; celles qui n’ont pas joui durant le processus de création d’une
liberté artistique suffisante pour accomplir un acte de création original, en raison de contraintes et de
directives trop précises. Leur rôle a ainsi été réduit à celui d’exécutant technique.
Pour l’œuvre audiovisuelle, cette détermination des auteurs est facilitée puisque le code de la propriété
intellectuelle fixe une liste d’auteurs présumés coauteurs. Il considère qu’il s’agit d’une œuvre de
collaboration, "à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques". On en compte cinq :
l’auteur du scénario, l’auteur de l’adaptation, l’auteur du texte parlé, l’auteur des compositions musicales
spécifiquement réalisées pour l’œuvre et le réalisateur. Cette liste qui n’est pas limitative n’établit qu’une
présomption simple, il est possible d'exclure une de ces cinq personnes si elle n'a pas contribué à
l'élaboration de l'œuvre commune. Inversement, d’autres contributeurs comme par exemple le costumier
d’un film d’époque, le cascadeur d’un film d’action, s'ils ont réellement participé (de manière originale) à
l’élaboration de l’œuvre peuvent avoir la qualité de coauteur.
Le producteur audiovisuel, qui est plus souvent une personne morale que physique, et surtout qui n’apporte
pas son originalité à l’œuvre, est exclu de la liste des coauteurs présumés. Cependant, comme il prend de
lourds risques financiers, la loi lui facilite le transfert des droits d’auteur nécessaires à l’exploitation de
l’œuvre audiovisuelle. Elle instaure d’une part par la conclusion du contrat de production audiovisuelle une
présomption de cession des droits d’exploitation au profit du producteur, et amoindrit d’autre part les
prérogatives du droit moral des coauteurs jusqu’à l’achèvement de la réalisation de l’œuvre.
La présomption de cession des droits d’exploitation en faveur du producteur
La réalisation d’une œuvre audiovisuelle donne généralement lieu en pratique à la conclusion d’un contrat
de production audiovisuelle qui est expressément régi par le code de la propriété intellectuelle. Afin de
préserver les intérêts du producteur, le législateur a posé une présomption de cession : la conclusion du
contrat de production audiovisuelle vaut cession des droits d’exploitation au profit du producteur. Le
producteur audiovisuel est ainsi investi de tous droits de reproduction et de représentation, pour tout mode
d’exploitation de l’œuvre.
Le contrat de production audiovisuelle est un contrat qui doit être constaté par écrit entre un producteur et
tout auteur participant à la réalisation d’une œuvre audiovisuelle. Le producteur est défini comme la
personne physique ou morale qui prend l’initiative et la responsabilité de la réalisation de l’œuvre.
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Il importe que le producteur ait à la fois la responsabilité financière, commerciale et artistique de la
réalisation de l’œuvre, le seul financement du projet ne suffisant pas à conférer la qualité de producteur.
La présomption vaut pour tous "les différents modes d’exploitation audiovisuelle de l’œuvre", c’est-à-dire "la
projection en salle mais aussi les télédiffusions par voie hertzienne, par câble et par satellite, la
commercialisation par vidéodisque ou vidéocassette". À défaut de stipulation contractuelle contraire, la
jurisprudence considère que la cession vaut pour la durée légale (70 ans après le décès du dernier survivant
des coauteurs) et pour le monde entier.
Limitation du droit moral des coauteurs jusqu’à achèvement de l’œuvre
Inaliénables, personnelles et imprescriptibles, les prérogatives morales en principe reconnues à tout auteur
d’œuvres de l’esprit sont au nombre de 4 : le droit de divulgation ; le droit de retrait et de repentir ; le droit au
respect de l’œuvre ; le droit de paternité. Conscient des conséquences que peut entraîner l’exercice du droit
moral par un seul sur le travail de tous, le législateur a aménagé le droit moral des collaborateurs à une
œuvre audiovisuelle. Il a ainsi voulu empêcher les coauteurs de contester les éventuelles modifications qui
auraient été apportées à leur contribution par le producteur. Cet aménagement ne vaut toutefois que jusqu’à
l’achèvement de l’œuvre, à son issue les coauteurs retrouvent le plein exercice de leurs prérogatives
morales.
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