Le mythe du bon sauvage chez Montaigne Les Essais « Des

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Le mythe du bon sauvage chez Montaigne Les Essais « Des
Le mythe du bon sauvage chez Montaigne
Les Essais
« Des Cannibales » / « Des Coches »
Les grands voyages et les récits de ces voyages sont à l'origine du mythe du bon sauvage. Dés la fin du
quinzième siècle, Christophe Colomb, en 1492, Vasco de Gama en 1497, Magellan, en 1519, Jacques
Cartier en 1534, avaient respectivement fait route vers l'Amérique, les Indes, le Canada. Leurs carnets de
voyage nous révèlent l'existence d'autres peuples, d'autres coutumes, d'autres cultures, d'autres religions.
L'Europe prend conscience qu'elle n'est plus seule au monde. Par ailleurs, Nicolas Copernic (1473 - 1543)
démontre que la terre est ronde et qu'elle tourne, puis Galilée (1564-1642) prouve que la terre tourne autour
du soleil. C'en est fini du géocentrisme, c'est la naissance de l'héliocentrisme. Tous ces éléments
révolutionnent les systèmes de pensée, la diversité des hommes et des coutumes voit naître le relativisme.
Le début du mythe du « bon sauvage » est souvent attribué à Michel de Montaigne, même si les fondations
de ce mythe sont bien antérieures. Montaigne aborde le sujet dans les chapitres « Des Cannibales » et « Des
Coches » de ses Essais. De nombreux critiques maintiennent que l’auteur prend position en faveur des
peuples autochtones qui vivent tranquillement dans la nature et contre les Européens qui ne s’intéressent
qu’à s’enrichir et à corrompre des peuples innocents.
Montaigne souligne l’importance de choisir la raison par rapport à la voix commune et introduit le
principe de relativisme culturel ainsi que l’idée de tolérance. Il dit que la culture « civilisée » ne connait pas
toujours la vérité et, peut-être, que les Européens se trompent en appelant les Amérindiens anthropophages
des « barbares.» En comparant les Européens au peuple Tupinamba de Brésil dans « Des Cannibales »,
Montaigne essaie de montrer la « barbarie » de l’action destructrice des Européens. Ses descriptions des
Tupinamba soulignent pour les lecteurs la perfection de leur harmonie avec la nature. Leur mode de vie
surpasse toutes les imaginations de « l’âge d’or » et il compare ce peuple « naturel » et « pur » aux fruits
sauvages qui sont menacés par le goût corrompu des Européens. Selon Montaigne, l’innocence des
Tupinamba est plus pure que l’état social.
Certains critiques questionnent la fiabilité des sources qu’emploie Montaigne en partie à cause de son
exagération. Il est de fait indéniable que Montaigne commente l’Histoire d'un voyage fait en la terre du
Brésil publié par Jean de Léry en 1578 : l’essai « Des Cannibales » semble alors une conversation avec le
texte de Léry et une gageure pour penser hors de l’habitude de pensée. Néanmoins, le chapitre « Des
Coches », qui continue ce premier plaidoyer en s’appuyant sur d’autres sources, montre que la position de
Montaigne est celle de l’étonnement plus que de la leçon. Montaigne questionne, ouvre des dialogues,
souffle des réponses provocatrices. Plusieurs soutiennent que sa représentation du « bon sauvage » dans les
Essais contribue largement à la pensée humaniste en ce qu’elle redéfinit ce qu’est la culture et son rôle pour
définir l’humanité.