Chaufferie bois et mini réseau de chaleur pour cinq chalets de

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Chaufferie bois et mini réseau de chaleur pour cinq chalets de
RE ORTAGE
Chaufferie bois
et mini réseau de chaleur
pour cinq chalets de montagne
Une chaufferie bois de 220 kW
alimente en eau chaude,
via un mini réseau de chaleur,
cinq chalets à TignesleLac,
en Savoie.
L'installation, la maintenance...
et le financement de cette
chaufferie ont été réalisés
par la même société.
L
a société ECHM (Eau & Chaleur en
Haute Montagne) a réalisé à Tignesle-Lac, en Savoie, l'installation d'une
chaufferie bois et d'un réseau de
chaleur pour le chauffage et la production d'eau chaude sanitaire de cinq
chalets haut de gamme, d'une surface
totale chauffée de 1756 m2. Mise en service en septembre dernier, la chaufferie
bois, située à une altitude de 2100 mètres,
serait aujourd'hui la plus haute d'Europe,
selon Didier KATGELY, responsable de
l'activité chauffage de l'entreprise de
Bourg-Saint-Maurice, filiale de GENERALE DES EAUX (groupe VEOLIA).
La société de génie climatique réalisait jusque-là la conduite et l'entretien du chauffage de trois de ces chalets. Quand leur
propriétaire a décidé d'en mettre deux
nouveaux en chantier, ECHM a proposé la
mise en place d'une chaufferie collective,
de manière à éviter l'installation de deux
nouvelles chaufferies et récupérer ainsi
de la surface habitable (un point non négligeable quand on connaît le prix élevé
du m2 à Tignes !).
Parmi les chalets existants, deux étaient
jusque-là chauffés au fuel et un à l'élec-
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La chaufferie est installée en sous-sol du chalet Arktic. Le chauffage et la production
d'ECS sont réalisés par une chaudière à granulés de bois. Une chaudière fuel
complète la production si besoin.
tricité. Le maître d'ouvrage, très sensibilisé à l'environnement, souhaitait recourir
à une énergie renouvelable. Le choix s'est
porté assez vite sur le bois-énergie. ECHM
a confié l'avant-projet au bureau d'études
THEME (Thermodynamique, Milieu et
Energie) de Val-Maravel, dans la Drome.
La société ECHM a mené, d'avril à
décembre 2005, les travaux d'installation
en chauffage (chaufferie, réseaux primaire
et secondaire), ventilation et sanitaire.
Ceux-ci ont pu être réalisés sans gêner
l'activité économique (la location des chalets) du maître d'ouvrage.
La chaufferie bois a été implantée en
sous-sol de l'un des chalets nouvellement bâti, baptisé Arktic. Elle comprend
deux chaudières, l'une au bois, utilisée
comme générateur principal, l'autre au
fuel.
La chaudière bois a été dimensionnée
pour répondre à 90 % des besoins. Le BE
a déterminé que le meilleur dimensionnement était de 188 kW. Le fabricant choisi
CHAUD ● FROID ● PLOMBERIE ● N°689 - Avril 2006
(l'Autrichien HERZ) proposait soit un
modèle de 180 kW, soit de 220 kW. La différence de prix étant assez minime, les
dimensions identiques (hauteur totale de
la chaudière de 180 cm dans les deux
cas) et le chauffage par temps très doux
(à partir de 14 °C extérieurs) prévu pour
être assuré par le générateur au fuel,
THEME a préconisé le modèle de
220 kW. D'autant que si le rendement
optimal est atteint à une puissance de
188 kW, il ne baisse que très légèrement
à 220 kW (les calculs théoriques donnent
83,81 à 200 kW, au lieu de 84,57 à
188 kW).
La chaudière a été montée et mise en
service par le fabricant, venu accompagné
de son importateur français (la société
SB THERMIQUE, basée à Dizimieu, en
Isère). Pour faire face au problème particulier de l'altitude, où le pourcentage plus
faible d'oxygène dans l'air peut entraîner
des problèmes de combustion, ECHM a
préconisé l'installation d'un brûleur d'une
Chaufferie bois...
puissance de 15 à 20 % supérieure, qui
permet, en amenant une quantité plus
importante d'air, de compenser le déficit
en oxygène.
Des sécurités coupe-feu ont été prévues.
Un clapet coupe-feu est situé au niveau
de l'admission du combustible. Une sonde
de température anti-retour de combustion
est par ailleurs située sur la vis d'alimentation de la chaudière. La troisième sécurité se compose d'un système Sprinkler
relié à un réservoir d'eau. Une soupape de
décharge thermique tarée à 95 °C permet
de noyer le combustible en cas de combustion importante.
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La chaudière
est alimentée
par des granulés
de bois.
Une cuve fuel pour stocker
les granulés de bois
Le choix a été fait d'alimenter la chaudière
en granulés de bois. Ce combustible a été
préféré au bois déchiqueté. Plusieurs raisons à cela : les granulés demandent un
volume de stockage moins important que
le bois déchiqueté ; leur transport vers la
station, située rappelons-le à 2100 mètres
d'altitude, est également plus facile et
peut se faire par un camion six roues,
alors que le bois déchiqueté demande à
être livré par un semi-remorque. Le PCI
(pouvoir calorifique inférieur) des granulés
de bois est également supérieur à celui du
bois déchiqueté. Seul bémol, le prix du
combustible s'avère plus élevé à l'achat.
Les granulés sont livrés par l'entreprise
SAVOIEPAN, implantée à Albertville. Ils
sont stockés dans une cuve cylindrique
enterrée, initialement prévue pour le fuel.
C'est le maître d'ouvrage qui a proposé
d'adapter une cuve fuel neuve simple
enveloppe au stockage du bois. Cette
solution (une première pour ECHM !) a
permis de réduire le coût du stockage de
moitié par rapport à un silo en béton classique, qui aurait nécessité des travaux de
génie civil plus importants. La cuve a été
placée sur un châssis en béton et arrimée par trois sangles à des crochets en fer.
D'une capacité de 30 m3, la
cuve a été aménagée avec
un déversoir et une vis de
désilage transversale en bas
de cuve. Un tuyau d'aération a été placé en partie
haute de la cuve. Il permet
d'évacuer la poussière formée lors de la livraison des
granulés.
La cuve constitue une réserve
de combustible d'environ
trois semaines à un mois. Une
ventilation basse, avec un
clapet coupe-feu au niveau
de l'admission du combustible, permet également d'éliminer, si besoin, la condensation. Aucune trace d'humidité n'a été constatée dans la
cuve et cette ventilation n'a
donc jusqu'à présent pas été
utilisée.
La combustion des granulés
de bois produit chaque mois
environ 120 kg de cendres. Celles-ci sont
valorisées par le propriétaire, qui les utilise comme engrais pour son jardin.
Un réseau de chaleur
de 92 mètres alimente
les chalets
Une chaudière fuel de 300 kW
(GT 408 de DE DIETRICH) est
couplée à la chaudière bois,
pour compléter si nécessaire les
besoins en chauffage couverts
prioritairement par la chaudière
bois, en période de grand froid
notamment (jusqu'à - 30 °C en
Les granulés de bois sont
stockés dans une cuve
cylindrique enterrée, initialement
prévue pour le fuel.
hiver). Elle assure également le relais en
cas de maintenance (une révision annuelle
prévue, nécessitant une quinzaine de jours
d'arrêt) ou de pannes de la chaudière
bois.
Entre la mise en service de l'installation et
début février dernier, la chaudière a fonctionné 66 heures, ce qui représente un peu
plus de 5 % du temps de fonctionnement
de la chaudière bois (1000 heures).
Le réseau de chaleur partant de la chaufferie alimente directement la sous-station du chalet Arktic. Vers l'Est, le réseau
dessert les chalets Atlas (162 m2, 15 lits)
et Yosemite (631 m2, 16 lits), qui vient
d'être construit. Vers l'Ouest, les chalets
Grand Ski (178 m2, 10 lits) et Les Arolles
(336 m2), où réside le propriétaire. Le
réseau de chaleur est composé de tubes
ECOFLEX en polybutène pré-isolés présentant d'excellentes qualités thermiques
(perte de 1 °C par km à une température
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Chaufferie bois...
Fonctionnement de la chaudière bois
La chaudière bois HERZ Biomatic se compose de différents modules : corps de
chauffe, foyer et module d'alimentation.
Le corps de chauffe comprend des échangeurs constitués de tubes verticaux en acier
spécial et d'un système de turbulateurs, qui permettent le ralentissement et la turbulence des fumées. Ces derniers permettent également le nettoyage des échangeurs en mode automatique.
La partie interne de la chaudière est composée d'un pot de combustion muni de
multiples orifices destinés à l'injection de l'air au niveau des braises.
Le foyer en fonte réfractaire supporte des températures très élevées. Sa conception double paroi permet une injection d'air sur deux niveaux, ce qui permet d'obtenir un préchauffage de l'air secondaire, un refroidissement du foyer et une réduction
de l'inertie.
Le décendrage du pot de combustion s'effectue par un disque rotatif actionné par
un moteur électrique, dont la fréquence et la durée de fonctionnement sont paramétrées en fonction de la consommation et de la qualité du combustible.
Le décendrage du foyer est réalisé par deux vis sans fin. Sa capacité est dimensionnée pour obtenir une autonomie de trois à quatre semaines.
L'allumage de la chaudière est automatique. Il est assuré par une ventilation d'air
chaud au niveau du pot à combustion et produite par un allumeur type décapeur
thermique. La durée de son fonctionnement est pilotée par la sonde de température des fumées, du foyer et la sonde lambda.
La régulation de combustion est assistée par sonde lambda et intervient sur la quantité de combustible, et d'air primaire ou secondaire.
Les apports en air primaire sont assurés par un ventilateur d'extraction à puissance
variable, les apports en air secondaire par deux ventilateurs.
L'extraction des fumées est réalisée par un ventilateur à puissance variable fonctionnant en rapport avec la dépression mesurée dans le foyer. Il est placé dans
le système de dépoussiérage multi-cyclonique.
extérieure de 0 °C en régime 80/65 °C). Sa
longueur est de 92 mètres.
Compte tenu du petit nombre de points
distribués, il a été proposé un système de
distribution avec échangeurs. Deux raisons à cela : la diversité des occupants
(locataires saisonniers de courte durée) et
la présence de radiateurs à purgeurs dans
un chalet (les autres chalets sont tous
chauffés par des planchers chauffants
REHAU ou ROTH ; ils sont également
équipés de radiateurs sèche-serviettes
dans les salles de bains). Un système de
distribution avec bouteilles de mélange
était également envisageable mais il
nécessitait d'équiper les radiateurs avec
des systèmes de purges à clés pour éviter les “fuites d’eau accidentelles” liées à
des manipulations “non autorisées” des
purgeurs à volants excitants.
Production d'ECS centralisée
avec distribution
par réseau bouclé
Les besoins en eau chaude sanitaire sont
très importants, du fait du grand nombre
de salles de bains (quatre salles de bains
par appartement en moyenne), avec un
pic de consommation en fin d'après-midi
en hiver, qui marque la fin de la journée de
ski. Ils ont été estimés par le BE THEME
sur la base moyenne d'une puissance
nécessaire de 2,2 kW par appartement.
Deux solutions ont été étudiées :
● la production dans chacune des sousstations avec distribution unique au niveau
du réseau primaire,
● la production centralisée en chaufferie
avec distribution par réseau ECS bouclé.
C'est cette seconde option qui a été retenue. La production d'eau chaude est réalisée dans la sous-station Arktic. Elle est
stockée dans un ballon PACIFIC de 2000
litres d'où elle est distribuée vers les autres
chalets en suivant le réseau de chauffage. Dans chaque chalet, un réchauffeur
Le réseau de chaleur est composé
de tubes en polybutène
pré-isolés.
L'extraction des fumées est réalisée par
un ventilateur à puissance variable, placé dans
le système de dépoussiérage multi-cyclonique.
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CHAUD ● FROID ● PLOMBERIE ● N°689 - Avril 2006
L'eau chaude produite
par les chaudières bois et fuel
transite par une bouteille de mélange.
Chaufferie bois...
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de boucle permet de maintenir la température de l'eau.
Un comptage individualisé a été installé au
niveau de chaque sous-station.
Le chalet Arktic comprend une piscine
intérieure et deux petits bassins extérieurs, qui sont également chauffés par la
chaudière bois, via deux échangeurs en
titane, l'un pour la piscine, l'autre pour
les bassins.
La pièce où se situe la piscine couverte est
déshumidifiée par une centrale d'air, installée par ECHM. Signalons par ailleurs
que la ventilation des chalets est assurée
par une ventilation simple flux, avec
extraction dans les sanitaires.
Installateur, exploitant...
et banquier !
L'installation est pilotée par une gestion
technique centralisée TREND équipée
d'un automate programmable qui offre la
possibilité d'un suivi à distance grâce à
une connexion par modem. L'exploitant,
de son bureau de Tignes, dispose ainsi
d'un accès direct au site, permettant
notamment le réglage des paramètres
des sous-stations (températures de départ
et de retour des circuits, modes de fonctionnement des appareils,...).
L'investissement pour le chauffage et le
réseau de chaleur s'est élevé à environ
200 000 euros. Cette opération a été réalisée avec l'aide financière de l'ADEME et
de la Région. Son financement est quelque peu singulier. L'exploitant s'est ainsi
porté tiers investisseur : il finance les travaux d'installation sur la durée du contrat
d'exploitation (15 ans), le maître d'ouvrage paye quant à lui un kilowattheure qui
intègre le prix de l'énergie, l'offre de services et le remboursement progressif de
l'investissement.
Le maître d'ouvrage se déclare aujourd'hui
très satisfait de la fiabilité de la chaufferie bois. Il souhaite désormais mettre en
place une information sur le chauffage
au bois à destination des locataires,
notamment pour sensibiliser les jeunes.
Avec pour souhait que cette installation
puisse servir de vitrine pour le bois-énergie.
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