A la rencontre de Raphaël : Salut l`artiste !

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A la rencontre de Raphaël : Salut l`artiste !
A la rencontre de Raphaël :
Salut l'artiste !
Au FAC le mercredi, on ouvre « l'Arobase » (Espace Public Numérique-EPN-), c'est jour d'informatique.
C'est aussi jour de rencontres dans cette salle studieuse et conviviale, où chacun, du plus jeune au plus vieux,
se concentre en silence sur son clavier pour rédiger qui son CV, qui un courrier, ou naviguer sur internet.
A l'occasion, c'est le dernier salon où l'on cause. Ce mercredi de novembre 2014, ici, on parle italien : ''qui si
parla italiano''. Une conversation à bâtons rompus se déroule entre Joël, formateur de l'INSTEP (Inirep/LéoLagrange, de Mainvilliers), Kadiatou, sénégalaise, ayant épousé un italien, hébergée à « Urgence famille »
avec ses trois filles, et enfin Raphaël, les yeux rivés sur son écran.
Explication ? tous trois ont bien sûr des attaches familiales en Italie.
S'agissant de Raphaël, il est né en 1953 en Sardaigne. Ce sexagénaire aussi affable que loquace est l'un des
45 salariés des Ateliers des Carnutes, y compris la dizaine d'encadrants.
Empruntant le couloir, une fois passé le jardin d'enfants de « Chœur de Mamies », nous sommes allés faire
plus ample connaissance au Gain's bar, lieu de repli d'un moment, fermé aux clients.
Depuis quand travaillez-vous aux Ateliers des Carnutes ?
« - Je suis salarié ici depuis maintenant près de trois ans. Mon arrivée remonte à 2011. Pôle emploi m'avait
fait cette proposition de poste. J'ai conclu un contrat aidé de deux ans, renouvelé pour une troisième année,
qui vient sous peu à expiration. Au départ, c'était un CUI-CAE (contrat unique d'insertion-contrat d'accès à
l'emploi). Maintenant on parle de CDDI (Contrat à Durée Déterminée d'Insertion); j'espère une prolongation
pour une quatrième année.
J'ai cumulé au cours de ma vie professionnelle diverses expériences en peinture. J'ai travaillé dix ans comme
artisan peintre décorateur. Après un divorce, mes enfants ayant grandi, j'ai souhaité changer de vie.
J'interviens à l'atelier « second œuvre du bâtiment », bien sûr comme peintre principalement, soit en interne,
sur les bâtiments du FAC, soit sur des chantiers extérieurs.
Nous sommes sept salariés au total, plus Laurent, notre encadrant technique, un des plus anciens ici.
Nos profils sont tous différents, pour l'âge comme pour le profil, majoritairement issus de l'agglomération
chartraine.
(Off : L'atelier « second œuvre du bâtiment» remonte à 1999. C'était alors un CAVA (Centre d'Adaptation à
la Vie Active), devenu Atelier et Chantier d'Insertion en 2006. Aux Carnutes, il existe quatre pôles
supplémentaires en cours de réorganisation interne fin 2014 : menuiserie, espace verts /espaces naturels,
chemins de randonnée, services/logistique. Le site internet du FAC et des Carnutes détaille leurs prestations)
Quelles sont vos satisfactions aux Ateliers des Carnutes, et au FAC en général?
- Je travaille à temps partiel, trois jours par semaine, ça me laisse du temps libre. J'habite Chartres depuis
vingt ans, je réside actuellement à deux pas d'ici, et je viens à pied. Je serai bientôt à la retraite. Je toucherai
une petite pension, insignifiante, de quoi manger et me soigner.
Je me sens bien ici : dans mon atelier, l'ambiance est « sympa ». J'aime le contact humain, je suis plutôt
sociable. C'est difficile aussi parfois, on n'est pas toujours bien reconnu. Quand c'est possible, je contribue,
j'apporte mon savoir-faire. J'aide avec plaisir à l'encadrement, si nécessaire. Quand on peut faire, on fait...
Ce qui m'intéresse au FAC, c'est cette organisation et ce fonctionnement spécifiques.
J'apprécie ses buts et ses formes d'action. J'aime participer à la vie de l'association et je partage ses valeurs.
mc
Le FAC permet à beaucoup de gens de respirer. Pour certains, il faut de temps en temps remettre les
pendules à l'heure. Reconnaître ce que réalise le Foyer d'Accueil Chartrain (dont les Ateliers des Carnutes),
ce n'est pas dire qu'il peut effectuer des miracles. Pour ça, il n'existe pas de recettes : il y a ceux qui
veulent s'en sortir, et les autres... Récemment, un salarié nous a quittés, il a trouvé un CDI (Contrat à Durée
Indéterminée) : un tel événement est un moment de bonheur pour nous tous. Mon engagement est conscient.
Ma vie durant, j'ai toujours été engagé, d'une façon ou d'une autre.
Votre expérience de peintre décorateur est donc utile à l' atelier ?
- Oui, j'ai notamment été peintre en lettres pendant un certain temps, mais le métier a évolué. En tout cas ce
n'est pas ce que je pratique aux Carnutes. Fut une période où l'on réalisait même les enseignes des entreprises
avec des lettres en relief découpées à la main, ou bien on peignait artisanalement, à l'unité, les panneaux de
chantier. Je pratiquais aussi la sérigraphie. Un peintre décorateur peut se spécialiser aussi dans le trompel’œil, le faux-marbre, les différents types de lettres, gothiques, romaines …
D'où tenez-vous votre savoir-faire ?
- Je l'ai acquis en Italie. Né dans la petite ville de Ghilarza à l'ouest de la Sardaigne, j'ai suivi ma famille en
Corse, île française toute proche, à l'âge de cinq ans, au début des années 60. Puis en 1970, je suis venu me
former en Italie, à l'académie des Beaux-Arts de Vercelli, ville du Piémont, dans la plaine rizicole du Pô (Off
: celle du film ''Riz amer'' avec Sylvana Mangano). On y travaillait beaucoup, en commençant par les bases,
la décoration. On ne comptait pas les heures. Les cours de dessin, de peinture, d'acrylique, de patine étaient
complexes.
Je suis resté quelques temps dans mon pays d'origine, où j'ai participé à des expositions dans des galeries.
Puis j'ai dû partir ... Mais j'ai gardé ma passion pour la peinture artistique, et j'ai la chance de pouvoir y
donner libre cours actuellement. C'est une chance que de pouvoir vivre ses passions ...
Vous avez un goût prononcé pour l'art ? Et la peinture en particulier ?
- Une tel enthousiasme que mon logement est un véritable atelier-galerie de peinture ! Je suis en ce moment
très pris par le développement d'une association loi 1901 née en 2013, Arte-nel-mondo (l'art dans le monde),
dont la vocation est d'organiser des expositions de peinture, de photos, de sculpture pour éventuellement les
vendre aux enchères par la suite. Il s'agirait de créer des salons, et ainsi tisser des réseaux. C'est une approche
particulière certes, marchande bien sûr, mais pourquoi ne pas tenter de nouvelles formes de
commercialisation pour se faire reconnaître ? Ceci existe dans d'autres pays. Il me reste à convaincre.
Aujourd'hui, vous m'avez trouvé très absorbé par ma tâche car j'apprends à construire un site internet
interactif pour Arte-nel-mondo, grâce aux conseils de Joël. La formation est ouverte à tout salarié en
insertion. Jessy, notre conseiller socio-professionnel, nous y incite. C'est pour moi une opportunité. Je
découvre des possibilités magnifiques pour poursuivre mes projets. »
(Off : Comment ne pas rêver de devenir artiste peintre quand on est italien et qu'on s'appelle Raphaël ?
En tout cas, les œuvres de Raphaël Marras existent, je les ai rencontrées, et vous pouvez faire de même. Son
œuvre est classée comme figurative, voire parfois expressionniste, servie par des couleurs flamboyantes. Il
peint beaucoup de portraits, et aussi des nus de femmes. Il est souvent inspiré par les coutumes (et les
costumes) d'origine locale (voir Les costumes laotiens)
Voici quelques titres : Les Geishas, Les arlésiennes, Toréro, Danseurs flamenco, mais aussi Les trois coqs,
Régate, Joueurs de golf...
On les retrouve sur internet à partir d'expositions de galeries locales. Raphaël a également accompli un
stage d'artiste en résidence en août 2008 à l'atelier de lithographie d'Houplines, dans le département du
Nord, près d'Armentières pour maîtriser cette technique ancienne. En décembre 2014, il exposait à Chartres,
rue du Soleil d'or, une cinquantaine de tableaux à la galerie de l'Atelier-loisirs.
mc