MONUMENT NONUMENT. Politique de l`image mémorielle

Transcription

MONUMENT NONUMENT. Politique de l`image mémorielle
Directeur de Programme
(2011 - 2016)
Andrea Pinotti
MONUMENT NONUMENT.
Politique de l’image mémorielle,
esthétique de la mémoire matérielle
Résumé
Il y a parfois des moments fondamentaux où le passé se cristallise dans une image, se fixe autour d’un objet
sensible et là, en même temps, survit et se transforme selon la constante modification des modalités réceptives
de l’objet dans l’histoire. Engagé dans cette dialectique de répétition (de ce qui a été) et reconstruction (de ce
qui a toujours été parce que, à proprement parler, n’a jamais été) – ou, en d’autres termes, d’histoire et mythe
–, le passé se fige dans monuments, au sens propre des mots allemands Denkmal, Mahnmal (à la lettre « tache
», Mal, « de la pensée », Denken, ou « de l’avertissement », Mahnen). En disant « monument », on pense
donc à la tache comme lieu de rencontre et de collision, dans le présent, du passé et du futur. Bref : on tombe
ici sur un véritable chronotype de rencontre/collision, valide à la fois pour l’individu et la communauté. Le
monument représente donc une trace physiognomiquement inscrite dans le visage des villes, la surface des
paysages, le commun sentir comme tissu connectif anonyme de nos expériences. En rappelant le sens original
du mot latin monumentum (qui vient du verbe monere, aussi « faire rappeler » que « faire penser », « aviser »,
« mettre en garde », « exhorter », « conseiller », « inspirer » et enfin « prédire » et « annoncer »), cette trace
transmet le passé au présent en vue de l’éclosion d’un horizon futur.
Le projet entend approfondir la question de la monumentalité comme lieu de convergence de certains axes
polaires fondamentaux de l’expérience humaine : temps/espace, mémoire/oubli, présence/représentation,
individu/communauté, construction/destruction, vie/mort. En suivant ces directives, le projet s’articule
essentiellement en six moments:
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4.
5.
6.
la relation entre mise en image et mémoire sociale et collective ;
la question de la présence de l’absence et de l’absence de la présence, c’est à dire le problème de la
genèse du monument à partir de la représentation du corps mort, du cadavre ;
l’histoire et la sémantique de l’idée de « monumental » dans la pensée esthétique et politique
occidentale ;
les principales modalités de négation du monument (vandalisme, censure, iconoclasmes et
iconophobies) ;
le rôle du monumental dans la culture du XXe siècle (comparaison des stratégies monumentales des
sociétés totalitaires et libérales) ;
poétiques et pratiques de l’anti- et de la contre-monumentalité contemporaine (le « nonument » comme
non-monument).
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Le projet embrasse donc au moins trois des quatre intersections qui caractérisent les activités du CIPH: «
Philosophie/art et littérature » (par rapport à la relation entre le monument comme image mémorielle et
l’esthétique, l’histoire des arts visuels et de l’architecture) ; « Philosophie/politique et société » (voir le
rapport de la monumentalité avec les questions de l’identité communautaire, de la propagande idéologique et
de la polarité ami/ennemi) ; « Philosophie/sciences et sciences humaines » (en ce qui concerne la relation
fondamentale que la question de l’image monumentale en tant que présentation d’une absence entretient avec
la psychologie historique, l’anthropologie culturelle et la thanatologie).
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I. ARGUMENTAIRE ET PERSPECTIVES DU PROGRAMME
Préambule: Monumentum, Denkmal, Mahnmal
Il y a parfois des moments fondamentaux où le passé se cristallise dans une image, se fixe autour d’un objet
sensible et là, en même temps, survit et se transforme selon la constante modification des modalités réceptives
de l’objet même dans l’histoire. Engagé dans cette dialectique de répétition (de ce qui a été) et reconstruction
(de ce qui a toujours été parce que, à proprement parler, n’a jamais été) – ou, en d’autres termes, d’histoire et
mythe –, le passé se fige dans monuments, au sens propre des mots allemands Denkmal, Mahnmal (à la lettre
« tache » [Mal] « de la pensée » [Denken] ou « de l’avertissement » [Mahnen]).
C’était déjà en 1917 – c’est-à-dire peu de temps avant que la tragédie de la Grande Guerre, une fois
terminée, ait été soumise à l’inévitable autant que désespérée sublimation d’innombrables Kriegerdenkmäler
[monuments aux Morts de la guerre] – que le regard prophétique de Walter Benjamin remarquait comme le
Mal « est souvent le signe d’une faute ». « Le Mal paraît surtout chez les êtres vivants (les stigmates du
Christ, la rougeur, la lèpre peut-être, les envies) ». En guise de symbole, donc, le Mal peut bien être le signe
aussi de la faute dans la rougeur que de l’innocence dans les stigmates: coincidentia oppositorum. De plus: en
disant Mal on donne à l’image une particulière valence temporelle (ein-mal: une fois): « On voit disparaître
toute résistance opposée par le présent à l’union de passé et future, qui se joignent de façon magique ».
Si le monumentum est pensé et érigé pour monere, pour « faire rappeler » (mais aussi pour « faire penser
», « aviser », « mettre en garde », « exhorter », « conseiller », « inspirer » et enfin « prédire » et « annoncer
»), son geste est alors pontifical, c'est-à-dire – à la lettre – qu’il fait fonction de pont: véritable concrétion de
rétention et protention, dressé dans le présent d’un « ici et maintenant », le monument convoque le passé et,
ce faisant, il le rend présent et le tend vers le futur.
Un grande signe matériel, gardien de la mémoire et berceau du projet: voilà le degré zéro de la
monumentalité. Avec le Denkmal on pense la tache comme lieu de rencontre, dans le présent, du passé et du
futur ; et bien sûr – c’est un lieu de rencontre autant pour le sujet individuel que pour la communauté. Le
monument représente donc une trace physiognomiquement inscrite dans le visage des villes, la surface des
paysages et le sentir commun (koinè aisthesis), tissu conjonctif anonyme de toutes nos expériences.
Devant le monument, la pensée réfléchit sur les trois extases temporelles ; devant le monument, on pense
le temps. « Monument » c’est donc non seulement Denkmal, mais aussi Denkraum, espace de la pensée et
pour la pensée, intervalle que l’œuvre (l’image) établit entre le sujet et soi même et entre le sujet et le monde:
début de celle distanciation (Entfernung, Distanzierung) définie par Aby Warburg, dans l’Introduction à son
atlas Mnemosyne, comme « acte fondateur de la civilisation humaine ».
Explorer le domaine du monument signifie à la fois parcourir l’expérience du temps, des modalités de
coagulation du temps dans un espace, des possibilités données à une culture de rappeler ce temps ou bien de
l’oublier. Il s’agit d’un parcours esthétique, dans la mesure où il réfléchit sur temps et espace – ces deux axes
fondamentaux de notre expérience sensible – et sur objets qui, au cours des siècles, ont représenté occasions
cruciales et critiques pour notre expérience artistique. Mais il s’agit aussi d’un parcours politique, dans la
mesure où il réfléchit sur les modalités d’identification symbolique entre une communauté et un objet – un
objet vu et entendu par la communauté même comme incarnation d’un moment fondamental de sa propre
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histoire et comme articulation en image des relations identitaires d’ami/ennemi. On tombe ici sur une
rhétorique et sur une idéologie de l’image, de son affirmation et de sa négation.
A. Généalogie du monumental
La première phase du projet sera vouée à la reconstruction des grandes lignes de la généalogie du concept de
« monumental ».
On abordera en premier lieu la question du monument comme trace mnestique et image de mémoire, et
avant tout de mémoire collective et sociale. Ceux qui ont réfléchi sur la mémoire et l’expérience mnestique
(or sur son contraire: l’oubli), ont toujours questionné deux faces d’une même médaille. D’un côté, il y a la
dimension de l’intériorité individuelle, de la subjectivité psychique comme lieu essentiellement immatériel de
production et conservation des souvenirs ; de l’autre, on tombe sur la dimension de l’extériorité sociale, de la
remise du souvenir à un support matériel accessible à une communauté plus ou moins vaste, partageable, en
principe, par une pluralité d’individus ; et effaçable aussi. Le secret de l’intériorité est donc, à la lettre,
secretum, c’est-à-dire quelque chose que la mémoire sécrète en se déposant sur un vecteur physique qui peut
bien passer d’une main à l’autre et s’affranchir du sujet souvenant (avec tous les avantages, mais les risques
aussi, que cela comporte).
Cette deuxième face de la médaille de la mémoire – qui de nos jours émerge, de façon éclatante et
diffuse, avec les dispositifs de la mémoire informatique et de l’archive digital, de la clé usb aux unités
externes de disque dur – ne représente pas un horizon inédit, mais est plutôt part constitutive de la
remémoration même. La neurophysiologie a conçu notre cerveau aussi comme une sorte de réservoir de traces
que le moi – tantôt identifié avec le cerveau même, tantôt distingué de lui en tant que « spirituel » ou «
psychique » opposé à la matière cérébrale – graduellement enrichit en vertu de nouvelles expériences
suffisamment intenses pour lasser une trace sur la substance nerveuse. Dans la seconde moitié du XIXe siècle
les travaux de Samuel Butler sur la mémoire collective inconscient et surtout ceux de Ewald Hering sur la
mémoire comme matière organisée ont abouti à un modèle mnestique graphique, basé sur l’incision de
l’expérience sur la substance cérébrale. La célèbre conférence pendant laquelle Hering a esquissé cette
doctrine a influencé d’une manière indélébile beaucoup de penseurs du XXe siècle ; ses principes ont été
ensuite développés et approfondis par le zoologiste Richard Semon, auquel le débat actuel autour des
neurosciences, avec Daniel Schacter, se rattache de nouveau. Semon a forgé deux mots fatals: mneme, c'est-àdire mémoire collective, anonyme et sociale, transmissible de façon héréditaire ; et engramme, c'est-à-dire
graphème ou trace mnestique gravée sur la substance cérébrale. Aby Warburg et Carl Gustav Jung s’inspirent
de Semon pour élaborer leur différents théories de la mémoire des images et de leur survivance au cours des
siècles. Freud aussi, avec son Homme Moïse, reconnaît d’être profondément fasciné par l’idée de traces
mnestiques biologique héritables et de ne pas réussir à y renoncer.
Comprendre le monument en tant que trace mnestique, ça veut dire le considérer donc dans le cadre de
cette tradition graphique de la mémoire.
Mais la trace est présence d’une absence, et l’absence par excellence est celle du mort. Le projet doit
donc utiliser tous les instruments fournis par la psychologie historique, l’anthropologie et la thanatologie pour
interroger la relation essentielle entre image mémoriale et mort. L’image naît toujours en rapport à
l’expérience de la mort et à sa prise de conscience par l’homme. Comprendre que notre corps est destiné à la
décadence, à la décomposition et donc à la disparition, et chercher un antidote qui puisse remédier à cette
annulation grâce à la réalisation d’une image durable: ces deux moments vont toujours pas à pas. En ce qui
concerne ces thèmes, iconique et thanatologie ont abouti à d’importants résultats, et on peut bien en s’attendre
à nouveaux. L’étymologie aussi fournit des indications fondamentales à propos de la relation originaire entre
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les termes qui, chez les cultures anciennes, désignent l’image et le domaine de la mort: au début, le mot grec
eidolon n’indique pas l’« image » ou le « portrait » mais, plutôt, le « fantôme » des morts ; le simulacrum
latin signifie tout d’abord « spectre » ; imago est le moulage en cire du visage du défunt. Dans le IIe siècle,
funus imaginarium indiquait les funérailles de l’image, ayant lieu quand le corps mort n’était pas utilisable.
Pendant le Moyen Âge, le terme lui-même « représentation » désignait une figure en cire qui prenait la place
du défunt au cours des obsèques. On peut donc étendre la notion de « représentation » à celle générale coimplication de présence et absence qui fait partie du statut de l’image et de ses fonctions.
Une fois repérée et définie cette co-appartenance d’image et mort, on peut mieux entendre le rôle crucial
de la tombe (sema) comme premier signe (semeion) du corps (soma): une parenté déjà rappelée par Platon
(Cratile 400 C, 1-9). Le cippe funéraire, la stèle sépulcrale enfoncée dans la terre: ce simple signe verticale
imposé à l’horizontalité de la terre – à dire: « ici c’est encore et pour toujours présent celui qui n’est plus
présent et ne le sera plus jamais » – est au même temps le degré zéro de la monumentalité, de ce geste du
monere qui s’incarne dans un signe matériel qui souvient et met en garde, qui joint passé et future dans le
présent. Le cénotaphe (à la lettre: tombe vide), érigé à la mémoire d’un corps enterré (c’est-à-dire dissous)
ailleurs, représente l’élévation à la puissance de cette fonction souvenante et re-présentante du monument
sépulcrale.
Une fois déterminés les rapports fondamentaux entre monument et mémoire collective d’un côté, et entre
monument et expérience de la mort de l’autre, le projet envisagera les différentes variantes de la constellation
monument-monumental-monumentalité dans le discours esthétique et politique de la culture occidentale.
Aujourd’hui on perçoit de plus en plus la manque d’une telle vue générale et systématique, nécessaire pour
esquisser et circonscrire l’histoire sémantique de ces notions, les jeux linguistiques connexes et la possibilité
d’empiétement trans-artistique du monumental lui-même, qui n’est pas plus limité à la sculpture et à
l’architecture mais doit être compris comme véritable catégorie esthétique, dont on décrira les caractéristiques
structurelles (verticalité, durée temporelle, emploi d’un certain matériel, prédilection pour certaines formes,
dimensionalité et échelle, etc.).
Cette première phase généalogique, qui engagera les premiers trois ans du projet, aboutira à la
publication d’une œuvre collective provisoirement intitulé Monumentalité. Histoire d’une idée esthétique et
politique (2013).
B. Anti- et contremonumentalité
La deuxième partie de la recherche, tout en inversant la traditionnelle séquence de pars destruens et pars
construens, concernera la destruction du monument, ou plus généralement sa négation. Une fois élevé, le
monument peut être nié (ignoré, négligé, abandonné, violenté, vandalisé, anéanti) ou affirmé (vénéré, idolâtré,
restauré, conservé, momifié, immortalisé). Ce sont ces modalités spécifiques que le projet de recherche devra
décrire dans leur complexe phénoménologie, fondée sur une polarité fondamentale constituée par la manière
dont le monument sait se taire ou plutôt parler à la volonté d’une époque. Mais ce serait sans doute une erreur
de penser que la négation du monument engendre non-sens et son affirmation, au contraire, sens: aussi bien la
négation que l’affirmation sont des pratiques esthétiques et politiques qui peuvent transformer le monument
en expression ou bien l’anesthésier. Dans le premier cas, le monument tend vers la ruine qui, loin d’être un
simple objet muet, témoigne par son silence: d’où le véritable culte voué aux ruines par certaines époques et
esthétiques. Dans le deuxième cas, le monument se transforme en pièce de musée (Mouseion est le lieu
consacré aux Muses, déesses protectrices des arts et des sciences: les Muses sont les filles de Zeus et de
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Mnemosyne, déesse grecque de la mémoire), soumis à l’inverse aux soucis de la conservation et à la
sacralisation du lieu qui produisent souvent un mutisme du sens et son oubli.
Mais que peut-il arriver si l’image monumentale – en tant que double du défunt, en tant que
Doppelgänger – meurt elle-même? Et que peut-il arriver plus généralement si le monument – présence qui,
comme nous l’avons vu, prend la place d’une absence – s’absente lui-même, soit par l’incurie des hommes,
soit par l’action destructrice des forces naturelles, soit par vandalisme ou iconoclasmes d’origines diverses
(religieuse, politique ou idéologique)? Ou bien aussi par une entropie intrinsèque, par son irrésistible
inclination à se faire – malgré sa vocation naturelle vers la plus grande visibilité – invisible, comme Robert
Musil l’a bien mis en évidence dans son essai Monuments?
Cette entropie semble être directement liée au statut de trace mémorielle propre au monument lui-même.
Depuis les origines de la pensée grecque jusqu’à ce qu’écrit Freud dans son essai de 1925, Bloc-Notes
Magique, on peut relier de nombreux auteurs qui entendent la mémoire comme gravure d’une trace sur un
support matériel: le monument serait l’incarnation par excellence d’une telle trace au niveau de l’imaginaire
collectif. Mais vraiment en traçant des signes nous nous rappelons, ou plutôt devrions-nous dire: en traçant
des signes nous nous autorisons à oublier, assurés que le signe se souviendra à notre place? Platon a démasqué
une fois pour toutes l’ingénuité de la croyance à une relation entre signe et mémoire, en reconnaissant le lien
étroit qui existe entre écriture et oubli: le Phèdre, en exposant le mythe de l’origine de l’écriture, nous parle
de son inventeur, le dieu égyptien Theuth, faisant l’éloge des prodigieuses propriétés de ce remède contre
l’oubli au roi Thamous. Mais le roi connaît bien la double face du pharmakon, aussi bien médicament que
maladie, poison autant qu’antidote ; il sait bien que l’écriture « n’est pas une recette de mémoire, elle sert
plutôt à se rappeler ». Tout en confiant à la trace écrite ce que je souhaite conserver, je peux me permettre de
l’oublier. Les choses ne se passent pas différemment pour cette classe particulière de hypomnemata ou
remèdes auxquels nous donnons le nom de monuments. On pourrait même dire, probablement, que le
phénomène se produit de façon la plus explicite pour les monuments: objets matériels intentionnellement
conçus, produits et installés pour préserver la mémoire d’un nom, d’un lieu ou d’un événement partagés au
sein d’une communauté ou d’une culture, ils présentent celle duplicité de mémoire et d’oubli que Platon avait
identifié comme trait essentiel des dispositifs mnémoniques extérieurs. Erigé en guise d’avertissement, d’une
présence imposante, souvent placé au centre d’une place ou sur une hauteur pour être vu de n’importe où et
par tous, le monument est construit pour être littéralement « contourné »: si tout se passait bien, son style «
explosif » imposerait sa voix puissante, mais dans la plupart des cas son image disparaît dans l’indifférence de
nos déplacements quotidiens, en se perdant dans un bruit de fond, comme une voix qui crie un message
désormais incompréhensible, noyé dans le trafic et étouffé par les cris bien plus puissants des affiches
publicitaires (par exemple, on évite volontiers de se remémorer les événements de la Grande Guerre lorsque
nous rencontrons tous ces monuments dans chaque ville d’Europe).
Dans le cadre de cette problématique dialectique, le projet se concentrera surtout sur le XXe siècle: on
prendra en considération les principales stratégies élaborées autour du discours monumental et qui ont
caractérisé les régimes totalitaires nazi-fascistes et soviétiques d’une part et les états libéraux de l’autre, en
mettant en relief les analogies et les différences. On affrontera le débat complexe qui a suivi la chute de ces
régimes autour ce qui concerne le destin à réserver aux monuments nazi-fascistes et soviétiques: témoignages
d’un passé qui doit être conservé afin d’éviter son retour et sa répétition, ou bien symboles d’un Mal à
détruire pour soustraire aux nostalgiques tous les emblèmes symboliques auprès desquels ils pourraient se
recueillir ou avec lesquels ils pourraient s’identifier?
Toujours dans le cadre de la contemporanéité, on devra également examiner les poétiques et les pratiques
de la monumentalité du temps présent, afin de pouvoir mesurer le degré du sentiment monumental de ces
dernières décennies, ainsi que les perspectives plus récentes dans le domaine de l’esthétique et de la politique.
Une attention particulière sera réservée aux artistes qui ont opéré manifestement selon une conception
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contraire au monument – ou anti-monumental – en renversant conceptuellement les caractéristiques
constitutives du monumental (verticalité, rectitude, matériaux durables, grandes dimensions, visibilité, etc.).
Cette négation programmatique de la notion même de monumental témoigne d’une prise de conscience
critique et mature de l’art et de l’architecture par rapport au langage monumental traditionnel, qui paraît avoir
épuisé ses potentialités ; elle opère donc dans un sens seul apparemment négatif – et voici un autre paradoxe,
consubstantiel à l’expérience même de la monumentalité: c’est précisément en oubliant toutes sortes de
prétentions qui traditionnellement étaient attribuées au monument afin de l’identifier véritablement comme
tel, qu’on envisage de lui faire regagner toutes ses fonctions que, à cause de ses propriétés constitutives, il
n’était plus capable d’exploiter.
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Le projet embrasse donc au moins trois des quatre intersections qui caractérisent les activités du CIPH: «
Philosophie/art et littérature » (par rapport à la relation entre le monument comme image mémorielle et
l’esthétique, l’histoire des arts visuels et de l’architecture) ; « Philosophie/politique et société » (voir le
rapport de la monumentalité avec les questions de l’identité communautaire, de la propagande idéologique et
de la polarité ami/ennemi) ; « Philosophie/sciences et sciences humaines » (en ce qui concerne la relation
fondamentale que la question de l’image monumentale en tant que présentation d’une absence entretient avec
la psychologie historique, l’anthropologie culturelle et la thanatologie).
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II. Rythme prévisionnel du déroulement de la recherche
(juillet 2010 à juin 2016)
On peut prévoir six moments, conceptuels et thématiques, du déroulement de la recherche, qui se
distribueront sur les six ans du programme de la façon suivante et qui s’articuleront dans deux phases
principales:
A. PREMIERE PHASE (juillet 2010 à juin 2013) :
GENEALOGIE DU MONUMENTAL
La première phase de la recherche aura pour but d’examiner les conditions de la formation du concept de la
monumentalité et de saisir les éléments qui déterminent sa généalogie, par rapport à la dialectique
mémoire/oubli et à l’expérience collective de la mort, de l’absence, du passé en tant que “non-plus présent”.
Cette première phase se conclura avec une description de la sphère sémantique de la notion de monumental
dans le discours esthétique et politique occidental, dans une perspective d’histoire des idées.
1. Première année (juillet 2010 à juin 2011): Monument et Mneme
Champ thématique :
• Le statut du monument en tant qu’image mémorielle et précipitation chronotopique (Riegl, Benjamin,
Musil, Agamben) ;
• La notion de mémoire sociale et collective (les recherches sur la mémoire biologique et matérielle dans le
XIXe siècle: Hering, Semon, Butler, Otis ; les études sur la mémoire sociale: Halbwachs, J. et A.
Assmann, Loewy-Moltmann ; les récentes perspectives scientifiques et neurologiques: Hacking,
Schacter) ;
• La notion de mémoire collective imaginale (Warburg et Mnemosyne en tant qu’Atlas de l’imaginaire
occidental ; Jung et les archétypes ; Bachelard, Durand ; les récentes perspectives de la mémétique:
Dawkins, Blackmore) ;
• La dialectique de mémoire et oubli (Bergson, Freud, Ricoeur, Augé, Weinrich, Déotte, les récentes
perspectives des “trauma-studies” : Alexander, Caruth, Belau-Ramadanovic, Hallas-Guerin).
2. Deuxième année (juillet 2011 à juin 2012): Monument et mort
Champ thématique:
•
Iconosphère et thanatologie (Evers, Panofsky, Debray, Macho, Hart Nibbrig, Marek, Lüders, Sozzi) ;
•
Le rapport entre image monumentale et représentation de la mort (Benveniste, Roux, Vernant, Kerényi,
Norberg-Schulz, Ginzburg, Marin ; Koselleck-Jeismann) ;
•
Mort, photographie et monumentalité: une affinité élective (Barthes, Ruby, Belting) ;
•
Image mémorielle et sculpture en cire: histoire du material et recognition des différents emplois dans
l’art contemporaine (Schlosser, Didi-Huberman, Panzanelli).
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3. Troisième année (juillet 2012 à juin 2013) : Histoire du concept de « monumental » dans l’esthétique
occidentale
Champ thématique :
•
Origine des termes “monument”, “monumental”, “monumentalité” et leur sphère sémantique (Riegl,
Schlosser, Lipp, Michalski, Nelson-Olin, Le Goff, Forster) ;
•
Recognition des différents emplois de ces termes dans le discours esthétique et politique occidental
(Michalski, Lipp, Borsdorf-Grütter, Hajós) ;
•
Le monument entre sculpture et architecture et la Denkmalpflege (Riegl, Dehio, Schlosser, Huse) ;
•
Le monument entre art et politique (esthétisation et muséification du monument, utilisation pour la
propagande idéologique et religieuse) ;
•
La notion de monument naturel (Riegl, L. Bignami, Tosetti) ;
•
Monument stricto et lato sensu: le monumentale comme catégorie esthétique applicable aussi aux
ouvrages littéraires, picturaux, musicaux etc.
Réalisation des ouvrages rèlatifs à la première phase du projet
•
•
Direction d’un numéro de la revue on line du centre « Punctum » de Bergamo, avec le recueil des
contributions présentées aux séminaires autour du thème de la recherche.
Publication d’un premier ouvrage relatif au travail du séminaire. Titre provisoire : Monumentalité.
Histoire d’une idée entre esthétique et politique.
B. SECONDE PHASE (juillet 2013 à juin 2016) :
ANTI- ET CONTREMONUMENTALITE
La seconde phase du projet aura comme but d’analyser les différentes modalités de négation du monument (ycomprise l’apparente affirmation du monument en tant qu’objet muséifié) contre lui-même, tout en
considérant les pratiques vandaliques et iconochlastiques, avec un focus particulier sur les aventures de la
monumentalité à l’âge contemporaine, dans le cadre d’une dialectique identitaire Nous/Autres et d’une
idéologie Ami/Ennemi.
4. Quatrième année (juillet 2013 à juin 2014): Vandalisme, iconoclastie et iconophobie
Champ thématique :
•
Le suspect envers le monument dans le cadre de la traditionnelle iconophobie de la pensée occidentale
(Latour-Weibel) ;
9
•
•
•
•
La destruction des monuments comme chapitre de l’histoire de l’iconoclastie: cas paradigmatiques
(Besançon, Gamboni, Freedberg, Scribner, Michalski, Latour-Weibel, Power, Spivey) ;
Le vandalisme en tant que syndrome psychopathologique et pratique idéologique (Demandt, Gamboni) ;
Le vandalisme comme poétique artistique (Demandt, Freedberg) ;
La réparation du monument blessé, le double dans ses différentes manières.
5. Cinquième année (juillet 2014 à juin 2015): Le politique de la monumentalité
Champ thématique :
•
Le monument comme symbole figural de l’identité d’une communauté ;
•
Resignifications et recyclage du même monument ou motif monumental dans différentes cultures et
idéologies (Koselleck) ;
•
Comparaison des stratégies monumentales dans les sociétés totalitaires et soi-disantes libérales dans le
XXe siècle (la discussion autour de la notion de « sculpture publique » ; la propagande : Vojnovic);
•
Destin ambigu des monuments nazi-fascistes et soviétiques après la chute des régimes totalitaires: le
débat sur leur destruction/conservation (Arndt, Winzen, Reichel, Smith, Steiner, Yampolsky) ;
•
La monumentalisation de la guerre: le cas des Kriegerdenkmäler (Koselleck) ;
•
La monumentalisation de la tragédie: le cas de l’Holocauste (Todorov, Vidal-Naquet, Friedlander,
Mickenberg, Didi-Huberman, Wajcman, Pagnoux, Walker, Young, Zelizer) ;
•
La monumentalisation de la tragédie: le cas de Ground Zero (Borradori, Baudrillard, Carbone, Stephens,
Nobel).
6. Sixième année (juillet 2015 à juin 2016): Poétiques et pratiques de la contremonumentalité
contemporaine
Champ thématique :
•
La contremonumentalité contemporaine comme dernière plage du monument (Young, Melvin) ;
•
Phénoménologie des différentes modalité de l’anti-monumental: immergence au lieu d’émergence
verticale ; utilisation de matériaux presque immatériaux, non-monumentals (air, lumière au lieu de la
pierre ou du bronze) ; le vide au lieu du pleine ; enveloppement qui produit l’invisibilité du monument
au lieu de sa visibilité bombastique ; l’absence du monument comme monumentalité ;
•
Analyse de cas paradigmatiques (Matta-Clark, Gerz, Hoheisel, Christo).
Réalisation des ouvrages rélatifs à la seconde phase du projet
•
•
Direction d’un numéro de la revue on line du centre « Punctum » de Bergamo, avec le recueil des
contributions présentées aux séminaires autour du thème de la seconde phase de la recherche.
Publication d’un second ouvrage relatif à la seconde phase du travail du séminaire. Titre provisoire :
Contremonumentalité : la dernière plage du monument.
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BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE
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Zeichen – Monument. Skulptur und öffentlicher Raum heute, éd. par E. Mai et G. Schmirber, Prestel,
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III. Modalités de travail
1. Séminaire
Le séminaire, qui sera l’élément principal du travail, se déroulera selon quatre modes différents :
•
•
•
•
Séminaire permanent à Milan, à l’Università degli Studi, au moins pendant six semestres (un séminaire
pour chaque année du projet).
Cycles de conférences au Centre « CRAB » de l’Accademia di Belle Arti di Brera à Milan, au Politecnico
di Milano (Campus Bovisa), au Centre « Punctum » de l’Università degli Studi di Bergamo, au DAMS de
l’Università degli Studi di Genova et au IUAV de Venise.
Au moins trois cycles de conférences intensifiès au Collège à Paris.
Présentations uniques (approximativement une par an) du travail du programme : notamment à Lyon
(Université Jean Moulin), Bâle (centre Eikones), Londres (Warburg Institute), Hambourg (Warburg
Haus), Lisbonne (Universidade de Lisboa, Projecto « A Imagem na Ciência e na Arte » auprès du
CFCUL), Leyde (Université, Faculté des Arts), Mendrisio (Accademia di Architettura).
2. Ouvrages
Les résultats principaux du travail de la recherche seront deux ouvrages, correspondant aux deux phases
principales du déroulement du programme. Idéalement, ils seront écrits et publiés en français, ce qui n’exclut
pourtant pas des versions (traductions) italiennes et/ou anglaises.
•
•
•
Premier ouvrage, relatif au premier moment principal de la recherche. Titre provisoire : Monumentalité :
Histoire d’une idée esthétique et politique (2013).
Second ouvrage sur la question de la contremonumentalité contemporaine. Titre provisoire :
Contremonumentalité : la dernière plage du monument (2016).
Deux numéros de la revue on line du Centre « Punctum » de Bergamo seront dédiés à recueillir les
contributions des séminaires et des conférences.
3. Relations institutionnelles
Le projet se déroulera avec le soutien local principal de l’Università degli Studi di Milano (dans les cadres
d’une convention ou d’une coopération), ainsi que du Centre de culture visuelle « Punctum » de l’Università
degli Studi di Bergamo. En plus, le projet profitera de la coopération avec le Centre CRAB de l’Accademia di
Belle Arti di Brera (Milan), le Politecnico di Milano (Faculté d’Architecture, Campus Bovisa), le IUAV
(Istituto Universitario di Architettura di Venezia), le DAMS de l’Università degli Studi di Genova et
l’Université « Jean Moulin » Lyon 3.
4. Visites des Directeurs de programme du Collège
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Je prévois des visites d’autres Directeurs du programme du Collège pour faire des interventions dans le cadre
du séminaire à Milan (Università degli Studi, Politecnico et Accademia di Brera), à Bergamo (Università
degli Studi), à Genova (DAMS) et à Venise (IUAV), d’un rythme provisoire d’une visite par an (en cas de
conditions favorables, d’une visite par semestre). J’envisage un soutien de la part de l’Università degli Studi
di Milano et de l’Università degli Studi di Bergamo pour cette modalité de travail.
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