Prédication narrative à partir de Matthieu 22/1-14
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Prédication narrative à partir de Matthieu 22/1-14
Prédication narrative à partir de Matthieu 22/1-14 Je suis invité. C'est génial. Je suis invité. Oui mes amis, il m'a invité. Pardon, vous voulez savoir qui m'a invité. Je ne le sais pas. Tout ce que je sais, c'est que je suis invité. Ne bougez pas, je vais vous raconter… J'étais assis tranquille sur mon banc devant la maison. Le soleil commençait doucement à descendre derrière les toits. Il faisait doux, comme il peut faire doux dans une belle soirée du mois de mai. Les oiseaux chantaient dans les tilleuls, les abeilles tournaient autour des acacias en fleurs. Il faisait bon. Une certaine image du bonheur. Dans ma tête, je passais et repassais les images de la journée. Et là, ce n'était pas bonheur du tout. Le banquier avait téléphoné pour me convoquer. Il paraît que mon compte n'est pas en bon état. Mais cela, je le savais déjà. Et puis Jo a téléphoné aussi. Sa mère a été hospitalisée et le diagnostic n'est pas joyeux : cancer ! Et du coup remontent à la surface les visages des amis qui sont partis, emportés par cette saloperie de maladie, et puis les visages de ceux qui se battent encore avec l'espoir rivé au fond du cœur et du corps. Du coup, ma vieille copine, la douleur que je porte dans le bas du dos, s'est réveillée, comme pour me rappeler que je n'avais pas à porter tout le poids de la misère du monde. D'accord, lui ai-je répondu, à ma vieille copine, mais à qui vais-je bien pouvoir confier mon poids ? Je n'entendais plus le chant des oiseaux, je ne sentais plus le parfum du tilleur, je ne voyais plus la danse des abeilles. Fini le bonheur. J'étais donc là, avec le cœur lourd de tous les chagrins et de toutes les peines, je souffrais avec la mère de Jo et avec Jo lui-même. Mon dos me faisait mal. C'est là qu'il est venu. Je dis venu… je n'en sais rien. Je ne l'ai pas vu venir. Tout à coup il était là devant moi. Comment il est venu, je n'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est qu'il est là. "Bonsoir ! Belle soirée n'est-ce pas ?" - Oui, bonsoir. Oui… belle soirée en effet. "Je suis venu vous dire que vous étiez invité, demain soir, au château." - Ah bon ! En quel honneur ? "Le maître donne une soirée. Et il invite." - D'accord. Enfin, je comprends. Je n'ai pas dit d'accord pour ma participation. J'aimerai tout de même en savoir plus. D'abord, où il est ce château ? "C'est simple. Il suffit de suivre la route. Une fois sur la route, c'est tout droit. D'ailleurs tous les chemins mènent au château." - Pourquoi moi ? Mon voisin Tony est-il aussi invité ? "Pourquoi vous ? C'est simple aussi. D'abord parce que je vous ai rencontré, assis là sur le banc. Ensuite parce que cela se voit que votre journée a été difficile. Et ensuite parce que le patron a décidé d'inviter tout le monde. Même Tony. Car il est aussi malheureux que vous ; son chien est mort tout à l'heure. Sa fille est au chômage…" - Mais votre patron, comme vous dites, est-ce qu'il n'a pas d'amis ? "Si, si beaucoup d'amis, ou du moins beaucoup qui se prétendent comme tels. " - Alors ils seront là aussi. Nous, Tony et moi, et les autres, on aura l'air de …. Ils veulent s'amuser à nos dépens, le patron et ses amis. "Non, ne vous inquiétez pas. Les amis ne seront pas là. Ils ont été invités. Mais ils avaient tant de choses à faire : du travail au bureau, une nouvelle limousine à essayer, une jeune épouse qu'on ne peut pas laisser sans surveillance. Non, ils ont refusé l'invitation. Alors, comme tout est prêt, tout est commandé, tout est payé, le maître a décidé d'inviter tous les autres, tous ceux qu'on n'a pas l'habitude de voir au château. Ceux qui ont du souci comme Tony, ceux qui portent lourd comme toi." - Merci, mais je n'ai pas de tenue de soirée. Et comme je connais Tony, il n'en a pas non plus. Alors, on ne pourra pas venir… Il me tend alors un paquet. Avec tout ça, je n'avais même pas vu qu'il tenait un paquet. "C'est pour vous. Et j'ai le même pour Tony. Et n'oubliez pas de le mettre demain soir. Le maître vous attend, en tenue, s'il vous plait." - D'accord, je serai là. Je viendrai avec Tony. C'est promis. Promis, juré… - Dites à votre patron, votre maître, que cela me fait rudement plaisir. Oui ! Et il est parti comme il est venu. Comme je regardais le paquet, je ne l'ai pas vu partir. Dommage. Le tilleul sentait bon, les oiseaux chantaient et les abeilles dansaient dans l'air doré d'un soir de mai qui se languit avant d'aller s'éteindre. Je suis invité. C'est génial. Je suis invité. Intermède musical (1') Salut les amis, salut mes frères ! Je vais bien, ce soir. Le tilleul sent toujours aussi bon, les oiseaux chantent encore mieux que l'autre soir, et les abeilles font toujours leur provision dans les acacias du chemin. Je vais super bien. Je sais, vous êtes venus pour que je vous raconte mon invitation. Je le savais… Quand on est arrivé, Tony et moi, on a été accueilli comme des rois. C'est vrai, qu'il a été facile à trouver, le château. C'est juste au bout du chemin, au bout de la route. Je ne l'avais jamais remarqué. J'avais mis la belle tenue, une veste et un pantalon tout blanc. Je me sentais bien, je me sentais un autre homme. Je n'ai jamais porté une tenue de soirée. C'est chic. Cela vous transforme un homme. Dans ce cas-là, l'habit fait le moine. Et moi, j'étais bien. C'est comme si j'avais enlevé mes soucis et mes chagrins en enlevant mon vieux pantalon et ma vieille chemise à carreaux. Et j'étais devenu un homme nouveau en enfilant les nouveaux habits. Je ne sentais plus mon poids sur les épaules, et du coup, je n'avais plus mal au dos. Tony a dit qu'il se réservait la tenue pour une meilleure occasion. Il l'a rangée dans son armoire. Il a sorti un pantalon propre, et une chemise propre. Mais il n'a pas cette impression de changement que moi, je ressens. Enfin, c'est son affaire. Je lui ai dit que si quelqu'un t'offre un habit, c'est la moindre des politesses de le mettre. Il m'a répondu qu'il avait trouvé cette invitation un peu louche, qu'il y allait pour voir, mais que cela ne valait pas la peine de se mettre sur son 31 pour si peu. Alors on avait l'air un peu bizarre sur le chemin, moi en costume blanc immaculé, lui en vieilles fringues délavées. Il n'a pas arrêté de me parler de sa fille au chômage, de son chien qui était mort. Au bout d'un moment, je lui ai dit qu'il aurait mieux fait de mettre sa nouvelle veste, cela lui aurait changé les idées… Il ne m'a pas compris et il a continué… Au château, on a été accueilli comme des rois. Major d'homme, domestiques, et une table dressée comme je n'en avais jamais vue. On était un joli petit paquet. Toute la ville, tout ce que la ville comptait comme pauvres et malheureux était là. En costume blanc. C'était super. Tony, dans sa vielle chemise et son vieux pantalon, Tony lui n'a pas arrêté de critiquer. Moi, j'étais bien, j'étais heureux, pour une fois, je ne ruminais pas mes mauvaises pensées. J'avais vraiment l'impression de revivre, avec cette invitation et mon nouveau costume. Pour une fois, j'étais quelqu'un, quelqu'un de reconnu, quelqu'un d'aimé. Alors j'ai profité pleinement du moment. Tony, lui, n'a profité de rien du tout. D'abord il a râlé en permanence, puis quand le maître est arrivé et a salué tout le monde, il s'est arrêté près de Tony, et dans un accès de colère, il l'a fait mettre à la porte. "Mon ami, comment es-tu entré ici, sans ton habit de fête ?" a-t-il crié. Il n'a pas aimé, mais alors pas du tout, que Tony soit venu sans le costume qui lui a été envoyé. La fête a été joyeuse. Chacun d'entre nous s'est fait de nouveaux amis. Je me suis rendu compte que dans ma vie, celle de tous les jours, avec le poids sur les épaules et le mal de dos, dans ma vie, je n'étais pas seul. Surtout aujourd'hui. Je sais qu'il y a d'autres hommes, d'autres femmes qui ont été invités comme moi, et habillés comme moi. Je sais aussi que, pour chacun, quelque chose a changé dans la vie. Et puis j'ai un nouvel ami, un grand ami. Oui, le patron lui-même, le maître. Il a pris du temps pour moi, il m'a écouté, il m'a rassuré, et surtout il m'a dit que, avec mon habit tout blanc, je faisais maintenant parti de son monde à lui, le monde de ses amis. Je suis heureux. Tony lui, il est toujours assis devant sa porte. Il crie après son chien qui est mort depuis cinq jours, il pleure sur le chômage de sa fille. Je l'entends même grincer des dents. Il porte toujours sa vieille chemise et son pantalon délavé. Il est plus seul que jamais. Et surtout, il ne sent toujours pas le tilleul en fleurs, il n'entend pas la chanson des oiseaux et il n'applaudit pas la danse des abeilles. Dommage. Il lui suffisait pourtant d'accepter le cadeau et de mettre l'habit. Dommage. Intermède musical (1') Jésus se met encore à parler aux foules en utilisant des comparaisons. Il leur dit : "Le Royaume des cieux ressemble à ceci : Un roi prépare un grand repas pour le mariage de son fils…"