la mobilité sociale
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21 LA MOBILITÉ SOCIALE On définit la mobilité sociale par le changement de position dans la structure sociale. Ces positions sont mesurées par l’appartenance socioprofessionnelle ou la classe sociale. La mobilité intergénérationnelle compare la position d’une personne à celle de ses parents, voire de ses grands-parents. COMMENT MESURER LA MOBILITÉ SOCIALE Le principal instrument de mesure de la mobilité sociale intergénérationnelle est constitué par les tables de mobilité construites par l’INSEE qui sont relativement compliquée à lire. q Les tables de mobilité Nous reproduisons ici la dernière table disponible issue de l’enquête publiée par l’INSEE en 2006 (chiffres de 2003) : « Formation, qualification professionnelle » (FQP). En mai 2003, 7045000 hommes âgés de 40 à 59 ans sont actifs ou étaient d’anciens actifs. Parmi eux, 4 % étaient des agriculteurs. Dans chaque case, le premier chiffre indique les recrutements et celui en italique les destinées pour chaque groupe socioprofessionnel. Ainsi, 22 % des fils d’agriculteurs sont devenus agriculteurs, mais 88 % des agriculteurs sont fils d’agriculteurs. La différence s’explique par l’évolution de la structure sociale d’une U NE RELATIVE IMMOBILITÉ SOCIALE Catégorie socioprofessionnele du fils en fonction de celle du père en 2003. PCS* du père PCS* du fils AE* ACCE* CPIS* PI* Employés Ouvriers Ensemble AE* ACCE* CPIS* PI* Employés Ouvriers Ensemble 88 % 22 % 12 % 6% 8% 9% 11 % 17 % 13 % 9% 18 % 37 % 16 % 100 % 2% 1% 29 % 21 % 14 % 22 % 12 % 24 % 10 % 9% 9% 24 % 12 % 100 % 1% 0% 6% 6% 24 % 52 % 9% 26 % 5% 6% 2% 9% 8% 100 % 1% 0% 10 % 8% 20 % 33 % 16 % 33 % 9% 9% 6% 17 % 11 % 100 % 1% 0% 7% 7% 11 % 22 % 11 % 28 % 14 % 17 % 7% 26 % 9% 100 % 7% 1% 36 % 8% 23 % 10 % 41 % 23 % 49 % 12 % 58 % 46 % 43 % 100 % 100 % 4% 100 % 9% 100 % 19 % 100 % 24 % 100 % 11 % 100 % 34 % 100 % 100 % * PCS : professions et catégories socioprofessionnelles ; AE : agriculteurs exploitants; ACCE : artisans, commerçants, chefs d’entreprise ; CPIS : cadres et professions intellectuelles supérieures ; PI : professions intellectuelles. Source : INSEE, enquête FQP, 2003. Champs : hommes actifs ou anciens actifs âgés de 40 à 59 ans en 2003. 52 génération à une autre. Si 37 % des fils d’agriculteurs deviennent ouvriers, on considère que la mobilité est essentiellement horizontale, c’est-à-dire que ces fils n’ont pas modifié leur position sociale par rapport à celle de leur père, car ils occupent la même place dans la hiérarchie de prestige. La lecture de la diagonale permet d’apprécier l’immobilité sociale, qui reste forte surtout pour les groupes situés aux extrêmes de la hiérarchie. q De la mobilité nette et structurelle à la mobilité absolue et relative On peut lire les tables de mobilité sociale en distinguant la mobilité structurelle et la Mesure de la fluidité sociale mobilité. La première indique une mobilité « forcée » due à l’évolution de la structure Pour mesurer la fluidité sociale, on calsociale d’une génération à une autre alors cule des rapports de chance relatives (odds ratios en anglais). Si sur 100 fils que la mobilité nette est considérée comme de cadres, 80 deviennent cadres et la mobilité « pure » (mobilité de circulation) 20 employés alors que pour 100 fils car elle est indépendante de l’évolution de d’employés, 75 deviennent employés et la structure sociale d’une génération à 25 cadres, on peut calculer le rapport de chances relatives de la manière suil’autre. On la calcule en faisant la différence vante : (80/20)/(25/75) = 12. On dira entre la mobilité totale et la mobilité strucdonc que les chances de devenir cadre turelle. Depuis la fin des années 1970, les plutôt qu’employé sont 12 fois plus élesociologues distinguent la mobilité absolue vées pour les fils de cadres que pour les fils d’employés. Si ce rapport baisse, la et la mobilité relative. La première est celle fluidité sociale sera alors considérée qui apparaît dans les tables de mobilité, en comme plus importante. intégrant la mobilité structurelle alors que la seconde mesure la mobilité d’une catégorie sociale par rapport à une autre, c’est donc une mesure de la fluidité sociale. ÉVOLUTION DE LA MOBILITÉ SOCIALE q Les facteurs de la mobilité sociale En France, la fluidité sociale s’est accrue depuis les années 1950, mais au cours des Trente Glorieuses la mobilité sociale est une mobilité structurelle liée à plusieurs facteurs : l’évolution de la structure socioprofessionnelle (développement des classes moyennes et supérieures), la fécondité différente des groupes sociaux (les cadres et les professions intermédiaires ont une fécondité moins élevée que les ouvriers et les agriculteurs, laissant ainsi d’une génération à une autre des emplois disponibles pour les enfants des premières), la féminisation de l’activité et l’immigration (les femmes et les immigrés occupent des emplois moins qualifiés ce qui favorise l’ascension sociale des hommes français). q Le rôle de l’école La place occupée dans la structure sociale, en France, est liée à la réussite scolaire. Or, les enfants dont les parents ont un niveau de diplôme élevé sont ceux qui ont la plus grande chance de réussite à l’école (voir fiche 22). Cependant, le développement du système scolaire a été plus rapide que celui des emplois qualifiés. Donc, avec un niveau de diplôme plus élevé, un fils peut avoir une position sociale moins prestigieuse que celle de son père. Ce paradoxe a été mis en évidence par un sociologue américain, Charles Anderson (paradoxe d’Anderson). 53