La 7e Journée mondiale de la prévention du suicide prend forme

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La 7e Journée mondiale de la prévention du suicide prend forme
actus
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LORET
La 7 Journée mondiale
de la prévention du suicide
prend forme aux Flamboyants
La clinique du Port, spécialisée dans les soins
psychiatriques et psychothérapeutiques, a accueilli la
première rencontre réunionnaise qui vise à mieux
répondre à un besoin majeur de santé publique car le
suicide fait toujours des ravages.
À
La Réunion, 110 personnes sont mortes
par suicide en 2010. À titre de comparaison, on a enregistré la même
année 65 décès par accident de la route. Une
bonne raison pour les professionnels de santé
et les représentants d’associations de
s’impliquer dans la Journée mondiale de la
prévention du suicide, fixée au 10 septembre
par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Sur proposition du docteur Gérard d’Abbadie,
psychiatre et fondateur des Flamboyants au
Port et prochainement à Saint-Pierre, c’est le
docteur Xavier Saunier, psychiatre libéral, qui
a présidé aux échanges entre psychiatres,
psychologues, travailleurs sociaux, écoutants
et responsables des associations SOS Solitude
et Association Prévention Suicide-Kersoley. «
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Cet événement sera le moment, chaque année,
annonce le docteur Saunier, où les différents
intervenants dans le domaine de la prévention
du suicide pourront présenter leurs actions,
les difficultés rencontrées et leurs attentes,
échanger sur leurs pratiques et les possibilités
d’actions interdisciplinaires. Cette première
édition est amenée à se structurer et à évoluer
au cours des prochaines années. »
UN PROJET D’OBSERVATOIRE
DU SUICIDE
Afin de recueillir des données statistiques sur
les raisons et les moyens employés à l’occasion
de ces drames, Pascal Duvignac, psychothérapeute et superviseur pour SOS Solitude, a pu
révéler qu’un projet d’Observatoire du suicide
« Cette première édition est
amenée à se structurer
et à évoluer au cours des
prochaines années », a annoncé
le psychiatre Xavier Saunier,
présidant l’événement.
De gauche à droite sur notre
photo : les docteurs Gérard
Mouls, Jacky Brandibas, Xavier
Saunier et Gérard d’Abbadie.
LORET
actus
Damon Odayen (à gauche), directrice de
l’association Prévention Suicide-Kersoley et
la présidente Sandrine Castel.
De gauche à droite : Jean-Paul Cerveaux et Nadine Rivière,
écoutants de SOS Solitude et Pascal Duvignac,
psychothérapeute et superviseur pour l’association.
était en phase de préparation. « Nous en sommes encore aux prémisses, nous n’avons pas
véritablement de moyens, mais il faudra
immanquablement récolter toutes ces données-là. »
En première ligne tout au long de l’année, les
écoutants bénévoles des associations
témoignent des difficultés à renouveler leurs
équipes. « Il s’agit de permanences que nous
tenons depuis notre domicile en dialoguant
au téléphone. Il est indispensable de cerner
les motivations des bénévoles qui rejoignent
l’association car c’est aussi une responsabilité
déterminante pour l’issue des appels, explique Nadine Rivière, l’une des 36 écoutants de
SOS Solitude. Nous faisons de la prévention
parfois dans des maisons de retraite et dans
d’autres endroits. Nous avons mis sur pied les
« Jeudis de la prévention » pour aider les gens
à déceler des signes autour d’eux. » Kersoley
dispose d’une vingtaine d’écoutants et effectue
aussi de la prévention dans les établissements
scolaires, quartiers, groupes de familles, en
fonction des demandes. « Il paraît incroyable
que dans une classe de 20 enfants, 5 ou 6
d’entre eux aient déjà tenté de se suicider.
Qu’on nous demande une rencontre préventive dans une classe ou un tiers des lycéens
sont déjà passés à l’acte, déclare Damon
Odayen, directrice de Kersoley. Nous faisons
de la prévention en en parlant, tout simplement... » Le fait qu’il y ait moins de suicides à
La Réunion, parfois deux fois moins, que dans
d’autres régions de France n’incite guère les
pouvoirs publics à y prêtait beaucoup
d’attention, déplorent les acteurs.
à certaines dépenses préventives comme les
filets de protection qui manquent sur beaucoup de grands ponts à la Réunion, notamment celui de l’Entre-Deux où sont mortes
récemment cinq personnes en un mois. « Une
personne qui meurt, c’est environ dix personnes en traumatisme qu’il faut accompagner, remarque Jacky Brandibas, psychologue
et formateur régional. »
« Supprimer, symboliquement, des moyens
de suicide, est un message fort qui signifie :
on tient à vous », affirme le psychiatre Gérard
Mouls.
« Aux États-Unis, par exemple, on ajoute des
vomitifs à certains cachets, qui agissent à partir d’une dose dangereuse », ajoute Jacky
Brandibas.
À la suite du plan Kouchner, en 1999, pour
faire de la prévention du suicide une priorité
nationale, on était passé de 13 000 à 9 500
décès annuels. « 80 % des malaises viennent
du milieu familial, de la maltraitance, sexuelle
ou physique, et de la violation d’identité
comme un mensonge sur la filiation. Il est
alors difficile de se retourner vers la famille »,
constate Damon Odayen. De son côté, le
docteur d’Abbadie souligne le rôle prépondérant des associations. Il insiste aussi sur
l’importance d’échanger entre intervenants
car, dans le moment crucial d’une crise suicidaire, il est parfois difficile d’établir un relais
de prise en charge. Un accompagnement contraint ne peut s’opposer, dans la plupart des
cas, aux libertés individuelles.
À 80%, LES MALAISES
VIENNENT DU MILIEU FAMILIAL
JL
UN MILLION DE DÉCÈS
ANNUELS DANS LE MONDE
L’Organisation mondiale de la
Santé (OMS) considère le
suicide comme un problème
de santé publique énorme,
mais en grande partie
évitable. Il se trouve
aujourd’hui à l’origine de près
de la moitié de toutes les
morts violentes. On compte
actuellement près d’un million
de décès annuels dus au
suicide et le coût économique
se chiffre en milliards de
dollars. Selon les estimations,
le nombre de décès dus au
suicide pourrait passer à 1,5
million d’ici 2020. Après le
succès de la 6e Journée
mondiale de prévention du
suicide en 2010, la Journée
était organisée à nouveau le
10 septembre 2011 par l’OMS
et par l’Association
internationale pour la
prévention du suicide (AIPS)
pour attirer l’attention de
l’opinion mondiale et lancer
un appel en faveur de l’action.
Au cours de cette journée, il
est demandé instamment aux
communautés, aux individus,
aux professionnels et aux
bénévoles de prendre part
aux activités de sensibilisation
à ce problème de santé
publique.
Andrée d’Abbadie-Xiste, psychiatre, constate
que « dans la société réunionnaise, les interlocuteurs sont souvent les gens de la famille.
Or, ils peuvent être en situation de trouble et,
autour d’eux, cela semble être un grand
désert. Il y a un effort à réaliser dans le lien
social ».
Le véritable coût du suicide reste à établir. Il
est, en tout cas, considérablement supérieur
l’officiel de la santé dans l’océan indien
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