Américains et Irakiens face à face

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Américains et Irakiens face à face
www.lemonde.fr
DIMANCHE 13 - LUNDI 14 AVRIL 2003
59e ANNÉE – N 18108 – 1,20 ¤ – FRANCE MÉTROPOLITAINE
DOUBLE PEINE
Le projet de loi Sarkozy
la supprime pour les
étrangers ayant des
attaches en France p. 11
Américains et Irakiens face à face
Le chaos. Pillages et incendies ont
MUSIQUE
Apple convoite
la filiale Universal
Music de Vivendi p. 15
marqué les premiers jours de l’Irak
« libéré » de la dictature de Saddam
Hussein depuis la chute de Bagdad,
le 9 avril. Dans la capitale, les militaires américains ont semblé laisser faire, affirmant craindre, selon un officier, de tomber dans « le piège du
maintien de l’ordre ». Des Bagdadis
qui tentaient de faire eux-mêmes la
police ont été pris pour cible par l’armée américaine. Nos envoyés spéciaux à Bagdad, Patrice Claude et
Rémy Ourdan, racontent la mise à
sac des bâtiments officiels, des
hôtels et des magasins, et décrivent
des habitants apeurés, s’interrogeant sur la méthode américaine.
Dans la misérable Saddam City, faubourg majoritairement chiite, la
population s’organise autour de ses
imams et évoque parfois « un gouvernement islamique ». Dans le Sud,
à Bassora, où le calme semble être
revenu, ce sont aussi les chefs chiites qui s’efforcent de mettre fin au
chaos. Dans le Nord, à Kirkouk, la
plupart des combattants kurdes se
sont retirés. A Washington, George
W. Bush a lancé un avertissement à
p. 2 à 5
la Syrie.
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Irak : premier test
de la stratégie de Bush
Les Anglais calment Bassora
GAUCHE
Jospin invité d’Europe 1,
dimanche. Christiane
Taubira s’explique p. 10
RETRAITES
Syndicats et patronat
« déçus » par les
orientations Fillon p. 9
et incendies
ont marqué les
premiers jours de la
chute de la dictature
f Les
récits de nos
envoyés spéciaux
dans la capitale
fA
Saddam City,
faubourg de Bagdad
à majorité chiite,
ainsi qu’à Bassora
les imams prennent
la situation en main
La traque de Saddam Hussein. Le
Pentagone distribue un jeu de 52 cartes à l’effigie des 52 responsables irakiens les plus recherchés. Saddam y
est l’as de pique. Un demi-frère du
raïs tué dans un raid aérien.
p. 6
La diplomatie. Réunis à SaintPétersbourg,
Jacques
Chirac,
Gerhard Schröder et Vladimir Poutine ont insisté sur le rôle de l’ONU.
Ils continuent à défendre une
conception des rapports internatio-
naux qui « exclut l’unilatéralisme ».
Samedi, au Caire, Dominique de Villepin a exposé le projet français
p. 7 et 24
pour le Moyen-Orient.
Notre éditorial.
ARCHITECTURE
Inauguration du Grand
Théâtre de Lorient p. 20
f Etat
des lieux : prix,
réserves, oléoducs
f Les
projets
de privatisation
Lire notre dossier, pages I à VIII
Madonna antiguerre, « en dehors du rêve américain »
MADONNA a décidé de ne pas diffuser le clip vidéo du
premier titre de son nouvel album, American Life. A en
croire les détracteurs de l’industrie musicale, la star américaine aurait suivi les conseils de son entourage financier. American Life, dont la musique a été composée par
le Franco-Afghan Mirwais, serait une chanson antiguerre, pacifiste, mal venue alors que l’armée américaine prétend libérer l’Irak. Le clip, conçu avant la guerre,
n’a jamais été montré aux Etats-Unis, mais a été diffusé
en France sur M6 et sur MCM dans la nuit du 31 mars au
1er avril, date à laquelle Madonna a décidé de le cacher,
« par respect pour les forces armées engagées en Irak ».
A bien regarder cette réalisation de Jonas Akerlund, la
critique adressée à l’Amérique par Madonna, qui vit
aujourd’hui à Londres, va bien au-delà de la guerre en
Irak. Elle est d’une radicalité peu supportable par les
patriotes et les faucons américains. Le clip commence
par un défilé de mode militaire, treillis froufrous, guêpières piégeantes, masques à gaz pour fashion victims, colliers en balles de mitrailleuse. Une femme porte une
jambe coupée, des vidéos montrent des immeubles en
feu et des champignons atomiques. Se glissent dans
cette armée de travelos et de femmes cogneuses des
PORTRAIT
György Sandor, Bartok
sur tous les tons p. 22
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0123
ARGENT
Acheter pour louer
est-il rentable ?
Le marché de l’art
Entreprises................ 15
Aujourd’hui.............. 16
Météorologie ........... 19
Jeux ........................... 19
Culture ..................... 20
Radio-Télévision...... 23
symboles de la société américaine. Puis surgissent deux
enfants défilant en tenue de rizière (le Vietnam) et deux
petites filles presque en tchador (l’Afghanistan, l’Irak).
Une meute de photographes mitraillent, ces jeunes mannequins sont chics, beaux. Ils font partie de la représentation du monde.
Autre séquence : aux toilettes pour femmes, un commando – d’Hispanos, de Blacks, de Blanches – se prépare
à l’attaque. L’une fumant du crack (ou assimilé), l’autre
lacérant le mur au couteau pour écrire « Protect Me »
(« Protégez-moi »). Soudain, un gros plan sur le drapeau
américain et le visage de Madonna, rageur, qui en arrive
à l’essentiel : « I’d like to express my extreme point of
view/I’m not Christian and I’m not a Jew/I’m just living
out the American dream/And I just realized that nothing
is what it seems » – « Ni chrétienne, ni juive, juste en
dehors du rêve américain, où il ne faut pas se fier aux
apparences ». Madonna, guerrière du rien, lance une grenade sur l’assistance. C’est un briquet. Un quasi-sosie de
George W. Bush s’en sert pour allumer son cigare.
La farce est terminée. Cruelle et dansante.
Véronique Mortaigne
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AVEC LA PRISE de Bagdad, les
Etats-Unis sont devenus, au ProcheOrient, un acteur à part entière.
George W. Bush, qui dénonçait, en
2000, pendant sa campagne électorale, le nation building pratiqué par
le gouvernement Clinton dans les
Balkans, est engagé aujourd’hui
dans la plus grande et la plus
périlleuse entreprise de ce genre
tentée par les Etats-Unis – ou par
qui que ce soit d’autre – au ProcheOrient depuis la fin de l’Empire ottoman il y a quatre-vingts ans.
Les choix que fait ou va faire
Washington pour l’organisation de
l’Irak sont lourds de conséquences,
pour ce pays, pour toute la région
et, dans une certaine mesure, pour
le monde musulman. Or la bataille
LE PHOTOGRAPHE Laurent Van der Stockt, de l’agence Gamma, a
suivi pendant trois semaines la progression du 3/4 marines jusqu’à la
prise de Bagdad, le 9 avril. Ayant déjà couvert plusieurs guerres, il confie au Monde son étonnement devant le comportement de cette « troupe aguerrie » dont la devise est « Search and Kill » (chercher et tuer).
Recueilli par Michel Guerrin, son témoignage décrit une armée irakienne « fantôme, quasi inexistante », des marines qui « abusent d’une
force inadaptée » et des civils – femmes, enfants, vieillards (photo prise
le 7 avril) – tués sans sommation.
Lire notre « Vu par », page 4
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Washington dans les affres
de l’après-Saddam Hussein
Les robots
androïdes
arrivent
France, la Russie
et l’Allemagne
plaident pour l’ONU
contre l’unilatéralisme
« J’ai vu cette troupe aguerrie
tirer sur des civils irakiens »
: la bataille
pour le pétrole
commence
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GOÛTS
Pâques et légumes
p. 18
de printemps
p. 13
f La
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f Dossier
DANS la guerre, les puits de
pétrole sont restés quasi intacts.
Qu’en fera l’administration américano-britannique du pays ? La
deuxième réserve du monde excite
toutes les convoitises. Elle jouera
un rôle-clé dans la reconstruction
du pays. Le Monde présente les éléments-clés, historiques et actuels,
du dossier. Dans une interview
exclusive, l’expert Youssef Ibrahim
nous annonce que Washington a
déjà désigné les responsables pour
gérer le redémarrage de la production de l’or noir irakien.
CUBA
Exécution des 3 pirates
d’un ferry
p. 8
A YOKOHAMA (Japon), le
Salon Robodex présente les
derniers robots « intelligents » à forme humaine destinés à la surveillance et à
l’aide ménagère. Lire page 16
f Pillages
La ruée sur l’or noir de l’Irak
UNION EUROPÉENNE
Référendum, samedi,
p. 8 et 12
en Hongrie
Le conflit irakien....... 2
International ............. 8
France-Société........... 9
Horizons.................... 12
Carnet ....................... 14
Abonnements .......... 14
FONDATEUR : HUBERT BEUVE-MÉRY – DIRECTEUR : JEAN-MARIE COLOMBANI
fait rage, à Washington, sur la
façon de s’y prendre.
Une première logique est celle de
l’occupation a minima. Elle se décline de la façon suivante : les EtatsUnis ont attaqué et défait le régime
de Saddam Hussein en raison de la
menace que représentaient ses
armes non conventionnelles et son
agressivité antiaméricaine. Une fois
ce régime renversé, l’essentiel est
de mettre en place un pouvoir qui
assure la tranquillité d’esprit des
Etats-Unis. Cyniquement, l’idée est
d’avoir, à Bagdad, l’équivalent des
régimes amis du Caire ou d’Amman, où la démocratie et la liberté
d’expression ne sont pas en vogue.
Dans le cas de l’Irak, s’ajoute la
difficulté d’avoir à tenir ensemble
un pays divisé. Néanmoins, on remplacera un pouvoir autoritaire par
un autre pouvoir autoritaire, et les
forces américaines se retireront du
pays le plus vite possible.
Une deuxième logique est celle
de l’occupation transformatrice.
Elle dérive, pour une part, des difficultés de mise en œuvre de la précédente. Pour assurer la stabilité et
l’intégrité de l’Irak, il faut faire
davantage que de trouver des successeurs à Saddam Hussein et à son
clan. Le renversement du parti Baas
oblige à repenser tout le système
institutionnel irakien.
Patrick Jarreau
Lire la suite page 13
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Irlande 1,50 ¤, Italie 1,50 ¤, Luxembourg 1,20 ¤, Maroc 10 DH, Norvège 18 KRN, Pays-Bas 1,50 ¤, Portugal cont. 1,50 ¤, Réunion 1,50 ¤, Sénégal 1000 F CFA, Suède 18 KRS, Suisse 2,40 FS, Tunisie 1,5 DT, USA (NY) 2 $, USA (others) 2,50 $.