La Source du Castor - Plongée Souterraine

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La Source du Castor - Plongée Souterraine
La Source du Castor
Compte rendu de l’exploration du 21 mars 2008
Par Xavier Méniscus
Objectif : poursuite de l’exploration
La source du Castor débouche en bordure de l’Ardèche, par 2 orifices, dont l’un sous fluvial, un peu en aval
du rocher de la Cathédrale sur la rive droite côté Gard. Elle draine l’un des plus gros plateau calcaire de la
région, avec, quelques km plus au sud, une jonction possible avec l’aven d’Orgnac.
L’accès se fait 300 m en Aval, par le chemin du camping des Templiers. Son téléphérique nous aide à
transporter le matériel de plongée au pied des gorges. Avec des canoës, nous remontons la rivière et ses
rapides pour arriver devant la source, où s’ouvre une lucarne, 2m au-dessus du niveau de l’eau. A l’intérieur
loge une famille de castors que l’on peu apercevoir furtivement si on a un peu de chance, lorsqu’ils se mettent
à l’eau.
Nous pénétrons dans la cavité par l’accès sous fluvial. Sur les 100 premiers mètres, la visi n’est jamais bonne,
puis passée cette zone de limon due aux eaux chargées de l’Ardèche qui s’infiltre à l’intérieur, l’eau de la
source devient cristalline. Le profil descend doucement sur 450m jusqu’à –67m de profondeur pour remonter
dans une énorme salle, lieu de nos 1ers paliers. En haut à –23m, repart une galerie de 5x6m sur 200m
jusqu’à un carrefour. A gauche, on remonte dans une grande cloche, et à droite, vers une trémie où O Isler
s’était arrêté sans trouver de suite en 1981. Fréd Badier accompagné de PE Deseigne y étaient retournés
mais n’avaient pas réussi à trouver un passage. En 2005 Fréd refait une tentative avec mon aide, et trouve
enfin le passage en contournant la trémie par le dessus. Je découvre une nouvelle grande salle avec en
plafond une cloche, puis en cherchant en bas, la suite de la galerie. Je m’arrête alors sur une belle faille de 23m x 5m qui part au loin dans des eaux cristallines par –24m de profondeur.
Cela faisait maintenant presque 3 ans, que je m’étais promis de revenir avec Fréd, poursuivre l’exploration. En
ce mois de mars, entre 2 chantiers offshores, Patrick Serret me téléphona en début de semaine pour m’inviter
à venir l’accompagner avec un groupe de spéléo germano-suisses désireux de découvrir cette magnifique
source aux eaux translucides. Après 2 secondes de réflexion à peine, je me dis que c’est la bonne occasion
d’y aller remettre un coup. Patrick s’occupe de contacter Jacques et Loulou Guerrier, les propriétaires du
camping pour emprunter le chemin d’accès et surtout utiliser le téléphérique et des canoës pour acheminer
notre matériel de plongées au pied des gorges puis devant la source sans « trop d’effort ».
Le rendez vous est pris à 8h du matin le vendredi. Il ne me faut qu’1h15 de trajet en voiture de Valence pour
arriver. Là Patrick m’informe que la vingtaine de spéléo censés nous donner un coup de main ne viendront
pas. Info ou intox pour me décider à venir ?
En fait, aucune importance. L’utilisation de 2 recycleurs CCR JOKI allége énormément le volume de matériel
pour le portage. En un seul voyage de téléphérique le matériel de plongée de 2 plongeurs d’assistance et 1
plongeur de pointe dont un scooter UV-26 est en bas. Nous arriverons devant la source, chacun avec son
matos dans son canoë à 9h15. Soit seulement 1h15 après notre arrivée en haut des gorges. Le fait de n’être
qu’une petite équipe, a certainement facilité notre portage. En ce mois de mars, nous sommes seuls dans les
gorges, si fréquentées habituellement en pleine saison. Le temps est sec mais couvert, les températures sont
relativement fraîches ce matin, mais accommodantes pour le portage.
Sans perdre de temps, nous débarquons notre matériel. La plongée risque d’être longue, ne connaissant pas
le profil que je vais découvrir et n’étant pas limité en temps et profondeur, un autre apport du double recycleur
CCR. Un rapide briefing pour organiser la plongée, c’est Patrick qui partira avec moi, pour me donner un coup
de main au départ, puis à T + 2h, Georges ira à ma rencontre prendre de mes nouvelles lors de mes paliers.
Depuis quelques temps, j’utilise une caméra posée sur l’avant du scooter dans un caisson étanche, pour
filmer mes plongées, dont une à –174m au Goul de la Tannerie pour configurer et valider l’ensemble caméra,
éclairage et batterie pour ne pas trop alourdir le propulseur et changer son hydrodynamisme. Mais surtout,
ramener des images en plongée souterraine exploitables que je prendrai pour une 1ère fois en exploration. Le
but étant de montrer au plus grand nombre ce que nous sommes trop peu à pouvoir découvrir.
10h, Patrick et moi sommes prêts à partir, la caméra tourne !
Je m’engage le premier tracté par mon propulseur. La visi est presque nulle, comme d’habitude, et j’avance
par tâtonnement. Mais je sais que plus loin, cela sera bien meilleur. Patrick, lui ne s’en rappelle plus, ses
dernières plongées au Castor remontant à l’époque où il accompagnait F Leguen lors de ses plongées
d’exploration en 1979. Dommage, il fera demi-tour au bout de 100m, presque à la fin de la 1ère couche
chargée en limon. Ce n’est qu’au bout de 200m, passée une dernière zone, que l’eau deviendra cristalline.
Grâce à l’éclairage diffus dont je dispose pour la caméra, j’éclaire parfaitement l’ensemble de la cavité. Je
pense déjà à l’ambiance que cela va donner dans la grande salle après le point bas, pour ma part l’un des
endroits les plus beau qu’il m’a été permis de voir en plongée. Le début de la progression se fait dans une
cavité aux parois découpées, de nombreux blocs jonchent le fond. Un fin limon très volatil au passage d’un
plongeur, recouvre tout. La progression est assez variée, passage sous voûtes, diaclase, et virages serrés
évitent la monotonie. Une roche bien blanche diffuse parfaitement la lumière. Plus nous approchons du point
bas, plus la galerie se lisse, s’arrondit formant un tube de 4 à 5m de diamètre. Ce n’est qu’au point bas, à
450m de distance par –67m de profondeur, que le sol se recouvre à nouveau de blocs rocheux, signe de
l’effondrement de l’énorme salle qui suit sur la droite en remontant par une faille. Le spectacle est grandiose
comme je l’espérais. Je me suis positionné tout au fond dans un recoin pour faire mon 1er palier profond à –
43m pour éclairer entièrement à l’aide des puissants phares dont je dispose pour la caméra, cette salle aux
parois bien blanches. Elle part de –67m, remonte jusqu’à –23m pour une largeur de 20 à 25m. A 2, en 2005
avec Fréd Badier, qui éclairait à l’opposé, c’était encore plus beau.
Je finis mon 2ème palier en haut de la salle, afin de poursuivre ma progression. Cette fois, ce sont des pans
entiers de plafond effondré qui recouvrent le sol de la galerie de plus de 8m de large. A 600m on trouve 2 fils
presque parallèles. Il faut éviter de prendre celui de gauche au retour, sinon on refait une boucle
complète pour revenir au-dessus de la grande salle. Je m’y étais perdu pour y avoir tourné en rond il y a 3
ans. Je fais bien attention de vérifier la présence du repère pour signaler la bonne direction de la sortie sur le
fil principal, avant de poursuivre. A 650m, le carrefour qui annonce sur la droite l’arrivée proche de la trémie
« Badier ». A gauche, on remonte dans une cloche où aucune suite n’est possible. Arrivé devant cette trémie,
je suis étonné de retrouver mon fil en bon état. Les crues n’ont pas dû être violentes ces dernières années ! Je
redécouvre le passage qui est assez grand pour positionner le scooter devant moi, et le faire fonctionner de
temps en temps pour avancer. Avant de franchir le passage qui m’amène dans une nouvelle grande salle,
j’effectue 5min de palier à –12m devant une fenêtre toute noire annonçant la fin de la trémie. Quel bonheur de
sortir d’un endroit intimiste, pour passer dans un autre immense !
Watch the caouetch …
Avant de poursuivre, je me place au milieu vers –8m pour filmer la salle « X-Men » de 20 à 25m de large.
Au plafond une cloche, au fond à gauche un tas de gros blocs avec le passage en son centre, et sur la droite,
la suite, par –25m de profondeur. Au bout de 50m, j’arrive à la fin de mon fil, accroché sur un becquet rocheux
de forme significative, ressemblant à la Bretagne. Je sors mon dévidoir, pour remonter dans une faille de
3x5m. Le sol est toujours jonché de gros blocs. Plus on remonte, plus la faille s’agrandit en largeur, pour
diminuer proportionnellement en hauteur afin d’arriver au bout de 50m de fil déroulé, vers –3m sous une
nouvelle cloche. Puis quelques mètres après, le passage d’une voûte immergée, je m’arrête devant une
nouvelle trémie. En surface, je vois l’eau circuler. Je sors la tête de l’eau une fois mes derniers paliers à -3m
effectués après 50min de plongée, pour découvrir sur la droite une belle galerie exondée, de 5x6m. Je viens
de franchir le siphon, l’espoir de tout spéléo ! La suite se fera au sec.
Vue de la suite en exondé
Ma configuration ne me permet pas de sortir facilement hors de l’eau. Tous mes relais oxy et gonflage
vêtement étant fixés sur mon dorsal ainsi que les lourds boyons pour l’éclairage de la caméra. Et puis, ça sera
bien plus marrant d’y revenir une prochaine fois à plusieurs.
Avant de rentrer, je vérifie qu’il n’y a aucun passage dans la trémie pour poursuivre en immersion. Je fixe mon
fil en surface, range mon dévidoir à la ceinture. Il est temps maintenant rependre le chemin du retour. Je
refranchirai le siphon en 55 min. Les paliers se feront en m’amusant avec quelques perches, et autres
poissons, venus se réchauffer dans des eaux plus chaudes que celle de l’Ardèche en cette saison.
A midi pile, je refais surface.
Georges et Patrick arrivent en canoë. Ils ont été voir l’entrée de la Guigone, 200m en amont. Pendant que
Georges ira faire sa plongée balade, lui indiquant qu’il faut aller au-delà de 150m pour trouver une bonne visi,
Patrick et moi irons voir le départ du siphon de la Guigone, un futur objectif… A 15h, nous avons replié et
acheminé notre matériel de plongée sur la plage du camping des templiers. En 1h tout sera remonté, et
chargé sur le téléphérique pour remonter au parking.
Xavier Méniscus

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