Réforme des retraites SNCF et RATP de 2008 : des effets pervers

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Réforme des retraites SNCF et RATP de 2008 : des effets pervers
MOBILICITES, 24/05/2016
Réforme des retraites SNCF et RATP de 2008 : des effets pervers
qui coûtent cher
Par Marc FRESSOZ
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Le Conseil d'orientation des retraites publiera en milieu de semaine une note établissant un bilan de la
réforme des régimes de retraite spéciaux. Si l'âge de départ recule, les mesures d'accompagnement
négociées à la RATP et à SNCF finissent par coûter plus cher à ces deux régimes. Mais aussi aux deux
entreprises. Un système gagnant-perdant ?
52,6 ans en 2015 au lieu de 50 ans en 2008 pour les roulants ; 56,8 ans au lieu de 55 pour les sédentaires de
la SNCF : huit ans après la réforme des régimes spéciaux, sa mise en place a fait progressivement reculer l’âge
de départ en retraite des cheminots.
Même évolution à la RATP. L'âge moyen auquel les agents font valoir leurs droits est passé de plus de 54,5
ans à un peu moins de 55,5 ans en 2015.
Mais tandis que dans le privé, on part à 62,4 ans, on est encore loin d'avoir atteint la convergence et l'équité
entre salariés du privé et salariés du public. En principe, c'est vers 2024 que l'âge d'ouverture des droits des
agents sédentaires atteindra 62 ans.
A la RATP, le régime le plus favorable
De tous les régimes spéciaux (gaziers, électriciens, fonctionnaires des trois catégories, personnels de la
Banque de France etc.), celui de la RATP assure à ses personnels le départ le plus précoce. Telles sont les
principales constatations de la note du Conseil d'orientation des retraites (COR) qui sera publiée mercredi ou
jeudi et dont la teneur a déjà fuité dans la presse la semaine passée.
Le COR évoque aussi les effets pervers des à-côtés de cette réforme de 2007-2008. Car à l'époque, pour faire
baisser la tension sociale engendrée par cette évolution et mettre un terme aux grèves des cheminots et des
agents RATP, les pouvoirs publics et les dirigeants de la SNCF et de la RATP ont dû accepter de lâcher du lest.
Comme souvent, la suppression d’avantages a été compensée par l'octroi de nouveaux dans le cadre
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d'accords d'entreprise. Ce qui n'augure pas très bien de la future convention collective du rail et de l'accord
d'entreprise SNCF qui sont tous deux en cours de négociation finale.
Concrètement, s'agissant de la réforme des retraites, comme la progression de carrière des agents dans ces
deux groupes est automatique et jalonnée par des franchissements d'échelons, de nouveaux échelons
supérieurs ont été créés au sein de la RATP et de la SNCF pour accompagner cet allongement de la vie d'actif.
Age retardé mais pensions plus conséquentes
Mécaniquement, les salaires s’améliorent en fin de carrière et comme les pensions de retraite sont calculées
sur les 10 derniers mois de présence et non pas sur les 25 meilleures années comme dans le privé, on devine
l'effet : les pensions gonflent. Ce qui n'est pas une bonne affaire pour les caisses des régimes SNCF et RATP.
Concernant celle de la régie, le rapport devrait souligner que le coût de ces mesures a un impact supérieur à
la baisse d'acquisition des droits. Entre 2008 et 2015, ce ne sont pas des économies mais un surcoût de 7
millions d'euros qui apparaît !
Mais l'ensemble des compensations (majoration des trimestres cotisés, par exemple) pèsent aussi sur les
comptes des entreprises et expliquent notamment leur difficulté à maîtriser leurs coûts sociaux. Ils
expliquent en partie pourquoi en dépit d'une baisse de ses effectifs, la SNCF ne voit pas sa masse salariale
baisser comme l'avait établi un rapport divulgué par Mobilicités.
Des effets sur le service TER
Par ailleurs, l'évolution du régime des retraites SNCF a aussi des effets directs sur la qualité de service
ferroviaire. Certaines régions qui financent le TER l'ont expérimenté à leur dépens ces derniers mois, en
constatant que la SNCF leur supprimait des trains faute d'un nombre suffisant de nouveaux conducteurs
formés. Le métier attire moins les jeunes, a expliqué l'entreprise, mais il se trouve aussi que celle-ci a été
prise au dépourvu.
"Sachant qu'au fil du calendrier de mise en place de la réforme de 2008, les modalités évoluent chaque année,
certains conducteurs ont refait leur calcul, explique un dirigeant de la SNCF. Ils ont estimé plus avantageux
de partir tout de suite, d'où des départs non anticipés qui nous ont posé problème sachant qu'il faut environ
deux ans pour recruter des conducteurs.“
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