Schéma National d`Aménagement du Territoire et changements

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Schéma National d`Aménagement du Territoire et changements
Dialogue Euro Méditerranéen de Management Public Management, MED 6
« Cultures pour le changement, changements par la Culture»
7, 8 & 9 Octobre, 2013 @ Marseille
Axe 2 – Cultures, territoire et changements économiques et sociétaux
Schéma National d’Aménagement du Territoire et changements culturels
en Algérie
Ouari MERADI*, Matouk BELATTAF** & Claude ALBAGLI***
*
Maître assistant et Doctorant en Sciences Economiques
Laboratoire d’Economie et Développement (LED)
Faculté des SECSG
Université Abderrahmane MIRA - Béjaïa, Algérie
Tél. +213 (0) 661 14 18 78
Fax : +213 (0) 34 22 16 22
Courriel : [email protected]
**
Professeur en Sciences Economiques
Laboratoire d’Economie et Développement (LED)
Faculté des SECSG
Université Abderrahmane MIRA - Béjaïa, Algérie
Tél. +213 (0) 773 83 07 89
Fax : +213 (0) 34 22 16 22
Courriel : [email protected]
***
Président de l’Institut CEDIMES
Faculté d’Administration et d’Echanges Internationaux
Université Paris XII Val de Marne
Tél. +33 (0) 6 26 27 05 67
Courriel : [email protected]
1
Résumé
Ce papier est une étude du cas algérien. De ce fait et à travers une approche analytique et une
pensée purement positive, on essayera de répondre aux questions suivantes :
-
Quels sont les fondements, les outils et les finalités de la nouvelle politique algérienne
d’aménagement et de reconquête du territoire ? En outre, quels sont les finalités
socioéconomiques (valorisation du territoire, création de richesse et d’emplois et bienêtre des populations) qui peuvent en découler d’une politique d’aménagement du
territoire ayant une forte empreinte culturelle ?
-
Quel est l’effet de cette politique sur le patrimoine culturel ? En outre, quelle est la
place accordée à la culture dans toutes ses nuances ?
Par cette contribution étudiant le cas algérien et à travers les idées exprimés ci-dessus, on
cherche à identifier et à analyse les externalités territoriales positives engendrées par le
rapport d’influence qui existe entre la politique d’aménagement du territoire -visant à
valoriser durablement le territoire dans toutes ses composantes- et la politique de préservation
et de valorisation du patrimoine culturel -visant à préserver et à promouvoir l’identité
culturelle collective et celle propre à chaque espace local.
Mots clés : Aménagement du territoire, Capital culturel, Algérie.
Abstract
This paper is a study of the Algerian case. This fact and through an analytical approach and a
purely positive thinking, we try to answer the following questions:
-
What are the fundamentals, tools and goals of the new Algerian planning policy and
reconquest of the territory? In addition, what are the socio-economic objectives
(development planning, wealth creation and employment and well-being) that can
result from a planning policy with a strong cultural imprint?
-
What is the effect of this policy on cultural heritage? Also, what is the importance
given to culture in all its nuances?
In this contribution the student Algerian case and through the ideas expressed above, we seek
to identify and analyze the positive externalities generated by the territorial influence
relationship between policy-planning to promote sustainable the territory in all its
components, and the policy of preservation and enhancement of cultural heritage, to preserve
and promote the collective cultural identity and that for each local space.
Keywords: Land settlement, Cultural Capital, Algeria.
2
Introduction
La compétitivité territoriale se manifester sous diverses formes, elle peut être économique,
culturelle et/ou technologique. La valeur multidimensionnelle d’un territoire reste relative et
conditionnelle, elle se mesure par rapport à son pouvoir d’attractivité des capitaux, des
compétences et des populations.
L’Algérie s’est engagée dans une nouvelle politique d’aménagement et de reconfiguration
de son territoire (perspectives 2030). Cette démarche volontariste est focalisée autour du
renforcement efficient du rôle de l’Etat en tant que garant d’un développement équilibré et
durable du territoire et de ses composantes, cela va permettre d’éviter le gaspillage des
ressources, de combattre la ségrégation territoriale, d’assurer la cohésion sociale et spatiale
de l’ensemble du territoire algérien, mais surtout de préserver et de valoriser l’héritage
historique et culturel. Car le territoire n’est plus considéré comme un support physique des
activités anthropiques, c’est aussi un lieu de rencontres et d’échanges de toute nature, le
sentiment d’appartenance à un territoire donné se forge à travers les âges, il se consolide par
les traditions, l’éthique, les normes, les pratiques et l’héritage culturel collectif (CLAVAL
P., 1995). Donc, un fort ancrage caractérise la relation entre territoire te culture et les limites
qui les séparent restent toujours floues (BONNEMAISON J., CAMBREZY L. & QUINTYBOURGEOIS L., 1999 et BERQUE A., 1996).
En restant dans cette logique de compétitivité et de valorisation territoriale, l’Algérie doit
maîtriser et cerner au mieux son territoire. Cet objectif ultime permettra d’atténuer
davantage les contraintes et les atouts d’un territoire connu pour sa diversité et sa
complexité.
Le territoire algérien est déséquilibré et cela se manifeste par la répartition du
développement et du peuplement. Afin de redistribuer d’une façon équilibrée les surcharges
sur un territoire vaste, une approche prospective et centrée sur la rationalité s’impose. Cet
angle de vision a pour objectif d’instaurer un travail fondé sur la concertation et
l’intégration, dans une ultime finalité qui est l’adoption d’une politique d’aménagement du
territoire globale ayant à la fois une forte dimension économique, sociale, environnementale
et culturelle.
Ces principes sont fortement imbriqués dans la nouvelle politique algérienne de reconquête
du territoire (SNAT, 2013, p. 4).
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1. Le territoire algérien : un territoire riche et diversifié mais plein de
contrastes
L’Algérie est un vaste pays, sa superficie est de 2 381 741 Km2 et son territoire recèle des
ressources naturelles et des richesses minières très importantes. L’Algérie occupe une place
stratégique, son territoire est à la fois imbriqué dans le Maghreb, le Monde Arabe, l’Espace
Euro-méditerranéen et l’Afrique. L’autre facette du territoire algérien est moins attrayante,
les grands ensembles naturels qui le composent sont au nombre de trois :
-
La zone tellienne : est un ensemble septentrional composé en grande partie de
montagnes qui se séparent de la mer par des plaines littorales très étroites (M’leta,
Habra, Mitidja, Annaba). Pour ce qui est des plaines du bassin intérieur, celles-ci
s’interposent entre le littoral et les montagnes à l’ouest du pays (Tlemcen, Sidi Bel
Abbès, Mascara, Cheliff, Guelma). Dans son ensemble, la zone tellienne ne
représente que 4% de la totalité du territoire algérien.
Carte n° 01 : Représentation des grands ensembles géographiques du territoire algérien
Source : SNAT, 2008, p. 15.
-
Occupant 9% du territoire algérien, les Hauts-Plateaux représentent le deuxième
ensemble géographique après celui des plaines telliennes, il est limité au Sud par
l’Atlas Saharien. En dépit d’une variation de leur altitude en passant d’une région à
une autre (en moyenne 800 m à l’Est, 400 m dans le Hodna et 1 100 m à la frontière
4
marocaine), les Hautes Plaines forment un large plateau qui s’étend de l’Est à
l’Ouest du pays. Quant à l’Atlas Saharien, il forme un ensemble géographique
homogène, il est la frontière séparant les Hautes Plaines et le Grand Sud, son climat
reste aride. L’Atlas Saharien est plus large à l’Est qu’à l’Ouest.
-
Le dernier ensemble géographique s’étend de l’Atlas Saharien au Nord jusqu’à
l’extrême Sud du pays. Le Grand Sud occupe 87% du territoire algérien et son
climat très aride le rend répulsif et il reste plus au moins mélancolique.
Pour ce qui est du climat, il est l’image même du découpage géographique. Le climat en
Algérie est à dominance aride, il perd sa douceur et devient de plus en plus aride au fur et à
mesure qu’on se déplace vers le Sud. En plus, la morphologie des reliefs telliens et
atlasiques et la position en latitude rend les niveaux de pluviométrie moins denses à l’Ouest
(Oranie) qu’au Centre et à l’Est. En dépit de son immensité (8% du territoire africain), la
partie écrasante du territoire algérien est une zone aride où les précipitations restent très
faibles. Les eaux souterraines au Sud sont une ressource non renouvelable, c’est dire que
leur exploitation et leur rendement sont limités dans le temps. Ce constat démontre que seul
le Nord, qui est doté d’un climat doux (climat méditerranéen), est considéré comme une
zone disposant de ressources en eaux renouvelables.
L’Algérie, dans son ensemble, ne recèle pas un grand potentiel agricole. En effet, la totalité
des terres en mesure de supporter des cultures sont de l’ordre de 40 millions d’hectares.
Dans cet ensemble, la SAU n’est que de 7,5 millions d’hectares, soit 3,14% de l’ensemble
du territoire et une moyenne de 0,25 hectares/habitant (SNAT, 2008, pp. 18-23). En plus de
la rareté des ressources en terres et plus précisément en SAU, les terres cultivables se
concentrent majoritairement dans les Hauts-Plateaux ou l’Atlas Saharien, là où les
ressources hydriques sont très limitées. Ce potentiel limité et fragile est sans cesse agressé
par la nature (érosion hydrique, érosion éolienne, désertification, salinisation, etc.) et
l’homme (consommation des terres les plus fertiles par l’industrie et l’urbanisme.
La zone tellienne, et plus précisément la frange littorale, est très exposée au risque sismique.
Les séismes les plus dévastateurs se sont manifestés dans les plus grandes villes du pays, à
savoir Alger et Oran. Cette vulnérabilité de la zone littorale est due à la rencontre (à une
profondeur ne dépassant pas les 20 Km) des deux plaques tectoniques africaine et
eurasienne. Toutes ces données soulignent le caractère dévastateur des séismes dans les
zones épicentrales. Les dommages causés par un séisme sont amplifiés par la forte
concentration des populations dans les régions à risques et également, par la qualité des
constructions qui restent loin de respecter toute norme antisismique.
5
2. Les lignes directrices de la nouvelle politique d’aménagement du
territoire
Le passage de l’Algérie d’une économie auto-centrique où l’Etat est le seul créateur de
richesses et d’emploi, à une économie de marché où l’importance du rôle de l’Etat dans la
sphère socioéconomique perd de son ampleur au profit de l’acteur privé, ne signifie en
aucun cas une marginalisation totale de l’Etat. En principe, aucun acteur ne peut remplacer
avec efficience l’Etat dans sa fonction de régulateur de l’économie et en tant que garant
d’une solidarité sociale et territoriale. Il s’engage dans une politique de redistribution de la
richesse nationale basée sur la mutualisation et le partage.
2.1. Un aménagement du territoire créateur d’emploi
Il est évident que l’Etat algérien, en optant pour une politique globale d’aménagement du
territoire et de rééquilibrage territorial du développement ayant comme essence
l’amplification des infrastructures publiques et des équipements de base afin d’optimiser la
création d’un grand nombre de postes d’emploi réparti spatialement de sorte à refléter
l’image même de la reconquête des espaces intérieurs marginalisés et délaissés (territoires
de marge). L’intensification des grands travaux d’aménagement du territoire est un
mécanisme dynamique en faveur d’une équité interzonale en termes de politique nationale
de l’emploi. Il est fortement admis que la reconquête des territoires de marge fixe comme
ultime objectif le rééquilibrage du peuplement et du développement. Afin d’inciter les
populations à se concentrer dans les ZAP, il est indispensable d’assurer l’émergence d’un
environnement attractif aux entreprises et d’un cadre de vie favorable à l’épanouissement
des populations. La focalisation de l’O.HP-Sud sur l’intensification des grands travaux
d’aménagement du territoire n’est pas un choix hasardeux et dénué de toute logique ou
d’objectivité. L’Etat vise à éponger une éminente portion du chômage qui touche une
grande partie de la population active des Hauts-Plateaux du Sud. La mise en service des
équipements de base, en plus de leur grand apport en termes de développement pour les
régions intérieures, va mettre un terme aux obstacles qui freinent le développement de ces
régions longtemps délaissées et marginalisées. Une fois équipée, la région des HautsPlateaux et du Sud sera valorisée et mieux préparée pour attirer les populations et les
investisseurs.
6
2.2. Le développement durable : un principe indissociable de la nouvelle politique
d’aménagement du territoire
Le maillage entre le souci d’aménager harmonieusement le territoire et celui de la protection
de l’écosystème est l’une des caractéristiques majeure de la nouvelle politique
d’aménagement du territoire. La prise en charge de l’aspect environnemental par les
nouveaux instruments d’aménagement du territoire est clairement reflétée dans la création,
en août 2000, du Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement. En plus
de la valorisation des différentes zones constituant le territoire algérien, la nouvelle
démarche volontariste de l’Etat visant la reconquête des territoires de marge est largement
soucieuse d’imprimer ce développement de durabilité. Cela se manifestera notamment à
travers (SNAT, 2008) :
-
La protection de l’environnement, des écosystèmes et des espaces naturels,
-
La préservation de la biodiversité naturelle,
-
L’exploitation objective et rationnelle des ressources naturelles et en particulier
celles qui sont non-renouvelables,
-
Le développement durable des villes (Villes Ecologiques).
Les différentes démarches engagées dans ce cadre sont les suivantes :
-
La création de Zones de Développement Durable (ZDD),
-
La promotion des aires protégées et des réserves naturelles,
-
L’adoption pour chaque zone urbaine d’une politique environnementale urbaine,
-
La gestion intégrée des déchets municipaux par la mise en application du
Programme national de gestion intégrée des déchets municipaux (PROGDEM),
-
L’aménagement et l’équipement des Centres d’Enfouissement Technique (CET),
-
L’élaboration d’un Plan national de gestion des déchets spéciaux (PNAGDS),
-
L’institution d’un Fonds national pour l’environnement et la dépollution (FEDEP),
-
La délocalisation des activités industrielles à risques des zones côtières vers les
Hauts-Plateaux et le Sud,
-
La mise en œuvre de la Stratégie nationale de l’environnement et du développement
durable (SNE-DD) à travers l’élaboration d’un Plan national d’actions pour
l’environnement et le développement durable (PNAE-DD),
-
L’utilisation intensive des énergies renouvelables comme l’énergie solaire et
éolienne.
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3. L’Aménagement du territoire au service de la sauvegarde du patrimoine
culturel
La place accordée par l’Etat à la culture reste floue et difficile à cerner dans toute politique
d’aménagement et de développement du territoire. Par conséquent, il est judicieux de
s’interroger sur la nature et l’intensité du lien qui subsiste entre l’action volontariste de l’Etat
et la valorisation culturelle du territoire. Il est crucial de faire ressortir les liens culturels entre
acteurs et composantes territoriales afin d’atténuer les inégalités spatiales et de renforcer
l’osmose territoriale et la cohésion sociale, d’où l’intérêt d’imprimer fortement l’action
publique et privée d’une forte empreinte culturelle (LATARJET B., 1992, p. 84). Dans le cas
de l’Algérie cet objectif est décréter par le schéma directeur des biens, des services et des
grands équipements culturels (SNAT, 2010, p. 1).
Figure n° 01 : Le processus d’application continuelle et stricte du SNAT
LIGNES
DIRECTRICES
ENJEUX
BILAN ET
DIAGNOSTIC
SCENARIOS
DIAGNOSTIQUE
PROSPECTIF
ELABORATION
DU SNAT,
ORIENTATIONS,
PRESCRIPTIONS
ET ACTIONS
PROSPECTIVE
TERRITORIALE
MISE EN ŒUVRE
ETAT DES
LIEUX
SUIVI DU
SNAT ET
TABLEAU
DE BORD
CONCERTATION
MISSION 1
MISSION 2
MISSION 3
MISSION 4
MISSION 5
Source : SNAT, 2010, p. 99.
L’application minutieuse du SNAT est fondée sur un travail d’évaluation et de suivi
permanant, il est important d’opérer des actions de régulation en adéquation avec tout
changement interne ou externe qui peut se manifester à moyen ou à long terme. De ce fait, il
est impossible de prédire avec exactitude l’image future du territoire algérien, et la mise en
place de scénarios aide à optimiser la prise de décision en optant pour les choix les plus
efficaces et les moins couteux. Dans ce sens, quatre scénarios ont été définis (SNAT, 2010, p.
100) :
8
-
Le premier scénario est celui de l’équilibre volontariste : L’Etat vise à développer
massivement les Hauts Plateaux et le Sud afin de rééquilibrer le territoire et de réduire
les pressions exercées sur le littoral et la zone tellienne.
-
Le second scénario est celui de la dynamique et de l’équilibre : Le développement
durable de villes nouvelles vise à équilibrer à la fois les régions littorales et celles des
Hauts Plateaux, en veillant à instaurer un équilibre soutenable entre la compagne et la
ville.
-
Le troisième scénario cherche à faire émerger des territoires compétitifs : Les
territoires doivent se développer et se valoriser, et cette finalité socioéconomique ne
peut se concrétiser sans une consolidation effective de l’attractivité et de la
compétitivité territoriale.
-
Le quatrième scénario est celui du territoire dispersé : C’est un scénario de
catastrophe, il est fondé sur le laisser-faire, les paramètres territoriaux évoluent d’une
manière mécanique et tendancielle sans aucune intervention volontariste ayant des
finalités socioéconomiques précises.
Selon LEVY J. et LUSSAULT M. (2003), le patrimoine culturel est un héritage transmis
d’une génération à une autre et il trouve dans le présent une valeur et une signification
particulière. Le patrimoine permet d’attribuer au territoire une identité en accordant aux
personnes qui l’approprient une certaine légitimité d’usage (MICOUD A., 1999). L’une des
exigences de la nouvelle politique algérienne d’aménagement du territoire est la préservation
et la valorisation du patrimoine culturel matériel et immatériel. La sauvegarde du capital
culturel c’est une préoccupation collective visant à assurer sa transmission aux générations
futures, ces dernières seront en mesure d’éviter toute perte identitaire ou déracinement
culturel, mais des situations conflictuelles risquent de surgir et de porter atteinte à cette
osmose sociale qui est fondée sur la légitimité (MELE P., LARRUE C., ROSEMBERG M.,
2004).
4. La stratégie de préservation et de valorisation territoriale du capital
culturel
La stratégie nationale d’aménagement et de développement prospectif du territoire
(perspectives 2030) vise à préserver l’identité nationale et à assurer une cohésion territoriale
et sociale par le biais d’une valorisation de l’héritage culturel. C’est une autre façon de penser
9
le territoire, où la valeur intrinsèque est mise en avant loin de toute démesure matérialiste
visant uniquement à valoriser le territoire. L’enjeu culturel reste une forte préoccupation, il est
porté par les hommes dans une approche systémique d’un fort ancrage territorial, cette vision
est transmise aux générations futures afin de préserver l’identité collective et éviter la
fragmentation du territoire.
Des pôles patrimoniaux d’un grand capital culturel matériel et immatériel formeront des parcs
culturels porteurs qu’il faudra préserver et valoriser vue leur fort héritage historique et
archéologique. Cette démarche a aussi une dimension locale, elle est centrée sur un processus
participatif du citoyen, ce dernier contribuera activement à la fabrication culturelle du
territoire local. L’innovation consiste en outre à (SNAT, 2010, p. 14) :
-
Adopter des plans de préservation et de valorisation des sites historiques et
archéologiques,
-
Identifier les zones culturelles à promouvoir à l’aide de plans d’aménagement adaptés,
-
Adopter un Schéma Directeur des Zones Archéologiques et Historiques par lequel une
cartographie nationale du patrimoine culturel est confectionnée et où des priorités ont
été hiérarchisées et des options de protection et de mise en valeur ont été identifiées.
Un travail en profondeur et en continuité s’impose, il est prévu également de :
-
Déterminer le degré de fragilité et de vulnérabilité de certains sites archéologiques,
-
Corriger les erreurs commises dans le passé concernant la protection des sites
historiques anciens (Ksour, casbah, village traditionnel, etc.),
-
Valoriser les sites historiques (zones sahariennes, hauts lieux de la résistance
populaire, sites de patrimoine partagé, monuments, réserves archéologiques, centres
historiques, parcs culturels),
-
Inventorier, classer, restaurer et valoriser le patrimoine culturel par le biais d’un travail
de promotion touristique continu et la création de PME spécialisées dans la
préservation et la valorisation du patrimoine culture. Car il est possible de valoriser le
patrimoine culturel mettre au service d’activités touristiques créatrices de richesse et
d’emploi, ce qui va reconfigurer le territoire et lui donner une vocation bien précise
(LAZZAROTTI O., 2003).
Ces actions regroupées vont contribuer à valoriser avec beaucoup d’efficacité le territoire et à
consolider son attractivité.
10
5. Le capital culturel comme élément de rééquilibrage et de développement
durable et responsable du territoire
Il est admis que le développement durable et équilibré du territoire passe par une valorisation
effective et réfléchie du capital culturel, c’est une condition sine qua non sans laquelle le
développement socioéconomique du territoire risque d’être déséquilibré et d’engendrer en
parallèle des externalités territoriales négatives (pollution, nuisances multiples, perte
d’osmose sociale, etc.). Un développement équilibré et durable du territoire doit trouver un
juste équilibre entre les besoins socioéconomiques des citoyens et la responsabilité morale
que consiste la sauvegarde de l’héritage culturel. Il y a dons, une nécessité de provoquer des
changements profonds dans les mentalités et les comportements anthropiques à tous les
niveaux (national, régional et local). Par conséquent, le développement économique et
l’étalement urbain doivent être maîtrisés et contrôlés au niveau des zones archéologiques les
plus sensibles (SNAT, 2010, p. 34). Dans le cadre du SNAT, le développement durable du
territoire ne peut se concrétiser sans un développement viable, équitable et vivable du
patrimoine culturel. Le cinquième Programme d’Action Territoriale (PAT 5) focalisé sur le
patrimoine culturel vise à (SNAT, 2010, p. 40 et 87) :
-
Préserver et sauvegarder le patrimoine naturel et culturel,
-
Sauvegarder les chances de développement des générations futures en assurant la
pérennité du capital culturel collectif,
-
Assurer un usage économique rational et réfléchi du patrimoine culturel.
Cette démarche se décline en objectifs, stratégies et programme d’action. Les objectifs
consistent à : (i) protéger et valoriser le patrimoine culturel dans toute sa dimension, (ii)
intégrer le capital social en tant que composante indissociable de la politique nationale de
développement et d’aménagement du territoire. Les stratégies visent à inventorier, identifier
(par la mise en place d’une banque de données du patrimoine culturel matériel et immatériel)
(LARDON S., MAUREL P., PIVETEAU V., 2001) et créer des pôles économiques du
patrimoine culturel et s’investir amplement dans un travail de formation et d’éducation ; une
tâche qui est confiée au Centre National de Recherches en Archéologie (CNRA) et au Centre
National de Recherches Préhistoriques, Anthropologiques et Historiques (CNRPAH). Pour ce
qui est du programme d’action, ce dernier consiste à (i) créer les Pôles d’Economie du
Patrimoine (PEP)1 et les Parcs Culturels à travers notamment les plans généraux
1
Dans le cadre du SNAT, 18 PEP ont été identifiés sur l’ensemble du territoire national.
11
d’aménagement et la consolidation de leurs structures de gestion, (ii) mettre en place des
mécanismes de préservation et de protection du capital culturel, c’est un rôle attribué aux
différentes directions de la culture des wilayas (iii) définir les actions à engager en urgence et
à court terme, (iv) travailler en concertation avec les autres secteurs et acteurs concernés
directement ou indirectement. Pour ce faire, des organismes spécialisés peuvent apporter une
contribution précieuse et un savoir-faire fort appréciable, c’est le cas par exemple du Centre
National de la restauration des biens culturels mobiliers et immobiliers, du Centre National
des Manuscrits, de l’Office de Gestion et d’Exploitation des Biens Culturels, du Musée
National d’Art Moderne et Contemporain, du Musée de la Miniature, de l’enluminure et de la
Calligraphie et du Musée Maritime.
Schéma n° 02 : La stratégie de sauvegarde et de valorisation du capital culturel en Algérie
dans le cadre du SNAT, 2030
Les objectifs
- Protéger et valoriser,
- Intégrer le principe de durabilité.
Les stratégies
- Inventorier et préserver,
- Créer des Pôles d’Economie du
Patrimoine (PEP),
- Former et sensibiliser.
Le programme d’action
- Activer les Pôles d’Economie du Patrimoine
(PEP),
- Adopter des mesures protectrices,
- Engager des actions prioritaires,
- Instaurer un travail de concertation et
d’intégration.
Source : SNAT, 2010, p. 40.
Dans le cadre d’une politique réfléchie de la ville et d’un renouvellement urbain fondé sur la
mutualisation et le partage, les liens culturels entres les zones rurales et les zones urbaines
doivent être fortifiés, ces territoires doivent se valoriser culturellement en harmonie et en
toute complémentarité fonctionnelle. Pour ce qui est de la capital du pays, cette dernière est
vouée à devenir un portail culturel de l’Algérie sur le reste du monde, un lieu de rencontre de
la créativité et un centre culturel de renommée internationale. Un développement local
endogène a toutes les chances de tirer sa force du patrimoine culturel et touristique local. Sans
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être exhaustif, des pôles touristiques culturels locaux peuvent être envisagés, c’est le cas
du pôle culturel touristique (SNAT, 2010, pp. 74, 77, 81, 82 et 84) :
-
De Tamanrasset-Djanet-Illizi,
-
Des Aurès-Zibans,
-
Des Oasis d’Adrar, Timimoun et Ghardaïa,
-
Des Monts des Ouled Naïl-Djebel Amour,
-
De la Kabylie-Djurdjura.
Conclusion
Dans son Option Hauts Plateaux - Sud (O. H P - Sud), la nouvelle politique algérienne de
reconquête du territoire se base sur le rééquilibrage des ressources, du peuplement, des
activités économiques et des infrastructures de base. Cette nouvelle alternative se veut un
soulèvement collectif contre le « laisser-faire » et le « laisser pour compte ». La ligne
directrice du scénario volontariste qu’a tracé la nouvelle politique d’aménagement du
territoire vise à combattre les décalages de peuplement et de développement entre les
différentes régions. Ces finalités ne peuvent se concrétiser dans le court terme, c’est dire
l’obligation d’une politique prospective s’étalant jusqu’à 2030.
Par conséquent, il est
impératif de passer d’une politique d’assistanat et de prise en charge vers une politique de
promotion et de mise en valeur des territoires de marge, cela se fera à travers l’amélioration
significative des conditions de vie des populations par le biais d’une valorisation efficiente
et multidimensionnelle (économique, sociale et culturelle) des Zones A Promouvoir (ZAP)
pour hausser leur niveau d’attractivité.
Il est impératif de sortir de la spirale infernale de l’évolution tendancielle pour amorcer une
nouvelle ère qui est celle de l’évolution volontariste. Dans cette perspective, l’Algérie s’est
engagée dans une nouvelle politique d’aménagement et de reconfiguration de son territoire
(perspectives 2030). Cette démarche volontariste est focalisée autour du renforcement
efficient du rôle de l’Etat en tant que garant d’un développement équilibré et durable du
territoire et de ses composantes culturelles, cela va permettre d’éviter le gaspillage des
ressources, de combattre la ségrégation territoriale et d’assurer la cohésion sociale et
spatiale de l’ensemble du territoire algérien.
La protection et la mise en valeur du capital culturel est une finalité fortement exprimée dans
le Schéma National d’Aménagement du Territoire (SNAT), ce dernier est un outil par lequel
13
l’Algérie compte préserver son identité culturelle. La prise en compte des impératifs culturels
liés au territoire vise la sauvegarde de l’identité nationale, elle se concrétisera par le biais
d’une valorisation réfléchie du patrimoine culturel matériel et immatériel. Sans être
exhaustive, la démarche de l’Etat s’articule autour des finalités suivantes :
-
Un nouveau repositionnement sur le plan territorial des infrastructures culturelles,
-
Un aménagement équilibré des infrastructures culturelles pour plus de démocratisation
de la vie culturelle,
-
Une décentralisation réfléchie de l’activité culturelle pour permettre aux collectivités
locales de valoriser au mieux leur patrimoine culturel local.
Toutes ces finalités vont se concrétiser par une organisation territoriale du système
patrimonial, elle doit veiller à ne pas confondre l’aménagement physique et géographique du
territoire (infrastructures et équipements) à la construction collective et soutenue de la culture
par l’homme en tant que garant et porteur de l’identité culturelle et de l’osmose sociale. De ce
fait, on constate qu’il y a une forte adjonction entre : (i) l’homme en sa qualité d’acteur, (ii) le
territoire en sa qualité de support dynamique, et (iii) l’identité culturelle du territoire.
Bibliographie
BERQUE A., (1996), « Etre humains sur la terre », Paris, Gallimard, 212 p.
BONNEMAISON J., CAMBREZY L., QUINTY-BOURGEOIS L., (1999), « Les territoires
de l’identité. Le territoire, lien ou frontière ? », Paris, Éd. L’Harmattan, 315 p.
CLAVAL P., (1995), « La géographie culturelle », Paris, Nathan, 384 p.
LARDON S., MAUREL P., PIVETEAU V., (2001), « Représentations spatiales et
développement territorial », Paris, Éd. Hermès, 437 p.
LATARJET B., (1992), « L’aménagement culturel du territoire », La documentation
française, Paris, p. 84.
LAZZAROTTI O., (2003), « Tourisme et patrimoine » : ad augusta per angustia, Annales de
géographie, n°629, p. 91-110.
LEVY J., LUSSAULT M., Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Paris, p.
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