L`ÉVEIL ET L`INITIATION À LA MUSIQUE ET À LA DANSE : UNE

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L`ÉVEIL ET L`INITIATION À LA MUSIQUE ET À LA DANSE : UNE
Rencontre métier
Synthèse
L’ÉVEIL ET L’INITIATION
À LA MUSIQUE ET À LA DANSE :
UNE PÉDAGOGIE TRANSVERSALE ?
Cette synthèse est un compte-rendu des témoignages des personnes présentes
aux rencontres des 5 octobre et 10 décembre 2015
à l’Ariam Ile-de-France (Paris)
Intervenante : Edwige Audon, coordinatrice pédagogique au Pont supérieur de Nantes, professeur
de danse, formatrice pour l’éveil et l’initiation.
Rédactrice de la synthèse : Anahi Renaud
Comment favoriser cette forme d’éveil artistique sans pour autant négliger l’initiation aux fondamentaux nécessaires aux acquisitions musicales ou chorégraphiques ?
Comment trouver un langage commun dans le binôme professeur de musique/ professeur de danse
et ainsi donner aux enfants des repères essentiels à la poursuite de leurs apprentissages ?
Cette matinée se veut le lieu d’échanges, de témoignages et de questionnements.
Elle sera aussi l’occasion pour ceux qui ont suivi la formation « Pédagogie transversale musique et
danse pour l’éveil et l’initiation « programmée depuis maintenant 3 ans de se retrouver.
Les participants :
42 participants ont suivi ces matinées dont : 23 professeurs de danse des 3 disciplines
19 professeurs de formation musicale, d’instrument ou musicien intervenant. 3 des stagiaires avaient fait
la formation : « Pédagogie transversale musique et danse pour l’éveil et l’initiation « avec Edwige Audon et
Christian Chauvet.
Répartition par type de structure : 21 CRC, 6 CRD, 3 CRR, 12 associations ou écoles privées.
www.ariam-idf.com
QUEL DISPOSITIF CHOISIR ?
LA CONSTITUTION DU BINÔME
Les stagiaires présents témoignent de dispositifs différents selon le projet d’établissement de leur structure
mais aussi des ressources humaines et des locaux mis
à disposition :
Quel que soit le dispositif choisi, le binôme doit se
concerter et fixer des objectifs communs. Cela demande
un long temps de réflexion et de préparation en amont.
Il est nécessaire que les enfants ressentent la solidité du
binôme. Quelques professeurs en difficulté témoignent
du manque d’efficacité lorsque le couple de professeurs
ne communique pas ou peu :
« Je ne vois pas où est la transversalité dans le binôme
que je constitue, peu de dialogue et pas de place donnée
à l’autre, les enfants n’apprennent rien »
« Nous travaillons ensemble mais sans objectif commun, ça ne sert à rien »
« Lorsque le binôme se passe mal, le cours d’éveil ou
d’initiation devient une grande angoisse. L’objectif et la
qualité pédagogique n’existent plus »
- « nous intervenons à deux mais successivement,
comme un empilage, dans un espace et un temps partagé »
- « nous sommes trois intervenants : un professeur
de danse, un professeur de FM et un accompagnateur
danse, même lieu, même temps »
- « j’interviens 30 minutes puis les enfants vont dans la
salle d’à côté 30 minutes avec le professeur de danse »
- « les enfants ont 1 trimestre danse, 1 trimestre musique et 1 théâtre »
- « juxtaposition : intervention en binôme tuilé »
Relevons les expressions : « ça ne sert à rien » « ils n’apprennent rien » « la qualité pédagogique n’existe plus.. »
Elles témoignent de l’importance de pouvoir constituer
un duo dans lequel les mots complémentarité, complicité et symbiose prendront tout leur sens.
Le binôme travaillera différemment si le partenaire musicien est un professeur de FM, un professeur d’éveil
musical ou bien un accompagnateur danse.
Leur cours doit être propice à l’écoute, la découverte et
la créativité des enfants.
Il peut effectivement y avoir une personne motrice,
mais il faut équilibrer et alterner.
Les rôles de chacun doivent être très bien définis et le
vocabulaire commun.
Pour Edwige Audon, cette dernière solution est la plus
efficace et la plus juste par rapport à la transversalité en
question. Cependant pour ce faire, il faut mettre en place
une collaboration importante entre les intervenants sur
laquelle nous reviendrons dans le point suivant.
La durée des cours doit être pensée en fonction de l’âge
des élèves. Un enfant de 4 ans aura un temps de concentration plus court, en moyenne 20 minutes, qu’un enfant
de 5 ans. En principe, les cours d’éveil durent 45 minutes, et ceux d’initiation 1 heure. Un participant rapporte que dans sa structure « les enfants ont 45 minutes
d’éveil danse suivis de 30 minutes de musique à 5 ans,
ce qui induit une grande fatigue à la fin de la séance »
Il est rappelé que les professeurs de danse ont l’obligation d’avoir un DE pour enseigner et que dans la formation il existe un module obligatoire « éveil et initiation »
qui est validé par un examen. Ils arrivent sur le terrain
sans expérience mais avec une formation théorique
bien utile.
Le professeur de danse n’est pas spécifiquement professeur « d’éveil à la danse », il assure l’enseignement
également dans les cycles, ce qui n’est pas le cas des
enseignants musique.
Se pose également la question de la pérennisation du
dispositif. Les années d’éveil ne semblent pas poser
de problème quand aux contenus. Mais lorsque débute
l’initiation des questions surgissent, en particulier de
la part des musiciens : « les professeurs d’instruments
souhaitent que l’enfant arrive pour son 1er cours en sachant lire les notes, comment trouver le temps dans un
cours d’initiation transversal ? »
Pour rappel, en danse, le « programme initiation » dure
2 ans. Les élèves danseurs rentrent dans le cycle à l’âge
de huit ans, correspondant au CE2 pour l’éducation nationale. Les musiciens quand à eux démarrent leur instrument à 7 ans.
Les élèves musiciens pourraient-ils continuer à assister
à leur cours d’initiation 2e année ? Qu’en est-il du cycle
DANSE ET MUSIQUE :
LA CRÉATION D’UNE CULTURE
COMMUNE
1 ? Comment faire perdurer ce dispositif ?
Peu de propositions de formation existent à ce jour.
Cette transversalité continue d’exister plutôt au travers
de projets variés et transdisciplinaires dans certaines
structures.
Que les musiciens et danseurs soient amenés à travailler
en binôme ou non, dans le cadre d’une pédagogie transversale ils vont devoir être au service d’un même projet. Ce projet doit être pensé en synergie et doit garder
comme point de départ l’enfant lui même et les questions fondamentales telles que pour qui ? Pourquoi ?
Comment ?
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Les deux disciplines artistiques ont beaucoup de fondamentaux communs à mettre en place. Chacun y arrivera par des chemins différents mais il est essentiel dans
cette collaboration de les identifier et de se fixer des
objectifs de travail commun.
A chaque séance, qu’Edwige appelle atelier, est proposé
un travail autour :
- du corps,
- de l’espace,
- de la voix,
- de l’analyse musicale,
- du son.
Parmi les questions des participants nous pouvons relever celles des musiciens : « que faut-il mettre en place
à 6 ans ? » « A 5 ans que peut-on demander corporellement ?  »
…et celles des danseurs : « est-ce que c’est important
d’apprendre à lire les notes à 6 ans ? » « Quelles sont
les priorités en musique pour une entrée en cycle 1 ? »
Edwige Audon pose la question de choisir si l’éveil est
une étape ou bien un état.
« Le cours est conçu comme un voyage » conclut-elle.
Les échanges entre musiciens et danseurs présents ont
révélé une méconnaissance de la matière de l’autre
et donc un réel besoin de dialogue et d’exploration.
Prendre le temps d’apprendre à se connaître c’est gagner du temps pour la suite.
CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
Tous les stagiaires qui participaient à ces matinées
étaient là car leur recherche pédagogique correspondait
à la thématique proposée. Il n’y a eu aucune polémique
mais bien au contraire une certitude commune de l’importance de cette démarche. Toutefois ils se sentent un
peu démunis quand aux contenus à définir et aux méthodes à mettre en place. Certains pratiquent déjà mais
ont besoin de se renouveler et ont l’impression de ne
plus avancer, d’autres souhaitent changer et cherchent
des sources d’inspiration.
Les professeurs veilleront à se mettre d’accord sur un
vocabulaire commun et à en valider la signification.
Une des stagiaires souligne par exemple que « la notion d’improvisation n’est pas la même en danse et en
musique. En danse, nous l’abordons tout de suite, avant
même d’aborder la technique, ce qui n’est pas forcément
le cas pour les musiciens ».
Enfin, soulignons l’importance du respect de l’autre et
de sa matière. Oser dire qu’on est démuni » ou bien
« accepter ses fragilités », « s’appuyer sur l’autre pour
se renforcer ».
Pour avancer et trouver des réponses à ces questionnements, la formation « « Pédagogie transversale musique
et danse pour l’éveil et l’initiation « animée par E. Audon
et Christian Chauvet est tout à fait adaptée. De plus, 3
professeurs présents ayant suivi la formation confirment cette perspective. Il serait judicieux et utile que
l’Ariam la programme à nouveau la saison prochaine.
LE POINT DE VUE
D’EDWIGE AUDON
Forte d’une expérience et d’une réflexion qu’elle mène
depuis presque 15 ans, Edwige Audon revient sur sa
conception du cours d’éveil et d’initiation transversal.
Elle souligne l’importance de définir, pour un cours ou
un ensemble de cours, un objectif commun avec le musicien binôme et d’en explorer la thématique à travers
différents filtres : le corps, la voix, l’instrument, la voix
et le corps, l ‘instrument et la voix….en revenant toujours
sur la mise en place des fondamentaux communs identifiés, parmi lesquels l’espace, le temps, les dynamiques,
les forces, les vitesses, le geste…
Elle cite l’exploration comme moyen pédagogique privilégié et donne l’image du … « lit d’une rivière au flux
ininterrompu duquel on dévie mais vers lequel on revient toujours ». Les méthodes actives sont mises en
avant.
Elle insiste sur le chemin pédagogique qu’elle emprunte,
inspiré de celui de J.E. Dalcroze : vivre, sentir, nommer,
réutiliser
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