Il n`y a pas de mariage parfait

Transcription

Il n`y a pas de mariage parfait
Il n’y a pas de mariage parfait
Écrit par père Denis Sonet
Samedi, 02 Janvier 2010 12:03
« Je me suis mariée pensant que je connaitrais le vrai bonheur. Ma solitude de jeune fille allait
enfin se terminer. Avec mon mari, un jeune homme charmant pendant nos fiançailles, j’étais
convaincue de réaliser le plus merveilleux couple du monde. J’étais persuadée que nous
partagerions tout : nos aspirations, nos pensées, nos projets, notre foi. Je ne vais pas dire que
je suis tombée de haut, mais quand même, j’ai été vraiment déçue. Il importe de dire aux
jeunes que le mariage n’est pas le paradis. Je n’y ai pas trouvé ce dont j’avais rêvé. »
J’ai tenu à citer cet extrait un peu long des propos d’une épouse car il dépeint assez bien une
réaction fréquente de l’un ou l’autre conjoint après quelques mois ou quelques années de
mariage. Mais je dois dire, pour être objectif, que parfois j’ai pu entendre des paroles plus
réconfortantes : « Je me suis mariée croyant que c’était bien, mais c’est tellement mieux ! » ou
« Je me suis mariée les yeux fermés et je ne le regrette pas… ! ».
Le mariage parfait n’existe pas
Pourtant, il faut bien se rendre à l’évidence : le mariage parfait n’existe pas. Sans être d’accord
avec le proverbe qui dit que « Tous les maris contents tiendraient sur les bords d’une assiette »,
ou que « l’alcôve tue lentement », il faut bien reconnaître que l’amour humain est toujours
quelque peu décevant : il est un promesse non tenue (Paul Claudel).
Le cœur humain ne dit jamais : « Assez ! ». L’amour promet la fusion, mais les conjoints restent
deux, avec le mur de leurs différences. Il promet partage, le dialogue, mais il ya le poids du
quotidien. Il promet la disponibilité totale de l’autre, mais l’autre est un être libre qui appartient
d’abord à lui-même. Il promet la connaissance de l’être aimé, mais l’autre reste un mystère,
dont l’intériorité appartient à Dieu. Il promet le bonheur : il y a la maladie, la chute du désir. Il dit
« toujours » mais il y a, au dessus du couple, l’épée de Damoclès de la mort. L’autre déçoit
inévitablement quelque peu : « Il n’y a pas de bois sans nœud, il n’y a pas de femme sans
défaut » dit un proverbe espagnol ; et il est possible d’ajouter « Il n’y a pas de mari parfait, pas
même celui de la voisine ».
Les raisons de cette insatisfaction sont multiples : le perfectionnisme qui met la barre très
(trop ?) haut, le mythe de la complétude qui pense que l’autre va satisfaire tous nos besoins, le
mythe de la fusion où le couple rêve d’une union merveilleuse et sans conflit, comme le fut la
relation à la mère dans la toute petite enfance, l’idéalisation des amoureux éblouis par la
découverte de l’amour…
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Il n’y a pas de mariage parfait
Écrit par père Denis Sonet
Samedi, 02 Janvier 2010 12:03
En fait, la part considérable de l’imaginaire dans les projets conjugaux explique les désillusions
de la vie de couple. Même si le couple se dit réaliste et lucide, il a toujours la secrète espérance
de réaliser un couple pas comme les autres, uni envers et contre tout pour relever le défi de
l’usure du temps.
Devenir adulte, c’est gérer l’imparfait
Pour gérer cette inévitable insatisfaction, il faut d’abord cesser de s’en étonner. L’imperfection
fait partie de la condition humaine. C’est vrai en tout domaine et l’amour n’échappe pas à cette
finitude de l’être humain. S’accepter limité, et accepter les limites de l’autre, c’est quitter les
rêves de l’adolescence. Devenir adulte, c’est gérer l’imparfait. Comprendre que la vraie
perfection, la vraie grandeur, consiste justement à vivre la grisaille du quotidien : le départ au
travail, le frigo à remplir, la maison à ranger. « On construit un couple avec ses travers, ses
manies, ses reniflements, l’envers et l’endroit du tissu, le joli et le vilain, le propre et le sale » (J
Marroncle).
Il importe ensuite de fuir certaines tentations, comme rêver d’un ailleurs où l’herbe serait plus
verte, ou faire des comparaisons (« Ah, si j’avais un mari comme le tien, je ferais de la
catéchèse »), ou occulter tout le positif de le merveilleux de sa vie, ou même tout simplement
se résigner.
Surtout, il est capital de donner un sens à cette imperfection pour en percevoir le positif et
l’utilité. Elle peut devenir le moteur de la vie, en obligeant à avancer, à s’améliorer. Elle arrache
à la monotonie : « S’il était parfait, je m’ennuierais ! » disait une épouse.
Acceptée, elle permet de rencontrer l’autre tel qu’il est, et non un irréel prince charmant,
sachant que ce qu’il est « vaut pourtant le détour ».
Un cœur insatiable
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Écrit par père Denis Sonet
Samedi, 02 Janvier 2010 12:03
Il reste que l’autre ne pourra jamais satisfaire ce tourment de l’absolu, ce tourment de Dieu qui
est au fond de tous les cœurs : « Ce qu’aucune femme n’était capable fournir, pourquoi me
l’avoir demandé ? » demande l’héroïne du Soulier de satin à celui qu’elle aime.
A trop demander à l’amour, on est inévitablement déçu. Il faut se résoudre à l’évidence : notre
conjoint n’est pas le Christ et ne peut avoir la prétention de combler cette soif d’infini. Pourtant,
l’amour humain avec ses vicissitudes, ses aléas et ses faiblesses, mais aussi avec son
enchantement et ses richesses, est exactement ce qu’il faut à l’être humain pour buriner et
façonner ce cœur insatiable parce que destiné un jour à la rencontre avec l’amour absolu.
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