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Discours Légion d’Honneur Daniel Cambour
Par Bernadette Pinet Cuoq
29 septembre 2016
VERSION 3 – 29 SEPTEMBRE
Monsieur le Député,
Monsieur le Maire de Saint-Amand Montrond,
Chers Présidents et Chères Présidentes,
Chers partenaires, chers partenaires sociaux, chers amis du métier, chers adhérents,
Chère Olga,
Chère Madame Cambour, Chère Catherine, Chère Valérie,
Très cher Daniel,
Vous me faites l’immense honneur de vous remettre, dans la maison commune, les
insignes de Chevalier de la Légion d’Honneur, cette haute distinction que vous
décerne la République française, et de me confier cette noble charge, sans nul doute,
au regard de la fidèle et sincère amitié qui nous lie ;
Je vous en remercie de tout cœur.
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Vous avez souhaité aussi que ce moment ait lieu à l’Union française ; nous y voyons
toutes et tous le signe de votre attachement, de votre fidélité indéfectible à la grande
famille du Métier et à tous ses amis, réunis ce soir avec émotion, et bonheur, autour
de vous, cher Daniel, entouré de votre épouse Nicole, de vos deux filles, Valérie et
Catherine, et de l’âme d’Isabelle.
Ce soir, j’ai donc un double devoir : celui d’exprimer la gratitude du Métier et de la
République, au regard d’un cheminement professionnel et collectif aussi vertueux
que singulier.
Tout commence en quelque sorte par une tragédie transformée en destinée : avec la
bienveillance de l’archevêque de Constantinople, votre père, Emile Cambour, jeune
orphelin du génocide arménien, se réfugiera en France où il sera élevé par une
famille aimante. C’est ainsi qu’en France, à l’âge de 14 ans, il deviendra apprenti
bijoutier, y fondera sa famille et y créera et développera les sociétés Cambour et
SCAO.
Vous naissez en 1944, dans un petit village de la Sarthe à Mamers, où votre père
avait mis sa famille à l’abri pendant cette période trouble, au sein d’un foyer de
paysans accueillants, pour lesquels vous garderez un profond attachement.
Dès la fin de la guerre, votre famille s’installe à St Gratien dans le Val d’Oise ; vos
années de collège se dérouleront à Agen, chez les frères maristes, car votre père,
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vous estimant sans doute trop turbulent, peut-être trop rebelle, pense utile de vous
mettre en pension .
Puis, vous poursuivez vos études secondaires au lycée d’Enghien où vous rencontrez
Nicole, que vous épouserez en 1967; votre bac en poche, vous vous engagez dans
des études de droit privé à la faculté de Paris Panthéon, où vous passez brillamment
en 1971 un diplôme d’étude supérieur de droit privé.
Du droit et pas de la bijouterie, décidez-vous, alors que votre père vous presse de le
rejoindre dans l’atelier familial ; défi de jeune adulte à l’égard de l’autorité paternelle
ou défiance vis-à-vis d’une postérité que vous n’auriez pas agréée ?
Vous êtes recruté immédiatement comme chef du personnel à la Compagnie
nationale du bas Rhône et du Languedoc, cette société qui a réalisé l’aménagement
de la Grande Motte ; à 28 ans, vous êtes ainsi en charge de la gestion, du
recrutement et de la direction du personnel d’une société de 1000 collaborateurs ;
vous recrutez des ingénieurs internationaux de haut niveau, avec la même attention
que vous gérez les journaliers qui travaillent sur les chantiers, toujours une relation
de proximité et de respect.
Mais l’appel de votre père, entêté à vous confier la direction de son entreprise, se fait
de plus en plus pressant, et vous souscrivez enfin à son injonction prophétique pour
investir un univers prescrit, et bien éloigné du droit, et de la carrière de juriste qui
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s’offrait à vous. Mais vous allez écrire votre propre partition, en transformant cet
héritage assigné en une terre fertile et féconde.
Vous intégrez ainsi la société SCAO, qui fabrique des boites de montre pour les
grandes maisons, telles que LIPP, ROLEX, LONGINES, OMEGA, et chacun sait que
ces noms prestigieux sont liés à une haute qualité de savoir-faire des ouvriers, l’atelier faisait ses
propres outillages de frappe et de détour, ses matrices
estampées, pour livrer des boites parfaites où le mouvement venait se loger d’une
manière irréprochable. Ces multiples et hautes expertises seront ainsi définitivement
inscrites dans le code génétique des ateliers Cambour.
Vous relevez aussitôt deux défis majeurs :
Le premier, celui d’apprendre le Métier : vous le pénétrez à travers l’observation
des ouvriers à la cheville, n’hésitant pas à leur faire part de votre naïveté pour mieux
vous nourrir de la compréhension et du subtile ordonnancement de leurs gestes, de
leurs méthodes, de leurs procédés, parfois imaginés et inventés, pour sublimer
l’osmose du métal et de la pierre ;
Le deuxième, vous retrouvez une entreprise affaiblie par la crise horlogère, passée
de 80 à 30 salariés, la fabrication horlogère se concentrant irrémédiablement sur la
Suisse ;
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Vous recrutez un jeune ingénieur en
métallurgie,
qui ne vient pas du sérail,
Monsieur Doré, et à vous deux, vous décidez d’internaliser et maîtriser tous les
savoir-faire joailliers en intégrant le serti, la fonte à cire perdue, le polissage ; vous
créez votre propre collection, que vous vendrez à l’export et aux grands détaillants
français : des chaines polonaises, milanaises, des bracelets empierrés …. Le succès
est immédiat ; en capitalisant sur le savoir-faire intrinsèque de l’atelier, le savoir-faire
de ses ouvriers, de leur attachement à l’entreprise familiale, vous dressez ainsi les
fondations d’un grand atelier de joaillerie, qui compte aujourd’hui parmi les plus
prestigieux de la filière française.
Puis, dès les années 80, vous anticipez la nouvelle révolution du secteur ; en
effet, vous pressentez la capacité des grandes marques, non seulement à réveiller la
joaillerie française, mais aussi à engendrer une croissance planétaire, par la
puissance de la création, la perfection de la fabrication, et l’essor de la
communication.
Vous décidez de dédier votre atelier à la co-traitance avec les
grandes Maisons et vous contribuez ainsi au développement de bijoux devenus
planetaires ; la chaîne encre, de la Maison Hermès, les charms de la Maison Cartier,
les bagues anneaux de la Maison Chaumet, et les premières collections de la Maison
Dior, dont la collection pirate.
En 2000, alors que vous cherchez un lieu d’accueil pour déployer votre entreprise,
hors les murs de Paris, vous rencontrez Serge Vinçon, Maire de St Amand, ville
emblématique de la bijouterie francaise, par sa symbolique et magnifique pyramide,
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mais aussi par la volonté de son maire d’accueillir et de favoriser l’implantation
d’entreprises de bijouterie ; En 2000, Serge Vinçon inaugurera l’atelier Montdor,
alors
atelier
de
10
personnes ;
L’atelier
Montdor
compte
aujourd’hui
80
collaborateurs et se déploit dans une ville propice au développement des entreprises,
ville incarnée désormais par Thierry Vinçon, hautement investi dans sa mission de
Maire, pour y favoriser l’emploi et le dynamisme économique ;
En 2009, vous quittez les fonctions de Président Directeur Général pour devenir
Président des Conseils de Surveillance des sociétés Cambour et Montdor.
Ce groupe de fabrication compte aujourd’hui 150 personnes, il est titulaire du
prestigieux Label Entreprises du Patrimoine Vivant décerné par le Ministère de
l'Économie, de l'Industrie et du Numérique, et du Label Joaillerie de France attribué
par l’Union française BJOP.
Naturellement, mais rien n’est hasard, vos qualités de chef d’entreprise, social,
visionnaire, vont s’épandre avec évidence sur le collectif. D’ailleurs, vous aviez déjà
en vous le germe du militantisme puisque vous avouez avoir été délégué national au
congrès national …du SNES en 1969, pour porter les revendications du corps
enseignant, alors que vous n’étiez « que » surveillant …
En 2003, la société Cambour adhère à l’Union française.
En 2004, vous devenez Administrateur des Ecoles de la Bijouterie, Joaillerie,
Orfèvrerie, Pierres et Perles, dites « Ecoles BJOP » car vous êtes, depuis de
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nombreuses années, toujours très sollicité par la direction de l’Ecole pour accueillir
les jeunes apprentis et recruter des diplômés.
En 2006, vous créez le Label Joaillerie de France avec vos confrères joailliers et
diamantaires, ce label d’origine et de haute qualité porteur d’excellence de
fabrication.
En 2011, vous devenez Vice-Président des Ecoles BJOP.
La même année, vous êtes élu Administrateur de l’Union Française de la Bijouterie,
Joaillerie, Orfèvrerie, des Pierres et des Perles
En juin 2012, vous êtes élu Président de l’Union Française de la Bijouterie, Joaillerie,
Orfèvrerie, des Pierres et des Perles, à l’unanimité, par vos pairs.
En 2014, vous êtes nommé Administrateur du Comité Francéclat, Comité de
développement économique du secteur de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie et
horlogerie, par arrêté du Ministre de l’Economie, du Redressement productif et du
Numérique du 12 mai 2014 et
vous êtes élu
Vice – Président par le conseil
d’administration ; vous êtes président de la Commission Export ;
Vous êtes aussi fortement engagé dans deux importantes organisations des métiers
d’art.
En 2012, vous êtes nommé Administrateur et élu Trésorier de l’INMA, institut
National des Métiers d’Art, organisation sous tutelle du ministere des finances et du
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ministere de la culture, et élu Administrateur de l’Union Nationale des Métiers d’Art
(UNMA), association de promotion des Métiers d’Art et de Main.
-------------------------------------------Mais qu’on me permette aussi une confidence, et toute notre chaleureuse assemblée
y soucrira unanimememt, Cher Daniel, si je vous dis que ce formidable parcours a
pu et peut être relevé grâce à Nicole, votre épouse, diplômée de l’Ecole des Cadres,
chef d’entreprise et gestionnaire talentueuse, toujours et sans cesse investie à vos
côtés, pour la conduite et le développement de vos sociétés, ainsi que pour vos
engagements au service du Collectif ; Qu’elle en soit, aujourd’hui, profondémment
remerciée ;
********************
J’ai passé volontairement une partie de votre parcours sur vos brillantes études de
philosophie, longues et exigeantes études que vous avez menées alors que vous
étiez chef d’entreprise, mais c’est pour mieux y revenir.
Etudes studieuses et fécondes toujours sous la direction du philosophe Alain Badiou
dont vous dites qu’il est votre maître à penser ; Alain Badiou, dont la renommée est
internationale - titulaire de la chaire métaphysique à normale sup -
est l’un des
plus grands connaisseurs de Platon, et un des derniers défenseurs de la
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métaphysique ; Vous êtes ainsi, pendant de longues années, l’auditeur fidèle de ses
conférences et de ses enseignements, - le soir, après le travail à l’atelier ; ce cursus
universitaire
est
jalonné
de
productions :
ainsi
un
premier
mémoire
de
maitrise intitulé « Philosophie et crise de la rationalité scientifique», puis un mémoire
de Diplôme d’Etudes Approfondies qui s’intitule « A travers Rousseau : fondement de
l’inégalité parmi les hommes ».
Au terme de ce parcours, vous vous lancez dans une thèse de doctorat, sur « la
théorie de l’égalité » -
qui vous prendra 10 années d’écriture et qui viendra
couronner en 1997, ce cheminement incroyable d’un homme épris de philosophie,
patron d’un grand atelier de joaillerie, qui n’hésite pas à se fondre le soir sur les
bancs de l’université, auprès d’un public d’étudiants pour le moins insolites mais tout
aussi attachants - marxistes, révolutionnaires, maoïstes – passionnés comme vous
une pure pensée, au service de l’humanité …
Ainsi, votre personnalité se forge autour de deux mondes que vous liez intimement,
dans votre vie de chef d’entreprise et dans votre vie de syndicaliste, car rien ne vous
anime plus que le prolongement de la pensée incarnée dans le réel ;
Etes-vous un philosophe joaillier ou un joaillier philosophe ? Le joaillier, par essence,
produit le réel, et le philosophe pense la finitude, deux mondes antinomiques. Par
quel chemin singulier avez-vous uni la philosophie et la joaillerie, la pensée de l’infini
à un métier de main et d’esprit soumis aux strictes exigences de l’art, de la matière,
des formes et des volumes?
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D’abord Philosophe
En témoigne votre magnifique contribution à la théorie de l’égalité, thèse de près de
600 pages. A la question « pourquoi la théorie de l’égalité ? » vous répondez que
l’égalité est ce qui vous permet de penser l’infini et par conséquent, de penser les
différences. Pour vous, l’égalité n’est pas a=a, mais a=b ; vous partez du postulat
que l’égalité se décrète et que l’inégalité se pratique ; pour autant, il faut donc
souscrire au régime de l’égalité qui est un différenciant radical. « Car sous son
régime, les différences peuvent se déployer à l’infini » 1.
Théorie que vous appliquez notamment par votre vision de la femme dans la société,
vous dites : « Il n’y a pas de société qui peut se libérer sans l’émancipation de la
femme » ; conviction
intime et philosophique qui vous conduit
au plus grand
respect des challenges relevés par les femmes du Métier, dont je dirai pudiquement
qu’il est plutôt un univers d’hommes - femmes d’engagement que vous reconnaissez
comme vos pairs, respectueux de leurs parcours, souvent singuliers, et de leur
subtile appréhension du Métier.
Je veux parler de Dominique, de Brigitte, de Nathalie, de Marie-Christine, de Victoire
et de bien d’autres, et à titre personnel, je veux simplement souligner le soutien que
vous m’avez apporté lors de mon projet de reprise du Groupe GL.
1
Cambour Daniel, Théorie de l'Egalité, Anrt, Villeneuse d’Ascq, 1997, p.49
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Théorie de l’égalité, aussi appliquée magnifiquement dans notre corporation, où
quelle que soit son activité, bijoutier, orfèvre, créateur, artisan, industriel,
représentant des marques, distributeur...toutes et tous y sont accueillis sous
l’étendard de l’Amitié, car selon vous, le sentiment que fait naitre l’égalité, ne peut
être que l’Amitié, Vous écrivez : « la justice est l’accueil de l’autre au sein d’une
communauté partagée, dont tous les éléments sont unis par des liens d’amitié » ;
Philosophe et joaillier dans l’action, philosophe éminemment et résolument
élève de Platon : la philosophie doit avoir un ancrage dans le réel, à la fois idéaliste
et « matérialiste », au sens philosophique du terme ;
Militant de votre cité, vous vous placez toujours dans la vision des possibles, et
explorez les multiples voies pour accomplir le concret et rencontrer le réel:

En témoigne votre engagement dès les premières heures de la crise
de 2009, où vous avez porté le message de confiance auprés des
Marques pour construire l’avenir, au-delà de la dépression. Vous avez été le
premier acteur de la gestion de cette rupture dont vous saviez, en philosophe,
qu’elle serait créatrice de valeur : se projeter sur un futur cycle radieux, mais
préparer les ateliers à assurer leur déploiement, changer leur taille critique,
investir massivement dans l’élévation des niveaux de compétence des
collaborateurs, s’engager dans le développement durable. In fine, la charte a
scellé des relations confiantes et respectueuses entre donneurs d’ordre et
sous-traitants, non pas sous la contrainte, mais selon les principes de la cité
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grecque : la charte est ainsi le fruit de notre agora, espace politique, où tous
« les acteurs entrent les uns avec les autres dans des rapports de parfaite
réciprocité »2.
Cette Charte vit et prospère, en temoignent les discussions
confiantes et dynamiques conduites aujourd’hui entre les Maisons et les
Ateliers, pour construire le plan filière 2017-2020
Ainsi l’univers est neuf tous les jours, comme le proclame Héraclite.

joaillier et philosophe dans le présent
Les diamants synthétiques arrivent sur le marché, avec une communication
percutante, venant perturber un ordre établi, comme une onde de choc. Ainsi,
fabriqué (parfaitement sur le plan chimique) par la main de l’homme, dans un
laboratoire, le diamant synthétique aurait pour avenir de « remplacer » le diamant
naturel. Annihilant l’extraction dans les mines, il préserverait la nature de toute
intervention humaine. De fait, ce postulat marketing risque d’enfermer non
seulement la discussion, mais ainsi les stratégies de promotion du diamant dans une
confrontation binaire : l’opposition entre culture et nature, opposition qui proclame
que la nature n’aurait de vertu qu’étant vierge de toute intervention humaine. Or,
selon vous, il serait périlleux de se laisser entrainer dans cette antique opposition
entre culture et nature.
2
Op. cit., p.412
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Votre postulat de départ ; l’essence des activités humaines s’origine dans la
nature. Si le diamant synthétique est de culture puisque qu’il est le fruit de la seule
intervention humaine, cela serait occulter le fait que le diamant authentique est à la
fois de nature et de culture.
Car, afin de n’induire aucun risque de confusion pour le consommateur, nous devons
faire la distinction entre deux modes de production, l’un par la nature transcendé par
l’homme, et l’autre par la seule intervention humaine … belle piste de travail pour
nos futurs débats.

philosophe et joailler, édificateur du futur,
Très engagé dans la formation, - membre assidu de nombreux jurys d’examen - vous
êtes extrêmement proche des élèves, de leur devenir, de leur difficulté, de leurs
projets, de leur parcours de vie. Avec et par ce quotidien, vous portez cette ambition
que nos écoles doivent se positionner comme leader mondial de la formation, pour
soutenir et accompagner le développement de la joaillerie française, intimement
rattachée à la culture et à l’histoire. C’est cet héritage et ce rapport à la culture qui
libèrent la création, autorisant ainsi toutes les audaces, exprimées à la fois dans le
bijou fini ainsi que dans les techniques et les savoir-faire qui le font naître. C’est en
cela que la joaillerie française est unique. C’est en cela que nos Ecoles doivent porter
haut et fort l’apprentissage du Métier, dans une autre dimension, avec une ambition
à la hauteur des enjeux de croissance et de déploiement de nos savoir apprendre
uniques.
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Philosophe et joaillier « politique », car vous êtes convaincu que la vie de la cité
« politeia » au sens d’Aristote, c’est-à-dire l’union entre citoyenneté et mode
d'organisation de la cité, est fait de ce qui la compose et de ce qui la pétrit.
Etre politique, c’est la prégnance de la perspective, la faculté de passer d’un
paradigme à l’autre, d’une culture à l’autre, d’un optimisme à l’autre. Vous écrivez:
« L’homme doit être le temps, il doit briser, casser les perspectives, annoncer que
tout est écrit et que tout est possible, le devenir est immaculé, pure innocence »,
Cette vision doit ramener la structure à sa juste place, en la rendant au service de
l’horizon, ; et les sujets que vous portez au sein de l’Union française BJOP ne sont
pas de l’ordre de l’inventaire, mais bien du politique. Ils ne relèvent pas d’une
planification mais bien d’une vision et d’une ambition, ils ne s’excluent en rien les uns
avec les autres, mais bien au contraire, se complètent pour se nourrir mutuellement ;
Pour autant, votre conviction profonde est que
le corps système de toute filière
compétitive est bien la fabrication. Ainsi vous portez des enjeux clairs :
-
La fabrication française : des ateliers renforcés dans leur compétitivité, en
capacité de relever les plus grands challenges de croissance, de technologie et
d’innovation, en cohérence et en confiance avec les grandes Maisons
françaises, qui dominent et portent le marché du luxe mondial ;
-
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-
La création : Paris, capitale de rencontre incontournable des créateurs et des
acteurs internationaux, avec la création de rencontres d’affaires, programmée
en 2017
-
La distribution : des compétiteurs créatifs et performants auprès des
détaillants français, en quête de bijoux de qualité et de création française,
-
La qualité du dialogue social : en faire encore et toujours une voie de progrès
-
La formation : adapter
notre cœur de métier, l’enseignement de la
fabrication, aux exigences du métier : formation plus courte, plus intense, plus
d’atelier et plus de CAO-DAO.
------------------------------------------------------------------------------------------Votre perception des choses est toujours instruite du réel, de la connaissance du
dossier, du questionnement des chiffres, portée par une utopie qui surmonte et
dépasse la gestion des affaires, le désappointement et l’individualisme, pour une
éthique exigeante du bien public et du Métier.
Ces deux parcours singuliers auraient pu être éloignés voire divergents, mais
trouvent une si belle résonnance aujourd’hui dans notre collectif, en regard du
respect de tous vos confrères et consœurs, des adhérents, des partenaires sociaux et
bien sûr de toute l’équipe de l’Union et des Ecoles, toutes et tous réunis autour de
vous ce soir.
Indifférent à la carrière, animé par le souci de faire avancer vos idées, de trouver
des solutions aux enjeux, d’aller du concept au réel, de la culture et de l’histoire à
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l’actualité et à l’avenir, de vous positionner en ignorant, pour mieux apprendre de
l’Autre, ces hautes qualités font de vous à la fois le serviteur remarquable de notre
Métier et de la République.
Puisse votre parcours d’humaniste nous questionner, nous inspirer, nous réconforter
et nous guider dans nos vies quotidiennes, que nous soyons engagés dans le
Collectif ou dans l’Entreprise, dans la formation de notre jeunesse.
Que dans nos moments de doute, de solitude, d’enthousiasme, de rêves et de
projets, nous puissions
interpréter la réalité, nous
débarrasser des croyances,
maintenir ouvertes les lectures du monde, et comprendre l’Autre.
Au fond, dans ce monde complexe et troublé, souvent déroutant, parfois insensé,
puissions-nous rester éveillés, comme vous nous y invitez, pour donner du sens au
bien commun, maintenir les liens dans une agora harmonieuse, car, comme le disait
Héraclite, « les hommes éveillés ont un seul univers, qui est commun, alors
que chacun des dormeurs s’en retourne dans un monde particulier ».
Le temps est venu pour moi de conclure, et de vous remettre cette haute distinction,
qui vient honorer ce parcours à la fois exceptionnel et singulier, distinguer vos
valeurs entrepreneuriales, intimement liées aux réalités humaines,
au service de la joaillerie française,
au service de notre Union française,
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Au service de toutes et de tous dans le sens du progrès,
et reconnaitre ces vertus éclairées, que vous n’avez de cesse de porter, en
saisissante et magnifique cohérence avec celles de notre Métier et de notre
République.
------------------------------------------------------------------------------------------------------
Au nom du Président de la République et en vertu des
pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous faisons
chevalier de la Légion d’honneur.
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