Le parcours des jeunes dans les associations d`Éducation Populaire
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Le parcours des jeunes dans les associations d`Éducation Populaire
Novembre 2011 UNIVERSITÉ DE PICARDIE JULES VERNE UFR sciences humaines et sociales DIRECTION DE L’ÉDUCATION PERMANENTE 10, rue Frédéric Petit – 80048 AMIENS INSTITUT RÉGIONAL DE FORMATION AUX FONCTIONS ÉDUCATIVES 12, rue des 2 ponts – 80000 AMIENS DIPLÔME D’ÉTAT EN INGÉNIERIE SOCIALE ÉTUDE DE TERRAIN Demandée par : CRAJEP Picardie Portant sur : Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire Étude réalisée par : BRULÉ Matthieu HAMDANE Azouz ROUSSEAU Olivier VROMAN Marie-Pierre EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - REMERCIEMENTS Le groupe d’étude tient à remercier l’ensemble des personnes qui, par leur participation volontaire ont permis la réalisation de ce document. Nous remercions également les commanditaires ainsi que les salariés des trois structures associatives pour l’accueil, la disponibilité et l’investissement qu’ils ont montrés à chacune de nos sollicitations (participation aux réunions, recueil de données, constitution du groupe des interviewés, etc.). 2 SOMMAIRE REMERCIEMENTS.................................................................................................................................................. 2 SOMMAIRE.............................................................................................................................................................. 3 INTRODUCTION...................................................................................................................................................... 4 I. 1ÈRE PARTIE : LA JEUNESSE ET LE RÔLE DES ASSOCIATIONS ............................................................ 6 A. HISTOIRE DES POLITIQUES DE JEUNESSE EN FRANCE LE RÔLE HISTORIQUE DES ASSOCIATIONS D'ÉDUCATION POPULAIRE C. LE CONTEXTE ET LES ENJEUX ACTUELS POUR LES ASSOCIATIONS B. 6 8 8 II. 2ÈME PARTIE : L’ENQUÊTE DANS LES ASSOCIATIONS DU CRAJEP ............................................... 10 A. LES MÉTHODES EMPLOYÉES B. PRÉSENTATION DES ASSOCIATIONS C. PRÉSENTATION DES INTERVIEWÉS D. CARRIÈRE OU TRAJECTOIRE ? 10 10 12 14 ET DE LEUR DIVERSITÉ III. 3ÈME PARTIE : L’UNIVERS ASSOCIATIF ET SES JALONS ................................................................. 15 A. L’ASSOCIATION PORTAIL B. LES MODALITÉS DE LA RENCONTRE C. LE RÔLE DE LA FAMILLE D. L’ASSOCIATION COMME ESPACE DE SOCIALISATION E. FORMATION ET PROFESSIONNALISATION F. LES VALEURS ET L’ENGAGEMENT G. DES CARRIÈRES TYPES 15 16 18 19 21 23 25 CONCLUSION........................................................................................................................................................ 30 BIBLIOGRAPHIE................................................................................................................................................... 32 LISTE DES SIGLES ............................................................................................................................................... 33 ANNEXES............................................................................................................................................................... 34 3 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - INTRODUCTION Au niveau national, le CNAJEP est créé en 1968 afin de promouvoir un dialogue entre les associations d’Éducation Populaire et les pouvoirs publics. La motion d’orientation 2007-2010 du CNAJEP précise « que le CNAJEP doit s’affirmer comme une plateforme associative représentative et référente sur la question jeunesse. ». Le CRAJEP de la région Picardie, fédérant 18 associations, n’échappe pas à la commande publique générale qui instruit l’évaluation et qui de fait légitime les financements des actions déployées au sein des associations d’Éducation Populaire. C’est dans ce contexte que s’inscrit le questionnement sur les pratiques associatives. C’est pour tenter d’apporter des éléments de réflexion sur le sujet que le CRAJEP engage en octobre 2009 une recherche-action sur l’engagement des 15-25 ans au sein de ses structures. Cette recherche-action a donné lieu à un bilan d’étape établi fin mai 2010. Il est réalisé sur la base d’un travail élaboré à partir des discours des associations et fédérations du CRAJEP sur les jeunes et l’engagement de ces derniers et met en relief une cartographie des activités associatives et fédérales menées auprès des 15-25 ans. Aussi, pour compléter cette étude, une démarche de rencontre des jeunes afin de mieux comprendre leurs attentes et les modalités de leur engagement, doit être entreprise. C’est dans ce contexte que le CRAJEP a passé une commande aux étudiants du DEIS afin de mieux comprendre les trajectoires des jeunes investis dans son réseau et d’évaluer l’impact de leur participation sur leur insertion sociale et professionnelle. Il s’agira de développer des perspectives complémentaires à la recherche-action engagée par le CRAJEP en construisant des données qui n’ont pas encore pu être mobilisées. Pour cela, une approche qualitative semble la mieux adaptée. Pour répondre à cette commande, une première étape a consisté à rencontrer les directeurs et les équipes des structures associatives retenues. Ces rencontres ont eu lieu dans les locaux où ces associations proposent des activités aux jeunes et aux moins jeunes. Cette phase préliminaire montre que dans le contexte des politiques publiques en matière d’éducation populaire et de jeunesse, les interrogations sur la présence et sur l’implication des jeunes dans ces établissements sociaux et/ou culturels sont très importantes. En réponse à cette commande, nous avons orienté notre travail autour de deux axes principaux. Pour le premier, il s’agira d’élaborer une compréhension fine des formes d’investissement des jeunes dans les associations, de la toute première rencontre jusqu’au maintien des liens des années après. Puis le second définira une typologie des trajectoires qui permettra d’éclairer les différentes influences des associations sur le devenir des jeunes, aussi bien dans leur parcours socioprofessionnel que dans leur investissement dans des espaces publics. Cette enquête à visée principalement qualitative, basée sur des récits de vie, a été réalisée de décembre 2010 à octobre 2011 au sein de trois structures associatives. Cette recherche a été menée par un groupe composé de quatre étudiants en Master II sociologie encadré par un enseignant de la même matière de l’université de Picardie Jules Verne. Trois questions ont accompagné notre recherche: 1- Quels sont les motifs et les modalités d’adhésion aux associations et comment les jeunes s’y installent dans la durée ? 2- En fonction des pratiques et des interactions entre les acteurs, peut-on repérer des catégories ayant du sens pour eux (jeunes ? Adhérents ? Usagers ? Bénévoles ? Référents ? Animateurs ? 4 Consommateurs ? Etc) et le cas échéant comment s’organise le passage d’une catégorie à l’autre ? Autrement dit, quelle carrière fait-on dans les associations ? 3- Quels sont les bénéfices de l'expérience constituée par le passage dans les associations d’Éducation Populaire ? Pour tenter d’apporter des éléments de réponse à la commande, ces axes nous amènent à organiser notre propos en traitant avant toute chose de l’histoire des politiques de la jeunesse et du rôle des associations afin de mieux saisir le contexte dans lequel la commande a été passée (I). Nous présenterons ensuite dans un deuxième volet le déroulement de l’enquête dans les structures associatives visitées ainsi que la population qui a été interviewée (II). L’analyse des entretiens nous a permis de dégager des éléments structurant le parcours des jeunes dans les associations. La rencontre, le rôle de la famille, la socialisation, la professionnalisation et les valeurs sont autant de dimensions qui posent des jalons pour les jeunes dans l’univers associatif. Enfin notre enquête nous a conduit à proposer des carrières types qui permettent de mieux comprendre les parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire (III). 5 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - I. 1ère Partie : LA JEUNESSE ET LE RÔLE DES ASSOCIATIONS a. Histoire des politiques de jeunesse en France Avant 1936, il n’existe pas de politiques spécifiques de l’État en direction des jeunes. Qu’elles viennent des organisations de jeunesse ou bien des acteurs publics, les initiatives sont prises avant tout au niveau local. Si l’État légifère sur un certain nombre de questions qui touchent la jeunesse (éducation, santé, droit du travail, liberté d’association...), les mises en œuvre sont liées à la volonté des acteurs locaux. Peu à peu le réseau qu’ils forment devient de plus en plus dense. Apparaissent par exemple l’Association catholique de la jeunesse française et la Ligue de l’enseignement. Cette dernière se donne pour mission première la création de l’école laïque, publique, et obligatoire. Elle s’organise aussi pour soutenir les activités périscolaires. Ces associations relayant l’opposition confessionnel/laïque, véhiculent les préoccupations hygiénistes et sociales. À partir de 1936, l’État investit la prise en charge de la jeunesse avec la création d’un soussecrétariat aux loisirs et aux sports confié à Léo Lagrange, dont les initiatives d’envergure rencontrent l’adhésion immédiate des acteurs de jeunesse. D’après Patricia Loncle, « le tournant est décisif : l’ensemble des organigrammes ministériels qui suivent seront dotés d’instances centrales chargées d’intervenir en direction de la jeunesse pour organiser les actions qui ne relèvent pas directement du secteur éducatif. » [Loncle, 2010]. L’État va jouer un rôle central de coordination, de réflexion et de mise en œuvre des politiques de jeunesse. Après guerre, les responsables politiques sont préoccupés par le caractère démocratique de l’adhésion aux mouvements de jeunes (obligatoire sous Vichy), sur le pacifisme ou le militarisme, sur l’accès à la culture et à l’éducation, sur la promotion sociale des jeunes. Les problèmes publics sont donc centrés sur des questions politiques et sociales. À partir de 1958, période faste en matière économique, les problèmes publics s’éloignent des préoccupations sociales. Sous l’autorité de Maurice Herzog, Haut-commissaire à la jeunesse depuis 1950, les actions sont segmentées. À côté de l’action des mouvements et des organisations de jeunesse, l’État lance de nouveaux types d’équipement : les Maisons de jeunes et de la culture et les Centres de loisirs sans hébergement. De nouvelles figures de professionnels apparaissent pour encadrer les jeunes qui les fréquentent : les animateurs socioculturels. Enfin, pour la jeunesse inorganisée, l’État crée des Clubs de prévention et le secteur de l’éducation spécialisée. Avec la Vème République, l’État s’impose comme une « structure centrale omnipotente » [Bantigny, 2007] dans le domaine de planification et d’implantation d’équipements socioculturels relevant d’une réelle politique de jeunesse. Peu à peu le rôle des mouvements et organisations de jeunesse comme cogestionnaires de la politique de jeunesse est remis en cause. Les mouvements qui furent les promoteurs du principe de la politique de la jeunesse en 1936 (les CEMEA, les Scouts de France, les Eclaireurs de France, les Jeunesses Catholiques, les Auberges de Jeunesse) ou en 1945 (les Francas, Léo Lagrange, Peuple et Culture, la FFMJC) déclinent au long des années 70 [Loncle, 2010]. Sous la pression d’une politique publique qui leur assigne un rôle de prestataire de services, les militants font peu à peu place aux professionnels de l’animation socioculturelle. La répartition des pouvoirs entre État et collectivités locales change après les premières lois de décentralisation en 1982. C’est désormais à l’échelon local que l’on se mobilise pour la jeunesse. Les effets des ségrégations spatiales et le développement des difficultés économiques et sociales qui touchent les banlieues retiennent toutes les attentions. La mise en avant des inégalités sociales et territoriales et la volonté de privilégier les logiques de prévention sur les logiques de répression orientent les réponses aux problèmes de la jeunesse. Par leur soumission à d’autres 6 domaines d’intervention, les politiques de jeunesse apparaissent dès lors très affaiblies [ibid]. Les politiques de jeunesse depuis 1995 À partir de 1995 on assiste à « un foisonnement des mises à l’agenda et à un défaut de lisibilité des politiques de jeunesse, et ce à tous les échelons territoriaux. » [ibid]. Au niveau de l’État, la mise en œuvre des politiques de jeunesse est paradoxale. Si en janvier 2009 est créé le Haut-commissariat à la jeunesse confié à Martin Hirsch, on observe une baisse continue des subventions accordées au secteur de l'Éducation Populaire et la réorganisation des services déconcentrés de la jeunesse et des sports au sein de la Direction Régionale de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale. C’est au plan local que la mobilisation en faveur des politiques de jeunesse est la plus visible. Mais les collectivités qui vivent des temps de pénurie budgétaire croissante doivent opérer des choix politiques. Elles auront « d’autant plus tendance à valoriser les actions perçues comme les plus propices à renforcer leur image. » [ibid]. A mesure du désengagement de l’État, les services et les missions jeunesse dans les municipalités ou les départements se développent. Historiquement, ce sont bien les municipalités qui sont les premières à se saisir des politiques de jeunesse. Dans les communes les mandats d’élus spécifiquement dédiés à la jeunesse se sont multipliés à partir de 1995. Cela s’est accompagné également par l’apparition de personnel qualifié en expertise des besoins de la jeunesse. Mais la politique de jeunesse est souvent liée à la politique de la ville. Ainsi, c’est par quartier qu’elle se décline. Pour les départements, le processus est presque identique. Leur action se situe à un échelon plus fin : arrondissement ou unité territoriale d’action sociale. La loi du 13 août 2004 conduit à une nouvelle répartition des compétences en matière sociale, les collectivités locales deviennent les institutions organisatrices de la prise en charge des jeunes. L'État se désengage davantage d’une politique de cogestion État-collectivités : cela s’observe avec l’apprentissage pour le niveau régional ; du Fonds d’aide aux jeunes, du Fonds de solidarité logement, pour le niveau départemental. Les postes d’animateurs jeunes et les structures de loisirs socioculturels sont exclusivement financés par les municipalités. Les plus grosses villes interviennent aussi dans des domaines plus larges : emploi, logement, santé, lutte contre la délinquance. Au niveau départemental, la part du budget global consacrée à la jeunesse apparaît très variable en fonction des priorités politiques. Il n’y a pas de corrélation entre la taille des départements et la proportion de jeunes qui y résident. Dans certains territoires, les jeunes ne bénéficient qu’à minima des dispositifs locaux puisque l’attribution du Fonds d’aide aux jeunes (FAJ) dépend des règlements intérieurs adoptés par chaque département [ibid]. La figure suivante illustre les disparités d’attribution des aides financières dans le cadre du Fonds d’Aide aux Jeunes. 7 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - b. Le rôle historique des associations d'Éducation Populaire L'origine historique de l'Éducation Populaire s'explique par le rapport sur l'organisation générale de l'instruction publique présenté par Condorcet en 1792, qui affirme que l'instruction doit être publique et s'étendre au peuple et qui formalise l'idéal qui sera repris par les associations d'Éducation Populaire : mettre à disposition « l'ensemble des moyens qui permettent de donner à tous les hommes l'instruction et la formation nécessaires afin qu'ils deviennent des citoyens aptes à participer activement à la vie du pays. » [Cacères, 1964] 1. Au XIXème siècle, ce projet de démocratisation de l'enseignement et d'éducation à la citoyenneté sera porté et défendu par différents mouvements classés par Geneviève Poujol en trois principaux courants : catholique et protestant, laïc et républicain, et ouvrier. C'est principalement avec le Front Populaire en 1936 que l'Éducation Populaire se démarque du seul projet de l'instruction citoyenne. Le droit aux loisirs, l'accès aux milieux culturels et artistiques pour tous devient une orientation complémentaire qui prend toute son ampleur à partir de 1945. De nombreuses associations se réclamant d’Éducation Populaire voient alors le jour. Les activités qu’elles proposent peuvent être regroupées en « quatre grands faisceaux » [Mignon, 2007] : • Les activités complémentaires de l'école qui « utilisent les lieux, les moments et les techniques de loisirs » • L'éducation permanente qui « est liée à la promotion professionnelle tout au cours de la vie » • L'action culturelle « qui propose une démocratisation de l'accès et de la pratique de la culture » • « L'engagement dans la cité, » qui est « une démarche de compréhension du monde et de prise de responsabilité civique. » « La société politique et la société civile sont les deux grands acteurs de l'Éducation Populaire. Ils se complètent, se confortent, se heurtent et s'opposent dans le cadre de la République. » [ibid]. Mais on constate que le rapport de force entre le pouvoir politique et les divers mouvements d’Éducation Populaire s'est inversé lorsque la reconnaissance statutaire a eu lieu. Cela se traduit en partie par la contractualisation et le versement de subventions, obligeant les associations à suivre les directives du Gouvernement et à devoir justifier leur existence et le bien-fondé de leurs actions. c. Le contexte et les enjeux actuels pour les associations Fondé en 1968, le CNAJEP s’est historiquement construit avec cette intention de promouvoir un dialogue entre les associations d'Éducation Populaire et les pouvoirs publics 2. Il fédère ainsi plus de 430 000 associations (soit 49% du nombre total d’associations en France,) qui emploient 680 000 salariés (dont 330 000 équivalents temps plein) et 6 millions de bénévoles. Son budget cumulé est estimé à 18 milliards d’euros. Il assure par l’intermédiaire de ses instances représentatives élues en assemblée générale (Comité exécutif et Bureau,) la représentation des mouvements de Jeunesse et d'Éducation Populaire auprès 1 « Offrir à tous les individus de l'espèce humaine les moyens de pourvoir à leurs besoins, d'assurer leur bien-être, de connaître et d'exercer leurs droits, d'entendre et de remplir leurs devoirs ; (...) Tel doit être le premier but d'une instruction nationale ; et, sous ce point de vue, elle est pour la puissance publique un devoir de justice (…) imposé par l'intérêt commun de la société, par celui de l'humanité entière. ». Assemblée Nationale, Condorcet : L’instruction publique, (page consultée le 13/09/11) < http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/7ed.asp > 2 CNAJEP, Le CNAJEP en bref, (page consultée le 24/11/10) < http : //www.cnajep.asso.fr/cnajep-en-bref/ > 8 des pouvoirs publics et au sein d'instances paritaires ou inter-associatives. Enfin, il est partie prenante de l’animation des territoires à travers un réseau de coordinations régionales3. Le CRAJEP de la région Picardie qui fédère 18 associations 4 s’inscrit dans cette logique de questionnement des pratiques associatives. Le Comité a donc initié en octobre 2009 une réflexion sur l’engagement des jeunes 15-25 ans au sein de ses structures par l’intermédiaire d’une Recherche-Action dont les objectifs étaient les suivants : • Valoriser la diversité des formes d’engagement proposées aux jeunes par les mouvements du CRAJEP, • Mieux comprendre les pratiques d’accompagnement des jeunes pour mieux articuler les activités associatives en faveur de la jeunesse sur le territoire, • Elaborer, avec les partenaires publics, des propositions visant à renforcer une politique jeunesse sur la Picardie. L’étude est à l’époque prise en charge par le CRAJEP et soutenue par le Conseil Régional de Picardie, l'État (au travers d’une subvention du CVDA et d’une signature de convention avec la DRJSCS,) et l’Université de Picardie. Un bilan d’étape est établi fin mai 2010. Il reflète un travail de Recherche-Action élaboré à partir : • Des discours des associations et fédérations du CRAJEP sur les jeunes et l’engagement des jeunes, • D’une cartographie des activités associatives et fédérales menées auprès des 15-25 ans. En commanditant la Recherche-Action sur l’engagement des jeunes qui vient questionner les pratiques associatives et fédérales au niveau de la région Picardie, le CRAJEP s’inscrit dans une continuité du discours politique du CNAJEP. Mais ce dernier répond également à la commande sociale générale qui instruit l’évaluation, rendant légitime les financements des actions déployées au sein des associations d'Éducation Populaire. Aussi, il paraît inévitable que l’ensemble des associations mutualise leurs savoir-faire et leurs moyens, dans le but de faire face à cette ère nouvelle de la logique de réponses aux « appels à projet, » qui tend à imposer sur le territoire une conduite concurrentielle aux associations. Au sortir de cette étude menée par Me Marie Lemay, une démarche de rencontre est initiée auprès des jeunes afin de mieux comprendre leurs modalités d’engagement, leurs attentes et de leur proposer des espaces de mobilisation. Et c’est dans cette perspective que nous avons réalisé notre enquête. 3 CRAJEP, ARDEVA, FSPVA. 4 CEMEA, Concordia, EEF, Exposcience, URFR, FRCPE, Francas, IFEP-Léo Lagrange, JOC, URPEP, Etablissement Régional Léo Lagrange, FRMJC, JPAP, Scouts et Guides de France, UFCV, FRFR, Ligue de l’Enseignement Picardie, MRJC. 9 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - II. 2ème Partie : L’ENQUÊTE DANS LES ASSOCIATIONS DU CRAJEP A. Les méthodes employées Vers une sociologie compréhensive Afin de comprendre le sens que les personnes interviewées donnent à leur expérience dans les associations d'Éducation Populaire, nous avons choisi une méthode principalement qualitative 5. Pour mieux préparer les entretiens nous avons élaboré un guide détaillé (voir annexe) abordant l’ensemble des thèmes que nous voulions étudier. Mais dans la dynamique de l’entretien les questions ne furent pas posées dans l’ordre et certaines furent éludées. De manière générale, nous n’avions pas notre guide d’entretien sous les yeux pendant les interviews. La consigne de départ était claire et annoncée à l’enquêté : le faire parler de son parcours au sein de(s) l’association(s) d'Éducation Populaire. Nous avons effectué 32 entretiens qui ont duré entre 40 et 80 minutes, ce qui a permis à chacun des interviewés de revenir sur son parcours. Une évolution très nette est apparue lors de ces entretiens. Les premiers étaient des entretiens exploratoires qui nous ont permis d’affiner au fur et à mesure le guide d’entretiens. En conséquence, par ce jeu d’aller-retour les entretiens sont devenus plus précis mais aussi plus exhaustifs. De nouveaux thèmes auxquels nous n’avions pas pensés ou que nous n’avions pas jugés prioritaires, par exemple le rôle de la famille, sont apparus. Cette enquête fut une œuvre dynamique faite d’adaptations et de choix d’orientation. Nous n’avions pas prédéfini un nombre d’entretiens à réaliser. Ne connaissant pas les caractéristiques de la population ayant traversé les associations d'Éducation Populaire, nos critères de départ étaient très conventionnels (âge, sexe, niveau d’étude). S’ils étaient assez généraux, ils nous ont permis de viser une relative diversité de la population. Au début de l’enquête nous avons rencontré des professionnels, des salariés des associations. Précisons que ce ne fut pas un choix par défaut. Mais nous avions à l’esprit que nous rencontrions avec eux des exemples de « réussite » de parcours professionnels dans les associations. Ces « anciens jeunes » qui avaient fait carrière nous livraient des récits de vie relativement longs et déjà réfléchis. A nous d’avoir constamment à l’esprit qu’il s’agissait de discours reconstruits par les enquêtés à la différence de ceux des jeunes qui nous livraient une parole plus immédiate, moins réflexive. La reconstruction a posteriori de leur trajectoire par les enquêtés est à mettre en parallèle avec le sens subjectif qu’ils donnent à leur biographie. Dans toutes les enquêtes par entretiens, les interviewés racontent leur vie à la lumière de ce qu’ils sont devenus. Il est important de remarquer que dans cette enquête les jeunes qui ont côtoyé les associations et qui n’y ont pas fait carrière n’apparaissent pas. On peut supposer qu’ils sont nombreux. Mais nous ne les avons pas rencontrés pour deux raisons : d’une part, il était plus facile pour les associations de nous présenter des personnes dans les murs, d’autre part, trouver des interviewés n’appartenant à aucun réseau nécessite un autre type d’enquête plus ethnographique et réalisée sur une plus longue durée. b. Présentation des associations et de leur diversité Chacune des structures est constituée en association régie par la loi 1901. Elles ont un champ d’action bien défini et ce sur un territoire donné. Elles sont identifiées par le public (hors adhérents). Chacune d’entre elles fonde son action sur des valeurs humanistes qui sont le ciment de chacun des projets éducatifs et/ou pédagogiques de ces associations. Ceci étant posé, passons maintenant à la présentation de ces structures qui ont constitué notre terrain d’enquête. 5 Par une approche wébérienne qui institue une sociologie plus compréhensive dans l’analyse du parcours des individus. 10 Centre Social CAPS Centre Social et Culturel Étouvie Historique de création Association fondée en 1955, qui fonctionne dans un premier temps au travers de deux entités (le Foyer Léo Lagrange situé rue Émile Zola et le J-Club situé rue des Jacobins). C’est à partir de 1975 que les deux structures s’installent dans les locaux actuels situé place Vogel. Cette relocalisation avait pour but de promouvoir un développement culturel sur les quartiers environnants qui connaissaient alors d’importantes restructurations. Association fondée le 13 décembre 1994, à l'initiative de trois amis qui voulaient redynamiser le quartier Philéas Lebesgue. 1er agrément Centre Social en 2004-2005. Le CSC est né en même temps que le quartier à la fin des années 50. Initialement animé par les femmes des cadres qui se retrouvaient pour échanger et participer à la vie sociale du quartier, il est vite investi par les associations du quartier notamment par les associations sportives, qui ont quitté la structure depuis que des équipements et installations sportives sont apparus. Les missions - La formation artistique (corporelle, graphique, théâtrale, musicale), - La diffusion de spectacles à la recette (Le centre prête des locaux aux artistes), - Le travail d’actions de proximités (Mené sur le quartier Saint Maurice depuis maintenant 7 ans). - L’accompagnement à la scolarité (aide aux devoirs), - L’organisation de la fête du quartier, - L’accompagnement social. - L'accompagnement des familles, - Les actions autour de la santé, - L'accueil des personnes âgées, - L'accompagnement vers les travailleurs sociaux, - L'accompagnement éducatif, - L'accueil des jeunes sur le secteur culturel : formation, création, diffusion. 1 agent d’entretien 1 agent d’accueil 1 médiatrice culturelle 1 médiatrice culturelle 1 directrice 1 directeur 1 coordinateur d'action sociale 1 animateur d'action sociale 1 référente de l'action culturelle et de l'accompagnement scolaire 1 animatrice jeunesse référente de la fête du quartier 1 secrétaire Le personnel Centre Culturel Léo Lagrange 11 14 personnes à temps plein dont 7 en animation et direction : 1 directrice 2 animateurs jeunesse 1 animateur à l'accompagnement à la scolarité 1 animateur à l'accompagnement social 1 médiatrice culturelle 1 animatrice culturelle EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - Même si les objectifs sur lesquels les projets éducatifs et/ou pédagogiques de chacune des structures sont orientés autour de valeurs humanistes, il est clair qu’il existe, dans leurs activités quotidiennes, quelques différences. Tout d’abord, leur dénomination respective marque et montre que toutes n’ont pas le même domaine d’action : Centre Social pour CAPS, Centre Culturel pour Léo Lagrange et Centre Social et Culturel pour Étouvie. La sociologie des territoires d’implantation et d’action diffère. En ce sens, chaque association a pris le soin d’adapter l’offre de ses services en fonction de la demande immédiate de la population. C’est ainsi, par exemple, que CAPS a franchi le pas en obtenant un agrément Centre Social à partir de 2004. De même, la territorialisation de l’action culturelle de Léo Lagrange s’est orientée vers le quartier Saint Maurice alors que le Centre Culturel est situé plutôt en centre-ville. Il en est de même de l’offre du Centre Social et Culturel d’Étouvie qui n’a eu de cesse de développer des groupes de paroles (soutien à la parentalité), de proposer une programmation culturelle, etc. Nous constatons dans ces trois cas que, même si l’offre diffère car elle est fonction de paramètres déjà développés, il apparaît nettement une volonté des structures de s’adapter aux besoins et aux demandes du public accueilli mais aussi de faire en fonction du territoire dans lequel sont implantées ces structures. c. Présentation des interviewés La présentation des données sur les personnes interviewées ne vaut que pour elle-même et non pour une population plus globale. En effet, le mode de recrutement des enquêtés ne visait pas la représentativité mais plutôt la compréhension d’une diversité de parcours qui les caractérisent. Femmes Statut Hommes Moyenne d'âge Répartition par niveau des diplômes/brevets acquis au sein de la DRJSCS I II III I 4 2 2 IV V Sans II II I I V V Sans Personnel permanent 9 27,9 Personnel non permanent 3 21,6 1 Usager 5 27,8 2 1 17 26,8 4 5 3 3 Personnel permanent 8 38,3 1 1 2 1 2 Personnel non permanent 6 23,3 1 2 3 Usager 1 59 Sous-total 15 33 1 1 3 4 5 1 1 2 1 11 TOTAL 32 30 5 6 6 7 5 3 1 4 1 26 Sous-total 6 Nombre Répartition par niveau6 des diplômes/brevets/certificats ou équivalences acquis au sein de l'Éducation Nationale 1 2 7 2 3 2 5 2 2 1 2 15 1 1 5 5 1 1 Niveau I = Bac + 5, niveau II = Bac + 3 & 4, niveau III = Bac + 2, niveau IV = Bac, niveau V = CAP/BEP, Sans = sans qualification. 12 Femmes Statut Moyenne d'âge Âge de la 1ère rencontre avec une association d'Éducation Populaire Fréquentation Avant 12 ans En tant qu'animateur Autre situation Moyenne par tranche d'âge Continue Discontinue 2 1 12-13 ans 4 5 4-5 ans 2 1 9-10 ans 4 2 2 10-11 ans 10 7 11-12 ans 7 1 1 8 ans 3 3 1 Non renseigné 1 Personnel permanent 9 27,9 8 6 Personnel non permanent 3 21,6 1 2 Usager 5 27,8 1 5 17 26,8 10 13 2 Personnel permanent 8 38,3 6 5 3 Personnel non permanent 6 23,3 3 5 Usager 1 59 Sous-total 15 33,6 9 10 3 2 10-11 ans 11 4 TOTAL 32 30 19 23 5 4 10-11 ans6 21 11 Sous-total Hommes Nombre B A F A Synthèse des caractéristiques de la population interviewée Concernant : • La catégorie du genre : on a une répartition quasi égalitaire du genre chez les enquêtés. • L'âge : les personnes interviewées avaient entre 15 et 59 ans, la majorité des personnes avait entre 20 et 29 ans (avec une prédominance du genre féminin). • Le niveau de qualification : au niveau de la filière Education Nationale, surreprésentation du personnel permanent féminin concernant les niveaux I & II. • Le BAFA : peu importe le statut et le niveau de qualification, plus de la moitié des enquêtés ont le BAFA, avec une prédominance du côté du personnel permanent, bien que ce diplôme ne soit pas reconnu officiellement comme diplôme professionnel par la DRJSCS alors qu'il est pris en compte dans les modalités de recrutement des personnes. • L'âge de la première rencontre des enquêtés avec une association d'Éducation Populaire : les 3/4 ont connu la première association avant l'âge de 12 ans. 13 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - • La fréquentation : les 2/3 des enquêtés ont eu une fréquentation continue dans les structures. d. Carrière ou trajectoire ? Dans la perspective compréhensive et à partir des entretiens qui ont été recueillis, la notion de carrière semble plus pertinente que celle de trajectoire. D’un point de vue méthodologique d’abord, l’idée de trajectoire prend sens dans une perspective sociologique plutôt déterministe et soutenue par des enquêtes quantitatives. Il s’agit de décrire des cohortes et de découvrir les destinées partagées par des individus ayant au départ des caractéristiques sociales communes. On peut ainsi parler de la trajectoire scolaire des enfants d’ouvriers. Dans l’enquête que nous avons menée, les catégories de départ sont d’un tel niveau de généralités (jeunes par exemple) et les destinées sont tellement diverses que ce genre de perspective est impossible. D’un point de vue explicatif ensuite, dans sa visée compréhensive l’enquête cherche à saisir la manière dont chaque individu fait des choix à chacune des étapes de son parcours. Ce sont donc les représentations que la personne interviewée a de l’univers (ou d’une petite partie de l’univers) des associations d'Éducation Populaire, les représentations changeantes qu’elle a de son avenir et de sa propre place dans le monde social, les tactiques qu’elle utilise, que mettent en lumière les entretiens. La notion de carrière qui se construit au coup par coup, en fonction des opportunités, des contraintes, et des visions du monde, est donc beaucoup plus adaptée pour nos objectifs que celle de trajectoire qui décrit les individus comme des objets propulsés par des forces sociales surplombantes beaucoup plus que comme les inventeurs de leur propre parcours. L’enquête cherche à comprendre la manière dont s’opère le croisement entre des individus et l’univers associatif. Comment dans cette rencontre les biographies s’élaborent ? Comment cela donne aux individus des perspectives nouvelles et inattendues ? Comment ils en tirent partie ? Etc. Le résultat de ces rencontres dans ses aspects personnels, comme dans ses aspects plus collectifs et publics, est multiforme et ne saurait être décrit comme un chemin menant d’un lieu à un autre. Il y a de nombreux chemins et de multiples manières de les parcourir. Et la carte de ces chemins serait d’ailleurs encore plus riche si les personnes maintenant hors de portée car elles ont quitté le paysage, avaient pu être prises en compte. En résumé, rien dans ce que nous avons observé ne correspond à des trajectoires que l’on pourrait mettre en équation ou en probabilité. 14 III. 3ème Partie : L’UNIVERS ASSOCIATIF ET SES JALONS L’univers associatif est largement composé de structures multiformes et pluridisciplinaires avec des projets aussi différents les uns que les autres. Cet univers est bien sûr le résultat de sa propre histoire mais il est également le résultat de mouvements individuels au sein d’un collectif. Autrement formulé, s’il constitue une véritable source relationnelle et socialisatrice, il est également le produit d’interconnexions pluridisciplinaires qui permettent à ses bénéficiaires d’acquérir de véritables connaissances, de se créer et de mobiliser un véritable réseau et donc d’acquérir de véritables compétences et ainsi de développer leur capital social. Compétences et capital social qui leur offriront au fil de leurs expériences et de leurs rencontres des espaces de possibilité dans lesquels ils auront le choix et une liberté de mouvement qui définira leur propre carrière. Ainsi, l’analyse des entretiens réalisés au cours de cette enquête nous a permis de définir les jalons de cet univers associatif. A. L’association portail Au regard de cette analyse, il apparaît que l’association - qu’elle soit fréquentée au titre du loisir ou de la profession – n’est qu’une étape à un instant T dans le parcours des interviewés. En effet, il est à souligner que c’est la rencontre avec la première association - l’association portail 7 qui ouvre les portes d’un univers associatif et qui introduit ces personnes dans une constellation associative où les carrières des un(e)s et des autres se dessineront en fonction des rencontres opérées et des choix qu’ils feront8. Au delà des critères sociaux, ce qui semble être déterminant dans la rencontre de l’association portail est soit la rencontre avec une tierce personne (animateur, administrateur d’une association), soit la fréquentation d’une structure de loisirs lors de l’enfance et/ou de l’adolescence. Et c’est cette expérience qui laisse des traces, des souvenirs (positifs ou négatifs,) qui auront comme effet que les jeunes s’engageront ou non au sein de l’association portail ou dans l’une des associations de la constellation associative. Néanmoins, il existe lors de la rencontre avec l’association portail, deux postures. La première réside dans le fait que l’individu qui entre au sein de l’association en repart après avoir consommé ce qu’il était venu chercher. La deuxième réside dans le fait que l’usager y trouve une place et un intérêt particuliers et ainsi se construit sa propre carrière pouvant passer ainsi par plusieurs statuts9. La rencontre avec l’association portail apparaît donc comme un élément déterminant pour la suite de la carrière. Il serait donc intéressant d’observer puis d’analyser les modalités de cette ou de ces rencontres. 7 Nous entendons par association portail, la 1 ère association fréquentée et qui permet à l’individu qui s’y engage d’avoir accès à l’ensemble des associations qui gravitent autour de celle-ci. 8 Par «constellation associative» nous entendons l’ensemble des associations qui sont interconnectées les unes par rapport et dont l’accès est offert par l’association portail. Les interconnexions peuvent être de plusieurs ordres: relationnelle, activités, partenariat entre associations. 9 Les statuts dont il est question dans cette partie sont étudiés et analysés dans le schéma des idéaux-type de position (page 26). 15 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - b. Les modalités de la rencontre On imagine bien que l’implantation d’un centre social, culturel ou socioculturel aura de manière générale un impact dans le développement des relations qui s’établissent dans le quartier. Toutefois, en fonction de sa situation géographique, des activités proposées par l’équipe d’animation, des professionnels et bénévoles qui se succèdent dans la structure et qui marquent son histoire, la rencontre entre l’usager et l’association d’Éducation Populaire s’organise sous différentes modalités selon une proximité et un contexte qui lui sont propres. Proximité spatiale et temporalité Dans le cadre du déroulement de l’étude, nous avons principalement enquêté à partir de trois terrains : le CCLL, CAPS et le CSCE. L'étude des adhérents ne saurait rendre compte complètement des activités de ces structures, puisque l'impact des actions engagées va bien au delà du seul cercle des adhérents. Mais dans le cadre de notre étude, l'adhésion peut être considérée comme un moment important de la carrière des jeunes dans les associations. Par ailleurs, d'un point de vue pratique, les fiches des adhérents sont facilement accessibles. À partir de ces fiches, nous avons pu clairement observer que l’implantation géographique des structures - dans ou en périphérie du quartier - avait une forte incidence sur le recrutement des adhérents. Ainsi, nous pouvons constater une grande disparité entre la zone de recrutement du CSCE où une majorité d'adhérents habitent le quartier d'Étouvie et le CCLL, où une proportion bien plus faible est issue du quartier Saint Maurice. Le CSCE est au cœur d'Étouvie, son histoire est complètement imbriquée à celle du quartier. Au-delà de la proximité spatiale, la présence repérée et pérenne de la structure par les habitants du quartier aurait pour autre effet d’inscrire cette structure comme un espace potentiel de rencontre de plus en plus prédominant. Autrement dit, plus la structure est ancienne dans le quartier, plus elle en fait partie intégrante et plus ses habitants la repèrent et l’impliquent dans la vie sociale et collective de tous les jours. L’exemple du CSCE est flagrant. Il n’a pas moins d’un demi-siècle d’existence et, à ce jour, les familles sédentarisées depuis au moins deux générations l’ont toujours connu et ont bien repéré l’association comme faisant partie intégrante de leur environnement spatial, qu’il y ait conscience ou non des modalités d’organisation et de vie de la structure. Isidore10, 40 ans, animateur issu du quartier raconte : « Étant gamin, je n’avais aucune perception de ce qui s’y faisait, je savais que c’était un lieu où les portes étaient ouvertes. ». Proximité sociale et culturelle « Moi à chaque fois que je me suis mise dans une association c’est parce qu’il y avait des gens que je connaissais et qui y étaient, et vouloir monter un truc avec eux, … c’est plus comme ça que ça s’est fait, par le relationnel. » (Catherine, 23 ans). Par ses propos, Catherine témoigne du rôle essentiel de l’inter-connaissance dans les modalités de rencontre entre l’usager et les associations d’Éducation Populaire. Le fait de fréquenter des gens qui fréquentent les structures favorise ces rencontres. La famille est d’ailleurs la première proximité sociale qui peut conduire l’individu à découvrir le monde de l’Éducation Populaire par choix ou par circonstance. 10 Dans un souci du respect de l’anonymat, les prénoms des enquêtés et les lieux ont été changés. 16 Marion, 21 ans, nous raconte qu’elle ne se souvient pas précisément de sa première rencontre avec l’association située dans le quartier où elle vivait étant petite, mais elle se rappelle que très tôt elle accompagnait sa mère chercher ses frères qui la fréquentaient. Aussi, dès la primaire, elle a choisi de rentrer dans cette association dans le cadre de l’aide aux devoirs. Margaux, 30 ans, expose à son tour : « Et en fait malgré tout par des réseaux un peu, de… religieux, mais sans être trop religieux, on a, enfin mes parents ont connu une association qui organisait des camps de vacances sur tout l’Est de la France, et particulièrement en Rhône-Alpes. Et donc c’est là qu’ils m’ont envoyé une première fois et puis, on était en… c’était du camping, ça durait trois semaines. ». Le second cercle relationnel qui favorise la rencontre peut-être celui des copains de quartiers. « Mes copains, ils sont venus, moi je suis venu après avec eux ! » (Serge, 18 ans). « J’habitais Étouvie, j’avais des potes qui étaient dans l’animation, le soir on se retrouvait, on parlait et puis il y a un pote qui m’a fait rentrer dedans… » (Isidore). On se rend compte qu’effectivement le groupe a eu pour la plupart des enquêtés une influence certaine dans leur intérêt pour une structure associative. D’ailleurs, un directeur de structure nous explique qu’il fait le choix stratégique d’approcher les jeunes du quartier au travers du groupe. Il leur propose de développer des actions en fonction de leurs aspirations et de leurs compétences artistiques (produire un CD de musique par exemple). C’est ainsi qu’une relation de partenariat se développe entre le groupe et l’animateur chargé de les accompagner dans la réalisation du projet, ce qui aboutit généralement à l’adhésion des jeunes à l’association. Enfin, le thème de l’accès à la culture au travers de la pratique associative était récurrent dans les entretiens conduits. Beaucoup d’interviewés ont adhéré à diverses associations socioculturelles dans le but premier de « consommer » de la culture à moindre coût. Cependant, le choix d’adhésion à telle ou telle structure dépendait également de la représentation qu’ils s’en faisaient au travers des échos qu’ils recueillaient par l’intermédiaire de leurs connaissances. Fabienne, 52 ans, nous raconte qu’en arrivant sur Amiens il y a une vingtaine d’années, elle a tout de suite cherché à développer son réseau d’accès à la culture en prospectant dans diverses associations. Elle s’était d’ailleurs constituée un cahier avec les « meilleures adresses » qu’elle échangeait avec ses ami(e)s. Le but était de consommer pour le plaisir de la culture qui pour elle n’appartenait pas « qu’aux gens de la haute société » et de la partager ensuite avec d’autres dans le cadre d’ateliers de réflexions. Catherine relate : « Ça faisait des années et des années que je voulais faire du violon et en fait j’ai rencontré Matthieu à l’époque des mouvements sociaux à la fac en 2009, … et il m’a parlé d’ici, que c’était pas trop cher... et en fait après je suis venue et je me suis inscrite ! ». 17 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - En définitive, les modalités de rencontre entre les associations et l’usager sont la résultante commune ou différenciée : • D’une expérience individuelle de l’usager qui trouve probablement son origine dans une proximité spatiale avec la structure, • D’interactions relationnelles de proximités entre l’usager et son voisinage, • Du contexte de vie familiale qui aura ou non imposé à ce dernier l’entrée dans l’association. Aussi, nous allons nous intéresser maintenant au rôle que peut avoir la famille dans le développement social et culturel des jeunes. c. Le rôle de la famille Pourquoi la famille est-elle si importante ? Selon la culture qui conditionne en général l’éducation qu’on donne à ses enfants, nous pouvons constater que les modèles familiaux divergent. En effet, nous observons des différences de posture des jeunes lorsqu’ils sont issus de milieux sociaux et culturels différents. Première institution socialisatrice, la famille a connu diverses mutations tout au long des siècles et continue à en connaître de nos jours. Même s’il est admis qu’actuellement, à elle seule la famille n’est plus le seul élément de socialisation, il n’en demeure pas moins qu’elle reste un agent prépondérant dans le parcours d’un individu. Légitimement, nous pouvons interroger l’influence que joue la famille dans la carrière des jeunes. « Mes parents m'ont toujours fait confiance [...] J'ai obtenu une bourse du mérite parce que mes parents ne gagnaient pas beaucoup d'argent et que j'avais eu une mention très bien, et que j'allais suivre des études qui me conduisaient à des fonctions publiques. J'ai eu à peu près 600 euros par mois, ce qui est énorme et du coup je suis partie de la maison et j'ai fait ma vie et du coup je n'avais pas de pression car ils ne me donnaient même pas d'argent mes parents ! » (Sabrina, 24 ans). A elle seule, cette citation pose les jalons d’une prééminence de l’institution famille comme une immense fonction dans le développement social des jeunes. Cet extrait d’entretien montre que la confiance accordée par ses parents a permis à ce jeune de s’inscrire dans une démarche positive et d’obtenir cette bourse qui l’a conduit à une forme d’autonomie sociale. Considérant que l’influence positive ou négative de la famille sur ses membres conditionne le parcours de ce dernier, il est tout de même intéressant de noter que ce seul élément n’induit pas automatiquement l’échec ou la réussite d’une carrière. Marion évoque que les membres de sa famille ont participé en tant que bénévoles lors de la fête annuelle du quartier, mais qu'elle préférait « y aller pour s'amuser avec ses copines. », elle n'a pas suivi l'investissement que sa famille opérait dans l'association, mais a utilisé l'association pour des aides ponctuelles. Quant à Loïc, 20 ans évoquant son abandon d'études universitaires, il explique que sa mère travaillant pour l'Éducation nationale lui a trouvé un poste d'assistant d'éducation dans un collège. « Ma mère voulait absolument que je ne fasse pas rien. » Ajoutons qu’il insiste également sur le fait que son frère suivait un cursus de formation d’éducateur spécialisé, que son père avait un réseau social important et il clôture cette partie en nous signifiant qu’il n’était pas inquiet de son devenir 18 social étant donné le soutien de sa famille. Avec ce jeune qui, au départ, ne semble pas fortement attiré par la structure associative, nous constatons que la famille a joué un rôle crucial dans l’intégration de Loïc au sein de la structure associative. Et nous observons également que la cellule familiale joue un rôle qui le rassure et le protège dans la perspective d’un avenir incertain. Nous constatons aussi le parcours inverse quand un individu fréquentant la structure la fait découvrir aux autres membres de sa famille. « J’ai une grande sœur de 20 ans qui a fait une formation à CAPS et un petit frère de 6 ans qui vient pour l’aide aux devoirs. Ma mère, maintenant elle vient 3 à 4 fois par jour, plus que moi, c’est moi qui lui ai fait découvrir, je lui disais viens, viens. Maintenant elle vient plus que moi. C’est souvent les mamans qui sont là, les papas, on les voit moins, souvent ils travaillent. » (Serge). Il est intéressant de noter, avec ce témoignage, que l’activité au sein d’une association d’un ou de plusieurs des membres d’une famille influence l’engagement dans la structure associative des autres membres. Cependant, la famille peut être aussi le lieu qui pose problème. En effet, Isidore nous parle de l’importance d’acquérir des ressources hors de la famille. Pour lui, la structure est le lieu où va se construire socialement une identité éloignée de l’appartenance identitaire à laquelle ses parents le rattachent. Comme-ci cette appartenance ne suffisait plus à son épanouissement social. « A la maison tu ne pouvais pas faire rentrer n’importe qui à la maison […] Avec le recul, venir ici c’était acquérir un patrimoine au détriment d’un patrimoine que j’allais abandonner. Et cette structure-là accueillait des gens qui étaient dans la même crise culturelle que moi. Ma mère, elle est écossaise, mon père, il est laotien, culturellement c’est complètement différent. Du coup ce que tes parents n’ont pas été chercher, c’est à toi d’aller le chercher. » (Isidore). Donc fréquenter la structure permet aussi de se construire son identité et ainsi d’asseoir son existence sociale non plus comme un individu issu de « la famille de », mais bien « untel l’animateur ». Ceci revêt l’importance du statut social acquis, gagné. Ainsi cette phase permet au jeune de construire son propre parcours. Dans bon nombre d’entretiens, nous avons observé le rôle essentiel que joue la famille dans l’intégration d’un ou de plusieurs de ses membres aux activités de l’association. Elle joue tantôt un rôle direct, notamment lorsque les parents sont l’élément déclencheur de l’inscription de l’enfant aux activités de l’association, tantôt un rôle indirect lorsque le jeune qui s’y inscrit veut imiter l’un des membres de la famille qui est ou y a été investi. Même si la famille demeure la première institution socialisatrice, elle n’est plus la seule à jouer ce rôle. Aussi il devient primordial d’interroger le rôle de l’association comme véritable espace de socialisation. d. L’association comme espace de socialisation Il est intéressant de comprendre en quoi l'association est un espace de socialisation. Divers mécanismes y contribuent : les identifications, les affiliations, le partage, la coopération. Quelque soit la forme et les méthodes des différentes structures associatives de l'Éducation Populaire, l'association est présentée comme un espace de socialisation et d’intégration avec 19 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - l'objectif prioritaire de promouvoir des pratiques citoyennes au sein de la vie associative et de la vie locale. Les valeurs de solidarité, d'accès à la culture, de respect de la dignité humaine, sont des idéaux partagés par les associations d'Éducation Populaire. On retrouve ce discours chez les professionnels ayant suivi des formations liées à l'Éducation Populaire, qui valorisent implicitement ou explicitement leur mission d'agent de socialisation auprès des enfants. Ils évoquent leur rôle en tant qu'adultes qui doivent être à l'écoute de l'enfant individuellement mais aussi comme celui permettant l'inscription au sein d'un groupe. « Moi, j’attends que le gamin comprenne ce qui se passe dans les relations humaines. Il vient ici pour prendre des codes qu’il va pouvoir exposer, s’approprier pour sa vie de demain. Ici c’est une microsociété où on va rencontrer l’intérieur et l’extérieur. » (Isidore, 40 ans). « La démarche collective apporte à l’individu ... Il nous semblait intéressant que les jeunes aient cette approche collective. » (Ange, 35 ans). « Quand on vit mal sa situation de jeune aujourd’hui dans un quartier comme celui-là, et qu’on rencontre, peut-être que si on rencontre un jour des gens qui nous font confiance et qui sont capables de nous confier une responsabilité, ça peut être déclencheur, euh, ça peut être une étape intéressante. » (Louis, 44 ans). Les entretiens avaient pour objet de recueillir des récits relatant leurs diverses expériences dans les domaines associatifs, ces discours sont donc reconstruits sur la base de souvenirs avec des nuances selon l'âge de la personne entretenue ou de sa position au sein de l'association. Pour la plupart des personnes rencontrées, une distinction est notable entre les souvenirs d'enfance qu'ils évoquent et leur position actuelle par rapport au milieu associatif, en tant que professionnel ou usager. « Et je trouvais vraiment que les centres de vacances, quelque soit l’organisateur, c’était vraiment riche parce que ça, ça permettait d’aborder toutes ces questions de fond ! Et puis moi à ce moment là, j’étais pas très vieille non plus donc ça faisait écho aussi à des problématiques, à des questions personnelles. » (Margaux,30 ans). « Après j'étais bien contente parce qu'on sortait dehors, ... j'étais là surtout pour rigoler, les devoirs c'était pas trop mon truc, mais je les faisais quand même parce qu'on était obligé. » (Marion, 21 ans). Les souvenirs sont souvent liés aux activités pratiquées, au plaisir de s'y rendre, aux lieux accueillants mais aussi aux attitudes des animateurs. On relève peu de souvenirs liés au groupe de pairs et ceux-ci sont plutôt évoqués par rapport aux relations à l'école ou dans le quartier, le village. « Au lycée c'est vrai qu'on avait monté notre petit truc et puis je sais pas c'est peut-être en lien avec l'âge qu'on avait, 16-17 ans, ça nous plaisait bien, on était trimballé dans le minibus, pour aller faire des représentations, c'est un truc qui botte quand on a cet âge là et qu'on est avec toutes les copines qu'on connaît depuis la maternelle ! » (Catherine, 23 ans). Pour ceux qui ont fréquenté les associations très jeune, où la modalité d'entrée était plus liée à un choix des parents, essentiellement les centres de loisirs ou les centres de vacances, les rencontres évoquées et mises en avant sont celles en lien avec les animateurs, laissant entendre une 20 importance accordée à l'adulte comme référence. « Le premier centre que j'ai fréquenté, je n'aimais pas y aller parce que les animatrices étaient un peu « lourdes », ..., celui auquel je suis allée après ils étaient proches des enfants, ils osaient parler avec eux et quand on était un peu plus grands ils venaient… » (Ovidie, 15 ans). « Des fois, je recroise des animateurs que j'ai eus quand j'étais en centre aéré et je les reconnais ! » (Beverley, 20 ans). « C'est comme ma famille vu que c’est depuis 95 que je les connais ! » (Marion, 21 ans). Pour les personnes ayant rencontré plus tardivement les associations, où la modalité d'entrée est plus de l'ordre du choix, les souvenirs sont davantage liés au souhait de rencontrer d'autres personnes ayant les mêmes centres d'intérêt ou de pratiquer une activité culturelle. Mais, la qualité de l'accueil de l'équipe d'animation et la convivialité, les tarifs accessibles, restent des éléments importants dans leurs restitutions. « C'est vrai que la première fois que je suis revenue de mon cours, j'étais super enthousiaste, et mon copain à l'époque m'avait dit « ça c'est super important qu'avec ta prof ça se passe bien, c'est super important, tu progresseras vite ! » (Catherine, 23 ans). La socialisation est surtout valorisée dans les discours des personnes de ceux qui sont investis depuis longtemps dans une association, ou qui ont pu, à un moment donné de leur vie, se retourner vers une association qui leur a permis d'ouvrir une autre porte dans leur parcours de vie. Le recul de l'âge et la position professionnelle permet de comprendre ou de verbaliser le bénéfice apporté par l'association d'Éducation Populaire, sachant que ce regard rétrospectif est souvent lié au suivi d'une formation dans le domaine de l'Éducation Populaire. e. Formation et professionnalisation Si les métiers de l’animation et les associations font évidemment partie de notre système économique libéral, peu compatible dans les discours avec les valeurs et l’engagement (au sens de don de soi), ils participent bien à une mise sur le marché du travail de nombreux jeunes qui ont traversé les associations d'Éducation Populaire. Dans un contexte où le taux de chômage des jeunes de 15-25 ans est élevé (21% de la population active en 2009) l’expérience de la précarité est fréquente chez les jeunes même si on peut exercer des emplois précaires ou changer d’emploi souvent sans systématiquement vivre dans la précarité [Nicole-Drancourt & Roulleau-Berger, 1995]. La précarité peut alors être assimilée à un temps d’expérimentation. L’expérience de la jeunesse correspond à ce temps d’expérimentation. L’allongement de la durée entre la sortie du système scolaire et la stabilisation professionnelle prolonge cette période. Les jeunes sont en situation précaire notamment sur le plan scolaire et professionnel et nous observons pour la plupart des cas, surtout à CAPS et au CSC Étouvie des niveaux scolaires peu élevés. Ce sont essentiellement des jeunes qui n’ont pas acquis les codes d’accès à une meilleure réussite scolaire avec pour la plupart d’entre eux une vision de l’école comme un moyen rapide d’accès à une insertion professionnelle. En bref, on trouve peu d’héritiers – c'est-à-dire d’individus qui reprennent les positions qu’avaient leurs parents – dans ces deux associations. Dans les discours on trouve : Les mauvais choix d’orientation 21 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - « Ma mère, elle m’a dit, si tu veux quitter l’école, il faut que tu trouves un truc derrière. Avant de faire la menuiserie, je voulais faire la maçonnerie. J’ai fait après un CAP maçonnerie, ça me correspondait mieux mais le patron il a fait faillite. Donc tout s'est arrêté, j’avais 18 ans. » (Kylian, 21 ans). « J’ai arrêté le bénévolat une année pour faire un Bac Pro à Edouard. Branly en « hygiène et environnement » et ... j’ai arrêté. C’était une mauvaise orientation après, j’ai fait la suite de mon CAP et...ça ne me plaisait pas. Pendant mon CAP, j’étais toujours bénévole, je venais encore deux fois par semaine pour l’aide aux devoirs. Le CAP pour moi c’était vraiment trop simple, j’ai eu le choix entre un CAP et un BEP, j’ai hésité, après j’ai eu des remords, j’avais largement le niveau pour le BEP, maintenant je peux plus... » (Steeve, 18 ans). Les discriminations à l’embauche « Au départ j’ai un CAP-BEP tailleur de pierre. Mais pour trouver les stages quand on est d’origine étrangère, c’est très compliqué, c’est très lié au compagnonnage, donc du coup j’ai été très freiné, je n’avais pas le capital nécessaire pour aller beaucoup plus loin. Freiné par ces stages que tu ne peux pas faire, t’es obligé d’arrêter, donc j’ai arrêté, je suis parti, j’ai eu mon diplôme, j’me suis cassé.» (Isidore). Le terme de carrière des jeunes dans la relation Formation/Emploi est approprié car si la finalité pour ceux que nous avons rencontrés est de trouver un emploi, cette optique est séquentielle. En effet, la réalisation du projet (à supposer qu’il soit clair dès le départ) se fait par étapes (allant de l’échec scolaire, en passant par des formations diplômantes ou qualifiantes, les rencontres avec les professionnels). Nicole-Drancourt préfère parler de « moratoire juvénile » pendant lequel les jeunes explorent et vivent de nouvelles expériences en usant de diverses stratégies. La prédominance du BAFA Par exemple, obtenir son BAFA, reste une expérience primordiale et une stratégie intéressante pour bon nombre de jeunes interrogés. Pour l’obtenir, certains d’entre eux en manque de financement « se mettent au travail » sous la forme de chantier-jeunes : « Moi avec les études tout ça, j’avais pas trop le temps mais j’ai beaucoup de copains qui ont passé le BAFA. Il y en a qui n’avaient pas d’argent pour la formation alors ils ont fait des chantiers, mon pote Salvador c’est ce qu’il a fait.» (Mehdi, 23 ans). « C’est à partir du mois de juillet qu’il m’a proposé de participer à un camp VTT comme aide-animateur. Comme j’ai fait une semaine avec eux, ils m’ont payé ma semaine BAFA avec les CEMEA avec comme appréciation : très bon stage. » (Kylian, 21 ans). Cette envie d’obtenir le BAFA coûte que coûte invite certains jeunes à travailler bénévolement pour son financement. C’est un contrat moral établi entre l’association et le jeune qui s‘engage. Visiblement chacun y trouve son compte. Pour l’association ces jeunes sont de la main d’œuvre peu coûteuse et permettent de satisfaire les objectifs d’Éducation Populaire. De son côté, le jeune peut obtenir son financement. « J’ai fait un chantier jeune sur les conseils de CAPS, tu auras 150 euros 22 pour ton base BAFA et nous CAPS on te finance le reste pour te remercier de ton bénévolat et en fin de compte j’ai fait mon chantier jeune, j’ai eu 150 euros, et... j’ai pas osé demander à CAPS pour le stage BAFA, pour moi c’était faire la manche quoi ! C’était à moi de demander et moi, je me suis dit : je vais pas faire la manche ! Du coup l’acompte, il est pour les CEMEA. » (Steeve, 18 ans). L'indépendance financière Travailler dans l’animation, c’est rompre avec l’inactivité et acquérir une très relative indépendance financière. Cela peut passer par des stratégies « atypiques » comme celle d’Ivan, 38 ans qui rapporte : « J’ai fait un faux BAFA et j’ai travaillé 5 ans comme ça clandestinement, je n’avais pas de sous pour la formation, je devais avoir 18 ans. J’étais dans l’obligation de travailler. ». Quant à Mehdi, 23 ans (BEP, Bac PRO, BTS FEE) : « Ça permet de rapporter de l’argent tout en faisant un métier cool, bon c’est clair que parfois c’est un petit peu fatigant, mais être avec des jeunes ça permet de faire passer le temps très vite. ». L' expérience professionnelle Nul doute que les formations dans les métiers de l’animation participent à un épanouissement personnel, à la valorisation de la personne peu habituée à se retrouver dans un milieu stimulant : « La formation BAFA ? Franchement c’était extraordinaire, ça m’a bien appris à me développer plus. C’était dur de parler devant tout le monde sans stresser…mais tout le monde m’a encouragé. » (Kylian, 21 ans). Cela participe aussi à une inscription au départ individuelle dans une corporation, à un groupe de professionnels qui détiendrait les clés de la réussite dans ce corps de métier. Le jeune se forge, à force de relations, un réseau de connaissances qui peuvent l’orienter vers d’autres formations possibles susceptibles de donner de nouvelles orientations à sa carrière. Le jeune découvre aussi au sein des associations des savoir-faire, un langage propre au métier de l’animation, à une culture professionnelle : « Et puis la formation qualifiante, c’est une formation de BPJEPS (20042005) que j’ai passée avec l’UFCV. J’ai été super bien encadré, les gens me connaissaient par d’autres réseaux, je suis arrivé avec plein de trucs, un bagage, et ils ont mis de l’ordre la dedans, ils m’ont aidé à travailler par priorité, ils m’ont apporté toute la structure idéale, adaptée en fonction de mon parcours. » (Isidore). f. Les valeurs et l’engagement L'Éducation Populaire et ses valeurs « Effectivement, j’ai pas envie d’vivre dans un univers où on croit que tout s’achète et que la relation avec l’autre c’est jamais, elle n’est jamais gratuite, elle peut pas être gratuite et c’est inconcevable qu’elle soit 23 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - gratuite ! » (Louis). Cette conviction exprimée lors d’un entretien par un professionnel résume bien sur le fond l’espace repérable des valeurs11 des acteurs de l'Éducation Populaire ; un espace où la pratique à l’origine du bénévolat au travers de l’animation a permis à l’individu d’adopter une posture qui l’invite à exprimer ses croyances en ses valeurs humanistes : « Partage, (…) contribution à des édifices multiculturels, multi sociaux, » « aborder des questions de fond (…) des questions personnelles euh, sur la vie, sur euh la société et sur les engagements, la liberté, sur l’argent, euh, enfin la sexualité… » (Luc, 38 ans et Margaux, 30 ans). Qu’ils soient issus d’un milieu familial où les valeurs humanistes sont clairement établies ou alors complètement évincées dans les mécanismes de rapport à l’autre, tous les enquêtés ont soutenu qu’il y avait concordance entre les valeurs associatives d'Éducation Populaire et les valeurs humanistes qui tiennent compte des droits (à l’éducation, au loisir, etc.) et des possibilités de développement des individus. Néanmoins, des distinctions sont perceptibles concernant les propos tenus par les professionnels et par les usagers. En effet, de leurs côtés, les usagers vont rattacher aux valeurs qu’ils prônent l’attention que pourra porter l’équipe d’encadrement du point de vue de l’accueil, de la convivialité, de l’ambiance qui se dégagent au sein de la structure. Du côté des professionnels, les thématiques qui ressortent concernent le souci de transmission de ces valeurs au travers de l’animation, l’intérêt du développement de la coopération et de l’investissement de soi chez les jeunes. « L’animation, ça me plaisait bien, ça me permettait aussi de transmettre parce que ça c’est une valeur qui ne m’a jamais quitté. » (Cécile, 28 ans). « Qu’est-ce que t’as envie d’apporter à l’autre au sein de la structure ou dans le quartier ? » (Ange, 35 ans). L’engagement, ou l’expression concrète des valeurs par l’action Tous les professionnels s’accordent à soutenir l’idée que si les jeunes finissent par s’engager volontairement dans différents projets et/ou actions, c’est parce qu’il y a eu en amont tout un cheminement qui leur ont permis d’aboutir en règle générale à cette démarche. Ainsi, ils expliquent qu’au travers des premières rencontres, l’important c’est d’aller au-delà de l’offre de loisir proposée aux usagers (assimilable à de la prestation de service). Il faut que les animateurs entretiennent une culture de la relation auprès des jeunes qu’ils côtoient afin de les conduire vers l’engagement qui n’est à leurs yeux que l’aboutissement à une réussite d’éducation citoyenne de ces jeunes. « On avait multiplié un petit peu les, la, la capacité à investir les outils qui permettaient l’engagement des jeunes (…) c’était l’idée d’offrir, euh, au jeune, d’être en capacité de leur proposer quelque chose de transversal, c’est-à-dire de ne pas être seulement dans une offre de loisirs éducatifs, mais d’avoir à côté un certain nombre d’actions pour favoriser une initiative des jeunes, pour être dans une formation jeunesse. » (Luc). 11 « Les valeurs sont l’expression de principes généraux, d’orientations fondamentales et d’abord de préférences et de croyances collectives. Dans toute société, la détermination des objectifs s’effectue à partir d’une représentation du désirable et se manifeste dans des idéaux collectifs. Ces valeurs qui, systématiquement ordonnées, s’organisent en une vision du monde apparaissent très souvent comme un donné irréductible, un noyau stable, un ensemble de variables indépendantes. » [Boudon et al., 2003]. 24 D’ailleurs, les jeunes sont conduits tout au long de leur parcours avec pour la plupart une « nonconscience » du cheminement qui s’opère tout au moins dans les premiers temps. Du bénévolat (considéré comme du « non travail ») à l’engagement véritable (qui conduirait potentiellement à un poste rémunéré dans une association), tel est l’impact qu’ont les associations d'Éducation Populaire sur les jeunes qui choisissent de s’y impliquer. g. Des carrières types La notion de carrière, moins déterministe que celle de trajectoire, ne doit pas conduire à l’idée qu’aucune généralité, qu’aucun niveau de compréhension globale, n’est accessible. Certaines carrières se ressemblent et il est donc possible de parler des «carrières types ». De même des points de passage sont communs à de nombreux individus et on peut repérer des étapes importantes, des moments de basculements et de choix qui semblent revenir dans de nombreuses carrières. La construction d’une typologie Suivant les principes de méthode de la sociologie compréhensive, nous avons construit une typologie des trajectoires, en nous appuyant sur le concept de type-idéal. En un mot, il s’agit d’une présentation épurée et idéalisée du réel et non le réel lui-même. Il a le mérite de classer dans des catégories relativement homogènes ce que nous révèlent les enquêtés de leur parcours au sein des associations. Il n’est qu’un modèle abstrait établi à partir de caractéristiques communes. Il n’est pas une moyenne de la réalité mais il participe à la compréhension d’un phénomène en formant « un tableau de pensée homogène. » [Weber, 1992]. Il n'y a pas de linéarité dans les parcours même si on peut retrouver des similarités. Ces similarités nous ont permis de relater des carrières-types, avec des positions d'entrée et de sortie, mais ne permettent pas de prétendre que deux individus empruntant la même porte d'entrée se retrouveront sur la même position de sortie. Par contre, lors de leurs parcours, ils ouvriront d'autres portes, par choix ou par obligation, par opportunité ou par nécessité, les positionnant momentanément ou définitivement dans une forme d'investissement public ou privé pour des intérêts publics ou privés. 25 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - UN EXEMPLE DE CARRIERE DE L’ENGAGE L’idéal-type de l’engagé est l’individu qui s’investit pour des valeurs et qui va se mettre au service du collectif. Solange a 20 ans et a grandi dans un quartier résidentiel de Château Thierry. Elle est la benjamine d’une famille de quatre enfants. Sa sœur aînée âgée de 26 ans est ingénieure généraliste et travaille dans une ONG en Afrique du Sud. Ses deux frères font leurs études en France : l’un est en licence d’histoire et l’autre en master sciences politiques. Sa mère travaille comme caissière dans une grande surface et son père occupe le poste de chef de propulsion dans la publicité. Un contexte familial qui suscite l’envie d’aller vers les autres. Dès l’âge de 4 ans et jusqu'à ses 12 ans, Solange est partie en colonie de vacances avec beaucoup d’enthousiasme. Le fait de quitter ses parents durant trois semaines ne lui posait aucun problème. Elle explique cela au travers de son éducation, « On est quatre dans la famille (…) nos parents nous ont poussé pour découvrir des choses. » Elle renforce son propos en s’appuyant sur le parcours de sa sœur qui a également fait le choix d’évoluer depuis longtemps dans l’humanitaire (participation à des chantiers au Laos, etc.) et de son frère qui aime également voyager et qui revient d’un chantier « paysagiste » effectué dans un château Italien : « Y’a ça dans la famille ! » Concernant ses parents, elle raconte que c’est surtout sa mère qui a toujours souhaité voyager, visiter d’autres pays, mais qu’elle n’a jamais eu les moyens de concrétiser ses projets lorsqu’elle était jeune. C’est à partir de son expérience qu’elle a donc essayé de transmettre à ses enfants le gout du voyage et du désir d’aller à la rencontre des autres. C’est vraiment elle qui « booste » toute la famille, qui encourage l’esprit d’ouverture vers les autres, qui favorise « la liberté de rencontrer les gens. » S’engager pour être utile A l’âge de 17 ans, Solange n’a pas trouvé d’intérêt à passer son BAFA pour se lancer dans l’animation. Elle a préféré débuter son expérience dans les associations en créant avec un ami (qu’elle a rencontré lors d’un chantier) l'association Etoile. Elle est toujours présidente de cette association dont le but est de promouvoir, par l'intermédiaire des chantiers, le développement d'infrastructures (centre d'apprentissage) en collaboration avec une association africaine & Léo Lagrange. Durant les étés 2007 à 2010, l’association a réalisé quatre chantiers, trois semaines environ. Pour l'été 2011, Solange et ses camarades montent un nouveau projet de chantier au Bélize en partenariat avec deux autres associations belge et du pays concerné. Elle est également présidente pour cette année de l'association des étudiants de son école (organisation des soirées, etc.) Des études qui concordent avec un projet professionnel spécifique à l’humanitaire Après l’obtention du Bac S (qu’elle espèrait avoir sans aller au rattrapage car elle privilégiait à l’époque sa participation au chantier organisé par son association,) Solange rentre en études supérieures pour une année en école d’ingénierie en agriculture. Elle fait ensuite le choix de poursuivre ses études en faisant un DUT génie civil. Elle considère ainsi que cette formation lui permettra d’acquérir des compétences concernant la construction de routes et de bâtiments. Son projet professionnel d’avenir est de pouvoir intégrer une ONG afin de mettre en pratique ses savoirs faire au service des populations qu’elle souhaite aider. 26 UN EXEMPLE DE CARRIERE DU STRATÈGE L’idéal-type du stratège est celui qui va investir les espaces collectifs en vue d’améliorer sa situation actuelle ou à venir. Beverley, 20 ans est née à Amiens et a toujours vécu dans le même quartier situé au Nord. Elle est issue d'une famille dont les parents sont actuellement sans emploi, mais qui ont eu un statut autre à une époque : le père était directeur d'une entreprise et la mère, diplômée d'études supérieures mais a toujours eu des difficultés à trouver un emploi à la hauteur des ses diplômes et donc travaille ponctuellement en contrat à durée déterminée dans la téléphonie. Un souvenir agréable de ses vacances en centre de loisirs Depuis toute petite, elle a fréquenté les centres de loisirs avec plaisir jusqu'à l'âge de 12 ans, et en garde de bons souvenirs, mais n'en parle pas en d'autres termes (pas d'amis rencontrés et conservés par exemple), mis à part un endroit qui « ressemblait à un château » et qui l'« émerveillait » dès qu'elle le voyait. Elle a fréquenté un peu par la suite des ateliers de danse, mais s'est orientée vers la fréquentation des bibliothèques car elle préférait lire et être seule. Un parcours scolaire sans encombre... jusqu'à la confrontation avec l'échec Elle a effectué sa scolarité dans ce même quartier jusqu'à l'entrée au collège, moment où ses parents ont obtenu une dérogation pour qu'elle poursuive sa scolarité dans un collège proche du centre ville, la dérogation ayant été refusée pour ses dernières années de collège, elle a poursuivi sa scolarité dans un établissement privé parce que ses parents ne souhaitaient pas qu'elle aille au collège de rattachement du quartier Nord. A l'issue de son bac littéraire, elle est allée dans une université parisienne étudier le droit. Après avoir échoué 2 ans de suite sa 1ère année de droit, supportant mal « le niveau de compétition », elle a décidé de revenir à Amiens. L'abandon des études de droit est dû aussi à l'abandon d'un rêve, celui de devenir magistrate pour enfant « soit je faisais du droit pour devenir magistrate pour enfant, soit je ne faisais pas de droit du tout. On a toujours des idées préconçues et moi c'est soit j'y arrive soit je n'y arrive pas et si je n'y arrive pas c'est que c'est pas ça! ». Après l'abandon des études universitaires, la rencontre avec une association et l'exercice du bénévolat Souhaitant passer son BAFA afin de travailler pendant les vacances scolaires, « car c'est un bon moyen d'avoir de l'argent et de se faire plaisir » et ayant entendu parler d'un contrat qu'elle nomme « chantier BAFA » lui permettant ainsi de financer son BAFA, elle s'est rapprochée de l'animatrice jeunesse du quartier nord (elle ne savait pas que son quartier se référait à Saint-Maurice) en lui expliquant les professions liées à l'enfance lui plaisait et elle a donc été orientée vers l'association Soleil, dont le personnel est essentiellement des éducateurs. Elle a donc travaillé 50 h pour cette association et y est restée ensuite comme bénévole, trouvant le soutien nécessaire à la préparation du concours d'éducateur spécialisé. « En étant dans l'association, je leur apporte mon aide en étant bénévole et eux m'apportent une aide en m'aiguillant, dans tout ce que j'avais besoin ... je n'ai pas eu d'aide pécuniaire mais j'ai eu beaucoup d'autres aides en fait! ». Le statut de personne-relais Elle prend son rôle de personne-relais très à cœur, « car il y a beaucoup d'échanges constructifs avec les enfants », « ça nous permet d'avoir beaucoup de communication avec eux », « d'échanges d'idées », le fait de « porter un regard sur eux, ils sont plus ouverts ». Elle parle des animateurs comme étant une référence pour beaucoup de jeunes, qui reviennent voir les animateurs pour avoir de l'aide, des conseils, ou tout simplement des encouragements dans ce qu'ils ont entrepris, « ils ont une référence et ils savent qu'il y a quelqu'un qui peut les aider ». Elle même en tant qu'animatrice, elle se réfère à des personnes qui l'aident et l'orientent. Elle reconnaît que plus jeune « il aurait fallu qu'elle aille jusqu'aux informations mais à 12 ans on ne le fait pas... ». Elle se rend compte aussi maintenant en tant qu'animatrice qu'il faut servir de « relais car les enfants ne savent pas » et qu'« il faut un copain pour qu'ils se rendent à une activité ». Au-delà des représentations... l'espoir d'être un modèle En tant qu'animatrice elle espère être un modèle, « c'est ce que j'essaie de leur montrer, je suis du quartier nord, j'ai réussi ... parce que du coup maintenant il me voit à la place d'une adulte, plus en tant qu'une jeune et du coup ils se disent qu'elle a réussi », « je suis pareil qu'eux et c'est de leur montrer », « après c'est une question de volonté, soit on veut, soit on veut pas, mais c'est de leur montrer ». 27 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - UN EXEMPLE DE CARRIERE DU CONSOMMATEUR L’idéal-type du consommateur est l'individu qui ne vient pas dans l’association pour défendre des valeurs et qui y cherche une satisfaction personnelle immédiate. Marion 21 ans, est née à Amiens et a toujours vécu dans le même quartier situé au Sud-est. Ses parents se sont séparés quand elle avait 14 ans et elle vit avec sa mère qui ne travaille plus depuis longtemps (ne se souvient pas depuis quand) suite à des problèmes de santé. Son père « refait des bâtiments ». Une orientation scolaire chaotique... et une satisfaction professionnelle A 15 ans, sortie de 3ème, elle souhaitait être auxiliaire de puériculture et a été orientée sur un CAP d'auxiliaire de vie, dans un lycée situé à 40 km d'Amiens et est donc restée à l'internat du lycée. Elle s'est rendue compte au moment de son inscription qu'elle avait été mal orientée concernant son souhait de devenir auxiliaire de puériculture. Elle évoque cette année comme étant difficile du fait d'une orientation qui ne lui plaisait pas et de la difficulté d'être à l'internat, de la séparation de ses parents et du décès de plusieurs amies... Elle a donc souvent été absente. L'année suivante, elle est revenue à Amiens et a effectué deux années dans un lycée qui proposait la découverte des métiers. Elle s'est orientée sur un BEP « "des métiers d'Hygiène, de propreté et d'environnement », qu'elle n'a pas obtenu. Donc à 19 ans, elle a décidé de rechercher du travail et a envoyé des lettres de motivation « un peu partout ». A partir de 2010, elle a travaillé ponctuellement, en contrat de deux ou trois mois. Depuis janvier 2011, elle travaille pour une société « pour faire du ménage dans les bureaux ou les appartements » situés à proximité de son quartier. Elle nomme son contrat « CDDI », mais ne sait pas bien ce que le « I » veut dire, elle sait que ce sont des contrats de 3 mois qui peuvent être renouvelés pendant 2 ans, « après les deux ans, si j'ai la possibilité de trouver quelque chose dans une autre entreprise, ce serait bien ! ». Elle se dit très contente de sa situation, elle suit en parallèle une formation liée à l'entretien des locaux, dans laquelle elle se sent à l'aise étant donné ses acquis lors de son BEP « M.H.P.E. ». Une histoire familiale liée à l'association et au quartier Elle ne se remémore pas précisément sa rencontre avec l'association située dans le quartier puisqu'elle l'a toujours connue, venant avec sa mère, chercher ses frères qui y allaient. Elle a fréquenté l'association située juste à côté de l'endroit où elle vit, depuis qu'elle est entrée en primaire pour y faire ses devoirs, et elle y est venue jusqu'à l'âge de 15 ans, même si elle n'aimait pas faires ses devoirs car elle « n'aimait pas l'école », mais prenait beaucoup de plaisir à venir. Sa mère fréquentait aussi l'association en venant à « des ateliers » et la famille participait aux voyages organisés. A la question de savoir si elle pratique du bénévolat, elle évoque son père et ses frères qui ont participé en tant que bénévoles lors de la fête annuelle du quartier, mais qu'elle préférait « y aller pour s'amuser avec ses copines ». L'association vue comme la pratique de loisirs... Dès l'âge de 6 ans à 18 ans, elle a fréquenté les mercredis et pendant les vacances scolaires, les centres de loisirs et par la suite le Centre d'accueil Jeunes (CAJ) dans une autre association située à proximité de son quartier de résidence. Elle évoque de très bons souvenirs liées aux activités et aux sorties, mais n'a pas gardé de contacts avec les animateurs. ... et l'association vue comme un lieu de soutien et d'interconnaissances Elle a toujours trouvé de l'aide auprès de l'association implantée dans son quartier, même au moment où elle cherchait du travail, pour rédiger ses lettres de motivation, faire son CV. Elle y a gardé beaucoup de contacts, et elle y passe régulièrement pour les saluer ou quand elle « a besoin de parler », « c'est comme ma famille », elle connaît toutes les personnes qui fréquentent l'association puisque tous sont issus du même quartier et l'explique aussi par le fait qu'elle est quelqu'un d'ouverte, « je parle avec tout le monde et tout le monde me parle ». 28 UN EXEMPLE DE CARRIERE DU PROFESSIONNEL L’idéal-type du professionnel est celui qui va être au service des projets collectifs de l’association parce qu’il a le statut et les compétences du salarié. Luc est âgé de 38 ans. Il est depuis peu directeur d’une Fédération Départementale et a travaillé auparavant 12 années comme responsable du secteur jeunesse dans un centre social. Depuis qu’ils sont à la retraite, ses parents ont réinvesti le bénévolat. Son père est de nouveau président d’une association amiénoise et sa mère est visiteuse dans le cadre d’un accompagnement par le suivi de patients hospitalisés. Son frère benjamin travaille depuis une quinzaine d’années dans une federation d’Éducation Populaire et sa sœur aînée est assistante maternelle. Une dynamique familiale qui forge les valeurs de l’Education Populaire Durant son enfance, Luc explique que ses parents qui « n’avaient pas le BAFA (…) pas de diplômes », animaient bénévolement un club Léo Lagrange. Ils assuraient la gestion de la salle, du matériel mis à disposition, mettaient en place des activités et lui-même y participait. Sa mère couturière à domicile, avait « cette liberté d’animer le club durant ses temps libres. ». D’un point de vue général, le contexte familial dans lequel il grandit favorise « la culture » des valeurs de l’Education Populaire. « Les repas de famille le dimanche (…) on parle éduc. pop ! ». Le déclic qui le conduit au statut de professionnel Même si Luc a passé son BAFA pour assurer un travail saisonnier, même s’il est allé à l’université au sortir du Bac, il explique avoir le « vrai déclic éducatif » lorsqu’il est objecteur de conscience dans une association. A partir de ce moment, il choisi de s’orienter dans un cursus de formation professionnelle liée aux métiers de l’animation. Il obtient son BETEP à l’âge de 25 ans et son DEJEPS à l’âge de 28 ans. L’expression des valeurs de l’Education Populaire au travers de ses pratiques professionnelles Durant l’entretien, Luc décrit des pratiques professionnelles fondées sur les valeurs de l’Education Populaire. Il considère avant tout qu’il faut « offrir, …, au jeune (…) quelque chose de transversal, c'est-àdire de ne pas être seulement dans une offre de loisir éducatif, mais d’avoir à côté un certain nombre d’actions pour favoriser une initiative des jeunes. ». Il affirme avec conviction que les multiples activités proposées dans une structure associative doivent être pensées dans une « philosophie d’éducation populaire » et non dans une offre de « prestation de service envers la population. ». Accompagner les jeunes vers l’engagement Luc constate qu’au sein des associations il y a « toujours eu un noyau dur de jeunes qui montait un peu crescendo dans l’engagement... » et que les individus qui sont aujourd’hui engagés dans divers associations (création, etc.) sont passés par des activités éducatives classiques, occasionnelles où s’est d’abord créée la proximité avec l’animateur. Concrètement, il reste attentif au fait que le secteur jeunesse doit proposer des activités aux jeunes afin que certains y trouvent une opportunité d’engagement. 29 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - CONCLUSION Cette recherche qui avait pour objet de comprendre comment s'opère le croisement entre les individus et l'univers associatif nous a permis de repérer des idéaux-types de carrières et de comprendre que les bénéfices de l'expérience constituée par le passage dans les associations d'Éducation Populaire sont extrêmement divers. Les limites de l’enquête sont principalement constituées pas le fait qu’elle est une photographie d’un moment et que les trente-deux témoins ont rapporté des récits qui auraient pu être différents à d’autres moment de leur carrière. Pour aller plus loin dans cette visée compréhensive, il serait sans doute bienvenu d’inscrire une enquête dans la longue durée pour suivre des cohortes. La distinction entre personnel permanent et non permanent nous a permis de constater que les carrières professionnelles au sein des associations d'Éducation Populaire se dessinent après avoir ouvert plusieurs portes, se déterminent par des rencontres et se finalisent par l'obtention d'une qualification professionnelle. Cela soulève aussi la question du choix : choisit-on de devenir professionnel, avec des bénéfices privés sous forme de carrière et de rétribution, sans avoir au préalable eu l'expérience de l'investissement public ? La longue socialisation dans les associations préalable à l’embauche n'estelle pas une forme de sélection par l’engagement? Ces parcours sont donc la garantie que les professionnels dépasseront en investissement ce qui est prévu formellement dans le contrat du salarié. La création de voies de professionnalisation plus formalisées qui ne passeraient plus par ce long stage de formation par compagnonnage pourraient déstabiliser cette figure du professionnel engagé au profit d’un rapprochement de l’idéal-type du professionnel : celui qui échange ses compétences contre un salaire. On comprend mieux aussi pourquoi les professionnels d’aujourd’hui, ayant été longuement socialisés par l’engagement dans les associations d'Éducation Populaire sont sensibles aux mutations des métiers. Le sens même de leur travail peut leur sembler remis en cause. L'enquête nous a également permis de rencontrer des individus d'origine socio-économique et de niveaux scolaires variés, et cette grande diversité, même si cela a rendu plus complexe l'analyse des parcours, conforte l'idée d'une grande richesse au sein des associations d'Éducation Populaire. Là encore, on peut se demander si cette richesse, due au brassage des expériences, des investissements et des intérêts, ne risque pas d'être mise en danger par une détermination trop précoce du devenir professionnel de l'Éducation Populaire et ainsi d'intégrer des filières spécifiques enfermant ainsi l'individu non plus dans un "savoir-faire" mais dans un "devoir-faire", les contraignant à des pratiques uniformes. Notre recherche n’avait pas pour objectif de juger la réussite d’un parcours d’un ou des jeunes. De plus nous avons peu de paroles précises d’interviewés illustrant le sentiment d’avoir ou non réussi professionnellement et socialement. Mais, s’il fallait se positionner sur ce terme de réussite, peut-être devrions-nous l’entendre comme l’acquisition par le passage et l’installation dans une association, d’un nouveau statut social qui valorise l’individu. Comme nous le disions : «Le jeune X est devenu l’animateur X, reconnu par ses pairs, par les parents, par les habitants du quartier». Si à la fois, le professionnel exprime le souhait d'être un référent, et ainsi un nouveau vecteur des valeurs de l’association, les discours des jeunes sur les salariés montrent bien qu’ils les voient comme des modèles d’ascension sociale. L’univers associatif propose finalement toute sorte de voie de cheminement et c’est sa richesse. L’individu pourra autant y conforter des capitaux familiaux que venir y trouver ce que sa famille lui refuse ou plus simplement ne lui offre pas. Le travail associatif n’est pas organisé en terme de trajectoires. Si tel était le cas tous les jeunes entrant dans les associations seraient potentiellement déterminés à devenir salariés de l’association. 30 Si uniquement certains jeunes sont repérés comme de futurs professionnels, c’est qu’ils correspondent aux yeux des associations à des critères proches de leurs attentes en termes d’investissement et d’engagement. Or, cet investissement de l’individu, c’est bien lui qui le produit. C’est lui qui, accompagné par l’association et enrichi de nouveaux savoir-faire, produit sa propre action sociale. En cela, l’univers association d'Éducation Populaire est un espace alternatif de réussite sociale La recherche initiée a permis d’élaborer un travail d’expertise en ingénierie sociale. En abordant l’objet de notre étude par une approche « qualitative » plutôt que « quantitative », des méthodes d’expérimentations se sont concrétisées au fil de la recherche. • Élaboration d’outils de recueil et d’analyse des données (guide d’entretien, grilles d’analyse thématiques, schéma des idéaux-types de position), • Conduite d’entretiens (exploratoires dans un premier temps) qui devaient permettre aux interviewés de nous raconter leur parcours, • Exploitation des données, par une répartition individuelle du travail d’analyse des entretiens et d’exploitation des données statistiques. L’une des difficultés liée à la réalisation de l’étude fut de compiler en un rapport final tous les écrits réalisés et qui tenaient compte des styles rédactionnels de chacun (ce qui pourrait expliquer le manque d’homogénéité à la lecture du document de l’étude.) La méthode qualitative est moins souvent mobilisée par les milieux professionnels que la méthode quantitative ou que la «recherche-action» parce que sa mise en œuvre et surtout l’interprétation des matériaux sont assez délicates. Le cadre du travail collectif nous a permis de multiplier les entretiens laissant les interviewés se raconter en fonction de leur point de vue sur l'Éducation Populaire. Il a aussi constitué un cadre propice à l’élaboration des conclusions présentées sous la forme des idéaux-types de parcours par la confrontation des interprétations et des expériences d’entretiens. Ceux-ci ont été affinés et mieux orientés à mesure que les analyses progressaient et laissaient entrevoir quels étaient les jalons de l’Univers associatif. Les échanges lors des comités de pilotage eurent aussi une fonction importante dans le déroulement de l’enquête. Ils permirent - au moment où les premières analyses commençaient à être élaborées - de mieux saisir les attentes et les points sensibles de ceux qui nous ont permis de mener cette recherche. Elle se conclut de manière un peu étrange peut-être puisque d’aucune manière il n’est possible de dire que les associations d'Éducation Populaire organisent des parcours rectilignes et balisés pour les jeunes. Mais c’est justement de cette capacité à laisser les jeunes inventer leurs chemins qu’elles tirent leur principale richesse. 31 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - BIBLIOGRAPHIE AGRIKOLIANSKY Éric, Carrières militantes et vocation à la morale : les militants de la LDH dans les années 1980, Revue française de science politique, 2001/1 Vol. 51, p. 27-46. DOI : 10.3406/rfsp.2001.403606. BANTIGNY Ludivine, Le plus bel âge ? Jeune et jeunesse en France de l’aube des Trente Glorieuses à la guerre d’Algérie, Paris, Fayard, 2007. BECKER Howard, Outsiders, Paris, édition A. M Metailé, 1985 (Première édition: 1963). BOUDON Raymond, BESNARD Philippe, CHERKAOUI Mohamed et LECUYER BernardPierre, « Dictionnaire de Sociologie », Edition Larousse, 2003. CACERES Benigno, Histoire de l'Éducation Populaire, Collection du Seuil, Paris, 1964. LONCLE Patricia, Les politiques de jeunesse. Les défis majeurs de l'intégration, Presses Universitaires de Rennes, 2010 MIGNON Jean-Marie, Une histoire de l'Éducation Populaire, La Découverte, Paris, 2007. NICOLE-DRANCOURT Chantal et ROULLEAU-BERGER Laurence, L'insertion des jeunes en France, Presses Universitaires de France (Que sais-je ? 2977), 1995. POUJOL Geneviève, Education populaire : histoire et pouvoirs, les Éditions Ouvrières, Paris, 1980. WEBER Max, Économie et société. Tome 1 : Les catégories de la sociologie. Paris, Librairie Plon, 1971. WEBER Max, Essais sur la théorie de la science (1918), Paris, Plon, 1965, p. 179-181. 32 LISTE DES SIGLES ARDEVA : Association Régionale pour le Développement de la Vie Associative BAFA : Brevet d’Aptitude aux Fonctions d’Animateur BEP : Brevet d’Études Professionnelles BPJEPS : Brevet Professionnel de la Jeunesse, de l'Éducation Populaire et du Sport BTS FEE : Brevet de Technicien Supérieur Fluides, Énergies, Environnement CAP : Certificat d’Aptitude Professionnelle CAPS : Culture, Animation, Prévention, Sport CCLL : Centre Culturel Léo Lagrange CDDI : Contrat à Durée Déterminée d’Insertion CEMEA : Centres d'Entraînement aux Méthodes d'Éducation Active CD : Compact Disc CSCE : CVDA : Centre Social et Culturel d’Étouvie Conseil de Développement de la Vie Associative CNAJEP : Comité pour les relations Nationales et internationales des Associations de Jeunesse et d'Éducation Populaire CRAJEP : Comité Régional des Associations de Jeunesse et d'Éducation Populaire CSC : Centre Social et Culturel DREES : Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques DRJSCS : Direction Régionale de la Jeunesse et des Sports et de le Cohésion Sociale DUT : Diplôme Universitaire de Technologie EEF : Éclaireurs Évangéliques de France FAJ : Fond d’Aide aux Jeunes FFMJC : Fédération Française des Maisons des Jeunes et de la Culture FRCPE : Fédération Régionale des Conseils de Parents d'Élèves FRFR : Fédération Régionale des Foyer Ruraux FRMJC : Fédération Régionale des Maisons des Jeunes et de la Culture FSPVA : Fond de Solidarité et de Promotion de la Vie Associative IFEP: Institut de Formation Eclairage Professionnel - Léo Lagrange JOC : Jeunesse Ouvrière Chrétienne JPAP : Jordan Poverty Alleviation Program MRJC : Mouvement Rural de Jeunesse Chrétienne ONG : Organisation Non Gouvernementale UFCV : Union Française des Centres de Vacances URFR : Union Régionale des Foyer Ruraux URPEP : Union Régionale des Pupilles de l’Enseignement Public 33 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - ANNEXES 34 DONNÉES STATISTIQUES CSCE 2009-2010 Durant l'année 2009-2010, 371 adhérents et 2 associations se sont inscrits au CSCE. Répartition géographique des adhérents Par individu Par famille % d'individus % de familles Amiens - Etouvie Amiens - hors Etouvie Autres villes et villages Non renseigné Total 251 80 35 5 371 141 48 21 5 215 67,65% 21,56% 9,43% 1,35% 100,00% 65,58% 22,33% 9,77% 2,33% 100,00% 80,00% 70,00% 60,00% Amiens - Etouvie 50,00% Amiens - hors Etouvie 40,00% 30,00% Autres villes et villages 20,00% Non renseigné 10,00% 0,00% % d'individus %de familles Provenance des adhérents en dehors d'Amiens Par individu Par famille Ailly sur Somme Argoeuves Beauval Bernaville Dreuil les Amiens Flesselle Guignemicourt Le Mesge Longueau Marcelcave Petit Camoon Poulainville Picquigny Pont de Metz Rivery Soues Vignacourt Total 2 1 1 1 5 1 3 1 6 1 1 1 2 1 1 2 5 35 1 1 1 1 4 1 1 1 2 1 1 1 1 1 1 1 1 21 Répartition du nombre d'adhérents par famille 1 2 3 4 5 6 7 8 9 Amiens - Etouvie Amiens - hors Etouvie Autres villes et villages Non renseigné 99 16 8 5 8 2 1 1 1 141 29 11 4 3 1 14 4 1 5 48 21 5 Non renseigné Total 2 Total 147 31 13 8 11 2 1 1 1 215 Répartition des adhérents par tranche d'âge De 4 à 6 ans De 7 à 12 ans De 13 à 18 ans Plus de 18 ans Non renseigné Total 18 82 101 165 5 371 De 4 à 6 ans De 7 à 12 ans De 13 à 18 ans Plus de 18 ans Non renseigné Répartition des familles selon le quotient familiale De 0€ à 525€ De 526€ à 630€ De 631€ à 800€ Plus de 800€ Non renseigné Amiens - Etouvie Amiens - hors Etouvie Autres villes et villages 152 17 12 14 7 3 48 8 7 5 70 Non renseigné Plus de 800€ Non renseigné Autres villes et villages De 631€ à 800€ Amiens - hors Etouvie De 526€ à 630€ Amiens - Etouvie De 0€ à 525€ 0 50 100 150 200 35 17 6 5 Total 173 29 15 65 89 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire DONNÉES STATISTIQUES CCLL 2009-2010 Total 381 127 508 Répartition adhérents par tranches d'âge 10-15 ans 16-20 ans 21-25 ans 26-30 ans 31-35 ans 36-40 ans 41-45 ans 46-50 ans 51-55 ans 56-60 ans 61-65 ans 66-70 ans 71-75 ans 76-80 ans 81-85 ans 86 ans et plus Total général Féminin 119 31 28 42 27 34 17 17 13 12 15 11 4 4 4 3 381 Masculin 56 17 7 4 8 4 7 7 7 4 4 Répartition CSP parents adhérents mineurs Non renseigné Agriculteur, exploitant En arrêt de travail Artisan, commerçant, chef d'entreprise Autre Cadre En congés Demandeur d'emploi Employé Enseignant Etudiant Intermittence Ouvrier Profession libérale Total général Féminin 1 2 1 6 10 25 1 8 46 28 2 1 3 Macsulin 134 Total intermédiaire 175 48 35 46 35 38 24 24 20 16 19 11 4 6 4 3 508 2 127 150 100 50 Féminin 0 Masculin 1-1 0 5… 6-3 2 0… 1-4 4 5… 6-6 5 0… 1-7 7 5… s … n a 6 8 Répartition adhérents par sexe Féminin Masculin Total général Total intermédiaire 1 2 1 10 15 43 1 10 66 42 2 1 5 2 201 4 5 18 2 20 14 2 2 67 Non renseigné Agriculteur, exploitant En arrêt de travail Artisan, commerçant, chef d'entreprise Autre Cadre En congés Demandeur d'emploi Employé Enseignant Etudiant Intermittence Ouvrier Répartition CSP adhérents majeures Non renseigné Artisan, commerçant, chef d'entreprise Autre Cadre Demandeur d'emploi Employé Enseignant Etudiant Ouvrier Profession libérale Retraité Total général Féminin 1 5 18 32 21 51 39 37 1 2 40 247 Macsulin Total intermédiaire 1 6 20 42 30 62 49 47 2 3 45 307 1 2 10 9 11 10 10 1 1 5 60 Non renseigné Artisan, commerçant, chef d'entreprise Autre Cadre Demandeur d'emploi Employé Enseignant Etudiant Répartition adhérents par type d'activité Non renseigné Les corporelles Les graphiques Les musicales Les théâtrales Total général Féminin 47 90 74 78 92 381 Masculin 11 4 37 53 22 127 Total intermédiaire 58 94 111 131 114 508 Ancienneté adhérents dans la structure Depuis Septembre 2006 Depuis Septembre 2007 Depuis Septembre 2008 Depuis Septembre 2009 Féminin 19 87 135 291 Masculin 9 31 50 100 Total 28 118 185 391 36 100 50 0 Féminin Masculin GUIDE D’ENTRETIEN JEUNE ADHÉRENT Thèmes Famille (à voir dans la chronologie) Sous-thèmes Composition Questions Avec qui tu vis ? Tu as des frères et sœurs ? Ils ont quel âge? Et toi ? Tout le monde vit à la maison ? Profession des parents Tes parents travaillent où ? Si non : c’est quoi son dernier métier ? Si oui : Il fait quoi ? Que font tes frères et sœurs ? Et toi tu fais quoi ? Ça se passe bien ? Tu sais déjà ce que tu aimerais faire plus tard ? Tu habites où ? C’est loin de l’association ? Tu viens comment ? Qui te dépose ? Qui t’accompagne ? Comment tu as connu l’association ? Depuis quand ? Tu connaissais du monde ? (copains, animateurs, fratrie) Qu’est ce qu’on y fait ? Tu sais comment ça fonctionne une association ? T’en penses quoi ?(question des statuts) C’est pour ça que tu es venu ? Avec des copains ? Tu aimes faire quoi ? Tu viens quand ? Tu viens souvent ? Qu’est-ce que tu y fais ? Avec qui, copains, animateurs ? Tu te sens bien ici ? Tu t’y es fait de nouveaux copains (ines) ? Il y a autant de filles que de garçons ? Et ça se passe bien avec les filles ? les garçons ? Profession, parcours scolaire de la fratrie. Proximité et lien avec l’association Zone géographique Connaissance de l’association L’entrée dans l’association Être dans l’association. Présence (ponctuelle ou régulière) Rapport jeune adhérent/jeune adhérent Rapport jeune adhérent/personnel de l’association. Inscription dans un projet Environnement Sortie de l’association T’es resté combien de temps ? De quel âge à quel âge ? Pourquoi tu ne viens plus ? Mais t’y reviens de temps en temps quand même ? Tu participes à la fête de quartier ? Tu fais d’autres choses ? Tu as toujours des contacts avec l’équipe ? Rapport jeune adhérent/non-adhérent Tu as des copains qui ne viennent pas ? Tu sais pourquoi ils ne viennent pas ? Qu’est-ce qu’ils font ? Tu en penses quoi ? Et eux ils en disent quoi du fait que tu viennes ici? Tu les vois quand ? Et il y en a d’autres que tu ne vois plus ? Pourquoi ? C’est parce que tu passes du temps ici que tu ne les vois plus ? Tu fais d’autres activités (sport, danse…)? Dans un club ? Il y a une activité que tu aimerais faire et que tu ne fais pas ? Pourquoi ? En dehors de tout ça, tu fais quoi ? Tu as l’impression de t’ennuyer parfois ? Nouveaux copains, apprentissages de nouvelles techniques? Tu as l’impression d’avoir changé depuis que tu viens ici ? Tu as d’autres projets maintenant ? Rapport jeune adhérent/ autres associations, activités. Rapport jeune/temps libre Bénéfices Tu connais tout le monde ? Tu sais qui fait quoi ? Tu t’entends mieux avec qui ? Pourquoi ? Tu le connais depuis longtemps ? Il y a des personnes ici à qui tu peux parler de tes problèmes ? Ce que tu fais c’est dans le cadre d’un projet ? C’était ton idée ? Tu peux m’en parler ? Comment ça s’est construit ? T’es obligé de venir à chaque fois ? Ça te plairait de travailler ici ? Bénéfices immédiats Bénéfices sur le long terme 37 EDT - Le parcours des jeunes dans les associations d’Éducation Populaire - GRILLE D’ANALYSE THÉMATIQUE D’ENTRETIEN Identité et situation générale Rupture Association portail Modalité de rencontre Rôle de la famille Espace de socialisation Formation et professionnalisation Valeurs et engagement (…) (…) (…) (…) (…) (…) (…) (…) 38