L`actualité en France en matière de droit de la concurrence dans les

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L`actualité en France en matière de droit de la concurrence dans les
Ribeiro Oertel, Roberta
L’actualité en France en matière de droit de la concurrence dans les
accords de distribution
The European Legal Forum (E) 2/3-2006, 88 - 94
© 2006 IPR Verlag GmbH München
The European Legal Forum - Internet Portal
www.european-legal-forum.com
Literature Doc. 679
Issue 2/3-2006 „ The European Legal Forum „
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L’actualité en France en matière de droit de la concurrence dans les accords de distribution
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Roberta Ribeiro Oertel
Introduction
En droit communautaire, les accords de distribution relèvent
essentiellement de l’article 81 du Traité instituant la Communauté européenne (« Traité »). Cette disposition interdit les
accords susceptibles d’affecter le commerce entre les Etats
membres en ce qu’ils ont pour objet ou pour effet d’empêcher,
de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence. L’article
81 du Traité prévoit que certains accords, dont les effets positifs l’emportent sur les effets anticoncurrentiels, peuvent être
« exemptés » sous certaines conditions. Il s’agit des accords
qui contribuent à améliorer la production ou la distribution
des produits ou à promouvoir le progrès technique ou écono1
mique. Le régime est complété par plusieurs textes importants.
D’abord, la communication concernant les accords
d’importance mineure (« Communication de minimis ») permet de soustraire à l’article 81 para. 1 du Traité les accords
verticaux, lorsque la part du marché de chacune des parties
n’excède pas 15% pour autant cependant que ces accords ne
2
contiennent pas des restrictions « caractérisées ». En dessous
du seuil de 15%, l’accord est considéré comme ne pouvant pas
affecter de manière sensible le jeu de la concurrence, ce qui exclut l’application de l’article 81 para. 1 du Traité. Ce seuil est
abaissé à 5% lorsque le marché est verrouillé du fait de réseaux
3
parallèles de restrictions verticales similaires.
Mais surtout, deux règlements communautaires complètent
le régime de l’article 81 du Traité.
En premier lieu, le régime complété par le Règlement
d’exemption par catégorie n° 2790/1999 du 22 décembre 1999,
adopté en application de l’article 81 para. 3 du Traité (« règle4
ment d’exemption »). Ce règlement est entré en vigueur le
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Présentation relative aux « Accords Verticaux – Conflits de concurrence
et de résolution contractuelle », tenue lors du Séminaire organisé à Barcelone (ES) du 8 au 10 juin 2006, organisé par l’Association Européenne
des Avocats (AEA).
Doctorante en Droit International des Affaires à l’Université Robert
Schuman, Strasbourg III; DEA Droit International à l’Université Robert Schuman, Strasbourg III; Directrice de la Formation Continue des
Avocats d’Alsace à l’Ecole Régionale des Avocats du Grand Est
(ERAGE), Strasbourg (FR); Avocate au Barreau de Porto, Portugal (PT).
A noter qu’avec l’entrée en vigueur, le 1er mai 2004, du « paquet modernisation », tout accord qui remplit les conditions de l’article 81 du
Traité est dorénavant considéré comme valable sans qu’une notification
et une décision de la Commission européenne ne soient requises (Règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la
mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82
du Traité (JO 2003, L 1, p. 1)).
Communication de la Commission européenne, concernant les accords
d’importance mineure qui ne restreignent pas sensiblement le jeu de la
concurrence au sens de l’article 81 no. 1 du Traité (de minimis), du
22 décembre 2001 (JO 2001, C 368, p. 13), para. 7 lit. B et para. 11.
Communication de minimis (n. 16), ch. 8.
Règlement (CE) n° 2790/1999 du 22 décembre 1999 concernant
l’application de l’article 81 para. 3 du Traité à des catégories d’accords
verticaux et de pratiques concertées (JO1999, L 336, p. 21).
1er janvier 2000 et expirera le 31 mai 2010. Il a une grande portée dans la mesure où il prévoit « l’exemption en bloc » de certains accords verticaux.
Le règlement d’exemption prévoit ainsi une exemption de
principe des accords verticaux lorsque (i) la partie du marché
du fournisseur (exceptionnellement de l’acheteur si le fournisseur s’engage à n’approvisionner qu’un seul acheteur dans la
Communauté) n’excède pas le seuil de 30% et que (ii) l’accord
ne comporte pas certaines « restrictions caractérisées », dont la
définition rejoint pour l’essentiel celle donnée par la Commu5
nication de minimis. Par ailleurs, certaines obligations de
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non-concurrence ne peuvent pas bénéficier de l’exemption.
En second lieu, si le règlement d’exemption s’applique en
principe quel que soit le marché des produits considéré. Toutefois, le domaine de la distribution automobile fait l’objet
d’un règlement sectoriel d’exemption particulier, c’est le Rè7
glement (CE) n° 1400/2002 du 31 juillet 2002. Eu égard à
l’expérience acquise dans ce domaine, ce règlement sectoriel,
qui est entré en vigueur le 1er octobre 2002 et qui expirera le
31 mai 2010, instaure des règles plus sévères que le Règlement
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d’exemption 1475/1995.
Enfin, les « lignes directrices » sur les restrictions verticales
émises par la Commission européenne, constituent un guide
détaillé qui a pour objet, d’une part, de commenter le règlement d’exemption et, d’autre part, de fournir des critères permettant d’évaluer, à la lumière de l’article 81 du Traité, les restrictions verticales qui ne sont pas couvertes par le règlement
d’exemption (ce qui est le cas, en principe, lorsque la part du
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marché du fournisseur excède le seuil de 30%). Ces lignes
constituent un outil particulièrement sophistiqué qui analyse
les aspects économiques et commerciaux de la plupart des accords verticaux que l’on rencontre en pratique. Leur utilisation se révèle précieuse pour les praticiens et pour les entreprises.
Le régime applicable aux accords de distribution aux termes
du règlement est complexe, tant d’un point de vue procédural
(interaction avec d’autres règlements d’exemption, possibilité
pour la Commission de retirer le bénéfice de l’exemption a
posteriori, etc.), que d’un point de vue du fond (les théories de
la Commission en la matière sont exprimées dans un document de 40 pages et impliquent une analyse économique complexe et au cas par cas).
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Article 2 du Règlement (CE) n° 2790/1999 du 22 décembre 1999.
Lignes directrices du 13 octobre 2000 sur les restrictions verticales émises par la Commission européenne (JO 2000, C 291, p. 1).
Règlement (CE) n° 1400/2002 du 31 juillet 2002 concernant
l’application de l’article 81 para. 3 du Traité à des catégories d’accords
verticaux et des pratiques concertées dans le secteur automobile
(JO 2002, L 203, p. 30).
Ce règlement, applicable jusqu’au 30 septembre 2002, sous réserve de
certaines règles transitoires, prévoyait en régime plutôt indulgent à
l’égard de la distribution automobile.
Lignes directrices, op. cit. n° 6.
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La mise en oeuvre des règlements au niveau communautaire : l’insuffisante garantie de sécurité juridique des entreprises
En voulant assouplir ses instruments de contrôle, la Commission a fini par les rendre très imprévisibles. Elle a ajouté au
texte principal de nombreux actes accessoires interprétatifs,
comme par exemple, les lignes directrices des restrictions verticales qui ne comptent pas moins de 229 articles, développés
en 55 pages, accompagnant le Règlement général du même
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nom, et constituant un véritable règlement.
Le nouveau règlement automobile ne se compose que de
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12 articles mais s’accompagne d’une brochure explicative de
99 pages. A peine était-il entré en vigueur pour tous les coner
trats en cours au 1 octobre 2003, que le 12 novembre de la
même année, la Commission a publié une brochure addition12
nelle contenant de nouvelles interprétations, de nouvelles
obligations et même de nouvelles formes de contrats.
Une autre source d’insécurité provient de l’utilisation par de
nouveaux règlements de la notion d’« obligation indirecte » ou
de « restriction de concurrence indirecte ». La Commission
utilise ces termes pour saisir le maximum de situations anticoncurrentielles possibles. Mais dans la mesure où le caractère
indirect de la restriction ou de l’obligation n’est soumis à aucune limite, toute clause contractuelle qui, même indirectement, pourrait se transformer en une clause « noire » ou
« rouge » est susceptible de tomber sous le coup de la prohibition. Prenons comme exemple une clause relative à un critère
de sélection purement qualitatif, tel que le nombre minimum
de véhicules de la gamme à exposer. Ce critère qualitatif améliore incontestablement le service que le distributeur doit rendre au client final. Il constitue pourtant, pour la Commission,
une obligation indirecte de non-concurrence, donc une clause
« rouge » interdite, dès lors qu’il rendrait trop difficile la représentation d’une autre marque. Ainsi, selon la situation du
distributeur, la même obligation qualitative pourra être ou
non assimilée à une obligation de non-concurrence interdite.
La contradiction des objectifs
On retrouve dans les nouveaux règlements certaines imperfections des règlements précédents : la Commission persiste à
voir le droit de la concurrence comme un simple instrument
de la liberté de circulation des marchandises ; elle confond
aussi parfois protection de la concurrence et protection des
concurrents. On ajoute aujourd’hui à ces difficultés classiques,
la nouvelle approche économique avec l’instrument juridique
qui représente le règlement d’exemption.
Dans le but de favoriser la liberté de circulation, la Commission accorde des traitements différents à des restrictions verticales produisant pourtant dans les faits des effets similaires ; en
appréciant par exemple de façon très sévère la fixation du prix
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12
Voir supra n° 9.
Voir supra n° 7.
Brochure explicative de la Commission sur le Règlement (CE)
n° 1400/2002 du 31 juillet 2002 concernant l’application de l’article 81
para. 3 du Traité à des catégories d’accords verticaux et des pratiques
concertées dans le secteur automobile : http/www.europa.eu.int/
comm/competition/car_sector/distribution/faq_fr.pdf
de revente alors que celle-ci peut avoir les mêmes effets favorables que la distribution sélective elle-même. Dans le règlement automobile n° 1400/2002, la Commission va encore plus
loin : bien que reconnaissant l’efficience de la distribution sélective qualitative et quantitative en son principe, elle en ruine
er
l’économie en autorisant dès le 1 octobre 2005 tout distributeur automobile revendeur du réseau à s’établir partout en Europe, pour créer des points de vente, ou même de simples
points de livraison. Au nom de la libre concurrence du marché
interne, le texte remet en cause le principe même sur lequel il
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est bâti : la sélection quantitative et qualitative.
Pour certains, cette façon d’attribuer une protection a un aspect pro concurrentiel, car elle compenserait l’état de dépendance économique de certains distributeurs. Pour d’autres, les
distributeurs et réparateurs en place sont sur protégés au détriment des nouveaux entrants.
La logique économique qui inspire le règlement à fixer le
seuil une fois pour toutes, quelles que soient les conditions du
marché (sans tenir compte des barrières à l’entrée ou de
l’importance de la concurrence potentielle) n’a aucun sens.
Mail, était-il possible de faire autrement ?
Dans une approche économique, l’analyse est faite cas par
cas. Cependant, la même opération est impossible à reproduire
dans un règlement, même si on lui ajoute des communications
interprétatives ou une possibilité de non exemption de restrictions simplement indirects.
La question est de savoir dans quelle mesure un règlement
d’exemption a encore sa place dans un « système d’exception
légale », qualification que la Commission a alloué au nouveau
règlement européen. Directement dérivée de l’approche économique, l’exception légale signifie que l’exemption perd
toute autonomie par rapport à l’interdiction et qu’elle ne peut
plus attribuer a priori dans les cas particuliers.
Un système d’exception légale ne supporte pas de règlements d’exemption qui ajouteraient des conditions à la loi.
Ceci étant, pourrait-on songer que les règlements d’exemption
ne sont pas nécessairement destinés à devenir de simples lignes
directrices ?
En France, le règlement des restrictions verticales est déjà
appliqué par certaines autorités nationales, à titre de guide
d’analyse, pour interpréter le droit national, même s’il n’est
applicable qu’aux accords verticaux de dimension communau14
taire.
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14
Voir d’autres exemples : la faculté de retrait de l’exemption en cas de
différentiel de prix entre les différents Etats de l’Union européenne, article 6 para. 1, lit. c du Règlement (CE) 1400/2002, et en faveur de la
protection des concurrents les contrats des distributeurs et réparateurs
ne sont quasiment plus résiliables sauf pour faute ou avec préavis de
deux ans, selon l’article 3 para. 4 de ce même Règlement.
Cons. conc., Cassino/Bausch et Lomb, décision n° 2001-D-45 du
19 juillet 2001, BOCCRF n° 14, 24 septembre 2001 ; Cons. conc., Serap/Babour décision n° 02-D-01 du 22 janvier 2002 ; Lunettes
d’optique sur le marché de l’agglomération lyonnaise, décision n° 02-D36 du 14 juin 2002 ; Cuisines Plus, décision n° 03-D-39 du 4 septembre 2003 ; Cons. conc., décision n° 03-D-60 du 13 décembre 2003 relative à des pratiques mises en œuvre dans le domaine de l’horlogerie de
luxe, BOCCRF, 13 février 2004. Adde, Cons. conc., décision n° 03-D69 du 29 décembre 2003, relative à des pratiques mises en œuvre dans le
secteur de la distribution de produits pour prothésistes dentaires,
BOCCRF, 13 février 2004.
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I – L’accord de représentation : l’agence commerciale
Si le contentieux concernant l’agence commerciale en matière de droit européen de la concurrence est modeste, les affaires portant sur la cessation de contrat d’agence commerciale
sont d’actualité et abondent en droit interne.
A – Problèmes liés au droit européen de la concurrence
dans le contrat d’agence commerciale
La Commission considère que seuls les « véritables » contrats d’agence peuvent tirer bénéfice des exemptions, à savoir
les « contrats d’agence dans lesquels une personne physique
ou morale est investie du pouvoir de négocier ou de négocier
et de conclure des contrats pour le compte d’une autre personne, soit en son nom propre, soit au nom du commettant en
vue de l’achat de biens et/ou de services fournis par le com16
mettant ».
De même lorsqu’une obligation de non-concurrence souscrite par l’agent commercial au profit du mandant affecte le jeu
de la concurrence en empêchant l’agent d’intervenir pour
17
d’autres fournisseurs de service et produits concurrents. La
Commission se prononce sur ce sujet, en soulignant que lorsque cette interdiction se prolonge au-delà de l’expiration du
contrat, elle « concerne la concurrence inter-marques et peut
enfreindre l’article 81 para. 1 si elle entraîne le verrouillage du
marché sur lequel les biens ou services contractuels se ven18
dent ».
Il se peut aussi que « l’obligation d’exclusivité imposant au
mandataire de ne pas désigner d’autres agents pour le type
19
d’opération, de clientèle ou dans le territoire contractuel »
affecte le jeu de la concurrence et, puisse pourtant être sanctionnée.
Un peu plus récemment, dans l’affaire DaimlerChrysler AG
(aff. T-325/01), jugée le 15 septembre 2005, le Tribunal de
Première Instance des Communautés européennes (TPICE) a
partiellement annulé la décision de Mercedez-Benz rendue par
la Commission, le 10 octobre 2001, en rappelant que
l’interdiction prévue à l’article 81 concerne exclusivement des
comportements coordonnés bilatéralement ou multilatéralement, sous forme d’accords entre entreprises, de décisions
d’associations d’entreprises. Il précise dès lors, en se référant à
20
la jurisprudence Bayer, que la notion d’accord au sens de
l’article 81 est fondée sur l’existence d’une concordance de volontés entre deux parties au moins. Par contre, la décision à
portée identique d’un seul fabricant constitue un comportement unilatéral, donc d’une seule entreprise et échappe à
l’interdiction de l’article 81.
l’agent, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, ne
détermine pas de façon autonome son comportement sur le
marché, mais applique les instructions données par son commettant. Ainsi, les interdictions édictées par l’article 81 sont
inapplicables dans les rapports entre l’agent et son commettant, avec lequel il forme une unité économique.
En outre, la Cour de cassation a jugé dans un arrêt du
12 janvier 1999 que « l’exclusivité consentie à un agent commercial par la plupart des fournisseurs sur un marché a été annulée au motif qu’elle constituait une pratique anticoncurrentielle discriminatoire à l’encontre d’autres agents
21
potentiels ».
En matière de restrictions directes et indirectes à la liberté
des prix, le Conseil de la concurrence français a retenu une position restrictive, comme l’illustre l’affaire Benetton (2001-D58), en considérant que le fait que les prix étaient pré-étiquetés
ne permet pas de conclure que les prix conseillés seraient de
fait imposés, dès lors que beaucoup de revendeurs
n’appliquent pas ces prix, que les agents commerciaux ne contrôlent pas les prix et qu’aucune mesure de rétorsion n’est
adoptée contre les revendeurs pratiquant des prix plus bas.
Mais si le contentieux lié à l’agence commerciale en matière
de concurrence est infime en droit français, nous allons voir
que l’agence commerciale suscite beaucoup plus d’intérêt dès
lors qu’on soulève des questions liées à la cessation du contrat
par exemple, même après la réforme du 25 juin 1991, codifiée
au Code de commerce. Cette réforme appelée pourtant à con22
forter le régime préexistant.
B – La cessation du contrat d’agence commerciale en droit
français
L’écoulement de la durée du contrat est la principale cause
de rupture d’un contrat d’agence commerciale. De ce fait,
l’article L. 134-11 du Code de commerce précise, conformément à la Directive de 1986, les formes de renouvellement ou
de reconduction du contrat lorsqu’il s’agit d’un contrat à du23
24
rée déterminée ou à durée indéterminée.
Toutefois, en cas de cessation du contrat d’agence, l’agent
commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi. Il doit pour autant notifier sa demande
au mandant dans un délai d’un an à compter de la cessation du
contrat (article L. 134-12). Il est interdit aux parties au nom de
l’Ordre public de stipuler qu’une faute grave puisse priver
l’agent d’une telle indemnisation – seule une juridiction est
21
22
Dans cette affaire DaimlerChrysler, le TPICE considère que
15
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18
19
20
Droit national : Code de commerce arts. L. 134-1 à 134-17 (modifié par
la Loi n° 91-593 du 25 juin 1991) ; Décret du 23 décembre 1958 et la
Directive communautaire du 18 décembre 1986.
Lignes directrices du 13 octobre 2000 sur les restrictions verticales émises par la Commission européenne (JO 2000, C 291-4, p. 12).
D. Ferrier, Droit de la distribution, 3ème éd., Litec, 2002, p. 128.
Lignes directrices, préc., pt. 16.
D. Ferrier, op. cit., n° 16.
TPICE, 26 octobre 2000, Bayer AG (aff. T-41/96).
23
24
Idem. Paris, 12 décembre 1986 : Lettre distrib. 1997-1 ; Cass. com.,
12 janvier 1999.
L’agence commerciale est encore régie en droit interne français par le
Décret n° 58-1345 du 23 décembre 1958, ainsi que la Directive du
18 décembre 1986.
L’article 134-11 du Code de commerce précise que qu’ « un contrat à
durée déterminé qui continue à être exécuté par les deux parties après
son terme est réputé transformé en un contrat à durée indéterminée ».
L’article 134-11 du Code de commerce détermine que la durée est liée à
celle des relations contractuelles, de sorte que si le contrat en cours résulte de la transformation d’un contrat à durée déterminé en contrat à
durée indéterminée, on tiendra compte, pour la détermination de la durée du préavis, du temps écoulé depuis la conclusion du contrat à durée
déterminée. La durée du préavis ne peut être inférieure à un mois pour
la première année du contrat, deux mois pour la seconde année, trois
mois au delà ; la fin du délai devant coïncider avec la fin d’un mois civil.
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25
compétente.
Cependant, la faute grave est toujours appréciée de manière
restrictive par la jurisprudence, dans la mesure où elle pourrait
priver l’agent de la protection légalement prévue en fin de
26
contrat. Ainsi, s’il est constaté que la rupture a été provoquée
de manière détournée par le mandant, l’agent commercial a
droit à réparation du préjudice que lui cause la cessation du
27
contrat.
En réalité, la question de l’indemnité de fin de contrat due à
l’agent commercial a été toujours la cause de l’abondance du
contentieux en droit français. Plusieurs arrêts ont été rendus
en ce qui concerne à l’appréciation du degré de gravité de la
28
29
faute de l’agent, la demande et le calcul de l’indemnisation,
30
ainsi que la prescription de l’action.
Il est prévu aussi que le contrat puisse prévoir une clause de
non-concurrence à la fin du contrat à la charge de l’agent
(Code de commerce, article L. 134-14, al. 1). Cette clause est
post-contractuelle et ne sera toutefois valable que si elle est
écrite, limitée aux produits et services visés par le contrat
d’agence, ainsi qu’au territoire ou à la clientèle confiés à
l’agent commercial (Code de commerce, article L. 134-14,
al. 2). Elle ne pourra lier l’agent commercial que pendant une
durée maximale de deux années après la cessation du contrat.
II – L’accord de réseau
A – Distribution sélective
La distribution sélective permet de minimiser les risques de
comportements de « passagers clandestins » entre distributeurs. Cela suppose cependant que les critères retenus pour
admettre un distributeur dans son réseau permettent un contrôle suffisant. Les solutions communautaires ont été critiquées en ce qu’elles ne permettaient pas une sélection suffisamment poussée des distributeurs. La jurisprudence française
s’est parfois distancée des solutions communautaires, mais,
malgré certaines incertitudes, le Conseil de la concurrence réclamait la justification du bien-fondé de ce mode de distribution pour le produit en cause.
En droits communautaire et français, les critères doivent être
appliqués objectivement et sans discrimination.
La distribution sélective, depuis sa reconnaissance explicite
dans le Règlement (CE) n° 2790/1999 du 22 décembre 1999
sur les restrictions verticales de concurrence (article 4), est responsable d’un nombre important de décisions en la matière.
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29
30
Le juge est le seul à pouvoir décider si lors de la rupture du contrat
d’agence la faute attribuée à l’agent est réellement qualifiée comme
grave. Cass. com., 28 mai 2002.
J. Hémard, note sous Cass. com., 9 février 1971 : JCP 1972, II, 17064.
Cass. com., 23 juin 2004.
Dans ce sens voir aussi : Cass. com., 27 septembre 2005, note E. Chevrier, D. 2006, n° 37.
Idem.
Idem. La Cour de Cassation a statué que le point de départ du délai de
réclamation de l’indemnité des agents commerciaux doit être pris en
compte une fois que l’extinction des relations devient effective et non
pas à partir de la date de notification de la rupture. L’article L. 134-12
du Code de commerce n’institue pas une prescription extinctive de
l’action de l’agent commercial, mais une déchéance de son droit à réparation, C. com. 18 mai 2005.
La distribution sélective, fondée sur l’édiction de critères
qualitatifs en rapport avec la commercialisation des produits,
impose en principe que la sélection de tout distributeur satisfassent ces critères (Cons. conc., 21 septembre 2005, décision
n°05-D-50, SCOB – Brasserie Kronenbourg, qui justifie la distribution sélective pour la commercialisation de la bière en
fûts par le fait « qu’elle requiert la mise en œuvre
d’équipements, de services d’assistance et de soins particuliers
en vue de préserver la qualité du produit jusqu’à son tirage
destiné au consommateur final »). Pourtant, les juges admettent depuis peu l’application des critères quantitatifs permettant de limiter le nombre de distributeurs sélectionnés et donc
d’exclure des distributeurs pourtant sélectionnables.
Dans l’affaire Jaeger Lecoultre (Cons. conc., 28 juillet 2005,
31
décision n° 05-D-46), le Conseil de la Concurrence a été saisi
par la société Mouret, distributeur exclusif pour la distribution
des pièces détachées de la société Jaeger Lecoultre (fabricant
de montres de haut de gamme) en invoquant un abus de position dominante de Lecoultre constitué par un refus
d’approvisionnement de pièces détachées.
Le Conseil de la concurrence a rejeté la plainte. Sur la définition du marché pertinent le Conseil a soutenu que la rupture
d’un contrat de distribution sélective dans le but d’organiser le
réseau en vue d’améliorer la qualité du service après-vente,
ainsi que l’image et la qualité de la marque n’est pas abusif et,
ne constitue pas une entente concurrentielle. Il ressort des affirmations du Conseil de la concurrence que « le niveau de
minutie et de précision des réparations assurées par J. Lecoultre
est donc supérieur à celui assuré par les ateliers de réparation
indépendants ».
Dans l’affaire Metro (CJCE, 25 octobre 1977, Rec., p. 1875),
la Cour de justice des Communautés européennes a précisé, à
juste titre, que « les systèmes de distribution sélective constituent (...) un élément de concurrence conforme à l’article 81,
para. 1. du Traité CE, à condition que le choix des revendeurs
s’opère en fonction de critères de caractère quantitatif, relatifs à
la qualification professionnelle du revendeur, de son personnel
et de ses installations, que ces conditions soient fixées d’une
manière uniforme à l’égard de tous les revendeurs potentiels, et
appliquées de façon non discriminatoire ».
Dans la même décision, la Cour a décidé qu’un revendeur
non sélectionné peut commercialiser des produits couverts par
la distribution sélective dès lors qu’il les a régulièrement acquis, c’est-à-dire qu’il ne les a pas obtenus auprès d’un distributeur sélectionné en se faisant ainsi complice d’une violation
du contrat de distribution qui doit, en application du droit de
la concurrence, interdire au distributeur sélectionné de revendre les produits à un revendeur non sélectionné (Règleo
ment (CE) n 2790/1999, article 4, lit. d), et dans l’article
L. 442-6-I, 7, du Code de commerce).
La Cour de cassation s’est récemment prononcée en utilisant
cette même solution (Cass. com., 11 janvier 2005 – pourvoi n°
02-10.566), en affirmant que le promoteur d’un réseau de distribution sélective, implanté en France pour diffuser les produits d’un fournisseur américain (la société Levi Strauss),
poursuivait en concurrence déloyale un revendeur non sélec31
Voir aussi : CA Paris, 29 juin 2004, D. 2005, Pan. p. 152.
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tionné (société Auchan) qui commercialisait ses produits. Le
revendeur estimait l’action non fondée au motif qu’il avait acquis les produits hors de France auprès de distributeurs sélectionnés mais qui n’appartenaient pas au réseau implanté en
France et qui n’avaient donc souscrit auprès de son promoteur
aucun engagement de non rétrocession à des distributeurs non
sélectionnés.
La Cour de cassation dans arrêt du 11 janvier 2005, rejette
cet argument et souligne que « l’effet relatif des contrats
n’interdit pas aux tiers [en l’occurrence le promoteur du réseau français] d’invoquer la situation de fait créée par les conventions auxquelles ils n’ont pas été partie [en l’occurrence les
contrats de distribution sélective conclus dans le cadre
d’autres réseaux] si cette situation de fait leur cause un préjudice de nature à fonder une responsabilité délictuelle ».
Il se trouve que le contrat de distribution est pourtant opposable au revendeur hors réseau, même par celui qui n’était pas
partie. La Cour de cassation confirme donc qu’il était légitime
d’interdire la vente des produits de marque Levi’s par la société Auchan, dès lors que la société Levi Strauss justifiait que ces
produits étaient commercialisés en Europe par un réseau de
distribution sélective tout à fait conforme au droit de la
concurrence et dont la société Auchan n’était pas membre.
Un peu plus récent, le Conseil de la concurrence s’est saisi
d’office de la situation de la concurrence dans le secteur de la
parfumerie de luxe et des pratiques qui y sont mises en œuvre
(Cons. conc., décision n° 06-D-04 du 13 mars 2006).
32
Le Conseil a sanctionné 13 sociétés exploitant des marques
de parfums et cosmétiques de luxe pour s’être entendues avec
leurs distributeurs sur le prix de vente au consommateur. Les
principaux chaînes nationales de distribution Marionnaud
(12,8 millions d’euros), Nocibé (5,4 millions d’euros) et Séphora (9,4 millions d’euros) ont été sanctionnées pécuniairement.
En l’espèce, chaque fournisseur de parfums ou de cosmétiques fixait à ses distributeurs le « prix public indicatif », ainsi
que le taux de remise maximum qu’ils étaient autorisés à pratiquer, de façon à uniformiser vers le haut les prix de détail des
produits offerts à la vente. Chaque entente organisée par le
fournisseur s’est accompagnée de la mise en place d’une « police des prix » consistant à contrôler les prix pratiqués, les
pressions et les menaces de représailles commerciales à l’égard
des distributeurs qui refusaient d’appliquer les prix imposés
par la marque et voulaient faire jouer la concurrence en vendant à des prix plus bas.
Dans sa décision, le Conseil de la concurrence a rappelé que
la jurisprudence tant nationale qu’européenne autorise les
marques dont l’image est associée au luxe à contrôler étroitement la situation des points de vente qui distribuent ladite
marque et à vérifier la qualité de la présentation de leurs produits de façon à assurer leur mise en valeur. Mais, cette même
jurisprudence n’autorise pas les marques à entraver la liberté
des distributeurs à choisir leur taux de marge et donc leur prix
de détail.
32
Entre les années 1997 et 2000, les entreprises Jean-Paul Gaultier, Issey
Miyake, Chanel, Christian Dior, Hermès, ELCO, se sont entre autre
entendues avec les distributeurs de leur réseau, à savoir les chaînes de
distribution Marionnaud, Nocibé et Séphora, pour faire cesser pour
chaque produit de la marque, toute concurrence entre les revendeurs au
détail de ces produits.
Ces pratiques, ayant pour objet et pour effet de faire obstacle
à la fixation des prix par le libre jeu du marché, sont constitutives de restrictions caractérisées de concurrence au regard des lignes directrices de la Commission européenne, ainsi que contraires à l’article 81 du Traité CE et l’article L 420-1 du Code
de commerce. De ce fait, le Conseil de la concurrence a sanctionné les entreprises susmentionnées à hauteur de 45,4 millions d’euros.
B – Concession exclusive
La première décision rendue au fond par une juridiction suprême nationale de l’Union européenne sur le Règlement (CE)
no 1400/2002 du 31 juillet 2002, seulement moins de deux ans
après son entrée en vigueur et l’introduction de la procédure
en première instance, a été rendue le 2 juin 2005 par la Cour de
cassation.
Dans le cadre d’une politique de restructuration de son réseau, la société Daimler Chrysler France a notifié au Garage
Gremeau la résiliation de son contrat de concession le
11 juin 2001 moyennant un préavis de deux ans expirant le
30 juin 2003. Par courrier du 16 septembre 2002, la société
Daimler Chrysler France a notifié d’autres concessionnaires,
mais elle leurs avait envoyé le 30 septembre 2003 un autre
courrier leurs proposant de les agréer en tant que réparateurs
officiels et distributeurs de véhicules neufs Mercedes à compter du 1er octobre 2003, sous réserve qu’ils respectent les critères de sélection qui leur seraient communiqués ultérieurement.
Exception faite du Garage Gremeau et de 3 autres concessionnaires.
La Garage Gremeau a spontanément présenté sa candidature, par courrier du 28 septembre 2002, auprès de la société
Daimler Chrysler France afin d’être agréé en qualité de distributeur de véhicules neufs et réparateur Mercedes. Le 18 février 2003, la société Daimler Chrysler France a refusé cet
agrément en raison du système de distribution sélective, qualitative mais aussi quantitative, l’autorisant à recourir à la sélection de ses distributeurs de véhicules neufs, dont le nombre de
distributeurs à nommer pour son réseau lui paraissait d’ores et
déjà atteint.
La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel de
33
Dijon, en ce qu’il avait jugé que la société Daimler Chrysler
France avait pu refuser l’agrément de la société Garage Gremeau en qualité de distributeur de véhicules neufs. La Cour de
cassation a estimé quant à elle : « qu’en se déterminant ainsi,
sans examiner, même d’office, ces critères de sélection, leur objectivité, et les conditions de leur mise en œuvre, la cour
34
d’appel a privé sa décision de base légale (...) ». Il semble
donc qu’un contrôle d’objectivité des critères a priori et des
conditions de leur mise en œuvre a posteriori, s’impose aux juges du fond, même d’office !
Est ainsi directement sanctionnée comme illicite la stratégie
33
34
CA Dijon, 1er avril 2004, RG n° 03/01547.
En d’autres termes, dans le cadre d’un refus d’agrément opposé sur le
fondement d’un critère quantitatif, avant même de vérifier si le numerus
clausus est atteint en raison de la désignation d’un candidat antérieurement agrée respectant les critères qualitatifs de sélection, il est fait obligation aux juges du fond de procéder à un examen des critères de sélection, de leur objectivité et des conditions de leur mise en œuvre.
„ The European Legal Forum „ Issue 2/3-2006
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de présélection mise en place par la société Daimler Chrysler
France et plus généralement par d’autres constructeurs automobiles lors de l’entrée en vigueur du Règlement (CE)
no 1400/2002 du 31 juillet 2002, ayant consisté à réserver des
places au sein de leurs réseaux de distribution sélective au profit de distributeurs discrétionnairement pré-désignés, bien que
ceux-ci ne respectassent nullement les critères qualitatifs de sélection, tout en refusant d’emblée d’examiner toute autre candidature émanant, par exemple, de l’ancien concessionnaire
déjà en place sur la zone.
Le contentieux né de ces exclusions se développe dans le secteur particulier de la vente d’automobiles neuves du fait de la
réorganisation des réseaux de distribution provoquée par
o
l’entrée en vigueur du Règlement (CE) n 1400/2002 du
31 juillet 2002. Sur les conditions de réorganisation, la Cour
d’appel de Versailles, 24 novembre 2005 a jugé que : « la réorganisation d’un réseau peut se justifier par des motifs économiques ou juridiques (...). Le juge n’a pas à porter un jugement de
valeur sur la pertinence du choix économique opéré par le con35
cédant ».
Dorénavant, les constructeurs doivent choisir entre la distribution sélective (laquelle permet d’interdire au distributeur les
reventes à des distributeurs n’appartenant pas au réseau mais
ne permet pas de lui réserver une exclusivité territoriale) et la
distribution exclusive qui permet de lui réserver une exclusivité territoriale mais ne permet pas de lui interdire les reventes à
des distributeurs n’appartenant pas au réseau. Le constructeur
dont la part du marché n’excède pas 40%, peut, en outre,
choisir entre la distribution sélective purement qualitative et la
distribution exclusive qualitative et quantitative.
Un ancien concessionnaire exclu par un constructeur, qui
avait retenu cette dernière formule, et considérait que le nombre de distributeurs sélectionnés était suffisant, lui rapprochait
l’absence de mise en œuvre d’une procédure de sélection avec
notamment appel à candidatures, ainsi que l’édiction de critères quantitatifs et qualitatifs imprécis.
La Cour de Cassation affirme, d’une part, la liberté du promoteur dans la mise en place de la décision : « aucun texte
n’imposait au fournisseur de procéder à un appel officiel pour
susciter des candidatures » (solution correspondant à
l’économie de l’article L. 441-6 du Code de Commerce) et,
d’autre part, reconnaît l’objectivité du critère quantitatif qu’il
avait retenu : « un seul point de vente par aire de 500 000 habitants (...) ; des aires urbaines étant constituées d’un pôle urbain
et d’une couronne périphérique, chacun des concepts de la définition correspondant à une réalité géographique et économi36
que ».
En revanche, elle censure les juges de fond dans l’affaire
Daimler Chrysler contre Garage Gremeau pour ne pas avoir
apprécié, non seulement la pertinence des critères qualitatifs
appliqués, à l’occasion de la réorganisation du réseau, mais
aussi la satisfaction de ces critères par le distributeur qui avait
été sélectionné à la place de l’ancien concessionnaire. La Cour
de cassation renforce considérablement cette exigence de contrôle en précisant qu’elle doit être opérée, « même d’office ».
35
36
Voir Lettre de la distribution, décembre 2005.
Dans le même sens, CA Dijon 1er avril 2004 ; CA Douai, 15 avril 2004,
Lettre de la distribution, juillet-août 2004.
III – L’accord d’intégration : la franchise
Le contrat de franchise ou franchisage apparaît comme le
contrat par lequel un franchiseur, qui dispose d’un savoir-faire
et des signes distinctifs particuliers dans un domaine donné,
accorde au franchisé le droit d’exploiter cet ensemble, moyennant versement d’une somme d’argent. Son développement est
important, dans tous les domaines de la distribution, il y aurait
plus de 750 réseaux de franchise en France, particulièrement
coordonnés au sein de la Fédération française de la franchise
qui édite d’ailleurs un Code de déontologie de la franchise.
En droit interne, la franchise ne connaît pas de régime supplétif normatif (articles L. 330-1, L. 330-3 et L. 442-6, I, 5° du
Code de commerce).
En droit communautaire, la matière a été traitée dans le Règlement (CE) n° 4087/88 du 30 novembre 1988, mais abrogé
par le Règlement (CE) n° 2790/1999 et ramené à cinq paragra37
phes des Lignes directrices du 13 octobre 2000.
Nous passons donc à l’analyse de la jurisprudence relative à
ce contrat à l’égard du droit de la concurrence.
Clause d’agrément :
– CA Paris, 5e ch. A, 21 septembre 2005 : SARL Société de
coiffure Vichyssoire c/ SA J.-L. David
L’appréciation de la licéité d’une clause d’agrément dans un
contrat de franchise, au regard de l’article 81 para. 1 du Traité CE suppose que le réseau de franchise en cause soit susceptible d’affecter le commerce intra-communautaire. Par ailleurs,
une telle clause, qui constitue une modalité d’application de
l’intuitus personae propre au contrat de franchise et tend à éviter que le bénéfice du savoir-faire et de l’assistance apportée
aille indirectement à un concurrent, n’est pas contraire, à savoir constitutive d’une restriction caractérisée à la concurrence, aux règles instituées par le Règlement (CE) n°4087/88
relatif aux exemptions par catégorie, pas plus qu’aux dispositions du Règlement (CE) n° 2790/1999.
Licéité d’une clause de non-réafiliation d’un franchisé :
– Cass. com., 17 janvier 2006, n° 03-12.382 : P+B, SARL
Varassedis c/ SA Prodim (Juris-data n° 2006-031799)
Est licite la clause de non-réaffiliation stipulée dans un contrat de franchisage qui n’interdit pas la poursuite d’une activité
commerciale identique et se trouve limitée dans le temps et
l’espace.
En l’espèce, la Cour de cassation juge licite une telle clause
dès lors que cette clause ne vise qu’à restreindre et non à interdire l’exercice de son ancienne activité par l’ancien franchisé, et qu’elle est nécessaire à protéger des droits de propriété
37
Lignes directrices du 13 octobre 2002, point 199, défini la franchise
comme un « accord par lequel une entreprise, le franchiseur accorde à
une autre, le franchisé, en échange d’une compensation financière directe ou indirecte, le droit d’exploiter un ensemble de droits de propriété industrielle ou intellectuelle concernant des marques, noms
commerciaux, enseignes, dessins et modèles, droits d’auteurs, savoirfaire ou brevet, destinés à être exploités pour la revente de produits ou
la prestation de services à des utilisateurs finals ».
Issue 2/3-2006 „ The European Legal Forum „
I-94
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industrielle ou pour maintenir l’identité commune ou la réputation du réseau. En effet, le distributeur n’est pas interdit de
toute activité puisqu’il peut continuer d’exercer son activité
sous forme individuelle et en toute indépendance. Les conditions sont donc celles qui gouvernent la clause de nonconcurrence (conditions de proportionnalité et de nécessité).
Et pourtant, le Règlement communautaire alors en vigueur
n° 4087/88 (aujourd’hui fondu en un règlement unique pour
tous les accords de distribution : le Règlement (CE)
n° 2790/99) prévoyait que la durée maximale d’une clause de
non-concurrence ne devait pas dépasser un an. Or, la clause litigieuse n’est pas annulée. On sait que n’est pas nécessairement nul un accord ou une clause ne remplissant pas les
conditions posées par le Règlement d’exemption. Si le contrat
ou la clause ne fausse pas le jeu de la concurrence, il ne sera
pas annulé. La solution a été posée par la CJCE dans l’affaire
38
VAG c/ Magne et consacrée par la jurisprudence interne
(Cass. com. 3 décembre 2003 : Juris-data n° 2003-021438).
Le Règlement d’exemption n’a pas pour objet d’accorder
une exemption de nature concurrentielle en définissant les
conditions pour bénéficier de l’exemption. Il n’affecte donc
pas la validité du contrat.
L’extinction du contrat de franchise :
Le moment de la rupture est régulièrement source de contentieux. Le contrat de franchise peut en effet être classé parmi
39
ce que la doctrine appelle les contrats de situation. Comme
ces contrats ont vocation à s’inscrire dans la durée, cela leur
confère une valeur particulière et rend par conséquent la rupture coûteuse pour celui qui la subit.
– CA Paris, 5 mars 2003 (Juris-data n° 2003-216315)
Même dans le cadre d’une clause résolutoire de plein droit,
la résiliation n’est encourue que si le destinataire n’a pas respecté l’obligation précise visée dans une mise en demeure. En
l’espèce, aucune mise ne demeure n’a été notifiée, le franchisé
ayant seulement été informé de la cessation des relations contractuelles. La clause résolutoire ne peut donc pas justifier
cette résiliation. Le franchiseur est donc redevable d’une indemnité sur le fondement de l’article L. 442-6, I, 5° du Code
de commerce.
– Cass. com., 12 mai 2004 et CA Versailles, 14 octo40
bre 2004
La brutalité de la rupture des relations commerciales est appréciée au regard du préavis d’usage ou résultant d’accords
professionnels et non au regard du préavis convenu par les
parties. Ainsi, le respect du préavis contractuel ne suffit pas à
exonérer le franchiseur du paiement d’une indemnité de rupture fondée sur l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce.
_______________________________________________________________________________________________
OGH (AT) 25 January 2006 – 7 Ob 302/05w
Article 35(2) CISG – International sales contract – Objective minimum standards – Public law provisions of the
country of import
_______________________________________________________________________________________________
Where quality requirements have not been stipulated in
an international sales contract, the question whether there
is a breach of the duty to deliver has to be determined according to the minimum standards within Article 35(2)
CISG, inter alia, whether the sold goods are fit for any general or any particular purpose. Hereby, the standards of the
seller’s country determine the fitness for general purposes.
Public law provisions of the buyer’s country are only relevant, if they also exist in the State of the seller, if they were
agreed upon, or if they were made known to the seller at
the time of the conclusion of the contract, according to Article 35(2)(b) CISG. (Editor’s Headnotes)
1
Extract from the Decision: “(...) Entgegen den Ausführungen zur
Zulässigkeit des vorliegenden Rechtsmittels entspricht es nämlich der
Rechtsprechung, dass dann, wenn in einem internationalen Kaufvertrag die Anforderungen an die Beschaffenheit der Sache – wie hier –
nicht vertraglich festgelegt werden, die Frage, ob eine Verletzung der
Lieferpflicht vorliegt, gemäß dem in Art. 35 Abs. 2 CISG vorgegebenen objektiven Mindeststandard unter anderem danach zu beurteilen
ist, ob die kaufgegenständliche Ware dem gewöhnlichen oder besonderen Gebrauchszweck (Abs. 2 lit. a bzw. b leg cit) entspricht, wobei
über die Eignung für gewöhnliche Zwecke grundsätzlich (von den in
SZ 73/70 aufgezählten Ausnahmefällen abgesehen) die Standards im
2
Lande des Verkäufers bestimmen.
Der Oberste Gerichtshof hat sich (...) auch mit den hier angesprochenen Fragen bereits in seiner Entscheidung vom 13. 4. 2000, 2 Ob
3
100/00w beschäftigt und dazu Folgendes ausgesprochen hat:
„Nach Art. 35 Abs. 1 CISG hat der Verkäufer Sachen der vertraglich vereinbarten Quantität, Qualität und Art in der vertraglich vereinbarten Verpackung oder in dem vertraglich vereinbarten Behältnis
zu liefern. Wenn aber die Parteien eines internationalen Kaufvertrages
es verabsäumt haben, die Anforderungen an die Beschaffenheit der
Sache vertraglich festzulegen, erlangt der in Art. 35 Abs. 2 CISG vorgegebene objektive Mindeststandard Relevanz: Ob eine Verletzung
der Lieferpflicht vorliegt, bemisst sich dann danach, ob die kaufgegenständliche Ware dem gewöhnlichen oder besonderen Gebrauchszweck entspricht, mit einem Muster bzw. einer Probe übereinstimmt
4
oder in üblicher und angemessener Weise verpackt ist. Über die Eignung für gewöhnliche Zwecke bestimmen grundsätzlich die Standards
im Lande des Verkäufers. Die Eignung für den gewöhnlichen Nutzungszweck schließt nicht ein, dass die Ware den Sicherheits-, Kennzeichnungs- oder Zusammensetzungsvorschriften des Importlandes
5
genügt. Es kann vom Verkäufer nicht erwartet werden, dass er die
besonderen Vorschriften im Käufer- oder Verwendungsstaat kennt.
Auch allein daraus, dass der Käufer dem Verkäufer das Bestimmungsland mitgeteilt hat, kann noch nicht abgeleitet werden, dass der Verkäufer verpflichtet sein soll, die dort geltenden öffentlich-rechtlichen
1
38
39
40
2
CJCE 18 décembre 1986 – 10/86 : Rec. CJCE 1986, p. 4071.
M. Cabrillac, Remarques sur la théorie générale du contrat et les créations récentes de la pratique commerciale, Mélanges G. Marty, Université de Toulouse, 1978, p. 235 ; D. Mainguy, Remarques sur les contrats
de situation et quelques évolutions récentes du droit des contrats, Mélanges M. Cabrillac, Litec, 1999, p.165.
JCP E 2005, n° 1177, note D. Mainguy.
3
4
5
For a more extensive text of the decision, please refer to section II of
this issue, at 50.
RIS-Justiz RS0113448; zuletzt: 2 Ob 48/02a.
SZ 73/70 = IPRax 2001/15, 149 (krit. Schlechtriem) 161.
Posch in Schwimann², ABGB, Rn. 7 zu Art. 35 UN-Kaufrecht.
Posch, aaO, Rn. 7 zu Art. 35 UN-K; Magnus in Staudinger,
KommzBGB, Rn. 22 zu Art. 35 CISG; ders. in Honsell, KommzUNKaufrecht, Rn. 14 zu Art. 35; Piltz, Internationales Kaufrecht, Rn. 41
zu § 5.