parabole du pare-brise - Réflexions de Raymond Gravel

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parabole du pare-brise - Réflexions de Raymond Gravel
PARABOLE DU PARE-BRISE
Pierre-Gervais Majeau, prêtre
Diocèse de Joliette (Québec)
La tension montait dans la voiture. Un père apprenait à son fils à conduire une voiture.
Le fils était porté à regarder souvent dans le rétroviseur au lieu d’accorder toute son
attention à ce qui se passait devant lui sur la route. Après quelques avertissements, le
père monta le ton et dit à son fils : « C’est devant soi que les vraies affaires se passent!
Mais pourquoi regardes-tu sans cesse dans le rétroviseur. C’est dangereux de conduire
ainsi. À tout moment, un enfant peut surgir devant la voiture ou encore un animal. Tu
t’exposes à avoir des accidents à conduire ainsi en regardant toujours en arrière!
D’ailleurs, as-tu remarqué que le pare-brise occupe tout le devant de la voiture tandis
que le rétroviseur ne fait que quelques centimètres de long? Il me semble que c’est clair
que l’important c’est de regarder ce qui se passe devant! » Le fils, après un long silence,
répondit à son père : « C’est vrai! Tu as raison papa! C’est pas pour rien que le parebrise est si grand quand on le compare au rétroviseur! Mais j’aime bien cela voir, en
regardant dans le rétroviseur, tout le chemin parcouru et surtout voir les obstacles
évités. C’est comme cela que j’apprends des leçons du passé! »
Nous sommes tous un peu comme ce jeune qui apprend à conduire une voiture. Nous
sommes sur la route de la vie, le nez collé au pare-brise et l’œil attiré par le rétroviseur.
Nous voulons sans cesse échapper aux dangers de la route et nous regardons dans le
rétroviseur y cherchant des solutions aux défis actuels. Tandis que certains sont tentés
d’oublier le rétroviseur pour mener leur vie comme ils l’entendent en cherchant à
satisfaire leurs besoins; d’autres ont tendance à ne regarder dans le rétroviseur en
idéalisant le passé et en cherchant à le reproduire ou encore à le projeter sur l’actualité.
La sagesse voudrait que nous conduisions notre vie en accordant toute notre attention à
ce qui se passe devant soi tout en tenant compte des leçons du passé.
Il en est ainsi sur la route de la foi, de l’alliance. Nous sommes en route vers le monde à
venir. L’expérience de nos pères et de nos mères dans la foi peut encore nous inspirer
mais nous ne sommes pas pour autant dispensés de trouver une route nouvelle et
inédite sur le chemin de l’alliance. Un passage de l’épître aux Hébreux me semble
tellement approprié pour cette parabole : « Ô Dieu, qu’est-ce que l’homme, pour que tu
penses à lui, le fils de l’homme, pour t’occuper de lui? Tu l’as couronné de gloire et
d’honneur; tu as mis sous ses pieds toutes choses. Quand Dieu lui a tout soumis, il n’a
rien exclu de cette soumission. Mais en fait nous ne voyons pas encore que tout lui soit
soumis. Et pourtant Jésus, qui avait été « abaissé un peu au-dessous des anges », nous
le voyons maintenant « couronné de gloire et d’honneur » à cause de sa passion et de sa
mort. Si donc il a fait l’expérience de la mort, c’est, par grâce de Dieu, pour le salut de
tous. » (Héb 2,5-9) Le Fils a passé le premier sur cette route inédite, audacieusement, en
nous ouvrant la route nous menant à la plénitude. Cette route, toujours nouvelle et
toujours à inventer aujourd’hui, c’est la route du don de soi par amour! Endosser la
pratique de Jésus, ses valeurs du Royaume, peut nous conduire à des passages
douloureux. Ces passages douloureux nous conduisent à la gloire du relèvement, à la
gloire de la résurrection. Même si nous conduisons nos vies en étant protégés par le
pare-brise de nos prudences, il nous arrivera sans doute d’avoir à franchir des passages
douloureux. C’est à ce moment-là, qu’en regardant dans le rétroviseur, que nous
apercevrons le visage du sacrifié revêtu de gloire et d’honneur.
Revenons maintenant à ce passage de l’épître : « Puisque le créateur et maître de tout
voulait avoir une multitude de fils et de filles à conduire jusqu'à la gloire, il était normal
qu’il mène à l’accomplissement par des souffrances l’initiateur du salut. Car Jésus, qui
sanctifie, et les hommes qui sont sanctifiés, sont de la même race; et, pour cette raison,
il n’a pas honte de les appeler ses frères, ses sœurs et de dire J’annoncerai ton nom à
mes frères, au milieu de l’assemblée, je te louerai, et encore : Moi je serai plein de
confiance en lui. Me voici, moi et les enfants que Dieu m’as donnés. » (Héb, 5, 10-13) Le
Christ ressemble donc à ce père de la parabole qui voulait apprendre à son fils à
conduire une voiture. Il nous apprend à tenir compte de ce que le rétroviseur nous
rappelle comme chemin parcouru tout en nous incitant à donner la majeure partie de
notre attention à ce qui se passe devant nous, au-delà de ce pare-brise. Il nous rappelle
sans cesse que le chemin ardu de nos vies s’ouvre sur une plénitude de vie à condition
d’accepter de franchir les passages crucifiants, en endossant sa pratique de vie et sa
parole pour recevoir la couronne de gloire et d’honneur.
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