A propos du soufisme - Reseau

Transcription

A propos du soufisme - Reseau
LA PETITE FEUILLE VERTE
"Clarifier, c'est permettre d'agir en vérité"
A propos du soufisme
Remarques souvent entendues : "c'est vrai que le Coran parle souvent de violences… mais… il y a quand
même une voie mystique dans l'islam : le soufisme !" ; "et si le soufisme était le véritable islam ? ". Compte
tenu de la fréquence de des remarques, la PFV a demandé à un spécialiste de clarifier les choses.
Certains Occidentaux, nés non musulmans, sont tentés par le soufisme et, ignorant ou délaissant le patrimoine
mystique chrétien, se font musulmans. Ils n'ont pas suffisamment conscience, voire ne savent pas du tout,
qu’en islam le soufisme est mal accepté car il pose un grave problème de fond. Ainsi, sans s'en rendre compte,
ces personnes, dans leur recherche mystique, vont entrer par l’islam dans une vision "piégeante" de Dieu.
En effet, en islam, la communion avec Dieu est impossible : la transcendance de Dieu y est absolue et
ombrageuse, surplombant tout, les hommes y compris.
Cependant, le besoin profond de l'homme d'avoir une relation intime avec Dieu lui est naturel ; il ne peut être
éteint et s'infiltre dans l’islam par le courant du soufisme. Courant qui manifeste une recherche de Dieu,
subjectivement sincère et honnête (1).
Un courant non admis
Seulement, le soufisme n'est pas représentatif de l'islam : les "docteurs de la loi" y condamnent toute
expérience spirituelle. Au fil des siècles, cela s’est même traduit par des exils forcés et autres brimades,
voire par des exécutions capitales (2).
Pour contourner ces difficultés, les soufis cherchent des parades contre les persécutions : courant malâmatî
(excentricité pour détourner l’attention), poésie mystique ardue, ésotérisme tout aussi ardu (gnose
théosophique). Ils peuvent ainsi dissimuler la fusion recherchée avec Dieu afin de ne pas être accusés de
porter atteinte à sa transcendance et à son unicité (tawhîd, base de la croyance islamique).
Ces parades ne facilitent pas l’accès à cette mystique et sa compréhension.
Au-delà du prescrit qui reste obligatoire (la charia, y compris le djihad guerrier), le soufisme exprime le
besoin, au sein de l’islam qui en manque, d’une relation intime avec Dieu. Recherches aussi de solitude, de
guide spirituel, de purification et de pardon.
À la différence de la mystique chrétienne, le soufisme est surtout une mystique psychologisante : elle décrit
les "états" et les "stations" des différentes étapes possibles vers Dieu pour les "rapprochés" (muqarribûn).
Dialogue dans la lucidité
En christianisme, la communion avec Dieu est offerte à tous les baptisés (pas seulement aux mystiques) par
la prière et dans les sacrements (que l’on ne se donne pas par soi-même mais qu’on reçoit de l’Eglise par
Jésus, le Messie venu du Cœur de Dieu). C’est l’accomplissement de l’Alliance biblique, altérité où Dieu est
solidaire des hommes pécheurs, car Il est Amour (1 Jn 4,8.16) et Sauveur et Rédempteur, cohérence
inconnue en islam où le mot cœur n’est jamais utilisé pour Dieu.
Cela ne nous ferme pas le dialogue de croyants avec d’autres croyants différents : le dialogue de
l’expérience spirituelle, de la croyance en Dieu, des richesses de la prière et des voies de recherche de Dieu
dans la tradition de chacun.
Mais soyons lucides : résistons à la tentation simpliste du mélange religieux où tous les mystiques diraient la
même chose et auraient la même expérience, une fois arrivés au sommet de convergence de la montagne
des religions ! En réalité, le sommet sur terre est tronqué : on n’est jamais au sommet car il est atteint en
Dieu par Celui qui nous y introduit : Jésus-Christ.
Emmanuel Ghidan - 23 janvier 2012 – PFV 94
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(1) Ses principaux maîtres historiques sont Rabiat (m. 801), Bistâmî (m. 875), Junayd (m. 910), Hallâj (m. 922), Ançârî (m. 1089),
Ghazâlî (m. 1111), Suhrawardî (m. 1191), Ibn Arabî (m. 1240), Rûmî (m. 1273). A partir du XIIe siècle, sont apparues les
confréries mystiques, un islam populaire avec culte des saints et pratiques non exigées par le rituel islamique, ajouts que les
autorités religieuses de l’islam contestent souvent.
(2) Ainsi, ont été condamnés et exécutés Abû Dhar (652), Dhû Nûn (859), Hallâj et Ibn Atâ de Bagdad (922), Tirmidhî
(930), Ayn el Qudât Hamadânî (1131), Suhrawardî (1191), Shabestanî (XIVe siècle)…
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