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Colloque RECHERCHE 5 1 0 2 e r b o t c o 4 1 t e 13 n Les Salons de l’Aveyro e 2 1 s ri a P c ra b 17, rue de l’Au Colloque RECHERCHE 13 et 14 octobre 2015 Les Salons de l’Aveyron - 17, rue de l’Aubrac - Paris 12e La présente brochure regroupe, sous forme de fiches, les résultats des projets présentés dans le cadre du colloque des 13 et 14 octobre 2015 Les résultats, sous forme d’articles d’une dizaine de pages, sont accessibles dans la revue en ligne « Innovations agronomiques » http://www.inra.fr/ciag/revue Remerciements à tous les auteurs ainsi qu’aux coordinateurs de session : Isabelle Baldi (ISPED-Univ. Bordeaux), Christian Huyghe (INRA), Philippe Nicot (INRA), Antoine Messéan (INRA), Pierre Ricci (INRA, Président du Groupe d’Experts Recherche), Benoît Réal (ARVALIS-Institut du végétal), Bernadette Ruelle (IRSTEA), Jérôme Thibierge (Invivo AGRINOVEX) et Nathalie Verjux (ARVALIS-Institut du végétal) Crédits photos © (couverture) : Ministère chargé de l’agriculture : Xavier Remongin, Cheick Saidou, Pascal Xicluna Comité d’organisation : Laure Dreux (INRA), Gérard Gautier-Hamon (MAAF-DGER) Colloque financé sur des crédits issus de la redevance pour pollutions diffuses affectés à l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques pour appuyer les actions du plan Écophyto Sommaire Exposition aux pesticides agricoles et effets sur la santé humaine 1 AGRICOH 3 EVEXPE 7 Le biocontrôle, des perspectives de recherche prometteuses 11 TUTAPI 13 USAGE 15 La place des nouvelles technologies pour réduire l’utilisation des intrants phytosanitaires (TIC, capteurs, agroéquipements…) 17 MICODetect 19 ECOSPRAYVITI 23 La génétique végétale, un levier à long terme pour la réussite de l’ambition Écophyto 27 Cépages de demain 29 SUNFLO 33 Comment changer de système de manière progressive ? 37 ECOVITI 39 MIC-MAC Design 41 Conseillers demain 45 Impacts environnementaux : de l’évaluation à l’action 47 PLAGE 2 49 Chaîne Pressions-Impacts 53 Échanges sur les stratégies de recherches au niveau européen : quelle valeur ajoutée à une meilleure coordination des programmes ? 57 Projets de recherche, issus de différents appels à projets de recherche (CASDAR, MEDDE, ANR, ANSES…), contribuant à satisfaire les objectifs de réduction de l’usage des intrants phytosanitaires du plan Écophyto 59 4P 61 AGRICAN 63 BASIS3P 67 DEFILEG 69 Échaudure des pommes 73 EcoFusa 77 ECOPROTECTGRAIN 81 FERTIPRO 85 INFLOWEB 89 LANDSCAPHID 91 MEPIMEX 95 OAD SERRE 99 TABLE-RES 101 VASCUlég 105 VIRAPHID 109 Glossaire 113 Exposition aux pesticides agricoles et effets sur la santé humaine Cette session abordera les questions relatives aux expositions des personnes qui manipulent les pesticides, qui entrent en contact avec des végétaux ou des surfaces traitées ou qui évoluent dans des milieux contenant ces substances. Les molécules pesticides sont soumises à une réglementation spécifique pour leur mise sur le marché qui évalue notamment les risques pour la santé des travailleurs, a priori. Pourtant plusieurs travaux d’expertise collective récents ont montré qu’un nombre conséquent de travaux scientifiques mettent aujourd’hui en évidence des effets sur la santé des populations exposées. Cette session présentera les avancées de cohortes professionnelles conçues pour étudier ces risques de santé, en particulier dans le domaine du cancer. C’est notamment l’objectif de la cohorte française AGRICAN, ainsi que du consortium international AGRICOH. L’importance de la mesure des expositions aux pesticides pour l’amélioration des connaissances de santé sera mise en lumière, et les marges de progrès possibles seront illustrées par l’évocation de nouveaux outils : matrices cultures/expositions, techniques analytiques dans des matrices biologiques diverses (analyses dans les cheveux…). Le plan Écophyto a ainsi déjà permis d’encourager des études visant à documenter les niveaux d’exposition et leurs déterminants. Il doit permettre encore à l’avenir de soutenir des initiatives visant à estimer de quelle manière les stratégies de réduction des usages sont cohérentes avec la réduction des expositions des personnes. De telles recherches nécessitent un décloisonnement des disciplines et un travail pluridisciplinaire, notamment entre les sciences de la santé et celles de l’agronomie. SOMMAIRE AGRICOH 3 EVEXPE 7 Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 1 Financement Ecophyto (redevance pour pollutions diffuses) - ANSES EST 2011 Chap VIII: Exposition aux pesticides et santé humaine AGRICOH : Exposition aux pesticides et risque de cancers lymphatiques hématopoïétiques au sein du consortium d’études AGRICOH : analyse combinée Maria Leon-Roux Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Lebailly Pierre (étude AGRICAN), Université de Caen Basse-Normandie • Baldi Isabelle (étude AGRICAN), Université Bordeaux Segalen (AGRICAN, France) • Nordby Karl-Christian, (Cancer in the Nowegian Agricultural Population, Norway), National Institute of Occupational Health, Oslo • Beane Freeman Laura, (Agricultural Health Study, USA); , National Cancer Institute, USA • Kromhout Hans, (IRAS (Institute for Risk Assessment Sciences), The Netherlands) • Leon-Roux Maria, Schüz, Joachim, (CIRC (Centre International de la Recherche sur le Cancer), Lyon) Mots clefs Pesticides, agriculteurs, lymphome, leucémie, cancer, cohorte Ce projet a évalué l’association entre l’exposition à 14 groupes de pesticides et 33 agents actifs et l’apparition de tumeurs myéloïdes et lymphoïdes chez 316 270 agriculteurs inscrits dans les trois études de cohorte du consortium AGRICOH : l’étude « Agriculture française et Cancer » (AGRICAN), Cancer in the Norwegian Agricultural Population (CNAP) et l’Agricultural Health Study Etats-Unis (AHS). L’analyse des données n’est pas encore terminée et les résultats épidémiologiques sont donc préliminaires. L’exposition à quelques insecticides et herbicides est associée à un risque accru de cancers lymphatiques hématopoïétiques au vu de nos analyses préliminaires. Contexte et objectifs Chez l'homme, l'exposition répétée aux pesticides, en particulier chez les populations agricoles, a été associée à l’apparition de cancer chez les adultes et les enfants. Ce projet a évalué si l'exposition aux pesticides, déterminée en utilisant des matrices de cultures d'exposition, est associée à un risque accru de cancers lymphatiques hématopoïétiques pour une population de 316 270 agriculteurs à partir de trois études de cohortes en France, Norvège et aux Etats-Unis faisant partie du consortium AGRICOH. Les objectifs initiaux du projet sont : 1) de développer des matrices cultures-expositions et des matrices expositions aux animaux pour évaluer l'exposition aux pesticides chez les agriculteurs, 2) de rassembler les données des trois études de cohorte afin de déterminer les estimations combinées de risque de cancer en association avec l'exposition aux pesticides en utilisant les méthodes de méta-analyse, 3) de calculer une tendance dose-réponse pour les différents types de pesticides. Méthodes Cohortes Nous avons inclus les agriculteurs de la cohorte AGRICAN (n = 127 282), de la cohorte CNAP (n = 137 821) et de la cohorte AHS (n = 51 167). É valuation des expositions Dans la cohorte AHS, deux types d'informations avaient été récupérés auprès des agriculteurs : les pesticides utilisés, mais aussi les pesticides utilisés précédemment et le nombre d'années de leurs utilisations. Les informations recueillies au moment de l'enregistrement des agriculteurs dans la cohorte, et pendant les cinq ans de l’étude, portaient sur les pesticides utilisés pour chacune des cultures déclarées ainsi que sur les pesticides utilisés sur les cultures produites l’année précédente. Les participants d’AGRICAN ont fourni des données rétrospectives sur la croissance des cultures, indiqué s’ils utilisaient des pesticides sur les cultures (oui/non) et sur les dates de début/fin de ces activités. Les participants de la cohorte CNAP ont donné des informations sur la croissance des cultures l’année précédant la date du recensement obligatoire. Ce recensement été réalisé tous les dix ans de 1969 à 1989. Les informations sur les sommes dépensées pour les pesticides (1969) et l'équipement de pulvérisation de pesticides à la ferme (1979) ont été considérées comme des indicateurs de l'utilisation des pesticides. Les données autodéclarées sur l’utilisation des pesticides (1 des 3 cohortes) et les matrices culture-exposition, propres à chaque pays (2 des 3 cohortes) ont été utilisées pour estimer l'exposition des substances actives et les ... groupes de pesticides pour la période 1950-2009. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 3 AGRICOH : Exposition aux pesticides et risque de cancers lymphatiques hématopoïétiques au sein du consortium d’études AGRICOH: analyse combinée ... Enquête sur les pesticides La sélection de substances actives (33) et des groupes chimiques (14) a été basée sur une utilisation potentielle dans plus d'un pays, sur la fréquence d'utilisation et sur les attentes a priori de leurs associations avec des tumeurs malignes lympho-hématopoïétiques. Suivi de cancer La première incidence d'une tumeur maligne myéloïde ou lymphoïde au sein des membres de la cohorte sans cancer (sauf pour le cancer cutané non mélanome) était le centre d'intérêt principal dans cette étude. Le suivi de cancer a eu lieu entre le 1er janvier 1993 et le 31 décembre 2011, avec un début exact et une fin variant entre les cohortes. Analyses Les modèles de Cox sur les risques proportionnels ont été utilisés pour calculer les estimations d’association des coefficients de risque (HR) et 95% des intervalles de confiance (IC) pour 18 résultats de cancer avec des substances actives individuelles et avec des groupes chimiques. La catégorie de référence dans toutes les analyses contenait des participants classés comme jamais exposés au produit chimique considéré. Des modèles ont été exécutés individuellement pour chaque cohorte et ajustés pour les différents ensembles de variables. Les estimations obtenues ont été rassemblées en utilisant des effets aléatoires de méta-analyses. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto L’étude comporte 237 317 hommes et 78 953 femmes agriculteurs. Alors que 44% des participants de la cohorte AGRICAN sont des femmes, il n’en n’est pas de même pour les cohortes AHS et CNAP où le pourcentage de femmes est respectivement de 3% et 16%. Au début du suivi, les membres de l’AHS sont plus jeunes, avec un âge médian de 46 ans, tandis que les participants d’AGRICAN sont plus âgés, avec un âge moyen de 67 ans. La valeur correspondante pour les agriculteurs norvégiens est de 51 ans. Les cultures les plus communément produites parmi les participants de la cohorte sont les prairies (AGRICAN, 70%), les pommes de terre (CNAP, 31%) et le maïs (AHS, 74%). Pour AHS, 99% des participants sont considérés comme ayant été exposé aux pesticides, 68% pour AGRICAN et 63% pour CNAP. L'écrasante majorité des agriculteurs dans la cohorte AHS (92%) déclare avoir utilisé des insecticides 4 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron organophosphorés alors que l’on estime que 64% et 42% des agriculteurs dans AGRICAN et CNAP ont potentiellement déjà été exposés à ces insecticides, avec une durée médiane de l'exposition à ces produits chimiques de 16, 26 et 24 ans respectivement. La durée d’exposition a été fortement mise en corrélation entre les groupes chimiques (médiane r, AGRICAN = 0,80, CNAP = 0,77) et les substances actives (médiane r, AGRICAN = 0,71, CNAP = 0,55) dans les deux cohortes en utilisant les matrices culture-exposition pour déduire l’affectation de l'exposition aux pesticides. Une faible corrélation a été enregistrée pour AHS (médiane r = 0,08 pour la corrélation entre les groupes chimiques et 0,09 pour la corrélation avec les substances actives. Les néoplasmes lymphoïdes (n = 2 545) ont été plus fréquemment diagnostiqués que les tumeurs myéloïdes (n = 737) sur chacune des trois cohortes. Le syndrome myélodysplasique (SMD) est la tumeur maligne myéloïde la plus fréquemment diagnostiquée chez les agriculteurs d’AGRICAN et représente environ 47% de tous les cancers myéloïdes de cette cohorte par opposition à 18% pour CNAP et 16% pour AHS. Alors que le LMA (Acute Myeloid Leukemia ) prévaut pour les cohortes CNAP (39,6%) et AHS (41,7%), ce type de cancer représente moins d'un quart de toutes les tumeurs myéloïdes de la cohorte française (22,4%). L'apparition de néoplasmes myéloprolifératifs (NMP) est plus homogène au sein des trois cohortes et représente respectivement 29,7%, 27,9% et 24% de tous les cancers myéloïdes pour AGRICAN, CNAP et AHS. Le lymphome hodgkinien (LH) est tout aussi rare dans les trois cohortes, et représente seulement 3,3%, 3,6% et 3,6% de toutes les tumeurs malignes lymphoïdes dans AGRICAN, CNAP et AHS, respectivement. Un total de 2 430 lymphomes non hodgkiniens (LNH) a été diagnostiqué au cours du suivi. Parmi les cas de LNH à cellule B, le myélome multiple est de manière générale le sous-type le plus fréquent et représente respectivement 22,6%, 23,1%, et 18,3% de toutes les tumeurs lymphoïdes pour AGRICAN, CNAP et AHS. La leucémie lymphoïde chronique (LLC) représente respectivement 20,7%, 17,8% et 23,4% de tous les néoplasmes lymphoïdes pour AGRICAN, CNAP et AHS. Le risque de cancers lymphatiques hématopoïétiques combinés (LHC), comme indiqué par les ratios méta-risque statistiquement significatifs, montre un risque accru suite à une exposition aux trois insecticides (deux OP et un carbamate) et à trois herbicides (un phénylurée, un acide aromatique et un acide phénoxy) alors qu'aucun lien avec des fongicides ou avec des composés de l'arsenic n’a été détecté. L’orientation des estimations méta-risque et les substances actives associées à un risque varient au sein des deux groupes de cancer principalement étudiés : les cancers myéloïdes et lymphoïdes. n AGRICOH : Exposition aux pesticides et risque de cancers lymphatiques hématopoïétiques au sein du consortium d’études AGRICOH: analyse combinée Conclusions et perspectives L’évaluation de l’exposition aux pesticides pour une étude épidémiologique groupée et utilisant des données de plusieurs pays est difficile en raison des différences sur les données d’exposition recueillies, des types de cultures produites et des types de pesticides qui sont autorisés et utilisés dans chaque pays. Le calcul des probabilités d’exposition pourrait aider à affiner l’approche actuelle de l’évaluation de l’exposition et permettre la modélisation révisée du risque de cancer. Il s’agit d’une tâche très importante à remplir compte tenu de la forte incidence observée de cancers lymphatiques hématopoïétiques observés dans les cohortes des agriculteurs. Références bibliographiques > Maartje Brouwer, Leah Schinasi, Laura E. Beane Freeman, Isabelle Baldi, Pierre Lebailly, Gilles Ferro, Karl-Christian Nordby, Joachim Schüz, Maria E. Leon, Hans Kromhout, 2015. Assessment of occupational exposure to pesticides in a pooled analysis of agricultural cohorts within the AGRICOH consortium. Sumitted to Occupational and Environmental Medicine on 16 September 2015. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 5 Financement Écophyto (redevances pour pollutions diffuses), ANSES EST 2010 Chap VIII : Exposition aux pesticides et santé humaine EvExPe : Evaluation de l’Exposition chronique aux Pesticides : performances et optimisation des dosages sur urine et sur cheveux Brice M.R. Appenzeller Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Appenzeller Brice M.R., Human Biomonitoring Research Unit, Luxembourg Institute of Health • Zaros Cécile, INED, Paris Mots clefs Biomonitoring, pesticides, exposition, matrices biologiques Le projet EvExPe visait à améliorer les outils de diagnostic de l’exposition aux pesticides que sont les dosages sur urines et cheveux, afin de permettre une utilisation optimale de ces biomarqueurs, notamment dans le cadre d’études épidémiologiques focalisées sur les effets sur la santé de ces expositions. Le développement de nouvelles méthodes analytiques multi-résidus particulièrement sensibles a permis l’étude comparative des deux matrices et l’évaluation de l’apport respectif des urines et des cheveux quant à l’évaluation de l’exposition aux pesticides. La mise en évidence, sur un modèle animal, de la relation de proportionnalité entre la concentration en pesticides dans les poils des animaux et le niveau d’exposition a permis de démontrer l’intérêt de cette matrice dans un contexte de biomonitoring. Enfin, l’application des méthodes développées à l’analyse de prélèvements biologiques humains a permis pour la première fois de documenter d’une manière objective l’exposition des individus par deux matrices parallèles, en soulignant également le caractère multiple de l’exposition. Contexte et objectifs Méthodes Les expositions professionnelles et environnementales aux résidus pesticides sont responsables de différentes affections incluant cancers, stérilité, retard de développement, neuropathies ou encore baisse des fonctions immunitaires. Les études épidémiologiques permettant de mettre en évidence les relations entre les expositions et le développement des différents troubles nécessitent l’utilisation de marqueurs d’exposition comme les dosages sur matrices biologiques. Parmi elles, les urines, classiquement utilisées, et les cheveux, considérés comme une matrice d’avenir, sont les prélèvements biologiques les plus intéressants. Le projet EvExPe visait ainsi à améliorer les outils de diagnostic de l’exposition aux pesticides que sont les dosages de résidus de pesticides dans les urines et les cheveux. Le premier objectif concernait l’identification des possibilités respectives de chacune des deux matrices pour le dosage des différents résidus. Ensuite, l’optimisation du traitement pré-analytique et des stratégies de prélèvement des échantillons devait permettre d’éviter la plupart des biais représentant les limitations relatives à l’utilisation de ces outils. Le dernier aspect de développement visait à établir une relation de type « effet-dose » permettant d’évaluer quantitativement, à l’aide d’un modèle animal, le niveau d’exposition des individus à partir des résultats d’analyse des prélèvements biologiques. Enfin, l’application des approches développées à des échantillons biologiques humains avait pour objectif de documenter l’exposition des individus à partir de ces deux types de prélèvements. La première étape consistait au développement de méthodes de dosage multi-résidus de pesticides, incluant à la fois des composés parents et leurs métabolites/produits de dégradation dans les matrices urines et cheveux. Cette étape visait ainsi à optimiser le traitement pré-analytique des échantillons biologiques avant l’analyse des extraits obtenus. L’approche analytique développée visait à développer des méthodes aussi similaires que possible pour les deux matrices malgré la nature différente des échantillons (solide vs liquide), afin de réaliser ultérieurement une comparaison objective des performances de ces deux matrices en termes de biomonitoring. Une autre étape du développement analytique concernait un aspect spécifique à la matrice cheveux : la mise au point d’un protocole de décontamination des échantillons. Ce traitement pré-analytique, limitant les biais d’interprétation liés au dépôt éventuel de pesticides sur le cheveu, permet une interprétation des résultats basée uniquement sur les composés incorporés à la matrice lors de processus biologiques, et donc représentatifs de la dose interne des individus. Le projet EvExPe visait également à établir une relation de proportionnalité entre le niveau d’exposition aux pesticides des individus et la concentration de ces molécules ou de leurs métabolites dans les cheveux. Des animaux (rats) ont été exposés par gavage à un cocktail de 20 pesticides selon un schéma représentatif d’une exposition chronique (3 fois par semaine pendant une durée de 90 jours). Les poils des animaux collectés à J90 ont été analysés à l’aide des méthodes développées dans ce projet. ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 7 EvExPe : Evaluation de l’Exposition chronique aux Pesticides : performances et optimisation des dosages sur urine et sur cheveux ... La comparaison des résultats de dosages sur les deux matrices, intégrant notamment l’influence de la vitesse d’élimination urinaire des composés, a été réalisée en appliquant les méthodes analytiques développées dans ce projet à l’analyse de prélèvements biologiques provenant de 31 volontaires humains (15 femmes et 16 hommes). Un prélèvement de cheveux a également été collecté au même moment chez chacun des participants afin d’effectuer la comparaison entre les deux matrices. En dernier lieu, les approches développées dans le cadre du projet ont été appliquées à l’analyse de couples d’échantillons urines/cheveux provenant d’une cohorte de femmes enceintes. Les échantillons biologiques (cheveux et urines) analysés ici, fournis par l’InVS et l’INED, provenaient de l’étude pilote réalisée dans le cadre de l’étude ELFE (Etude Longitudinale Française depuis l’Enfance). Les prélèvements biologiques ont été collectés dans différentes régions Françaises (Seine-Saint-Denis, Ardèche, Isère, Loire et Savoie). Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Le travail réalisé a permis de mener à bien l’objectif du développement analytique d’une méthode de dosage multi-résidus de pesticides dans des prélèvements de cheveux et d’urines. Une partie du travail de développements analytique, portant sur la comparaison de différentes procédures de purification d’extraits obtenus à partir de prélèvement de cheveux a permis d’identifier les stratégies à adopter pour les différentes familles de composés recherchés [1]. Le développement parallèle des méthodes d’analyse des pesticides dans les urines et cheveux a permis de fournir une approche permettant une comparaison objective et non biaisée des performances des deux matrices quant à l’évaluation de l’exposition [2]. La mise au point d’une procédure de décontamination des prélèvements de cheveux avant leur analyse a permis de pallier l’absence de procédure standardisée dans ce domaine [3]. Cette avancée devrait ainsi permettre une utilisation optimale de cette matrice pour documenter l’exposition chronique aux polluants en évitant des biais d’interprétation des résultats. L’expérimentation animale a mis en évidence la relation de proportionnalité existant entre le niveau d’exposition des animaux et les concentrations retrouvées dans leurs poils pour la plupart des molécules étudiées (exemple en Figure 1). 8 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Figure 1. Mise en évidence de la relation de proportionnalité entre le niveau d’exposition des rats et la concentration en Fipronil dans leurs poils après 90 jours d’exposition. Les résultats obtenus suggérent la possibilité de déterminer les niveaux moyens d’exposition des individus à partir de la concentration en polluants détectée dans leurs cheveux. La publication de ces résultats devrait également représenter une référence significative dans le domaine de l’analyse de cheveux, en particulier, mais également du biomonitoring, en général [4]. L’étude de toxico-cinétique des pesticides dans les urines a montré la forte variabilité existant au niveau des concentrations urinaires des différents composés (pesticides parents et métabolites) et de souligner les incertitudes quant à l’utilisation de cette matrice. Cette étude a établi qu’un prélèvement unique d’urine ne suffisait a priori pas à rendre compte de l’exposition des sujets. La comparaison avec les résultats obtenus après l’analyse des prélèvements de cheveux auprès des mêmes volontaires a également montré la complémentarité de ces deux matrices quant à la nature des composés détectables dans chacune d’elles [5]. Les résultats obtenus à partir de l’analyse des échantillons d’urines et de cheveux collectés auprès des femmes enceintes ont pu mettre en évidence l’exposition multiple des sujets. Le résultat principal concerne le nombre significativement plus élevé de composés détectés dans les prélèvements de cheveux par rapport aux urines. Cette information représente une avancée dans le domaine de la biosurveillance et devrait permettre de soutenir l’utilisation de la matrice cheveux pour l’évaluation de l’exposition des sujets dans de futures études épidémiologiques. n EvExPe : Evaluation de l’Exposition chronique aux Pesticides : performances et optimisation des dosages sur urine et sur cheveux Conclusions et perspectives Les résultats produits dans le cadre du projet EvExPe ont permis la mise au point de procédures pouvant être standardisées pour le prélèvement et le traitement des échantillons biologiques (urines et cheveux) destinés à l’évaluation de l’exposition humaine aux pesticides. En identifiant les différents composés (pesticides parents ou métabolites) détectables dans les matrices urine et cheveux, ces travaux devraient permettre d’orienter les démarches vers la stratégie la plus adéquate pour l’évaluation des expositions aux différents résidus ou familles de résidus de pesticides. L’analyse des échantillons biologiques humains a d’autre part mis en évidence l’exposition cumulée à un grand nombre de pesticides différents des individus, fournissant ainsi une information réaliste et pertinente pour de futures études de toxicité intégrant l’aspect synergétique potentiel des co-expositions. A terme, les avancées obtenues ici devraient fournir des outils plus performants que ceux existants actuellement pour l’évaluation de l’exposition humaine. Ces outils pourront avantageusement être utilisés dans le cadre d’études épidémiologiques visant à relier les expositions aux troubles de la santé. Références bibliographiques > [1] Duca R.D., Salquebre G., Hardy E., Appenzeller B.M.R., 2014. Comparison of solid phase- and liquid/liquid-extraction for the purification of hair extract prior to multi-class pesticides analysis. J Chromatogr B. 955-956:98-107. > [2] Hardy E.M., Duca R.D., Salquèbre G., Appenzeller B.M.R.,2014. Multi-residue analysis of organic pollutants in hair and urine for matrices comparison. Forensic Sci Int. 249C:6-19. > [3] Duca R.D., Hardy E., Salquèbre G., Appenzeller B.M.R., 2014. Hair decontamination procedure prior to multi-class pesticide analysis. Drug Testing and Analysis.6:55-66. > [4] Appenzeller B.M.R., Hardy E., Grova N., Chata C., Salquèbre G., Briand O., et al., in preparation. 2015. Hair analysis for the biomonitoring of pesticide exposure – comparison with blood and urine in an animal model. > [5] Appenzeller B.M.R., Hardy E., Legrand R., Leite S., Sauvageot N., Duca R.D., 2015. Comparative assessment of human exposure to pesticides by urine and hair analysis. 20th meeting of the Society of Hair Testing, May 3-6, Sao Paulo, Brazil. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 9 Le biocontrôle, des perspectives de recherche prometteuses Le développement et la mobilisation de solutions de biocontrôle (micro- et macro-organismes vivants, médiateurs chimiques, substances naturelles) représentent un enjeu fondamental pour le plan Écophyto car elles constituent un levier clé pour réduire la dépendance des systèmes de cultures vis-à-vis des produits phytosanitaires chimiques. Cette session aborde la place de la recherche sur le biocontrôle. Elle illustrera le succès de démarches de co-construction entre recherche publique, recherche privée et développement. Elle soulignera le fort potentiel d’innovation des acteurs français et internationaux dans ce domaine face à des attentes et des besoins de recherche importants. Enfin, une mise en débat par certains de ces acteurs ouvrira une réflexion sur l’enjeu particulier constitué par l’intégration de solutions de biocontrôle dans des stratégies de protection intégrée et sur les recherches à mener pour favoriser leur développement. SOMMAIRE TUTAPI 13 USAGE 15 Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 11 Financement Casdar, Innovation et partenariat 2010 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants TutaPI : Mise en place d’une protection biologique contre Tuta absoluta, ravageur invasif de la tomate Elisabeth Tabone Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Tabone Elisabeth, INRA PACA – Unité Entomologie et Forêt Méditerranéenne • Ginez Anthony, APREL, Saint-Rémy de Provence • Giraud Marion, Société InVivo AgroSolutions, Valbonne • Lambionc Jérôme, GRAB, Avignon • Lefèvre Amélie, INRA - Domaine Expérimental Alénya-Roussillon • Terrentroy Anne, Chambre d’Agriculture des Bouches-du-Rhône • Trottin Yannie, CTIFL, Bellegarde • Rey Frédéric, ITAB, Montpellier Mots clefs Biocontrôle, Tuta absoluta, tomate, culture, partenariat, synergie Depuis 2006, Tuta absoluta (Lepidoptera ; Gelechiidae), un petit lépidoptère originaire d’Amérique du Sud, nouveau ravageur de la tomate à forte capacité de dissémination, envahit l’Europe. En France, depuis 2008, la chenille de ce papillon engendre des dégâts considérables sur tous les organes aériens de la plante. Les pertes de rendement des cultures peuvent atteindre 100% si aucun moyen de protection adapté n’est utilisé. C’est dans ce contexte qu’a été développé le projet TutaPI afin d’améliorer les connaissances, trouver de nouvelles solutions biologiques encore plus efficaces, tout en réduisant le coût de la protection. Ce projet a démarré début 2011 et s’est terminé en juin 2014. Dans ce cadre, différentes stratégies de protection, telles que l’utilisation d’insectes auxiliaires, des traitements et le piégeage, ont été développées. La combinaison de ces moyens s’est révélée indispensable et les auxiliaires ont joué un rôle essentiel. Ces actions ont été développées grâce à la synergie de partenaires de la recherche, de l’expérimentation, du développement et de l’agrofourniture. Contexte et objectifs Tuta absoluta, aussi appelé mineuse de la tomate, petit lépidoptère originaire d’Amérique du Sud, est un ravageur de la tomate. Des éléments de stratégie pour contrôler ses invasions en culture sous abri, en protection biologique intégrée (PBI) ou en agriculture biologique (AB), ont été rédigés dans le cadre d’un projet nommé TutaPI piloté par l’ITAB et l’INRA, et publiés dans un cahier technique. Ce projet a eu pour objectif de concevoir, évaluer et optimiser des stratégies de protection biologiques efficaces contre T. absoluta. Un ensemble d’actions coordonnées ont été mises en place pour disposer d’auxiliaires efficaces et de stratégies de protection intégrant les auxiliaires déjà disponibles et ceux étudiés par la recherche. Le projet s’est déroulé autour de trois grands objectifs stratégiques (Figure 1). ... Figure 1. Les trois objectifs du projet TutaPI Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 13 TutaPI : Mise en place d’une protection biologique contre Tuta absoluta, ravageur invasif de la tomate Méthodes Afin de mener à bien la recherche de nouveaux parasitoïdes oophages indigènes, les partenaires du projet TutaPi ont coopéré, chacun dans son domaine de spécialisation (Figure 2). Grâce à cette coopération, 49 modalités ont pu être expérimentées au cours des essais ; c’est-à-dire 3 combinaisons (serres chauffées en PBI, abris non chauffés en PBI, abris non chauffés en AB) au sein de 5 sites différents (les combinaisons n’ont pu être testées sur tous les sites). En laboratoire, des screenings avec différentes souches de trichogrammes, dont plusieurs indigènes, ont été réalisés en présence du ravageur T. absoluta sur tomate. Au total, 115 souches de trichogrammes (en provenance de la collection INRA Antibes et de cultures de tomate) ont été testées contre la mineuse de la tomate, en tubes dans un premier temps puis en mésocosmes (milieu naturel reconstitué en laboratoire). Les résultats obtenus ont été comparés avec ceux issus d’essais à partir de Trichogramma achaeae, la souche déjà commercialisée. Pour se rapprocher de la réalité de terrain, des essais ont finalement été effectués en serres expérimentales. Parallèlement, des tentatives avec des parasitoïdes larvaires ont été effectuées ainsi qu’une association, sous serres expérimentales et en production, entre un prédateur généraliste (Macrolophus pygmaeus) et un parasitoïde spécialiste (T. achaeae). Les interactions entre un prédateur (M. pygmaeus) et deux ravageurs (T. absoluta et des aleurodes) ont aussi été étudiées sur tomate. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Les travaux ont confirmé l’intérêt de combiner les méthodes de prophylaxie et de protection ainsi que le rôle essentiel des apports d’insectes auxiliaires. Les résultats les plus fiables Figure 2. - Illustration de la coopération entre partenaires de TutaPI pour la recherche de nouveaux parasitoïdes ont été obtenus avec des lâchers de trichogrammes en complément d’introductions de M. pygmaeus, notamment en cas de forte pression de T. absoluta ou de baisse des populations de mirides prédatrices. Dans certains cas, des auxiliaires indigènes peuvent aussi contribuer à la réussite de la protection contre le ravageur. Les collectes de parasitoïdes oophages sur différents sites de production ont permis d’obtenir plusieurs souches de trichogrammes. Trois souches indigènes ont donné, en serres expérimentales, une efficacité voisine de celle de T. achaeae. L’intérêt de l’association Mirides-Trichogrammes a été confirmé. En vue de faire des lâchers plus fiables, une étude des interactions entre le prédateur Macroplophus et deux ravageurs (aleurodes et T. absoluta) sur tomate a été conduite. Les résultats ont montré que si les deux ravageurs sont présents, on a un meilleur contrôle biologique vis-à-vis des deux ravageurs, car la présence d’aleurodes favorise l’installation du prédateur. n Conclusions et perspectives Les méthodes de protection les plus fiables contre Tuta absoluta sont celles qui s’appuient sur des apports combinés de Macrolophus pygmaeus et de trichogrammes. Ces méthodes permettent d’éviter ou au moins de limiter les traitements. Un cahier technique* a été rédigé à destination des producteurs afin de les aider à choisir la stratégie qui convient le mieux à leur situation, dans les conditions de leur exploitation. La collaboration et la complémentarité des différents partenaires de ce projet ont permis d’améliorer les connaissances sur le ravageur Tuta absoluta et sur les insectes auxiliaires. Cette démarche pluri-partenariale qui a fait ses preuves pourra s’appliquer à d’autres projets, pour faire face à l’arrivée de nouveaux bioagresseurs. Références bibliographiques > * Rey F., Carrière J., Ginez A., Giraud M., Goillon C., Goude M., Lambion J., Lefèvre A., Séguret J., Tabone E., Terrentroy A., TrottinCaudal Y., 2014. Stratégies de protection des cultures de tomates sous abri contre Tuta absoluta Protection Biologique Intégrée, Agriculture Biologique. Cahier technique TUTAPI, Paris, ITAB, 16p. 14 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Financement Écophyto (redevance pollutions diffuses), Casdar, Innovation et partenariat 2011 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants USAGE : Utilisation de micro-doses de sucres en protection des plantes Ingrid Arnault [email protected] Responsables des équipes impliquées • Bardin Marc, INRA Centre PACA, Unité de pathologie végétale, Montfavet • Clerc Henri, Invenio, Livrade-sur-Lot • Davy Maxime, Sileban, Gatteville-le-Phare • Ondet Sophie, Chovelon Marc, GRAB, Avignon • Furet Arnaud, Adabio, Montmelian • Kasprick Anne Cécile, CA d’Indre-et-Loire, Chambray-les-Tours • Marchand Patrice, ITAB, Paris • Romet Lionel, Groupe CAPL, Avignon • Roy Grégory, Station expérimentale Légume Centre Actions, Tour-en-Sologne • Auger Jacques, IRBI UMR CNRS 7261, Tours • Mançois Aurélie, Lycée Viticole, Amboise • Derridj Sylvie, retraitée, INRA Versailles Mots clefs Sucres, expérimentation au champ et en conditions contrôlées, molécules « priming », vigne, pommier, application foliaire Il est reconnu que les sucres des plantes (glucose, fructose, saccharose, raffinose …) jouent un rôle fondamental dans la préparation de la plante à résister aux différents stress. On parle d’un nouveau concept de Sweet Immunity ou défense liée aux sucres. Le projet USAGE (2012-2014) a proposé de tester des applications foliaires d’infra-doses de sucres sur les plantes pour renforcer et accélérer le processus de Sweet Immunity sur différents couples plante-bioagresseur. Le projet a regroupé 43 séries d’essais (6 en arboriculture, 12 en viticulture, 25 en maraîchage), dont 38 en conditions de productions. L’objectif générique était d’associer des sucres avec des doses réduites d’intrants tout en conservant la qualité de production agronomique. Les résultats, malgré les aléas d’expérimentation, ont permis d’observer un intérêt des applications de solutions de saccharose et de fructose en stratégies de biocontrôle, lors de pressions parasitaires faibles à modérées et sur des cultures pérennes (vigne, arboriculture). Ainsi, les dégâts de carpocapse ont été réduits de 55% en arboriculture biologique avec le saccharose et le fructose. En vigne biologique, le fructose a permis de réduire les doses de cuivre contre le mildiou. Les résultats ont contribué à l’approbation du saccharose en substance de base (règlement d’exécution UE n° 916/2014 de la commission du 24 août 2014). Contexte et objectifs Face aux injonctions politiques actuelles (Écophyto), les substances de base telles que les sucres (fructose, glucose, saccharose) stimulant l’immunité de la plante et les défenses des plantes sont une voie nouvellement explorée et prometteuse. Des études en laboratoire ont montré des réductions notables des dégâts de carpocapse des pommes et des poires avec des pulvérisations foliaires d’infra-doses de saccharose. Ce projet souhaite tester cette méthode de biocontrôle à base des sucres dans les itinéraires culturaux des arboriculteurs et étudier son efficacité en viticulture et en maraîchage en situations agronomiques très critiques vis-à-vis de certains bioagresseurs. Pour cela, des expérimentations coordonnées intra et inter-filières impliquant des chercheurs de l’INRA et des expérimentateurs (Invenio, Sileban, LCA, lycée viticole d’Amboise, Adabio, GRAB) ont été mises en place en France de 2012 à 2014. Méthodes Des essais randomisés au champ sur 3 filières agricoles (arboriculture, viticulture, maraîchage) ont constitué la majeure partie du projet. L’intérêt agronomique recherché était de valider les applications foliaires d’infra-doses de sucres associées à des stratégies de protections classiques de l’agriculture biologique et conventionnelle, afin d’augmenter les efficacités existantes ou de réduire les doses ... d’intrants, lorsque cela était possible. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 15 USAGE : Utilisation de micro-doses de sucres en protection des plantes ... Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto En verger biologique, les pulvérisations de saccharose à 100 ppm ont confirmé leur efficacité contre le carpocapse. Les applications foliaires de fructose à 100 ppm ont également pu réduire les dégâts de carpocapse de 55%. En protection fruitière intégrée, le fructose 100 ppm, ajouté au programme chimique de référence, a permis d’améliorer la protection de 35% par rapport au programme chimique de référence. Il s’agit néanmoins de résultats préliminaires à stabiliser par d’autres essais. Concernant les méthodes de lutte en vigne biologique contre le mildiou, le fructose 100 ppm a amélioré l’efficacité de l’hydroxyde de cuivre appliqué à 1/4 de dose, sur grappes et feuilles. Cette efficacité est similaire à la référence cuivre en cas de pression faible du pathogène. En cas de fortes attaques, la référence cuivre offre toujours la meilleure protection (Figure 1). Par ailleurs, aucun effet non intentionnel sur les acariens auxiliaires dans la vigne n’a été observé. En revanche, des suspicions sur un éventuel effet favorisant du fructose sur le black rot doivent être élucidées. En vignoble raisonné, on constate la même tendance, à savoir la possibilité d’utiliser du fructose à 100 ppm avec des doses réduites de fongicides de synthèse dans la lutte contre le mildiou, en cas de pression modérée du pathogène (Arnault et al., 2013). Lorsque la pression du pathogène est élevée, aucun résultat positif n’est observé. Que ce soit en protection fruitière intégrée ou en vigne raisonnée, les résultats indiquent des tendances de protection des stratégies de biocontrôle associant le fructose au programme chimique de référence. L’ensemble des tests réalisés sur les cultures maraîchères n’a pas permis de dégager de pistes encourageantes (Bardin et al., 2014). Néanmoins, le fructose et le saccharose à 10 ou 100 ppm ont montré ponctuellement des effets protecteurs significatifs (pyrale et oïdium du melon, thrips du poireau) mais insuffisants lors de fortes pressions parasitaires. Les résultats obtenus en protection des cultures et notamment en arboriculture justifiaient une approbation communautaire. Le saccharose a été approuvé en août 2014 (règlement d’exécution CE n°916/2014) et le fructose est proposé au vote pour le comité permanent Végétaux, Animaux, Alimentation et Nutrition animale du 13 juillet 2015. Des dossiers extensions d’usages sont d’ores et déjà en cours de montage. n Figure 1. Intensité d’attaque du mildiou sur grappes (en %) en fonction des différentes modalités (vignoble biologique de Savoie, cépage Gamay, 1er aout 2014). Les valeurs avec les différentes lettres sont significativement différentes (Anova, test post hoc NewmanKeuls). * Les stratégies cuivre conjuguent l’action de l’hydroxyde et du sulfate de cuivre avec des doses variables en fonction du stade et de la pression du mildiou, pour un total d’environ 2 kg/ha/an (soit deux fois plus que la référence). Conclusions et perspectives Dans le cas de cultures pérennes (vigne et arboriculture), le fructose et le saccharose à 100 ppm sont les deux seuls sucres ayant montré un effet significatif en situation de pression parasitaire faible à modérée. Dans ces situations, il est alors possible de diminuer les doses d’intrants (cuivre ou programme chimique classique). Les efforts d’expérimentation et de recherche mécanistique seront poursuivis dans le projet SWEET lauréat à l’appel à projets Casdar 2015. Il s’agira de valider les stratégies de biocontrôle en viticulture, arboriculture et d’explorer les efficacités des sucres contre d’autres bioagresseurs (tordeuses de la vigne, ravageurs du maïs…). Références bibliographiques > Arnault I., Furet A., Chovelon M., Gomez C., Derridj S., 2013. Reducing the amounts of copper in vineyards against Plasmopara viticola by the use of a low dose of D-fructose. IOBC-WPRS Bulletin : Biological Control of Fungal and Bacterial Plant Pathogens, Vol. 86, p 237. > Bardin M., Dantony L., Duffaud M., Neu L., Pascal M., Troulet C., Nicot P., 2014. Combining various biological methods to control powdery mildew of tomato, XIII Meeting of the IOBC Working Group Biological control of fungal and bacterial plant pathogens. Biocontrol of Plant Diseases: “From the field to the laboratory and back again”, 15-18 juin 2014 (Uppsala, Sweden). 16 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron La place des nouvelles technologies pour réduire l’utilisation des intrants phytosanitaires (tic, capteurs, agroéquipements...) La session est centrée sur la mobilisation des nouvelles technologies (agroéquipements, capteurs, TIC, robots…) pour répondre aux objectifs du plan Écophyto. Elle montrera comment l’interconnexion de tous les éléments participant à la décision d’un traitement et à l’application des produits phytosanitaires peut être une source importante de réduction du nombre de traitements et des volumes de produit utilisés. Avec le développement de nouvelles techniques dans le domaine de l’agriculture comme la télédétection (satellite, aérienne ou drone), la robotique, de nouveaux principes de mesure plus performants, l’internet des objets, etc., il est intéressant de faire un point sur les perspectives offertes pour une meilleure utilisation des produits phytosanitaires. Ces technologies sont susceptibles d’apporter des solutions intéressantes à différents niveaux : la détection précoce des attaques de bioagresseurs, la décision d’effectuer ou non un traitement, l’optimisation de l’opération de pulvérisation, l’application localisée des produits. D’autre part, les dernières générations d’équipements agricoles, mais aussi les systèmes centralisés de gestion de l’information, s’accompagnent de la constitution de bases de données absolument considérables. Ces données concernent l’utilisation des équipements agricoles, l’état global des végétations, mais aussi les suivis de contamination et d’attaques par les bioagresseurs. Comment mieux utiliser cette information pour délivrer aux opérateurs des clés pour mieux gérer la protection des cultures ? Comment exploiter ces masses considérables d’information pour produire des connaissances nouvelles ? La session apportera des réponses à ces questions. SOMMAIRE MICODetect 19 ECOSPRAYVITI 23 Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 17 Financement Casdar, Recherche finalisée et innovation 2010 Chap I : Surveillance biologique du territoire MiCODetect, vers le cahier des charges d’un Capteur Optique de Détection présymptomatique de Septoria tritici pour la lutte intégrée contre la septoriose du blé David Gouache Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Saindrenan Patrick, Institut de Biologie des Plantes, CNRS, Paris • Ayral Jean-Luc, Force-A, Orsay Mots clefs Blé, Septoria tritici, diagnostic précoce, fluorescence, métabolomique La septoriose est la première maladie contributrice aux traitements fongicides sur blé. Le raisonnement de son traitement au plus proche des besoins réels peut apporter des économies significatives de produit sans perte de performance technique. Pour cela, la quantification du champignon pendant sa phase asymptomatique d’incubation est le point clef. La production de métabolites secondaires par la plante de blé, en réaction à l’infection, pourrait servir à cette fin via la détection par un capteur ad hoc du signal fluorescent causé par ces métabolites. Un protocole d’analyse métabolomique et transcriptomique de l’interaction blé-septoriose a identifié plusieurs voies métaboliques induites. Trois métabolites de la voie du tryptophane sont produits lors de l’infection et émettent une fluorescence UV-UV. Au champ, la production de ces métabolites s’avère prédictive du développement ultérieur des symptômes et modifie le spectre UV-UV des feuilles de blé. Il reste encore des expérimentations à effectuer pour établir un modèle prédictif et robuste. Contexte et objectifs Méthodes La septoriose, provoquée par Zymoseptoria tritici est actuellement la maladie la plus dommageable sur le blé en France. Les traitements fongicides sur blé représentant aujourd’hui l’un des seuls moyens de lutte efficace, la septoriose est la plus grande contributrice aux traitements fongicides sur blé. Le contexte du plan Écophyto implique la généralisation de stratégies de protection « intégrées » des cultures. En effet, les producteurs disposent d’outils d’aide à la décision basés sur des prédictions agroclimatiques du développement de la plante hôte et de l’épidémie qui peuvent contribuer à une réduction de l’emploi des traitements. Leur plus-value réside dans la caractérisation de la phase présymptomatique, particulièrement longue (2 à 4 semaines), les produits étant plus efficaces lorsqu’ils sont appliqués durant cette phase. Ce type de modèle possède une erreur intrinsèque limitant sa précision à la parcelle. A contrario, une quantification par biologie moléculaire (PCR quantitative, PCRq) permet de prédire le développement ultérieur de la maladie, mais elle est difficile à généraliser de manière opérationnelle. Le projet MiCODetect a eu pour but de déterminer les éléments de cahier des charges d’un outil de détection. Il s’est agi principalement d’identifier une signature présymptomatique détectable par fluorescence de l’infection. Identification de métabolites fluorescents produits en phase précoce d’infection par la septoriose lors d’infections en conditions contrôlées a. Inoculation au pinceau de jeunes plantes de blé (variété Alixan) avec Zymoseptoria tritici (souche IPO323) et avec une solution témoin, en serre et chambre de culture, b. Extraction de l’ensemble des métabolites solubles et analyse par chromatographie liquide haute performance couplée à une spectrométrie de fluorescence dans l’ultraviolet (LC-Fluo), c. Confirmation des composés fluorescents induits par spectrométrie de masse, d. Analyse de données transcriptomiques (variété Cadenza – souche IPO90006) obtenues via une collaboration avec l’UMR 1290 INRA BIOGER, e. Validation par RT-PCRq de l’induction des enzymes de la voie métabolique du tryptophane. Validation au champ de la production de métabolites fluorescents et de leur caractère prédictif de l’évolution des symptômes a. Mise en place d’une expérimentation au champ sur le site de Villiers-le-bâcle (91) croisant différents niveaux de maladie (traité, non-traité, non-traité+inoculé), ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 19 MiCODetect, vers le cahier des charges d’un Capteur Optique de Détection présymptomatique de Septoria tritici pour la lutte intégrée contre la septoriose du blé ... b. Observations de symptômes, quantification du champignon par PCRq, dosage de la sérotonine, de la tryptamine et du tryptophane, c. Mise en relation de l’évolution des symptômes avec la quantité de pathogène et la production de métabolites Evaluation du potentiel d’une mesure fluorimétrique pour identifier une infection par la septoriose et prédire l’évolution des symptômes (Figure 1) a. Sur la même expérimentation au champ, b. Prise de spectres de fluorescence UV-UV de feuilles spécifiquement marquées comme ayant été inoculées, c. Analyse des spectres pour discriminer les feuilles inoculées et saines et pour tenter de prédire l’évolution des symptômes. Figure 2 : Quantification HPLC de 3 métabolites fluorescents à plusieurs stades (dai = jours après inoculation) de feuilles de blé infectées par Zymoseptoria tritici, en comparaison à des feuilles témoins B C Figure 1 : A : photographie de l’ensemble du dispositif de mesure Spectrofluorimètre Cary Eclipse modifié. B : exemple de test sur plantule en pot. C: détail des 12 zones de mesure sur la feuille de blé Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Identification de métabolites fluorescents Nous avons identifié que la voie du tryptophane était significativement induite lors d’une infection par Zymoseptoria tritici. Trois composés, sérotonine, tryptamine et tryptophane, sont ainsi produits en quantité plus importante lors d’une infection sur feuilles témoins. Ces trois composés émettent dans une gamme de longueur d’onde centrée sur 315-330nm après excitation à 275nm (Figure 2). Nous concluons que le spectre de fluorescence UV-UV des feuilles de blé a des chances d’être modifié en fonction du niveau d’attaque par la septoriose. Un capteur capable de détecter et de quantifier cette modification pourrait ainsi permettre une détection présymptomatique de la maladie. Validation au champ Nos résultats ont montré que la voie métabolique ciblée est également bien induite au champ et conduisait à une augmentation de la teneur des feuilles en sérotonine, trypta- 20 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron mine et tryptophane. La quantification des métabolites apparaît comme un aussi bon prédicteur du développement des symptômes que la PCRq (Figure 3). Nous en déduisons qu’un capteur capable de quantifier les métabolites de la voie du tryptophane offrirait effectivement la possibilité d’anticiper sur le développement ultérieur de la maladie et donc d’offrir un outil pertinent pour la lutte contre cette maladie. Metabo2 Metabo3 600 400 Temps (en somme de température base 0°C) entre la date de prélèvement et la date d'atteinte de 10% de symptômes A 200 0 −200 0.0e+00 4.0e+07 8.0e+07 2000000 qPCR.log 600 3500000 Metabo1 5000000 ● ● ● 400 2013−05−21 2013−05−29 2013−06−04 2013−06−11 2013−06−14 2013−06−18 2013−06−21 2013−06−24 2013−06−28 2013−07−02 2013−07−05 2013−07−08 2013−07−12 ● ● 200 ● ●● ● 0 −200 0 1 2 3 0e+00 2e+07 4e+07 Variable explicative Figure 3 : Temps (en somme de température base 0°C) entre la date de prélèvement et la date d’atteinte de 10% de symptômes, expliqué par la quantité d’ADN fongique mesurée ou la quantité de chacun des 3 métabolites (Métabo1, 2, et 3 : respectivement sérotonine, tryptophane, tryptamine). Les symboles représentent les différentes dates de mesure. MiCODetect, vers le cahier des charges d’un Capteur Optique de Détection présymptomatique de Septoria tritici pour la lutte intégrée contre la septoriose du blé Evaluation du potentiel d’une mesure fluorimétrique Nos résultats ont montré que les spectres UV-UV de feuilles inoculées par la septoriose montrent bien des différences avec les spectres produits par des feuilles non-inoculées. On observe en particulier une modification de la forme du spectre dans la zone d’émission de fluorescence des trois composés. Nos données n’ont pas suffi à établir avec précision le nombre nécessaire et suffisant de longueurs d’onde à mesurer pour bâtir une équation de prédiction des symptômes à partir des spectres. Ceci requiert en effet une acquisition de données dans un plus grand nombre d’expérimentations. n Conclusions et perspectives Il est nécessaire de poursuivre les travaux sur un nombre de situations plus important pour préciser les longueurs d’onde d’émission les plus prédictives et établir le degré de spécificité et de robustesse de ce signal fluorescent. Acquérir un nombre de spectres suffisant pour établir de telles équations constitue la prochaine étape dans l’établissement du cahier des charges d’un futur capteur. Les perspectives d’application du capteur sont nombreuses. Le capteur pourrait être utilisé conjointement à des outils d’aide à la décision et, en apportant une mesure directe au champ, permettre d’améliorer leur précision. On peut aussi imaginer la mise en réseau de capteurs dans un cadre comme le Bulletin de Santé du Végétal. Dans ce cas, le capteur apporterait une plus-value d’anticipation par rapport aux observations visuelles de symptômes. Enfin, une application en modulation intraparcellaire pourrait offrir des perspectives de réduction d’utilisation de produit répondant ainsi aux attentes du Plan Écophyto. Références bibliographiques > Chaouch S., Pasquet J.C., Bellvert F., Lebrun M.H., Dufresne M., Seng J.M., Gouache D., Saindrenan P., 2015. Induction of tryptophanderived and hydroxycinnamic acid amide secondary metabolites and alteration of the primary metabolism during infection of wheat (Triticum aestivum) by Zymoseptoria tritici. Plant Biology Scandinavia. 9-13 August 2015. Stockholm, Sweden. > Gouache D., Chaouch S., Florin L., Masdoumier G., Barrilliet G, Garcia C, Sailliot E, Deswarte JC, Valade R, Dufresne M, Seng JM., Ayral JL., Saindrenan P. 2015 (soumis). La quantification de métabolites secondaires fluorescents lors de l’interaction blé-Zymoseptoria tritici ouvre la perspective d’un capteur dédié pour une lutte de précision. Conférence Internationale sur les Maladies des Plantes (CIMA - AFPP). 7-9 décembre 2015. Tours,France. > Chaouch S. et al. : article scientifique en préparation. > Gouache D. et al. : article en préparation dans Perspectives Agricoles. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 21 Financement Écophyto (redevance pollutions diffuses), 2011 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants ECOSPRAYVITI : Développement des écotechnologies de la pulvérisation en viticulture Bernadette Ruelle Mail : [email protected] Sébastien Codis Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Codis Sébastien, IFV, Montpellier • Ruelle Bernadette, IRSTEA/UMR ITAP (Informatique Technologies, Analyse environnementale, Procédés agricoles) Montpellier Mots clefs Ecotechnologies, réduction des intrants phytosanitaires, pulvérisation, viticulture durable Le parc de pulvérisateurs existant et la majorité des matériels neufs vendus actuellement sont en décalage avec les enjeux agro-environnementaux et sociétaux (réduction de l’utilisation des intrants phytosanitaires, limitation des risques environnementaux et de l’exposition des opérateurs et des riverains). Le parc se caractérise par une grande diversité à la fois en termes de technologies (pneumatique, jet porté, jet projeté) mais également de configurations de machines (voûte, face par face, aéroconvecteur, …). En l’absence d’indicateurs chiffrés des performances des matériels, il est difficile pour l’ensemble des acteurs de la filière (constructeurs, conseillers agricoles) d’orienter l’évolution du parc vers des machines plus performantes et de proposer aux professionnels des pratiques de pulvérisation limitant le recours aux intrants phytosanitaires. Or, des solutions technologiques permettant de réduire significativement l’utilisation des produits phytosanitaires et de préserver l’environnement existent. Elles mériteraient d’être promues auprès des professionnels. A cette fin, des méthodes d’évaluation des technologies sont nécessaires. Les travaux conduits dans le cadre du projet ECOSPRAYVITI ont permis entre 2011 et 2013 le développement d’un nouvel outil de caractérisation des performances agronomiques et environnementales des pulvérisateurs. L’outil, baptisé EvaSprayViti, est une vigne artificielle modulable qui permet une mesure objective et répétable de la qualité de pulvérisation et le test en conditions contrôlées des performances des différents matériels et pratiques de pulvérisation. Contexte et objectifs La protection de la vigne contre les maladies et ravageurs est indispensable pour une production de vins de qualité. Elle repose aujourd’hui majoritairement sur l’utilisation de produits phytosanitaires (PP). La recherche d’alternatives et la réduction du recours à ces produits est un axe de recherche prioritaire pour la filière vitivinicole. En viticulture conventionnelle, mais aussi biologique, l’enjeu est donc d’assurer une bonne protection de la vigne - tout en diminuant les doses appliquées et le nombre de traitements. L’optimisation de la pulvérisation apparaît comme un moyen concret pour répondre à court terme à cette problématique. En effet, la capacité du matériel à localiser le maximum de bouillie pulvérisée sur la cible et ce, de la manière la plus homogène possible, est l’un des points clefs pour augmenter l’efficacité de la protection et réduire les quantités de PP employées à chaque intervention. En ce qui concerne les risques environnementaux, la conception de l’appareil est tout aussi déterminante, puisqu’elle conditionne en association avec les pratiques, les pertes de produits dans les différents compartiments de l’environnement (sol et air). Le projet ECOSPRAYVITI a consisté à développer de nouvelles méthodologies pour apprécier les performances agronomiques et environnementales des systèmes de pulvérisation. Il s’agit à long terme de contribuer à l’amélioration du parc de pulvérisateurs viticoles en service. Il s’agit également à plus court terme de définir quelles sont les pratiques de pulvérisation qui permettent de limiter le recours aux intrants phytosanitaires tout en maintenant l’efficacité de la protection. Méthodes L’outil EvaSprayViti, développé dans le cadre de ce projet, est une vigne artificielle modulable qui permet de tester en conditions contrôlées les performances des différents matériels et pratiques de pulvérisation. Ce banc d'essais reproduit 4 rangs de vigne de 10 m de long chacun. Trois configurations différentes du banc correspondant à trois stades de développement de la vigne (début, milieu et pleine végétation) permettent de tester les pulvérisateurs selon l'évolution de la végétation. Des vidéos de présentation de l’outil sont accessibles sur Internet (mot clé « EvaSprayViti »). ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 23 ECOSPRAYVITI : Développement des écotechnologies de la pulvérisation en viticulture ... Au cours de ce projet, les évaluations des matériels ont porté essentiellement sur la capacité du matériel à maximiser les dépôts sur le végétal et à limiter les pertes dans l’environnement. Les pulvérisateurs sont évalués selon 3 critères quantitatifs permettant de discriminer les appareils sur leur aptitude à la réduction des doses employées : 1. la quantité moyenne de produit déposé par unité de surface sur la végétation à protéger pour un gramme de matière active pulvérisée à l’hectare cadastral. Il s’agit d’une donnée normalisée que nous appelons « dose effective ». On l’exprime en ng/dm2 pour un gramme appliqué par hectare ; 2. la mesure de l’homogénéité du dépôt sur la végétation. Il s’agit du coefficient de variation des dépôts dans les différents compartiments composant la végétation. La compartimentation se fait à la fois sur la hauteur et l’épaisseur de manière à apprécier la pénétration du produit au sein de la canopée ; 3. le pourcentage de produit n’atteignant pas la végétation (%). Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Entre 2012 et 2013, plus d’une centaine d’essais de modalités de pulvérisation (1 appareil associé à 1 réglage) ont été menés. Les résultats de ces essais ont été consignés dans une base de données unique. La centaine de points qui composent la courbe de la Figure 1 représentent chacune des mesures de dépôt de pulvérisation moyen de la centaine de modalités testées, selon le stade végétatif. La figure permet de constater qu’avec les appareils testés, pour une même quantité de produit appliquée sur un hectare cadastral de vigne, en fonction des pratiques de pulvérisation et du stade végétatif recevant le traitement, les quantités moyennes de produit déposées par unité de surface sur la végétation varient dans un rapport de 1 à 9. Pour chaque stade végétatif, on constate de forts écarts Figure 1. Moyennes des dépôts par unité de surface sur la végétation pour les différentes modalités de pulvérisation testées en 2013, classées par stades végétatifs. 24 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron entre les différents appareils testés. Le rapport de dose effective entre les modalités d’application les plus performantes et les moins performantes est d’un facteur 5 en début de végétation, 3 en milieu de végétation et 2 en pleine végétation. Il apparaît donc que, dans la pratique, des marges de progrès en termes de qualité de protection existent et pourraient être exploitées pour accompagner les utilisateurs de produits phytosanitaires dans leur démarche d’optimisation des doses appliquées. Il reste à identifier les paramètres qui déterminent ces marges de progrès pour être en mesure de les prédire et offrir aux viticulteurs des outils de gestion du risque selon leur situation. La Figure 1 montre également que les caractéristiques physiques de la végétation cible influencent très fortement les niveaux de dépôts moyens de produit déposé par unité de surface. Pour l’ensemble des modalités testées, la moyenne des dépôts obtenus sur le stade de début de végétation est 4 fois plus élevée que la moyenne des dépôts au stade pleine végétation. La Figure 2 représente pour chaque modalité testée la mesure du pourcentage de bouillie intercepté par la végétation (rendement de l’opération de pulvérisation) en fonction du stade végétatif. Cette figure met en évidence que le rendement de l’opération de pulvérisation offert par les pulvérisateurs testés et les diverses façon de les utiliser, dépend du stade végétatif. Le début de végétation est le stade le mieux protégé mais avec des pertes dans l’environnement très importantes. Au fil de la saison, plus la végétation pousse, plus la part de la bouillie pulvérisée interceptée par la végétation augmente : les gouttelettes de pulvérisation sont d’autant mieux captées par le filtre végétal que ce filtre est large et épais. Du fait de la moindre quantité de végétation à couvrir, les doses effectives sont par ailleurs les plus élevées en début de végétation, ce qui laisse entrevoir, à condition de bien les évaluer, de plus fortes marges de manœuvre pour réduire les doses appliquées. n Figure 2. Part de la bouillie se déposant sur les feuilles (en %) en fonction des stades végétatifs pour les différentes modalités de pulvérisation testées en 2013. ECOSPRAYVITI : Développement des écotechnologies de la pulvérisation en viticulture Conclusions et perspectives Les premiers travaux conduits dans le cadre du projet ECOSPRAYVITI confirment que l’optimisation de la pulvérisation est un levier très important pour réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. En effet, des écarts de performance très importants sont enregistrés selon le type de matériel utilisé et les pratiques d’utilisation. Ces travaux montrent également que l’atteinte des objectifs fixés par les politiques publiques (50 % de réduction de l’emploi de l’utilisation des produits phytosanitaires) requiert des approches globales multidisciplinaires à la croisée des chemins entre les travaux de recherche dans le domaine des technologies (agroéquipements, capteurs, TIC), de l’agronomie (sélection variétale, épidémiologie, systèmes de culture), de l’économie et de la sociologie (appropriation des innovations). Le banc EvaSprayviti a obtenu la médaille d’argent au palmarès de l’innovation du SITEVI 2013. L’outil a également reçu le premier prix de l’innovation à la 1ère édition des trophées ITA’ INNOV organisée par l’ACTA en 2015. Références bibliographiques > Codis S., Douzals J-P., Vergès A., 2013. EvaSprayViti: a new tool for sprayer’s agro-environmental performance assessment 12th Workshop on Spray Application Techniques in Fruit Growing – colloque Suprofruit 26-28 juin 2013 - Valencia (Spain) > Hébrard O., 2012. Optimisation agro-environnementale de la pulvérisation en viticulture : états des lieux et perspectives. AFPP - CIETAP - Conférence sur les Techniques d’Application de Produits de Protection des Plantes, Lyon, 15-16 mars 2012. > Sinfort C., Cotteux E.B., Ruelle B., Bonicelli, 2009. A methodology to estimate environmental pesticide losses during vine spraying. Stic et Environnement, Calais, juin 2009, CD-ROM.14 p. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 25 La génétique végétale, un levier à long terme pour la réussite de l’ambition Écophyto La session est centrée sur la mobilisation de l’amélioration génétique végétale au service des objectifs du plan Écophyto. Elle analysera comment la génétique végétale permet de développer des variétés résistantes aux maladies. Ces variétés sont intégrées dans des systèmes de culture dont l’objectif est de répondre à des objectifs de performance économique, et de réduction des usages de phytosanitaires. La dimension temporelle est particulièrement importante, puisqu’il faut les résistances soient stables dans le temps, ce qui est atteint par leur contrôle polygénique et/ou les modalités de conduite des cultures. L’insertion dans des systèmes de production peut être analysée par une modélisation des interactions génotype x environnement x conduite, avec prise en compte des contraintes biotiques. La session montrera également comment les outils de la sélection permettent ces constructions génétiques et notamment les ruptures engendrées par la connaissance des génomes, le développement de marqueurs, l’utilisation des ressources génétiques ou encore le déploiement futur de la sélection génomique. Le levier génétique est central au succès du plan Écophyto, car il permet de concilier la performance économique via la production et la qualité des produits et la performance environnementale via la meilleure résistance aux maladies, synonyme d’une baisse potentielle de l’utilisation de produits phytosanitaires. Il est aussi important de souligner qu’il est utilisable et utilisé sur une grande diversité d’espèces et qu’il doit donc être au cœur de la diversification des systèmes de culture, autre levier de la réussite d’Écophyto. SOMMAIRE Cépages de demain 29 SUNFLO 33 Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 27 Financement Casdar, Recherche finalisée et innovation 2010 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants Créer les cépages de demain avec les outils d’aujourd’hui Loïc Le Cunff Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées © Institut Français de la vigne et du Vin • Le Cunff Loïc, UMT Géno-Vigne®, IFV, Le Grau-du-Roi • This Patrice, UMR Amélioration Génétique et Adaptation des Plantes, INRA, équipe DAVEM, Montpellier • Audeguin Laurent, IFV, Le Grau-du-Roi Mots clefs Génotypage haut débit, sélection génomique, sélection assistée par marqueurs, résistance durable L’innovation variétale est une voie d’amélioration utilisée dans toutes les filières agricoles. Durant les vingt dernières années, d’énormes progrès ont été observés chez les bovins ou encore chez des espèces végétales comme le maïs ou le blé. Ces dernières années, suite au séquençage du génome de la vigne, la filière viticole se tourne vers la création variétale pour réduire le nombre de traitement phytosanitaire ou répondre aux changements climatiques. Afin de répondre à ces nouvelles attentes nous avons dans ce projet étudié les outils et ressources disponibles chez la vigne pour développer des programmes de création variétale efficaces. Cette étude a abouti au lancement d’un programme (EDGARR) financé par le CTPS, les interprofessions de Provence et du Languedoc-Roussillon et la marque ENTAV-INRA qui a pour finalité l’obtention de variétés résistantes au mildiou et à l’oïdium adapté à une vinification de type « Vins rosé ». Contexte et objectifs Méthodes La viticulture est aujourd’hui une des activités agricoles les plus consommatrices de produits phytosanitaires en Europe. Par ailleurs, les évolutions du climat pourraient engendrer de profondes modifications, notamment dans la zone méditerranéenne. Les espèces apparentées du genre Vitis et du genre Muscadinia, interfertiles avec Vitis vinifera L. sativa, présentent des résistances monogéniques ou quantitatives aux stress biotiques et abiotiques, mais des caractères de qualité défavorables. Certaines de ces résistances ont déjà été utilisées au travers d’hybrides mais du fait des caractères qualitatifs défavorables des espèces, ils n’ont pas permis l’obtention de variétés de qualité. Les ressources moléculaires disponibles actuellement chez la vigne offrent dorénavant la possibilité de créer des variétés de vigne durablement résistantes tout en améliorant la qualité du raisin et donc du vin. L’UMT Geno-vigne® s’inscrit parfaitement dans ce cadre au travers de son activité de transfert de l’innovation vers la recherche appliquée. De plus l’accès au domaine de Vassal (plus grande collection au monde de ressources génétique vigne) et aux projets de génomique développés par l’INRA sur la vigne, permet d’avoir accès à des bases de connaissances et de savoir-faire incontestables pour développer ce projet. Utilisation de la méthodologie de sélection génomique chez la vigne pour l’amélioration de la puissance de la sélection La méthode de « sélection génomique » est utilisée avec succès chez les espèces animales (Solderg et al., 2008) et quelques espèces végétales (maïs notamment). Cependant la vigne, qui est une espèce pérenne, présente des caractéristiques propres : i) l’absence de pédigrées tels que ceux disponibles chez les bovins, ii) le polymorphisme nucléotidique (SNP) très important (1 SNP tous les 47 paires de bases, Le Cunff et al. 2008), et iii) la décroissance rapide du déséquilibre de liaison (Myles et al. 2010) sont des paramètres qui vont avoir un effet important sur l’utilisation de cette méthode. Le projet proposé va étudier cette méthodologie chez la vigne. Si elle s’avère possible, les gains en termes de sélection pourraient être très importants, non seulement en termes de valeur des génotypes créés mais aussi en termes de temps. Développement de génotypes homozygotes pour les loci de résistance L’obtention d’individus homozygotes pour des gènes de résistance provenant de différentes origines serait un atout, en effet ces géniteurs élites transféreraient à l’ensemble ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 29 Créer les cépages de demain avec les outils d’aujourd’hui ... de leur descendance tous leurs gènes de résistance au mildiou et à l’oïdium. Ces génotypes doivent être étudiés pour d’autres caractéristiques à déterminisme génétique simple comme la quantité d’anthocyanes, qui est contrôlée par un gène majeur. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Test de la méthodologie de sélection génomique chez la vigne Afin de tester cette méthodologie innovante, nous procédons en deux étapes, une première qui consiste à modéliser in silico des populations afin d’estimer la faisabilité de la sélection génomique chez la vigne et les limites des données actuellement disponibles (Génotypage obtenu dans le cadre du projet ANR GrapeReSeq, héritabilité des caractères étudiés, etc.). Ces aspects théoriques du projet ont pemis d’estimer qu’un grand nombre de marqueurs moléculaires sont nécessaires (environ 100.000). La Figure 1 présente les résultats de quatre méthodologies testées, afin de choisir celle qui présente le meilleur résultat de corrélation entre le phénotype réel de l’individu et la valeur prédite sur la base des marqueurs moléculaires (Fodor et al., 2014). La deuxième étape consiste à utiliser des données réelle sur lequelles nous avons testé deux types de stratégies : 1. une population universelle couvrant le plus de diversité possible utilisée comme population d’entraînement ou 2. une population d’entraînement composée d’individus issus du même croisement que les individus dans laquelle nous réalisons la sélection. Pour le caractère « taille de la baie », la stratégie 1 donne des coefficients de corrélation compris entre 0,1 et 0,35 alors que la stratégie 2 donne des coefficients de corrélation supérieurs, compris entre 0,5 et 0,7. Il est à noter que dans la stratégie 2 les correlations sont meilleures Figure 1 : Comparaison des 4 méthodologies de sélection testées lorsque l’on utilise l’ensemble de l’information génomique plutôt qu’un sous-ensemble sélectionné (approche QTL) (Fodor et al. in prep). Obtention de géniteurs homozygotes résistants au mildiou et à l’oïdium Des autofécondations ont été réalisées afin d’obtenir des génotypes homozygotes pour deux gènes de résistance au mildiou Rpv3 et Rpv1 et pour deux gènes de résistance à l’oïdium Ren3 et Run1. Environ 2 000 pépins ont été obtenus, nous avons observé un faible pourcentage de germination (~30%) dû au phénomène de dépression de consanguinité. Les plantes obtenues et conservées actuellement en serre (première floraison en 2015) comprennent 7 génotypes homozygotes pour les 4 gènes et 35 génotypes comprenant entre 2 à 3 gènes sur les 4 à l’état homozygotes. Ces génotypes seront utilisés comme géniteurs, ils permettront d’augmenter la fréquence de descendants pyramidés pour ces 4 gènes de résistance. n Conclusions et perspectives Les résultats obtenus ici permettent de développer de nouvelles pistes de recherche et une réflexion générale sur « la modernisation de la création variétale chez la vigne ». Même si le coût du génotypage est en constante baisse, alors que le phénotypage s’affine et de ce fait son coût augmente, l’investissement réalisé est-il intéressant ? Afin d’apporter des éléments de réponse et suite aux résultats obtenus dans ce projet trois scénarios sont proposés : i) Une population universelle permettant de prédire les caractères sur tous types de croisements, ii) une population de ségrégation, iii) une population de géniteurs élites. 1. Le scénario d’une « population universelle » nécessite encore un effort important, notamment le développement d’un outil de génotypage permettant d’atteindre 100 000 marqueurs moléculaires. 2. Le scénario « population en ségrégation » qui semble le plus intéressant d’un point de vue investissement / résultats est testé dans le cadre du projet EDGARR (lauréat 2014 de l’AAP CTPS « Semences et Plants »). Ce scénario est intéressant dans ce projet, car la définition des idéotypes est très précise (couleur du vin, niveau d’acidité, oxydabilité des moûts et arômes). 3. Le scénario « population de géniteurs élites » comprenant un set de géniteurs pertinents (Vitis vinifera et hybrides, voir espèces apparentées) et raisonnés en fonction de la demande majoritaire. Dans ce scénario la population d’entrainement utilisée ne sera composée que de géniteurs donneurs de résistances et de variétés connues pour leurs qualités organoleptiques. Cette option permet de raisonner la diversité exploitée. Cette option semble la plus intéressante à moyen terme au vue des outils moléculaires disponibles actuellement sur la vigne. Ce projet nous a permis de mieux définir les stratégies à mettre en place afin de garantir un gain génétique pertinent dans le schéma de création variétale vigne. 30 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Créer les cépages de demain avec les outils d’aujourd’hui Références bibliographiques > Fodor A., Segura V., Denis M., Neuenschwander S., Fournier-Level A., Chatelet P., Homa F.A.A., Lacombe T., This P., Le Cunff L., 2014. Genome-wide prediction methods in highly diverse and heterozygous species: proof-of-concept through simulation in grapevine. PLoS ONE 9(11): e110436. > Fodor A., Peros J.P., Launay A., Doligez A., Berger G., Bertrand Y., Roques M., Beccavin I., Le Paslier M.C., Romieu C., Bacilieri R., Laucou V., Adam-BLondon A.F., Boursiquot J.M., This P., Le Cunff L., (in prep). Genome-Wide Association Studies (GWAS) and Genomic Selection (GS) in grape for phenotype prediction using a large diversity panel. > Myles S., Chia J.M., Hurwitz B., Simon C., Zhong G.Y., Buckler E., Ware D., 2010. Rapid Genomic Characterization of the Genus Vitis. PloS One., 13;5(1):e8219. > Solberg T.R., Sonesson A.K., Woolliams J.A., Meuwissen T.H.E., 2008. Genomic selection using different marker types and densities. J Anim Sci., 86:2447-2454. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 31 Financement Casdar, Recherche finalisée et innovation 2010 Chap II : Solutions intégrées de protection Intégration des contraintes biotiques dans la modélisation dynamique des interactions génotype environnement conduite de culture pour une production intégrée du tournesol Emmanuelle Mestries Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Mestries Emmanuelle, Terres Inovia, Castanet-Tolosan •D ebaeke Philippe et Jean-Noël Aubertot, UMR1248 AGIR AGroécologie, Innovations, TeRritoires, équipe VASCO, Toulouse •V incourt Patrick, équipe Tournesol du LIPM, Toulouse •B run François, ACTA, RMT Modélisation, Toulouse •R aynal Hélène, UR0875 MIAT Mathématiques et Informatique Appliquées, plateforme RECORD, Toulouse •E xperts : Moinard Jacques, DRAAF-SRAL Midi-Pyrénées ; Tourvieille Denis, INRA Clermont-Ferrand © Terres Inovia Mots clefs Complexe parasitaire, conduite culturale, couplage modèle de culture – modèle épidémiologique, outil pour l’évaluation de stratégies de production Le tournesol est une culture présentant de nombreux atouts agronomiques, industriels et environnementaux. Dans le contexte Écophyto, son indice de fréquence de traitement faible lui ouvre une place de choix dans de nombreux systèmes de culture. Toutefois, sa compétitivité économique doit progresser et l’un des points-clés de cette progression réside dans la maîtrise des pressions biotiques subies par la culture. Le développement d’outils d’aide à la conception d’itinéraires techniques permettant de prendre en compte les interactions entre l’environnement (pression parasitaire locale, sol et climat), la conduite de culture (date de semis, fertilisation azotée,…) et le choix variétal est un moyen de contribuer à cet objectif. Deux approches de modélisation permettant de représenter ces interactions ont été mises en œuvre sur quatre champignons majeurs du complexe parasitaire du tournesol : le mildiou (Plasmopara halstedii), le phomopsis (Diaporthe helianthi), le phoma (Leptosphaeria lindquistii) et le sclérotinia (Sclerotinia sclerotiorium). Au-delà des connaissances acquises sur l’épidémiologie des maladies du tournesol et les effets des pratiques culturales sur l’état du couvert et l’expression des maladies, ces modèles permettront de représenter les interactions entre agents pathogènes du complexe parasitaire et de proposer aux sélectionneurs, aux chercheurs et aux ingénieurs et techniciens de développement, des outils d’aide à la conception d’idéotypes variétaux adaptés et des outils d’aide à la construction de stratégies de production intégrée. Contexte et objectifs : Dans le contexte Écophyto, le tournesol a des atouts à faire valoir au sein des systèmes de culture. Il contribue à la diversification des systèmes de culture, en rompant les successions de cultures d’hiver. Avec un indice de fréquence de traitement (IFT) de 2,1 points, il fait partie, avec le maïs, des grandes cultures les moins consommatrices de produits phytosanitaires (Butault et al., 2010) et permet d’améliorer l’IFT des assolements dans lesquels il s’insère. Pour cela, il doit impérativement améliorer sa compétitivité technico-économique auprès des producteurs. Celle-ci passe par une réduction des pressions biotiques subies par la culture, en particulier celles liées au complexe parasitaire fongique qui touche la culture : mildiou, phomopsis, phoma et sclérotinia. Une meilleure connaissance du fonctionnement de la culture et des variétés de tournesol couplée à l’épidémiologie des maladies est nécessaire pour modéliser de manière intégrée les interactions variété x milieu (sol, climat, pression parasitaire locale) x conduite de culture et développer des outils d’aide à la construction de stratégies de protection et de production intégrées adaptées à chaque situation. Méthodes Une synthèse des connaissances Une analyse de la littérature internationale a été ciblée sur les interactions agents pathogènes - conduite de culture - états de peuplement - environnement : connaissances épidémiologiques, fonctions de dommage, impacts des conduites culturales, identification des modèles spéci- ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 33 Intégration des contraintes biotiques dans la modélisation dynamique des interactions génotype*environnement*conduite de culture pour une production intégrée du tournesol ... fiques existants et de leurs caractéristiques (données d’entrée, paramètres,…). L’ensemble des données expérimentales utiles au projet disponibles auprès des partenaires a été rassemblé, à partir de bases de données existantes ou d’archives papier : données épidémiologiques, données expérimentales sur les effets des pratiques culturales sur les maladies (choix variétal, protection fongicide, fertilisation azotée, irrigation,…), données d’enquêtes sur les pratiques culturales et sur la pression « maladies » annuelle. La mise en place d’expérimentations dédiées Suite à l’analyse bibliographique et à l’exploitation des données disponibles, plusieurs manques de connaissances ont été identifiés et ont donné lieu à la conception et mise en place d’expérimentations en plein champ et en conditions contrôlées : - étude du lien entre la conduite de culture et la mise en place et le développement des symptômes de phomopsis et phoma via le microclimat créé sous le couvert, - évaluation de l’effet du stade phénologique de la plante sur la vitesse de propagation du phomopsis et quantification des dommages causés par le phomopsis sur les feuilles de tournesol, - étude de conditions de réalisation des interactions entre phomopsis et phoma, - acquisition de données épidémiologiques pour le phomopsis et le phoma, - étude de la variabilité génétique du tournesol face au phoma et au dessèchement précoce. Ces expérimentations ont permis d’explorer une gamme de sensibilité variétale aux maladies, couplée à une gamme d’architecture. Elles ont donné lieu à un suivi très fin des symptômes : date d’apparition, site d’infection, vitesse de progression, identification des cas d’interaction phomopsis-phoma. La construction du modèle SUNFLO_Maladies Un modèle de simulation dynamique de la culture de tournesol (SUNFLO) a été développé dans l’UMR AGIR de Toulouse en collaboration avec l’UMR LEPSE de Montpellier et Terres Inovia. Cet outil construit à partir de travaux expérimentaux soutenus par PROMOSOL permet de simuler les performances (rendement, teneur en huile) et le comportement (eau consommée) des variétés de tournesol. Les principales contraintes abiotiques connues sur la culture sont prises en compte, telles que les besoins en azote et la disponibilité en eau. La conduite de culture est décrite par les principales interventions jouant sur le couvert (date et densité de semis, fertilisation azotée, irrigation). Ce modèle, appliqué à différents contextes (réseaux de parcelles d’agriculteurs, réseaux d’essais d’évaluation variétale), permet aujourd’hui de mieux qualifier le parcours des variétés soumises à différentes combinaisons milieu x conduite de culture, par l’identification des périodes de stress subies par la culture. En revanche, les stress biotiques induits par les maladies fongiques n’étaient pas pris en compte à ce stade malgré leur poids important dans les interactions génotype x environnement. L’objectif de ce projet est donc d’associer des modules « maladie » à ce modèle pour y intégrer les contraintes biotiques. 34 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Le schéma conceptuel du modèle SUNFLO_Maladies a été construit d’après Aubertot et Debaeke (2006). Il comporte 4 modules permettant de reproduire les principales étapes de l’interaction culture – champignon pathogène : 1) production d’inoculum primaire : prédiction de la quantité d’inoculum initial (endo- et allo-inoculum), 2) dispersion : prédiction de la date de libération des spores, 3) pollution et infection (symptômes/dégâts) : prédiction de l’incidence et de la sévérité de la maladie, 4) nuisibilité : prédiction de la perte de rendement et de teneur en huile en fonction de la sévérité des dégâts. Ces modules seront couplés au modèle SUNFLO selon le schéma suivant, SUNFLO étant représenté en vert sur la figure ci-après : Dans le temps du projet, cette démarche de modélisation dynamique a été mise en œuvre pour le phomopsis et le phoma. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Une meilleure connaissance de l’épidémiologie du phoma L’épidémiologie du phoma a fait l’objet de nouvelles expérimentations visant à mieux comprendre les processus de maturation des pseudothèces de Leptosphaeria lindquistii et d’émission des ascospores. Les résultats confirment la capacité du champignon à émettre des spores contaminantes sur toute la durée du cycle du tournesol. Les premiers pseudothèces mûrs apparaissent dès février, bien avant le semis du tournesol, et leur proportion s’accroît jusqu’à la floraison du tournesol. Mi-mai, plus de 80% des pseudothèces sont généralement mûrs, permettant ainsi des émissions significatives d’ascospores pouvant être à l’origine de contaminations précoces des tournesols. Cette cinétique de maturation apparaît similaire selon que les résidus sont placés dans une culture de blé (cas correspondant à la réalité agricole dans un grand nombre de situations) ou sous un couvert de tournesol (dans une optique de contamination semi-naturelle renforcée pour l’évaluation des variétés par exemple). Les conditions climatiques favorables aux émissions des ascospores sont assez peu exigeantes : de faibles précipitations suffisent pour initier les projections et l’humidité relative de l’air après une période Intégration des contraintes biotiques dans la modélisation dynamique des interactions génotype*environnement*conduite de culture pour une production intégrée du tournesol pluvieuse permet la poursuite de ces projections. Les émissions d’ascospores de phoma suivent une dynamique très proche de celle du phomopsis et la première tentative d’utilisation du modèle Asphodel (construit par le SRPV MidiPyrénées pour la prédiction de la maturation des périthèces de phomopsis et utilisé pour le Bulletin de Santé du Végétal dans différentes régions) pour le phoma est encourageante. Le modèle reproduit bien les tendances des périodes de maturation des pseudothèces, mais le paramétrage serait à valider sur un jeu de données plus large, qui n’est pas disponible aujourd’hui. Les techniques de travail superficiel ne semblent pas réduire le potentiel d’inoculum pour l’année suivante par rapport au semis direct. Sur deux campagnes favorables au phoma sur tige, le réservoir d’inoculum est estimé à 60 000 pseudothèces en moyenne par m² de surface au sol. Bien que le dispositif mis en place pour cette quantification ne soit pas idéal, c’est la première fois que l’inoculum primaire de phoma est ainsi quantifié en parcelles agricoles et le conseil de Terres Inovia de broyage et d’enfouissement des résidus est conforté. Ces informations seront utiles à la modélisation du processus de maturation des pseudothèces et du processus d’émission des ascospores, permettant ainsi d’adapter le conseil de protection fongicide contre cette maladie. Effets de la conduite de culture et du microclimat sur phomopsis et phoma Les attaques de phoma sur tige apparaissent peu sensibles au microclimat, contrairement au phomopsis. Les contaminations naturelles suivent une progression acropète, du bas vers le haut de la tige. Une hypothèse explicative de ce phénomène est que le temps de latence serait différent selon la strate attaquée. Un modèle phénologique peut permettre de représenter cette progression dans le modèle SUNFLO_ Maladies. Le nombre de nœuds atteints varie selon la conduite de culture : plus la conduite est favorable, plus ce nombre est élevé. Le délai d’incubation dépend du stade phénologique de la plante : 360°C.jours en début de cycle, 180°C.jours en début floraison. La vitesse de progression des symptômes dépend du statut azoté de la plante avant la phase de remplissage mais ne peut être modélisée, contrairement à celle du phomopsis. Les attaques de phomopsis ont principalement lieu à la base de la plante (jusqu’à la 12e feuille), où le microclimat est le plus favorable tant que les tissus sont disponibles pour des contaminations. En conditions limitantes, le rôle du microclimat sur la dynamique des contaminations est particulièrement important ; en conditions climatiques non limitantes (pluies soutenues), le degré de fermeture du couvert joue sur la réussite des infections. Le nombre de feuilles infectées dépend avant tout de la sensibilité de la variété, de même que la vitesse de progression des nécroses. Le taux de passage de la nécrose de la feuille à la tige (symptôme nuisible) est lié à la longueur du pétiole, à la précocité de l’expression du symptôme sur feuille, à la vitesse de sénescence de la feuille et à la présence éventuelle d’une attaque de phoma sur tige (compétition). Alors que le microclimat est déterminant pour les attaques en pré-floraison, c’est l’importance de la surface verte réceptrice qui conditionne l’importance des attaques en post-floraison. Interactions entre phomopsis et phoma Ces interactions ont principalement été analysées sur les essais au champ. La compétition entre phomopsis et phoma pour les sites d’infection est la plus importante sur les feuilles-pétioles des strates 2 et 3 (en bas de la plante) et le phoma doit être installé depuis 15 à 20 jours pour empêcher le passage du phomopsis depuis la feuille sur la tige. Sur l’expérimentation au champ conduite en 2011, en conditions d’infection naturelle (phoma) ou semi-naturelle (phomopsis), ces interactions ont concerné 5% des sites d’infection observés. La synthèse des résultats a permis d’identifier les conditions favorables à l’expression de cette interaction et de proposer un schéma illustratif de l’impact de la conduite de culture (fertilisation azotée et densité de peuplement) sur l’interaction phoma-phomopsis. Variabilité génétique pour la résistance au phoma collet et au dessèchement précoce, effet de la précocité variétale De nombreux travaux antérieurs avaient déjà montré le caractère héritable et quantitatif de la résistance du tournesol face au phoma au stade "plantule". Ce projet a été l’occasion de travailler cette résistance sur plantes adultes et a permis de mettre en évidence : - une variabilité génétique importante au sein du genre Helianthus pour la résistance au dessèchement précoce, - le caractère polygénique et quantitatif de cette résistance et son indépendance par rapport à la précocité à floraison, - un déterminisme génétique différent pour le dessèchement précoce et les attaques de phoma sur tige. Ces deux types d’attaque doivent donc (comme les différents types d’attaque du Sclérotinia sur tournesol) être considérés par les sélectionneurs et les évaluateurs de variétés comme des maladies différentes. Un Point Technique dédié au phoma Un ouvrage collectif dédié au phoma et au dessèchement précoce a été édité en 2011 dans la collection des Points Techniques du CETIOM. Il constitue une synthèse de l’ensemble des connaissances acquises sur le phoma et le dessèchement précoce du tournesol. Celles-ci s’organisent autour des trois « partenaires », la plante-hôte, l’agent pathogène et l’environnement dans lequel ils se trouvent, dont l’interaction conduit à une expression de la maladie plus ou moins importante. n ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 35 Intégration des contraintes biotiques dans la modélisation dynamique des interactions génotype*environnement*conduite de culture pour une production intégrée du tournesol ... Conclusions et perspectives L’ensemble des connaissances acquises et des formalismes proposés ont permis d’initier la construction du modèle couplé SUNFLO_Maladies et son implémentation sur la plateforme de modélisation RECORD (https://www6.inra.fr/ record). Ces résultats ont permis de mieux comprendre les processus épidémiologiques en jeu pour phomopsis et phoma, qui sont très particuliers au regard de l’ensemble des autres pathosystèmes. Les processus sous-jacents aux mécanismes de dommage ont également été explorés. Quatre usages peuvent être envisagés pour le modèle SUNFLO_Maladies : la compréhension des interactions variété – agents pathogènes – conduite de culture – environnement, un outil de raisonnement de la lutte fongicide, un outil de conception et d’évaluation d’itinéraires techniques de production intégrée et enfin un outil pour la conception d’idéotypes de tournesol adaptés. De plus, certaines avancées de ces travaux ont une portée générique, mobilisable pour d’autres pathosystèmes. Une approche complémentaire de modélisation (Injury Profile SiMulator ; Aubertot et Robin, 2013) de type qualitatif, permettant également de représenter les interactions au sein du complexe parasitaire, est en cours de développement pour le mildiou, le sclérotinia, le phomopsis et le phoma. couv_Point_phomaTO11:Mise en page 1 11/05/2011 11:44 Page 1 LES POINTS TECHNIQUES DU CETIOM Phoma & dessèchement précoce du tournesol Références bibliographiques CETIOM 2011 > Bordat A., Debaeke P., Dechamp-Guillaume G., Mestries E., Seassau C., Vincourt P., 2011. Phoma et dessèchement Phoma & précoce du tournesol. Point Technique CETIOM, 86 p. dessèchement > Desanlis M., Aubertot J.N., Mestries E. Debaeke P., 2013. Analysis of the influence of a sunflower canopy on précoce Phomopsis helianthi epidemics as a function of cropping practices. Field Crops Research 149:63-75. du tournesol > Desanlis M., Maury P., Aubertot J.N., Lagarrigue L., Debaeke P., 2012. Photosynthetic consequences of Phomopsis helianthi on two sunflower hybrids: analysis and modelling. Proc.18th Int. Sunflower Conf., ISA, Mar del Plata, Argentina, 396-401. > Desanlis M., Mestries E., Lagarrigue L., Aubertot J.N., Debaeke P., 2012. Effects of sunflower canopy on Phomopsis helianthi epidemics. In: ECA, Plant and Canopy Architecture Impact on Disease Epidemiology and Pest Development, International Conference, Rennes, France, p. 24. > Mestries E., Desanlis M., Seassau C., Moinard J., Debaeke P., Dechamp-Guillaume G., 2011. Impact de la conduite de culture sur les maladies du tournesol. Innovations Agronomiques 14: 91-108. > Seassau C., Dechamp-Guillaume G., Mestries E., Debaeke P., 2012. Low plant density can reduce premature ripening caused by Phoma macdonaldii. Europ. J. Agronomy 43: 185-193. Prix : 40 ¤ 36 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Comment changer de système de manière progressive ? La session aborde la question de la transition entre des modèles de production qui se sont construits dans une logique de raisonnement où à chaque problème parasitaire, une solution phytosanitaire est apportée, vers des systèmes à la fois plus économes et moins dépendants en produits phytosanitaires. C’est complexe car il ne s’agit pas seulement de mieux raisonner les applications phytosanitaires ou de déployer des méthodes alternatives comme des variétés résistantes ou le biocontrôle, mais également de faire évoluer les systèmes de culture euxmêmes. Par ailleurs, compte tenu des caractéristiques des solutions alternatives aux pesticides (qui, prises individuellement, sont le plus souvent moins efficaces, plus difficiles à mettre en œuvre et plus risquées), il est nécessaire de combiner de manière harmonieuse des méthodes à effets « partiels » pour obtenir les mêmes performances. La transition vers des systèmes économes et moins dépendants doit s’inscrire dans des trajectoires individuelles spécifiques à chaque exploitation agricole. Les exposés illustreront, à travers quelques exemples, les leviers qui peuvent être mobilisés par les agriculteurs pour accompagner leur transition (solutions alternatives à combiner ou outils de conception de stratégies intégrées) ainsi que la nécessité de faire évoluer le conseil agricole de la diffusion de solutions techniques « clés en mains » vers un accompagnement au changement stratégique et l’aide à la conception de solutions personnalisées. Le débat portera sur l’identification des clés de réussite de ce changement à la fois pour les agriculteurs et pour les acteurs de la recherche et du développement. SOMMAIRE ECOVITI 30 MIC-MAC Design 41 Conseillers demain 45 Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 37 Financement Casdar, Innovation et partenariat 2010 Chap II : Solutions intégrées de protection EcoViti : Concevoir en partenariat une EcoViticulture ECOnomiquement viable et ECOlogiquement responsable par rapport aux pesticides David Lafond Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Metral Raphaël, Wery Jacques, UMR1230 SYSTEM, Montpellier SupAgro • Lafond David, IFV, Beaucouzé • Coulon Thierry, IFV, Bordeaux-Aquitaine • Délière Laurent, UMR1065 SAVE (Santé et Agroécologie du Vignoble), INRA Bordeaux-Aquitaine • Chevrier Christel, CA Languedoc-Roussillon, Lattes • Panigaï Laurent, CIVC, Epernay Mots clefs Prototypage, viticulture durable, réduction des intrants phytosanitaires, conception de systèmes de culture innovants. Initié en 2010, le projet EcoViti a proposé et testé une démarche de conception de systèmes viticoles innovants à bas intrants phytosanitaires par assemblage de connaissances expertes. L’évaluation des performances et le réajustement des prototypes conçus se font au sein d’un réseau de plateformes d’expérimentation installées dans les grandes régions viticoles françaises. Une méthode et des outils adaptés à la viticulture ont été produits et formalisés. Les premiers résultats d’EcoViti montrent des performances environnementales et économiques satisfaisantes pour encourager l’évolution des systèmes viticoles vers une moindre dépendance aux intrants. Contexte et objectifs Les réductions d’usage de produits phytosanitaires affichées comme objectif du plan Écophyto sont inatteignables sans passer par une reconception des systèmes de culture, ainsi que l’a montré le rapport Écophyto R&D (2010). Si des travaux en plantes annuelles existent depuis les années 90, le projet EcoViti a adapté et mis au point une méthode opérationnelle de conception des systèmes de culture en plantes pérennes appliquée à la viticulture. La démarche proposée permet de combiner agro-écologie et durabilité socio-économique avec les spécificités de chaque région et contexte des exploitations viticoles françaises. L’évaluation et le réajustement des prototypes s’appuient sur un réseau de plateformes expérimentales coordonnées, pour amener à la fois de la cohérence (en matière d’indicateurs de suivi) et de l’ambition scientifique (en matière d’innovations à tester) aux expérimentations mises en place. réseau de sites expérimentaux. Une liste de règle de décision définie pour chacun d’eux oriente toutes les actions tactiques et opérationnelles appliquées au système. Cela permet d’intégrer dans une forme « expérimentable » les effets et les interactions de plusieurs techniques sur les processus-clés de l’agrosystème viticole. Ainsi expérimentés, les prototypes peuvent être évalués et réajustés chaque année en utilisant les indicateurs définis de manière commune par le groupe d’experts. Quand le prototype donne satisfaction, on peut alors le diffuser et l’adapter à l’échelle de l’exploitation agricole (Figure 1). ... Méthode La conception des systèmes fait appel à un groupe d’experts pluridisciplinaires (protection du vignoble, agronomie, physiologie, entretien du sol, mécanisation…), d’origines diverses (INRA, IFV, Chambres d’agriculture, interprofessions…), qui s’est réuni au moins une fois par an en atelier de prototypages sur plusieurs jours. Les prototypes théoriques conçus pour chaque cadre d’objectifs et de contraintes sont ensuite adaptés au contexte local et mis à l’essai sur un Figure 1 : Méthodologie au sein d’EcoViti pour la conception de systèmes viticoles par assemblage de connaissances expertes et expérimentations Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 39 EcoViti : Concevoir en partenariat une EcoViticulture ECOnomiquement viable et ECOlogiquement responsable par rapport aux pesticides Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto La méthodologie de conception des systèmes viticoles proposée fonctionne. Elle a fourni à ce jour 45 prototypes de systèmes expérimentés dans 6 régions viticoles (Alsace, Arc méditerranéen, Bordeaux-Aquitaine, Charentes, Sud-Ouest, Val de Loire-Centre) qui produisent leurs premiers résultats (Figure 2). Ces plateformes formant le réseau EcoViti ont été pérennisées à travers les financements DEPHY EXPE. Des aides complémentaires FranceAgriMer permettent aujourd’hui à l’IFV d’assurer l’animation nationale pour la filière vigne de ce réseau d’expérimentation de systèmes viticoles innovants, en lien avec la Cellule d’Animation Nationale DEPHY (en particulier l’expert filière Vigne Laurent Délière et l’animateur DEPHY EXPE Emeric Emonet). n Figure 2 : Réseau des sites expérimentaux DEPHY EXPE Vigne, initié par le projet CASDAR EcoViti Conclusions et perspectives Le premier enseignement tiré du projet est la pertinence de l’approche de conception par expertise et expérimentation, avec des perspectives encourageantes d’atteindre des objectifs ambitieux de performance et d’innovation, sous réserve d’intégrer plus encore les processus agro-écologiques pour réduire les intrants. Le second est l’intérêt de pérenniser le travail en groupe d’experts sur le long terme, afin de capitaliser et rendre les ateliers de conception plus productifs. Le projet EcoViti a donc initié une dynamique nationale en viticulture pour accompagner l’innovation et les changements de pratiques. Le label EcoViti, qui se poursuit à travers le programme DEPHY EXPE du plan Écophyto, est reconnu aujourd’hui comme étant le réseau national d’expérimentation en agronomie des systèmes viticoles innovants. Références bibliographiques > Lafond D., Coulon T., Metral R., Mérot A., Wery J., 2013. « EcoViti: a systemic approach to design low pesticide vineyards », IOBC-WPRS Bull., vol. 85, p. 77‑86, 2013. > Lançon J., Wery J., Rapidel B., Angokaye M., Gérardeaux E., Gaborel C., Ballo D., Fadegnon B., 2007. «An improved methodology for integrated crop management systems». Agronomy for Sustainable Development 27, no 2: 101 110. doi:10.1051/agro:2006037. > Metral R., Lafond D., Wery J., 2013. « Innovation agronomique et diffusion des savoirs : L’exemple du projet CASDAR EcoViti en viticulture », Agron. Environ. Sociétés, vol. 3, no 2, p. 135‑136, déc. 2013. > Metral R., Rapidel B., Deliere L., Petitgenet M., Lafond D., Chevrier C., Bernard F-M., Serrano E., Thiolet-Scholtus M., Wery J., 2015. “A prototyping method for the re-design of intensive perennial systems: the case of vineyards in France”. 5th International Symposium for farming System Design – Agro2015 (Montpellier) 2p. 40 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Financement ANR, Systerra 2009 Chap II : Solutions intégrées de protection MicMac-design : une plateforme d’expérimentation et de modélisation pour concevoir et évaluer des prototypes de systèmes de culture innovants à faible niveau d’intrants Eric Justes Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Justes Eric, Véricel Grégory, Raffaillac Didier, Debaeke Philippe, Aubertot Jean-Noël, Farès M’hand, UMR 1248 AGIR, INRA, Toulouse-Auzeville • Alletto Lionel, Gulliano Simon, UMR 1248 AGIR, EI-Purpan, Toulouse • Gavaland André, UE 0802, Domaine Expérimental d’Auzeville, INRA, Toulouse-Auzeville • Raynal Hélène, UR0875 MIAT (Mathématiques et Informatique Appliquées Toulouse), Plateforme informatique RECORD, INRA • Benoit Pierre, Pot Valérie, Bedos Carole, UMR 1091 EGC (ECOSYS depuis 2015), INRA, Grignon • Léonard Joël, Mary Bruno, UR 1158 Agro-Impact, INRA, Laon • Emmanuelle Mestries, Nathalie Landé, CETIOM (Terres Innovia depuis 2015), UMR 1248 AGIR, Toulouse-Auzeville • François Laurent, ARVALIS-Institut du Végétal, Boigneville Mots clefs Sytème de grandes cultures, Écophyto, agro-écologie, cultures intermédiaires, expérimentation système, modélisation Le projet de recherche MicMac-design a eu pour objectif le développement de méthodes pour la conception et l’évaluation multicritères de systèmes de culture, ainsi que la production de références par expérimentation et modélisation de prototypes de systèmes de culture intégrés à bas niveaux d’intrants. Ce projet aide ainsi à concevoir des systèmes de culture innovants répondant aux enjeux multiples de l’agriculture, dont ceux du plan français Écophyto. Deux sites expérimentaux ont été mis en place avec une thématique propre à chacun des 2 sites : i) le domaine expérimental de l’INRA de Toulouse avec des systèmes de culture alternatifs à la rotation blé dur / tournesol ; ii) la ferme de l’école d’ingénieurs de Purpan où des alternatives à la monoculture de maïs sont évaluées. Ces deux sites ont été instrumentés de manière à mesurer les impacts environnementaux (dont les transferts de pesticides) des prototypes testés. Contexte et objectifs Le défi actuel de l'agriculture européenne est de concilier production agricole et respect de l'environnement. En France, ceci a conduit à développer un nouveau paradigme appelé « agriculture écologiquement intensive » (Griffon 2006) ou agroécologie : il s’agit de couvrir une demande de nourriture globale tout en diminuant les intrants agricoles (engrais et pesticides) afin de limiter leurs impacts négatifs sur les eaux, l’air et les sols. Ceci implique de mieux connaître les interactions dans la biocénose (couvert végétal, parasites et auxiliaires) avec le biotope (sol et atmosphère) au sein des différents agrosystèmes afin d’adapter les pratiques agricoles pour accroître l’efficacité d’utilisation des ressources naturelles abiotiques et les régulations biotiques en substitution des pesticides. Les deux principaux objectifs du projet MicMac-Design ont été les suivants : 1. Concevoir des prototypes de systèmes de culture à bas niveaux d’intrants de synthèse basés sur les principes de production végétale intégrée et de l'agroécologie, permettant : i) de réduire les fuites vers l'environnement et les impacts négatifs sur les écosystèmes (empreinte écologique de l'agriculture) et ii) de maintenir voire améliorer la rentabilité économique de l’agriculture (systèmes de grandes cultures). Pour cela, une approche expérimentale au champ couplée à de la modélisation a été privilégiée. 2. Le développement d’un nouvel environnement de modélisation générique pour la conception et l'évaluation des systèmes de culture. Ce travail est réalisé via la plate-forme INRA de modélisation RECORD, qui a été développée pour la simulation dynamique des systèmes de culture. Ce projet MicMac-design a eu aussi pour ambition de faire progresser les connaissances sur l’évaluation quantitative multicritère des systèmes de culture. Leurs différents impacts environnementaux sont étudiés : i) bilan hydrique ; ii) bilans carbone et azote avec mesures d’émissions de gaz à effet de serre (CO2 et N2O) et de lixiviation de nitrate ; iii) flux de pesticides vers l’air et les eaux de drainage et iv) bilan énergétique. Les coûts de production, au même titre que d’autres critères de performance économique, sont ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 41 MicMac-design : une plateforme d’expérimentation et de modélisation pour concevoir et évaluer des prototypes de systèmes de culture innovants à faible niveau d’intrants ... analysés. Enfin, une analyse de l’acceptabilité de l’innovation et des effets de verrouillage dans les filières est également menée. Méthodes Démarche de conception de prototypes de systèmes de culture innovants : La réduction des pesticides constitue l’un des axes prioritaires fixés pour l’ensemble des systèmes de culture conçus et testés dans ce projet. Pour atteindre cet objectif, plusieurs leviers agronomiques ont été mobilisés afin de concevoir des systèmes de culture moins sensibles aux bioagresseurs, tout en cherchant à réduire les risques environnementaux liés à l’utilisation des pesticides. De manière non exhaustive, nous avons mobilisé les leviers suivants : • accroître la diversité biologique dans les parcelles (allongement des rotations, mélanges d’espèces ou de variétés), • utiliser prioritairement les moyens de lutte mécanique (contre les adventices) ou biologique (contre certains ravageurs), en raisonnant les actions chimiques à partir de règles de décision définies (seuils de traitement, stades de développement, etc.), • choisir des espèces et variétés adaptées à des conduites à bas niveau d’intrants, • mettre en place des cultures intermédiaires multi-services (CIMS) pour simultanément : piéger les ions nitrate, fixer de l’azote atmosphérique, structurer le sol, réduire les flux d’eau et de pesticides par drainage. Une des originalités du projet MicMac-Design est de coupler l’acquisition de données sur des parcelles expérimentales, où les prototypes de système de culture innovants sont testés, à des démarches de modélisation. Ce couplage s’opère notamment au travers d’une plateforme de modélisation mise en place par l’INRA (plateforme RECORD) ; le couplage à une base de données est également en cours de réalisation (données expérimentales stockées initialement dans MicMacBDD et qui vont être transférées dans AGROSYST). L’ancrage de nos travaux dans cette plateforme de modélisation agronomique permettra de réaliser des simulations d’autres systèmes de culture. Notre ambition est de réaliser une évaluation quantitative multicritère des prototypes testés et des futurs systèmes de culture innovants, qui pourront ainsi être évalués de façon ex-ante. L’évaluation est basée sur les trois piliers suivants : 1) la production agricole (développement des cultures, impact des bioagresseurs, qualité technologique des récoltes), 2) l’impact environnemental (modélisation des flux d’eau, d’azote, de pesticides, de gaz à effet de serre (GES), etc.) et 3) l’efficacité économique (modélisation des marges des systèmes testés). Deux expérimentations « système de culture » Deux sites ont été mis en place en 2010, (domaine expérimental de l’INRA à Auzeville et la ferme de Lamothe de l’EI Purpan). Pour chaque système de culture, toutes les composantes de la rotation sont présentes sur une même année afin de prendre en compte les aléas climatiques et permettre ainsi une évaluation complète de chaque système tous les ans. 42 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron 1. INRA d’Auzeville : systèmes conçus dans une optique d’alternative à la rotation en sec blé / tournesol. L’expérimentation est réalisée pour deux rotations triennales successives, soit de 2010 à 2016, afin d’évaluer les effets cumulatifs éventuels. 2. Ferme de Lamothe : systèmes conçus comme alternative à la monoculture de maïs irrigué. Instrumentation et mesures réalisées sur les deux sites expérimentaux Afin de suivre en continu la dynamique de l’eau, des pesticides, des nitrates, chacune des parcelles des deux dispositifs ont été équipées de plaques lysimétriques (à 1 m de profondeur). Par ailleurs, certains systèmes de culture font l’objet de suivis complémentaires, mesures des émissions de GES (site INRA d’Auzeville) et mesures des pertes de pesticides dans l’air (Site EIP de Lamothe). En interaction avec ces évaluations agronomique et environnementale, des travaux en économie visent à évaluer la performance de ces systèmes de culture tant sur le plan financier que social (évaluations des temps de travaux ou de l’acceptabilité des innovations envisagées). Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Des résultats sur des processus spécifiques dèja disponibles, en attendant l’analyse systémique… Le projet MicMac-design est actuellement terminé mais les expérimentations continuent puisque la cinquième année vient d’être récoltée. Les résultats du projet ont permis de faire des progrès en termes de compréhension des effets des pratiques agricoles sur différents bioagresseurs et notamment : 1) effets du travail du sol sur l'inoculum primaire de phoma du tournesol, 2) effets d'association céréale-légumineuse sur les dynamiques de pucerons et maladies foliaires des protéagineux, 3) effets des pratiques sur la dynamique de repousses de la culture principale, support de différents bioagresseurs (application au mildiou de la pomme de terre mais ces travaux sont d’ordre générique), 4) effets des pratiques sur les principaux bioagresseurs du blé (tendre et dur). Les résultats experimentaux des deux essais systèmes de MicMac-design : une plateforme d’expérimentation et de modélisation pour concevoir et évaluer des prototypes de systèmes de culture innovants à faible niveau d’intrants culture montrent que, dans les conditions de Midi-Pyrénées, il est possible de réduire l’usage des pesticides sans impacter la rentabilité économique. Ainsi, pour l’essai INRA d’Auzeville, il a été possible de réduire l’usage des pesticides de 50 % (Bas Intrants), voire davantage (environ 70 % pour Très Bas Intrants), sur la première rotation triennale. La marge seminette de ces systèmes s’est révélée supérieure ou égale par rapport à la rotation courte Blé dur – Tournesol, très pratiquée dans la région. Les quantités d’engrais azotées ont été nettement réduites dans le système BI (-20 %) et fortement réduites dans le système TBI et AE (-50 à 70 %). Ainsi, les émissions de N2O se sont révélées relativement faibles dans nos conditions (< 2 kg N-N2O/ha/an), soit environ deux fois plus faibles que ne le laisser supposer le facteur d’émission IPCC fixé à 1 % de l’engrais minéral d’apport. Les transferts de pesticides sont modérés, en lien avec la baisse de l’IFT, puisque l’on retrouve seulement des molécules de bentazone, de glyphosate et de DEA à des concentrations détectables mais faibles dans les eaux de drainage dans les lysmètres. Nous avons été toutefois surpris de retrouver, toutefois en faible concentration, des molécules utilisées en traitement de semences. Ainsi, lors de la seconde rotation nous avons choisi d’utiliser des semences non traitées pour le prototype « agroécologique » (AE). De plus, ce prototype AE s’est révellé nettement moins efficace économiquement car la volarisation des graines mal triées après récolte a été faible (destination pour l’alimentation animale). Cela indique que le tri des graines est un verrou déterminant pour les associations d’espèces récoltées en mélange. Concernant l’essai de Lamothe, nous avons pu montrer que des marges de progrès existent encore pour optimiser la monoculture de maïs irrigué, notamment en utilisant une variété demi-précoce de maïs qui permet de réduire l’irrigation, de récolter plus tôt et des grains plus secs (réduction des coûts de séchage) et également d’implanter une culture intermédiaire suffisamment tôt, ceci sans avoir un impact très significatif sur la marge semi-nette. Un résultat surprenant, et à souligner particulièrement, concerne le transfert des pesticides (herbicide, en particulier), qui s’est révélé plus important en quantité et avec des concentrations élevées en situation de non-labour avec strip-till . Ceci s’explique probablement par des infiltrations préférentielles et des transferts rapides des molécules après le semis. Ce résultat, qui s’est confirmé sur plusieurs années, indique que dans les sols argileux du site de Lamothe, cette technique de semis n’est pas adaptée dans une démarche de réduction des transferts de pesticides vers les nappes alluviales. Les deux essais « système de culture » constituent un support pédagogique et de communication Ces deux dispositifs servent très régulièrement de support pédagogique pour les étudiants des trois établissements d'enseignement supérieur en agronomie et agriculture de Toulouse (INP-ENSAT, INP-EI-Purpan et ENFA), partenaires du projet, ainsi qu’à des visites régulières d’étudiants (Lycée Agricole d’Auzeville, Ecoles d’ingénieurs,…). Nous accueillons aussi des ingénieurs régionaux participants au plan Écophyto et des groupes d’agriculteurs lors de journées d’animation thématique. Ces journées de visite permettent de diffuser nos connaissances et de sensibiliser tous les praticiens agricoles aux marges de progrès possibles et aux impacts environnementaux. n Conclusions et perspectives La démarche proposée dans le projet MicMac-design a permis de progresser sur les méthodes, les modèles et les outils et a permis d’apporter des références directement mobilisables par le plan Écophyto, aussi bien à l’échelle nationale, compte tenu de la valeur générique des travaux conduits, qu’à l’échelle régionale de Midi-Pyrénées, tout en tenant compte des spécificités expérimentales locales. Les résultats expérimentaux disponibles pour une première rotation seront renforcés avec les résultats de la seconde rotation en cours, ceci afin d’avoir une base de données de six années et ainsi mieux représenter la variabilité inter-annuelle du climat et donc des performances à moyen terme. Références bibliographiques > Site Web du projet : http://www6.inra.fr/micmac-design > Bergez J.E., Raynal H., Launay M., Beaudoin N., Casellas E., Caubel J., Chabrier P., Coucheney E., Dury J., Garcia de Cortazar-Atauri I., Justes E., Mary B., Ripoche D., Ruget F.. 2014. Integrating the STICS crop model into the generic modelling and simulation platform RECORD to address new research and social issues. Environmental Modelling & Software, 62, 370-384. http://dx.doi.org/10.1016/j.envsoft.2014.07.010. > Bedoussac L., Journet E.P., Hauggaard-Nielsen H., Naudin C., Corre-Hellou G., Jensen E.S., Prieur L., Justes E., 2015. Ecological principles underlying the increase of productivity achieved by cereal-grain legume intercrops in organic farming. Agronomy for Sustainable Development. 35: 911-935. http://dx.doi.org/10.1007/s13593-014-0277-7. > Cassigneul A., Alletto L., Benoit P., Bergheaud V., Etiévant V., Dumény V., Le Gac A.L., Chuette D., Rumpel C., Justes E., 2015. Nature and decomposition degree of cover crops influence pesticide sorption: quantification and modelling. Chemosphere, 119, 1007-1014. http://dx. doi.org/10.1016/j.chemosphere.2014.08.082. > Giuliano S., Ryan M.R., Rametti G., Perdrieux F., Justes E., Alletto L., in press. Low-input cropping systems to reduce input dependency and environmental impacts in maize production: a multi-criteria assessment. European Journal of Agronomy. > Plaza-Bonilla D., Nolot J.M., Raffaillac D., Justes E., in press. Cover crops reduce nitrate leaching and improve N recycling in rotations including grain legumes: a field study completed with simulations using the STICS model. Agriculture, Ecosystem and Environnement. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 43 Financement Casdar, Innovations et partenariat 2009 Chap V : Dimensions socio-économiques des transitions Conseillers demain : Accompagner les conseillers pour intégrer l’enjeu de réduction des produits phytosanitaires Olivia David Mail : [email protected] © CA28 Responsables des équipes impliquées • Pilotage et animation : Minas Anne (CA28), David Olivia (CA28), Delbos Claude (CA44) • Groupe « Métier » : André Sébastien (CA54), Aninat JeanBaptiste (CA45), Arnold Philippe (EMC2), Ayriaud Alain (CA44), Baechler Franck (CA41), Brunet Jérôme (FDGEDA18), Coupez David (CA28), Dumoulin François (CA60), Georges Hervé (CA80), Gilet Jean-Dominique (FDGEDA 18), Girard Xavier (CA45), Kannapel Serge (CA57), Laudinot Véronique (CA88), Lemaire Philippe (CA44), Nicolet Jean-Pierre (CA36), Paineau Franck (CA37), Revest Corinne (CA54), Rouyer Xavier (CA55), Savina Jocelyn (CA28), Sene Olivier (CA02), Sexe Mathias (EMC2) • Groupe « Expert » : Cerf Marianne (INRA, UR 1326 SenS), Falgas Claude (YOTTA), Gagneur Charles-Antoine (INRA, UR 1326 SenS), Mischler Pierre (Agro-Transfert RT), Olry Paul (AgroSup Dijon/ EDUTER), Sigwalt Annie (Groupe ESA/ LARESS), de Torcy Bertrand (Trame) Mots clefs Produits phytosanitaires, conseiller, compétences, organisation. Réduction des produits phytosanitaires, évolution du contexte réglementaire et économique, diversification des pratiques, des attentes et du profil des agriculteurs, les « territoires » dans leurs multiples déclinaisons… Tous ces changements entraînent des évolutions dans la manière d’accompagner les agriculteurs ont un impact durable sur le métier du conseiller. Réfléchir la mutation du métier de conseiller en agronomie devient un enjeu collectif. Le projet « Conseillers demain » a été mené, avec des chercheurs, des conseillers et des chefs de service, pour qualifier ces changements de métier et identifier les conditions nécessaires à l’accompagnement des conseillers. Contexte et objectifs Méthodes La construction du projet s’est faite dans le contexte d’Écophyto, les résultats ont été diffusés au moment où le Ministre de l’Agriculture présentait son « projet agro-écologique pour la France » (décembre 2012), mettant ainsi en avant l’importance de l’évolution des systèmes de production dans l’actualité. Le projet « Conseillers demain » vise à enrichir la capacité de réponse et d’adaptation des conseillers et des organisations dans un environnement en changement. Cela passe par : - donner aux acteurs, à commencer par les conseillers euxmêmes, des clés de compréhension et des repères pour mieux définir et appréhender les situations nouvelles ou changeantes dans lesquelles les conseillers interviennent ; - leur proposer des outils et des méthodes pour sécuriser leur action ; - faire des préconisations aux organisations permettant de favoriser le changement. Un groupe métier En positionnant le projet « Conseillers demain » sur la problématique phytosanitaire, nous nous sommes directement confrontés à ce que nous avons ensuite appelé « l’extension des situations de conseil » : de pur technicien, le conseiller en agronomie devient facilitateur du changement, médiateur entre les exploitations agricoles et les acteurs locaux d’une même zone, lui-même ressource d’un environnement en profonde mutation. Pour rester au plus près des réalités de terrain, nous avons constitué un « groupe métier », c'est-à-dire une douzaine de conseillers de terrain désignés par leur organisation. Le dispositif a efficacement fonctionné avec les essais et erreurs que suppose une recherche action. Au fil du temps, des mécanismes collectifs sont apparus, à l’image de ceux utilisés par les conseillers avec les groupes d’agriculteurs confrontés volontairement ou non au changement. Dans les travaux, le choix a été celui de l’observation des ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 45 Conseillers demain : Accompagner les conseillers pour intégrer l’enjeu de réduction des produits phytosanitaires ... conseillers en situation par des chercheurs (ergonomie, didactique professionnelle, sociologie, pédagogie, agronomie), des mises en œuvre sur le terrain et des travaux en petits groupes de conseillers pour : - décrire et mettre à plat le métier de conseiller ; - identifier les difficultés et les besoins ; - formuler des hypothèses sur leurs besoins pour réaliser le métier dans le changement ; - expérimenter les méthodes et évaluer leur intérêt par rapport aux besoins formulés. L’animation a soutenu à la fois l’expression collective du « groupe métier » et la mise en expérience personnelle de chacun des participants. Il s’agit donc d’un travail construit et enrichi au fil des ateliers par les conseillers, qui a fait appel aux mécanismes collectifs tels qu’ils sont utilisés par les conseillers avec des agriculteurs pour créer des conditions de changement de métier. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Proposer aux conseillers des facteurs de sécurité Les résultats du projet sont structurés de la manière suivante : - Des observations de pratiques et une modélisation de la relation de conseil « La modélisation de la relation de conseil » apporte une approche systémique et réflexive du métier de conseiller en agronomie, et permet d’équiper de manière théorique les conseillers et les chefs de service pour mieux comprendre et se positionner dans les évolutions en cours. - Une boîte à outils à l’usage des conseillers et des responsables de service La boîte à outils se veut opérationnelle : proposer des outils et des méthodes aux conseillers qui sont amenés à accompagner des changements de pratique. Il s’agit d’outils souvent connus et éprouvés, l’innovation vient de l’articulation de ces outils dans le cadre de l’activité de conseil et des illustrations pratiques construites par les conseillers. Ces outils et ces méthodes ont pour but de les aider dans quatre domaines : comprendre le contexte de l’agriculteur, accompagner le changement, s’ajuster en situation et gérer la rencontre de conseil. - Des propositions à l’usage des responsables et des organisations Destinées aux employeurs, responsables professionnels et responsables de service, ces propositions ont pour but de décrire et promouvoir les conditions favorables à la mise en œuvre des outils et des méthodes testées et à l’accompagnement des conseillers dans leur changement de métier. - L’illustration par l’exemple du « tour de plaine revisité »... Les 3 premières ressources citées ci-dessus sont illustrées par un exemple : « le tour de plaine revisité ». Au-delà des livrables produits dans le projet, il est intéressant de restituer le vécu des conseillers. Pour la plupart des participants, ce projet sur 3 ans a permis de prendre conscience de la nécessité de faire évoluer le métier de conseiller, dans un contexte professionnel plus complexe. Par la mise à distance de leur propre expérience professionnelle (un projet inter-régional avec des ateliers de travail sur deux jours en dehors du cadre quotidien, de nombreux échanges et partages de questionnements, des interrogations d’experts), les conseillers ont été amenés à considérer leur métier dans sa globalité : « Certes, ma crédibilité auprès des agriculteurs suppose des connaissances techniques, mais cela ne suffit plus : ma posture doit intégrer une dimension relationnelle afin de mieux appréhender les objectifs de chaque agriculteur dans la conduite de son système de production. Mon travail ne consiste pas à apporter une réponse technique mais à accompagner le changement. » Tous les résultats téléchargeables à partir du lien : www.chambre-agriculture-28.com/espace-agriculteurs/ conseillers-demain/ Conclusions et perspectives Pouvoir penser collectivement l’évolution du métier En accédant à une certaine conceptualisation du métier, des conseillers peuvent « décortiquer » leur action pour mieux en parler grâce à l’élaboration d’un langage commun. Ils ont pris conscience que l’évolution du métier passe par des démarches collectives. Le temps de projet a été celui d’une transition, tant personnelle que collective. Pour lui donner suite, il faudra réserver dans nos organisations des moyens pérennes pour élaborer des langages communs, des démarches collectives à la hauteur des enjeux. Comme en témoignent des conseillers du « groupe métier » : « La poursuite sur ce travail (…) ne peut s’envisager seule. Il me semble nécessaire d’organiser des rencontres entre conseillers afin de poursuivre les échanges. » « Ma réflexion sur le métier m’a permis de mettre en pratique les thématiques travaillées au sein de ce projet avec un jeune collègue, afin de l’accompagner dans le démarrage de sa carrière. ». Références bibliographiques > Cerf M., Omon B., Barbier C., David O., Delbos C., Gagneur C.A., Guillot M.N., Lusson J.M., Minas A., Mischler P., Olry P., Petit M.S., 2012. Les métiers d’agent de développement agricole en débat : Comment accompagner des agriculteurs qui changent leur façon de cultiver en grandes cultures ? Innovations Agronomiques 20 (2012), 101-121 > Cerf M. et Maxime F., 2006. La coproduction du conseil : un apprentissage difficile. In B. Lemery, J. Rémy, H. Brives (Eds), Conseiller en agriculture, EDUCAGRI Editions, 137-152. > David O., Delbos C., Falgas C., 2011. Conseillers agronomiques demain : savoirs informels et politiques en crise. Colloque International « Crise et/en éducation », Université Paris Ouest, Nanterre. > Falgas C., Brunet J., 2012. La démarche de co-construction et l’attitude du conseiller. Travaux et Innovations n° 192, novembre 2012. > Petit M.S, Omon B., Bonnin E., Brunet J., Dobrecourt J.F, Geloen M., Paravano L., Robin P., Villard A., Vivier C., Mischler P., Guillot M.N, Cerf M., Olry P., 2010. Vers un nouveau métier de conseiller en production intégrée : Développer des compétences d’accompagnement des agriculteurs, SFER, Colloque « conseiller en agriculture : acteurs, marchés, mutations », 14-15 octobre 2010. 46 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Impacts environnementaux : de l’évaluation à l’action La session est centrée sur la manière d’évaluer les impacts environnementaux de l’utilisation des pesticides, notamment sur l’eau. Les thèmes suivants seront abordés : le suivi de la qualité des eaux (fréquence d’échantillonnage, intérêt des échantillonneurs passifs), l’apport de la recherche sur la compréhension des phénomènes de transfert, la mesure des transferts à l’échelle parcellaire, l’utilisation d’indicateurs, ainsi que des témoignages d’actions visant à réduire les contaminations des eaux par les pesticides. SOMMAIRE PLAGE 2 49 Chaîne Pressions-Impacts 53 Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 47 Financement Écophyto (redevance sur pollutions diffuses), Casdar, Innovation et partenariat 2009 Chap VIII: Des usages aux impacts: indicateurs PLAGE 2 : Conception et mise en œuvre d’une plate-forme d’évaluation environnementale mettant à disposition des acteurs du monde agricole des outils et des indicateurs agri-environnementaux Marie-Béatrice Galan, Alexandre Morin Mail : [email protected], [email protected] Responsables des équipes impliquées • Surleau Caroline, Agro-Transfert Ressources et Territoires, Estrées Mons • Cariolle Michel, ITB (Institut Technique de la Betterave), Paris • Bockstaller Christian, UMR Agronomie Environnement, INRA-Université de Loraine, Nancy Colmar • Guichard Laurence, UMR Agronomie, INRA-AgroParisTech, Grignon • Leclercq Christine, Insitut Polytechnique Lasalle Beauvais Mots clefs Évaluation agri-environnementale, Indicateur, Base de données de référence À l’issue de l’étude de faisabilité réalisée dans le cadre d’un premier projet financé par le CASDAR en 2008 et 2009, les partenaires du projet PLAGE 2 (Agro-Transfert Ressources et Territoires, Ambre Développement, INRA Grignon et Colmar, ITB, Envilys, Lasalle Beauvais, ACTA, Institut de l’élevage, CIRAD, ADEME, Chambres d’Agriculture de Bretagne, de Poitou-Charentes, de Picardie, de l’Aisne, de Seine et Marne et de Charente-Maritime) ont mis en œuvre le cahier des charges qu’ils avaient défini collectivement et qui comprenait : • le développement d’un site internet dont la finalité est de mettre à disposition gratuitement des informations sur un grand nombre d’outils d’évaluation agri-environnementale issus des acteurs de la recherche, du développement et de la formation, d’aider les utilisateurs potentiels à choisir l’outil le plus adapté à leurs besoins et de rendre accessible des ressources documentaires sur l’évaluation des pratiques agricoles. Ce site Internet, dont la maintenance est assurée par Agro-Transfert Ressources et Territoires, est accessible via le lien www.plage-evaluation.fr. • la création d’un réseau de compétences sur le thème de l’évaluation agri-environnementale et plus globalement sur l’évaluation des pratiques agricoles au regard de la durabilité des territoires. Ce réseau, animé également par Agro-Transfert Ressources et Territoires, est structuré autour de deux communautés : un groupe « méthodes » et un groupe « usages ». L’ambition des partenaires en 2013 est de créer une association loi 1901 pour donner un statut juridique et une meilleure visibilité au réseau d’acteurs. Contexte et objectifs La prise en compte croissante de la dimension environnementale dans les politiques d’orientation des pratiques agricoles et dans les travaux de recherche et de développement en agronomie a conduit depuis une quinzaine d’années à une multiplication de travaux sur l’évaluation agri-environnementale, aboutissant, dans de nombreux cas, à la conception de méthodes et d’indicateurs voire de prototypes informatiques1 1. la méthode DEXEL de IDELE, IDEA issue de travaux de la DGER, Dialogue du bureau d’étude SOLAGRO, INDIGO issue des travaux de l’UMR Nancy-Colmar (LAE), DAEG mis au point par Agro-Transfert Ressources et Territoires, MERLIN proposé par la Chambre d’Agriculture de Poitou-Charentes, et les travaux de l’INRA de Rennes sur l’Analyse de Cycle de Vie. d’origine diverses (INRA, Instituts Techniques, Chambres d’agriculture, Agro-Transfert..). Ces outils permettent d’estimer les impacts des pratiques agricoles au regard des différentes dimensions du développement durable et des thématiques environnementales et, pour certains d’entre eux, de proposer des plans d’actions à différentes échelles de temps et d’espace. Face à cette diversité, un ensemble d’acteurs de la recherche, de la formation et du développement agricole, concepteurs ou utilisateurs d’outils d’évaluation, s’est mobilisé à travers le projet PLAGE pour caractériser les outils existants et les situations d’évaluation, pour expliciter la diversité d’outils disponibles auprès de l’ensemble des acteurs du monde agricole afin de faciliter leurs usages, ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 49 PLAGE 2 : Conception et mise en œuvre d’une plate-forme d’évaluation environnementale mettant à disposition des acteurs du monde agricole des outils et des indicateurs agri-environnementaux ... mais également pour mutualiser les efforts de maintenance informatique et de paramétrage des outils et des BDD de références. En vue d’atteindre ces différents objectifs, les partenaires du projet ont conçu une plate-forme WEB et une plate-forme de compétences qui permettent de : • mettre à disposition de tout acteur du monde agricole, différents outils et indicateurs agri-environnementaux et d’évaluation de la durabilité, • guider les utilisateurs potentiels dans leur choix, en leur permettant de préciser leurs objectifs et de mieux caractériser les atouts et limites de chacun des outils disponibles au regard de ces objectifs, • d’assurer la maintenance et les mises à jour des bases de données nécessaires aux calculs des différents indicateurs et outils présents sur la plate-forme. Le projet PLAGE 1 a produit le cahier des charges de la plateforme WEB et a constitué un réseau ouvert d’acteurs agricoles impliqués dans l’évaluation agri-environnementale. Le projet PLAGE 2 a permis de concevoir cette plate-forme, d’en définir les conditions de maintenance et d’évolution mais aussi de structurer et d’élargir le réseau d’acteurs. Méthodes Plusieurs groupes de travail ont été mis en place pour atteindre les objectifs du projet : • Un groupe « charte », chargé de définir les modalités de fonctionnement du réseau d’experts ainsi que les conditions de pérennisation de la plate-forme internet. Plusieurs pistes ont été étudiées. • Un groupe « utilisateurs », chargé de préciser le cahier des charges du site Internet et notamment de définir les critères permettant de guider les futurs utilisateurs d’outils dans leur choix. • Un groupe « informatique et BDD », dont la mission était de réaliser le développement informatique de la plate-forme internet avec l’ensemble de ses composantes : aide au choix, BDD de référence, espace ressources. • Un groupe « Ecophyto » : l’objectif de ce groupe était de mettre en évidence les usages possibles de la plate-forme dans le cadre du Plan Ecophyto et de réaliser une expertise sur l’évaluation des effets collatéraux à une réduction d’usage de produits phytosanitaires. • Un groupe « communication », chargé de définir la charte graphique PLAGE, de rédiger les supports de communication et d’organiser le colloque de clôture. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Un site internet www.plage-evaluation.fr PLAGE (Figure 1), est un site web qui contient : • des informations sur des méthodes et outils d’évaluation environnementale, économique et sociale, informatisées ou non, • des liens vers les logiciels informatiques correspondant à ces méthodes lorsqu’ils existent, 50 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Figure 1 : Page d’accueil du site internet PLAGE • une aide au choix des méthodes, • une veille technique et scientifique sur les outils et projets dédiés à l’évaluation agri-environnementale et à la contribution au développement durable. Ce site Web est évolutif et pourra proposer à l’avenir de nouveaux services comme la mise à disposition de bases de données de références, mises à jour régulièrement, utiles au calcul des indicateurs. Cette plate-forme permet de favoriser l’appropriation et le développement de l’usage des indicateurs et outils concernés. Un réseau de compétences PLAGE est aussi un réseau d’acteurs qui s’appuie sur deux groupes de travail : • Un groupe « méthodes » lieu d’échanges entre les concepteurs et de mutualisation des connaissances sur les indicateurs. Ce groupe propose notamment au comité scientifique de nouveaux outils et indicateurs à référencer et alimente l’espace ressources du site. • Un groupe « usages », lieu d’échanges et de témoignages sur les différentes utilisations des outils et leurs évolutions. Ce groupe propose au comité de pilotage des améliorations de la plate-forme et notamment de l’aide au choix des outils. Ce réseau a d’ores et déjà produit : • une séquence de formation sur le diagnostic agri-environnemental en 4e année de l’école d’ingénieurs agricoles LaSalle Beauvais, • un rapport d’expertise sur l’évaluation dans les exploitations agricoles des effets induits par les pratiques visant la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires : grille d’analyse (pratiques, effets, indicateurs), méthode de caractérisation des stratégies, premiers résultats sur une dizaine d’exploitations. Deux expertises non prévues initialement dans le projet ont également été réalisées. Il s’agit de : • un inventaire et une analyse comparative des données de référence utilisées pour l’évaluation de systèmes de culture innovants et économes en intrants, pour le compte du RMT Systèmes de Culture Innovants, afin de faciliter l’harmonisation des méthodes de calcul des performances et de per- PLAGE 2 : Conception et mise en œuvre d’une plate-forme d’évaluation environnementale mettant à disposition des acteurs du monde agricole des outils et des indicateurs agri-environnementaux mettre l’analyse croisée des résultats obtenus par les partenaires. • une expertise sur les indicateurs et méthodes pour l’évaluation des approvisionnements en biomasse, en octobre 2012, sollicitée par les partenaires du RMT Biomasse dans le cadre du projet OPTABIOM pour donner un avis sur la méthode d’évaluation des plans d’approvisionnement qu’ils ont élaborée dans le cadre du projet. Les questions posées par les partenaires étaient plus précisément : 1) la méthode choisie pour évaluer des approvisionnements en biomasse dans le projet OPTABIOM est-elle pertinente ? 2) les échelles spatiales et temporelles sont-elles correctement intégrées dans cette évaluation ? Vers une base de données de référence commune La comparaison des bases de données internes aux outils informatiques des partenaires a permis d’identifier un pool de données communes aux divers outils et de constituer la structure d’une base de données de références commune. Il s’agit de données accessibles publiquement mais parfois difficiles d’accès car non centralisées et pouvant provenir de plusieurs sources, comme la liste et la composition des produits phytopharmaceutiques, la liste des caractéristiques des substances actives, la liste, la composition et les caractéristiques environnementales des engrais minéraux et fertilisants organiques, etc. Ce travail va permettre aux partenaires de PLAGE de bénéficier d’une base unique, centralisée et mise à jour régulièrement. Le réseau PLAGE envisage également de proposer la consultation d’une partie de cette base de données de référence sur le site internet de PLAGE, afin d’assurer une plus grande transparence des références couramment utilisées dans l’évaluation environnementale et de la durabilité et faciliter l’interprétation des résultats d’une évaluation. TÉMOIGNAGE LORS DU COLLOQUE DE CLÔTURE, 14 JUIN 2013 Magali BENOIT, Inspection de l’enseignement agricole. Quel intérêt pédagogique de la plate-forme PLAGE ? Autant pour le contenu que pour l’ergonomie, la plate-forme PLAGE est tout à fait en phase avec nos démarches et les compétences attendues en BTSA et en bac professionnel. En effet, la plate-forme peut venir en appui à : - des enseignants pour conduire leurs cours, - des élèves pour alimenter leurs travaux de l’évaluation finale (diagnostic de durabilité en bac pro, étude technique en BTSA), - des autres acteurs de l’enseignement agricole impliqués dans les projets en lien avec les politiques du Ministère de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la Forêt. Un mode de fonctionnement collaboratif Pour assurer le fonctionnement du réseau de compétences, la maintenance et la pérennité de la plate-forme internet, les partenaires du projet ont mis en place une organisation qui repose sur : • un comité de pilotage, dont le président est désigné par les membres du comité de pilotage, ainsi qu’un bureau, chargé d’assurer la gestion de la plate-forme, • un comité scientifique, dont le président est désigné par les membres du comité de pilotage, • un administrateur et animateur de la plate-forme. Par ailleurs, Agro-Transfert Ressources et Territoires a été désigné par le comité de pilotage PLAGE « organisme support » chargé de la gestion financière de la plate-forme. n Conclusions et perspectives Le colloque de clôture du projet s’est tenu le 14 juin 2013 à Amiens. Il a été l’occasion de mesurer tout l’intérêt de la plate-forme PLAGE pour l’ensemble de la communauté Recherche-Formation-Développement du monde agricole (cf Encadré 1) et de faire connaître l’intention des partenaires de poursuivre leur collaboration dans le cadre d’une association loi 1901. Les animateurs des groupes « usages » et « méthodes » ont annoncé les pistes de travail et leur souhait d’accueillir de nouveaux partenaires pour élargir le réseau d’experts et répondre toujours mieux aux besoins des acteurs et commanditaires de l’évaluation agri-environnementale. Les participants au colloque ont également exprimé le souhait de la tenue annuelle d’un séminaire autour des outils d’évaluation de la durabilité sur le modèle du colloque. Mais la pérénnisation du réseau et la maintenance de la plate-forme nécessitent des moyens humains et financiers. C’est pourquoi les partenaires se sont tournés vers le GIS Relance Agronomique et le Ministère de l’Agriculture afin d’étudier différents scenarii de financement. Références bibliographiques > Galan M.B., Surleau C., Leclercq C., Bernard M., Bockstaller C., Guichard L., Minette S., Boizard H., Cariolle M, 2012. PLAGE 1 : Etude de faisabilité d’une plate-forme WEB dédiée à l’évaluation agri-environnementale. Innovations Agronomiques 25 , 41-53. > Leclercq C., Attoumani-Ronceux A., Bockstaller C., Galan M.B., 2011 : Usages des méthodes d’évaluation environnementale. Actes du colloque « Ecologisation des politiques publiques », INRA, Avignon, mars 2011. > Dupriez M., 2012. Evaluation dans les exploitations agricoles des effets induits par les pratiques visant la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires. Mémoire de fin d’études. > Blanchard M., Galan M.B., 2012. Inventaire et analyse comparative des données de référence utilisées pour l’évaluation de systèmes de culture innovants et économes en intrants. Rapport d’expertise du réseau PLAGE. RMT Systèmes de Culture innovants. > Galan M.B., Bockstaller C., Cariolle M., 2012. Indicateurs et méthodes pour l’évaluation des approvisionnements en biomasse. Rapport d’expertise du réseau PLAGE. RMT Biomasse. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 51 Financement Écophyto (redevance pollutions diffuses) ONEMA R&D 2012 Chap VII : Des usages aux impacts: indicateurs Test d’outils intégratifs pour évaluer l’impact des pratiques phytosanitaires sur les cours d’eau Véronique Gouy Mail : [email protected] © Photo Irstea Responsables des équipes impliquées Mots clefs • Le Dréau Matthieu, Margoum Christelle (Laboratoire de chimie des milieux aquatiques) • François Adeline, Chaumot Arnaud, Geffard Olivier (Laboratoire d’écotoxicologie) • Foulquier Arnaud, Pesce Stéphane (Écologie microbienne des hydrosystèmes anthropisés) • Le Hénaff Guy, Gouy Véronique (Pollutions agricoles diffuses), Irstea Lyon • Mazzella Nicolas (Contaminants anthropiques et réponses des milieux aquatiques), Irstea Bordeaux Échantillonnage passif, bio-surveillance, gammares, communautés microbiennes, pesticides, qualité des eaux de surface. Ce projet vise à évaluer l’intérêt d’outils intégratifs (échantillonneurs passifs, gammares encagés, communautés microbiennes autochtones) exposés conjointement durant une semaine à un mois au sein de deux cours d’eau aux contextes agro-pédo-climatiques distincts. Grâce à leurs caractères intégratifs et à leur sensibilité, ces outils ont mis en évidence une différenciation spatiale et temporelle de la contamination en lien avec l’occupation des sols et la pluviométrie. L’intérêt d’envisager leur utilisation pour améliorer les diagnostics de la contamination et évaluer l’efficacité de plans d’action est mis en avant. Contexte et objectifs Méthodes Pour effectuer le diagnostic de la contamination des milieux aquatiques par les produits phytosanitaires, les gestionnaires (agents des syndicats d’aménagement de bassins, des groupes régionaux phytosanitaires, du territoire (dans le cadre des Plans d’Action Territoriaux des Agences de l’eau, notamment) s’appuient essentiellement sur une stratégie d’analyse chimique, associée à un échantillonnage ponctuel, au mieux mensuel. Cependant cette méthodologie ne rend pas compte i) de la variabilité temporelle de la contamination ni ii) des effets biologiques induits. Ainsi, ces informations permettent difficilement d’évaluer l’impact des pratiques phytosanitaires sur la qualité de l’eau et de mesurer l’efficacité de plans d’action en termes de réduction d’impact. Ce travail cherche à évaluer l’apport à cette problématique de nouveaux outils intégratifs chimiques (échantillonneurs passifs) ou biologiques (encagement de gammares, étude des communautés microbiennes autochtones) développés à l’Irstea. On souhaite mettre en avant leur intérêt et leur complémentarité pour mieux rendre compte de l’évolution spatio-temporelle de la contamination, mais aussi mieux cerner les conditions de leur mise en œuvre pour faciliter leur appropriation par les gestionnaires. Suivi chimique Deux types d’échantillonneurs passifs ont été utilisés : la passive-SBSE (Stir Bar Sorptive Extraction) échantillonnant des molécules hydrophobes à moyennement hydrophiles et le POCIS (Polar Organic Chemical Integrative Sampler) échantillonnant une majorité de molécules hydrophiles. Ces outils, placés dans le milieu, réalisent un échantillonnage en continu et améliorent ainsi la représentativité de la mesure en permettant d’obtenir une concentration intégrée sur le temps d’exposition de l’échantillonneur. Dans cette étude, 49 pesticides (28 herbicides, 9 fongicides et 12 insecticides) ont été recherchés. Suivi biologique Il a consisté dans le déploiement de deux types d’outils : - des gammares encagés (biomonitoring actif) sur 7 jours pendant 4 semaines consécutives, avec la mesure : 1) de l’inhibition de l’acétylcholinestérase, caractéristique d’un épisode de neurotoxicité dont les insecticides organophosphorés et les carbamates sont les plus susceptibles d’être en cause au sein des cours d’eau naturels en milieu agricole, 2) du taux d’alimentation marqueur de toxicité globale notamment sensible à la présence de phytosanitaires. ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 53 Test d’outils intégratifs pour évaluer l’impact des pratiques phytosanitaires sur les cours d’eau ... - l’étude des communautés microbiennes autochtones (biomonitoring passif) avec la mesure de paramètres fonctionnels sensibles à la présence de toxiques : 1) la dégradation de litières végétales, non spécifique des pesticides mais marqueur de la qualité écologique du milieu, 2) la capacité d’acquisition de tolérance des biofilms phototrophes périphytiques comme indicateur de la pression toxique à une famille de substances actives (tests de toxicité aiguë basés sur l’approche PICT, « Pollution Induced Community Tolerance »). Pour affiner les méthodologies d’utilisation et d’interprétation des réponses de ces outils, une campagne de déploiement conjoint a été réalisée en juin 2014 sur deux bassins versants différenciés : - le premier bassin versant est celui de l’Ardières, dans le Beaujolais viticole, soumis à une pression forte en produits phytosanitaires. Trois points de suivi ont été sélectionnés sur la rivière selon un gradient croissant d’occupation du sol par la vigne ; - le second bassin versant est celui de la Coise, dans les Monts du Lyonnais, associant polyculture et élevage. La culture du maïs est dominante au mois de juin. Trois sites de suivi ont également été sélectionnés : un point sur la rivière de la Coise (sous-bassin 2 : « SBV2 ») et deux points sur deux de ses affluents, caractérisés par des intensités d’usages agricoles différenciées (« SBV1 » : de faible pression agricole et « SBV3 » de forte pression agricole). paramètres biologiques mesurés sur les mêmes périodes d’exposition. Par exemple, en cohérence avec les concentrations importantes d’insecticides organo-phosphorés mesurées en aval du site viticole, une forte inhibition de l’acétylcholinestérase chez des gammares encagés a été observée (Figure 1). Bien que non spécifiques des pesticides, les taux d’alimentation des gammares encagés et les taux de décomposition de litières par les communautés microbiennes et de macro-invertébrés autochtones démontrent également une forte toxicité en aval de ce bassin versant. Les paramètres biologiques ont également mis en avant, sur le site intermédiaire, des perturbations sans que les concentrations en pesticides mesurées ne suffisent à les expliquer, révélant l’influence d’autres facteurs d’impact (substances phytosanitaires non mesurées ? mélanges plus toxiques ? autres polluants ?). Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Le déploiement des échantillonneurs passifs a permis de différencier les types de contamination des deux agrosystèmes étudiés : prédominance des fongicides et insecticides sur le bassin viticole et des herbicides sur le bassin en maïsiculture. Ils rendent également compte d’une différenciation spatiale de la contamination cohérente avec l’occupation du sol. On note que les échantillonneurs passifs ont intégré des pics de contamination fugaces directement liés à des épisodes de crue, mettant en exergue la présence de certaines molécules non échantillonnées par les prélèvements ponctuels réalisés sur la même période dans le cadre des suivis de surveillance (RCS et RCO) : par exemple l’acétochlore sur la Coise ainsi que des insecticides organophosphorés sur l’Ardières. Une analyse qualitative, par screening de plus de 200 molécules phytosanitaires, des substances actives détectées sur les échantillonneurs passifs comparées à celles détectées dans l’échantillon ponctuel sur la même période, met en évidence une gamme beaucoup plus importante de substances retrouvées via l’échantillonnage passif (par exemple 47 contre 18 en aval de l’Ardières). Cependant, une limite encore non résolue des échantillonneurs passifs réside dans leur difficulté à échantillonner les substances très hydrophiles comme le glyphosate et l’AMPA (produit de dégradation). Les outils de bio-surveillance ont permis de conforter ou de nuancer le diagnostic chimique au regard des valeurs des 54 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Figure 1 : a. Somme des concentrations en chlorpyriphos méthyl et éthyl, b. Inhibition de l’AChE sur gammares encagés – Bassin de l’Ardières, Sites Amont, Intermédiaire et Aval et chaque semaine d’exposition. Figure 2 : Tests de toxicité (croissance en 48h) de l’acétochlore sur les biofilms phototrophes - Bassin de la Coise, Sites SBV1, SBV2 et SBV3. Test d’outils intégratifs pour évaluer l’impact des pratiques phytosanitaires sur les cours d’eau Sur la Coise, aucune inhibition de l’acétylcholinestérase n’a été mise en évidence, ce qui a confirmé que les insecticides organophosphorés et carbamates ne sont pas un enjeu sur ce bassin. Cependant, l’inhibition alimentaire observée sur les gammares encagés a démontré des impacts biologiques pouvant être importants et discriminés dans le temps et dans l’espace, en cohérence avec l’évolution de la contami- nation en pesticides mesurée via les échantillonneurs passifs. Des tests de toxicité aiguë réalisés sur le biofilm phototrophe autochtone ont également montré une augmentation de sa tolérance vis-à-vis de l’acétochlore en fonction du niveau de présence de cette substance, ou d’autres herbicides présentant le même mode d’action, comme le métolachlore, au sein des trois bassins étudiés (Figure 2). n Conclusions et perspectives Ces premiers résultats mettent en exergue la grande cohérence des réponses des différents outils et leurs apports spécifiques pour améliorer les diagnostics de la contamination des eaux de surface par les pesticides et rendre compte de son évolution spatiale ou temporelle grâce, notamment, au caractère plus intégratif de ces outils et à leur sensibilité. Les outils de bio-surveillance apportent des éléments de diagnostic importants quant à l’estimation de l’impact toxique et de la gravité des impacts globaux ou plus spécifiques aux pesticides. Ces essais sont en cours de consolidation sur les mêmes bassins et sur un nouveau bassin à dominante grandes cultures (bassin du Charlet au sud de Clermont Ferrand). Compte tenu de ces résultats, il semble important pour faciliter le transfert de ces outils vers les opérationnels 1) d’élargir la connaissance des conditions de leur applicabilité pour une gamme diversifiée de contextes agro-pédo-climatiques, 2) de mieux caractériser à quelles questions du terrain ils peuvent d’ores et déjà répondre et 3) d’étudier leurs conditions d’appropriation par les acteurs de terrain. Références bibliographiques > Grenier H., Gouy V., Pesce S., Assoumani A., Margoum C., Coquery M., Larrose A., Dabrin A., Geffard O., Chaumot A., Jubeaux G., Mazzella N., Morin S., 2014. Evaluation de la qualité chimique et biologique des cours d’eau vis-à-vis des produits phytosanitaires : Intérêts et limites des capteurs passifs et d’outils d’évaluation d’impact biologique. Irstea, 82 p. > Le Dréau M., Chaumot A., Foulquier A., François A., Geffard O., Margoum C., Pesce S., Martin C., Mazzella N., Gouy V., 2015. Complémentarité d’échantillonneurs passifs et de bio-indicateurs pour évaluer la contamination en pesticides des eaux de surface de bassins versants agricoles. Communication orale et Actes du 45e congrès du Groupe Français des Pesticides, 27-29 mai 2015, Versailles. Sous presse. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 55 Échanges sur les stratégies de recherches au niveau européen : quelle valeur ajoutée à une meilleure coordination des programmes ? La plupart des autres pays européens sont engagés dans des programmes de recherche nationaux visant à faciliter la mise en œuvre des principes de la protection intégrée des cultures comme requis par la Directive 2009/128/EC. Compte tenu des préoccupations communes aux différents pays, un ERA-NET (C-IPM, Coordinated Integrated Pest Mangement in Europe) a été mis en place par la Commission Européenne afin de coordonner les programmes de recherche nationaux relatifs à la protection intégrée et aux usages mineurs. Coordonné par la France, C-IPM rassemble désormais 34 partenaires issus de 21 pays et a pour missions : - d’élaborer un agenda de recherche stratégique commun sur la protection intégrée en Europe ; - de coordonner des appels d’offres transnationaux sur la protection intégrée et les usages mineurs ; - de faciliter la mise en œuvre de la protection intégrée auprès des agriculteurs européens. Après avoir présenté C-IPM ainsi que deux exemples illustrant l’intérêt de partager des données et de mutualiser des dispositifs conduits à l’échelle nationale, la session a pour objet de discuter la valeur ajoutée que l’on peut attendre d’une meilleure coordination des programmes nationaux et d’identifier les thématiques du Plan Écophyto qui bénéficieraient le plus d’une telle coordination européenne. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 57 Projets de recherche, issus de différents appels à projets de recherche (CASDAR, MEDDE, ANR, ANSES …), contribuant à satisfaire les objectifs de réduction de l’usage des intrants phytosanitaires du plan Écophyto SOMMAIRE 4P 61 AGRICAN 63 BASIS3P 67 DEFILEG 69 Échaudure des pommes 73 EcoFusa 77 ECOPROTECTGRAIN 81 FERTIPRO 85 INFLOWEB 89 LANDSCAPHID 91 MEPIMEX 95 OAD SERRE 99 TABLE-RES 101 VASCUlég 105 VIRAPHID 109 Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 59 Financement Casdar, Innovation et partenariat 2010 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants 4P : Évaluation des caractéristiques et de l’intérêt agronomique de préparations simples de plantes pour des productions fruitières, légumières et viticoles économes en intrants Patrice Marchand Mail : [email protected] © Aude Coulombel Responsables des équipes impliquées •F uret Arnaud, Navarro Jean-Michel, ADAbio, Montmelian •M aille Eric, AGROBIO Périgord •C haput Cécile, CA IdF, Bidaut Florent, CA71, Larrieu Jean-François, CA82 •A rufat Alain, CIVAMBio66 •O ste Sandrine, Tournant Ludovic, Coulon Audrey, FREDON Nord-Pas-de-Calais •P arveaud Claude-Eric, Chovelon Marc, Gomez Christelle, Lambion Jérôme, Ondet Sophie-Joy, GRAB, Avignon •C onseil Mathieu, IBB, Rennes •A veline Nicolas, Molot Bernard, Berthier Céline, IFV pôle Bourgogne •B runet Jean-Luc, Belzunces Luc P, INRA-Laboratoire de Toxicologie Environnementale, Avignon • Bonafos Romain, INRA, Services Déconcentrés d’Appui à la Recherche, Montpellier • Guillet Bertrand, SupAgro Montpellier • Isambert Côme, Jonis Monique, ITAB • Bertrand Cédric, Andreu Vanessa LCBE UPVD, Perpignan • Treuvey Nadine, Pierre Sandra Prisca, SERAIL/CTIFL, Bellegarde Mots clefs Biocontrôle, Tuta absoluta, tomate, culture, partenariat, synergie. Chap VIII: Des usages aux impacts: indicateursrojet 4P « Protection des Plantes Par les Plantes » a porté entre 2009 et 2013 sur la recherche d’alternatives à l’utilisation de pesticides, en s’appuyant sur l’évaluation de préparations à base de plantes (infusions, décoctions de prêle, armoise, absinthe et saule) dans un objectif de protection des cultures contre les bioagresseurs, en particulier en viticulture. Le 4P s’est concentré sur l’étude des propriétés fongistatiques ou fongicides, la composition chimique et l’écotoxicité de ces extraits. L’étude des efficacités s’est appuyée sur des expérimentations de terrain réalisées sur un réseau de parcelles. Ce programme pluridisciplinaire s’est attaché à développer des solutions de biocontrôle, dans le cadre réglementaire pour les Préparations Naturelles Peu Préoccupantes. Il a pu mettre en évidence l’intérêt de ces préparations, définir les usages les plus caractéristiques (Bonnes Pratiques Agricoles), en particulier en viticulture dans la réduction des doses de cuivre et de soufre. Ces résultats sont encourageants, et bien que morcelés et partiels, ils sont en cours de valorisation effective grâce à d’autres travaux internationaux. Contexte et objectifs Un certain nombre d’agriculteurs biologiques mais également conventionnels utilisaient de façon plus ou moins empirique des préparations simples de plantes, avec l’objectif de conférer aux plantes cultivées une meilleure résistance aux attaques des bioagresseurs et/ou de réduire les traitements phytopharmaceutiques (nombre, fréquence, doses…). Les connaissances scientifiques concernant le mode préparatoire de ces produits et leurs modalités d’utilisation sont rares et partielles mais sont en augmentation régulière. La « rationalisation » de l’usage de ces produits doit permettre de répondre à l’une des demandes sociétales majeures de notre époque, à savoir la production d’aliments sains, non seulement pour les consommateurs (pas de résidus de pesticides) mais également pour l’environnement (pas de pollution des eaux et des sols, respect des équilibres naturels) et les utilisateurs (risques moindres voire nuls pour la santé de l’agriculteur qui utilise ces produits). Pour que ces préparations puissent être utilisées avec une efficacité reproductible, il est primordial de comprendre, même partiellement, leur mode d’action de façon à pouvoir optimiser l’extraction des substances actives, le processus de fabrication, la stabilisation de ces préparations, les dates et les doses d’application, afin de protéger qualitativement et quantitativement les cultures de façon satisfaisante. ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 61 4P : Évaluation des caractéristiques et de l’intérêt agronomique de préparations simples de plantes pour des productions fruitières, légumières et viticoles économes en intrants ... Les objectifs détaillés poursuivis dans ce projet étaient de : 1. montrer des efficacités in vitro ; 2. caractériser les extraits ; 3. tester l’innocuité des préparations (risques de toxicité sur les organismes non cibles : organismes aquatiques, abeilles) ; 4. tester l’efficacité sur plantes en pots ; 5. tester l’efficacité en plein champ (réseau de parcelles) ; 6. fournir aux agriculteurs des références pratiques. Méthodes Cinq plantes ont été retenues suite à une enquête multi-filières : prêle, saule blanc/osier, armoise, menthe poivrée et absinthe. Les préparations à base de plantes ont été réalisées et testées sous formes aqueuses (décoctions, infusions, tisanes) et d’extraits hydro-alcooliques, à partir des mêmes plantes sèches et d’une recette commune. Le projet a permis de tester : - Des préparations à base de plantes, extraction aqueuse (tisanes). > Plus de 40 expérimentations en maraîchage, viticulture, arboriculture sur 1 an en pot et au champ. - Des préparations hydro-alcooliques de plantes (décoction/ macération). > Plus de 70 expérimentations en maraîchage, viticulture, arboriculture sur 3 ans en pot et au champ. - Des expérimentations en laboratoire : > Analyse des capacités de stimulation des défenses métabolomiques des plantes (SDP), > Résultats écotoxiques sur insectes auxiliaires, > Analyse de la composition des extraits de plantes. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto En cultures assolées de plein champ, les résultats quoique intéressants et positifs, sont non reproductibles d’une année Tableau 1 : Efficacité des PNPP en viticulture et arboriculture sur l’autre et d’une station à l’autre, car trop dépendants des conditions d’utilisation et des variétés. En viticulture et arboriculture, elles se sont révélées plus efficaces, même avec une reproductibilité partielle, confirmant les utilisations régulières pratiquées sur le terrain. Ces préparations sont surtout intéressantes en complément des stratégies habituelles mobilisées en agriculture biologique, dans l’accompagnement des réductions de doses appliquées, de façon volontaire (soufre) ou obligatoire (cuivre) en particulier pour leurs propriétés antisporulantes contre Plasmopara viticola (Tableau 1). Les résultats ont été diffusés dans de nombreux congrès et une journée complète dédiée au programme 4P a été organisée par l’ITAB début 2013. Homologations Les approbations en substances actives étant hors de portée financière, nous avons déposé les dossiers de substance de base pour les 4 plantes du 4P. Deux extraits sont actuellement approuvés, la prêle (Equisetum arvense) et l’écorce de saule (Salix cortex). Les deux autres extraits d’armoise et d’absinthe ne seront pas approuvés dans cette catégorie et devront trouver d’autres voies. n Conclusions et perspectives Une « Journée 4P » a été organisée en 2013, les Actes sont en ligne sur le site de l’ITAB (http://www.itab.asso.fr/ publications/jt-intrants2013.php). Les tisanes sélectionnées ont montré des efficacités intéressantes et deux tisanes (la prêle, Equisetum arvense, et l’écorce de saule, Salix cortex) sont approuvées et utilisables par les agriculteurs, Un programme d’expérimentation CASDAR similaire est en cours sur les huiles essentielles en tenant compte des acquis du projet 4P. Un document guide « Conduire des essais d’expérimentation avec des extraits de plantes » est prévu, à l’initiative de l’ITAB, pour 2016. Références bibliographiques > Marchand P., 2011. Activité antifongique de la Prêle, Alter Agri, 110, pp25-26. > Marchand P. et al., 2014. Evaluation des caractéristiques et de l’intérêt agronomique de préparations simples de plantes, pour des productions fruitières, légumières et viticoles économes en intrants, Innovations Agronomiques, 34, pp83-96. > Marchand P. et al., 2015. Intérêt agronomique de préparations simples de plantes, pour des productions viticoles économes en intrants, Revue des Œnologues, 155, pp25-28. > Marchand P., 2015. .Basic Substances: An approval opportunity for Low Concern Natural Products under EU pesticide regulation, Pest Management Science, DOI: 10.1002/ps.3997 > Marchand P., 2015., Le saule ou osier : Un SDN antifongique, Alter Agri, 130, p31. 62 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Financement Ecophyto (redevance pollutions diffuses) ANSES EST 2010 Chap VIII: Exposition aux pesticides et santé humaine AGRICAN : Activités agricoles et risque de cancers chez les affiliés du régime agricole – Résultats intermédiaires de l’étude AGRICAN (AGRIculture et CANcers) Lebailly Pierre Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées •B aldi Isabelle, Université de Bordeaux, ISPED, Laboratoire Santé Travail Environnement, Centre Inserm U897 « Epidémiologie – Biostatistique » • Gagey Michel, Santé Sécurité au Travail, CCMSA Bagnolet • Velten Michel et Guizard Anne Valérie, réseau Francim des registres de cancers • Lebailly Pierre, UMR1086 INSERM Cancers & Préventions Mots clefs Cohorte, cancers, pesticides, facteurs de risque, professionnel Un relatif consensus existe au niveau international pour conclure à un risque différent de cancers chez les personnes travaillant en milieu agricole. Cependant, l’implication de l’exposition aux pesticides fait toujours débat. La conduite de vastes études épidémiologiques est une des solutions pour répondre à ces questions. Ainsi, la cohorte AGRICAN a permis l’inclusion de plus de 180 000 affiliés du régime agricole. Même si l’espérance de vie des affiliés MSA inclus est supérieure à celle de la population générale, certainement du fait du tabagisme nettement moindre, l’incidence de cancers n’est pas différente et certains cancers, comme attendu d’après les données internationales, sont retrouvés plus fréquemment (prostate, mélanome, cancers hématologiques). Les premières analyses sur les cancers les plus fréquents (prostate et poumons) montrent l’implication de différentes tâches agricoles et de l’utilisation de pesticides sur certaines cultures ou animaux Contexte et objectifs Les cancers représentent la première cause de décès en France comme dans de nombreux pays riches. Les facteurs de risque sont encore mal connus pour de nombreux cancers même pour certains parmi les plus fréquents (prostate, sein pour exemples). L’agriculture française est au premier plan en Europe pour de nombreuses productions mais aussi pour l’utilisation de pesticides. Ainsi, l’exposition professionnelle directe ou indirecte aux pesticides concerne une population agricole très nombreuse, environ 800 000 unités de travail à temps plein comprenant, outre les chefs d’exploitation, des salariés permanents à temps plein, à temps partiel ou saisonniers et des personnes ayant une activité sur l’exploitation. Par ailleurs, de nombreux arguments existent aujourd’hui dans la littérature scientifique en faveur de risques de santé pour les personnes professionnellement exposées à certains pesticides (cancers, troubles de la reproduction, maladies neurologiques,…) [Inserm 2013 ; Ntzani 2013], plaçant cette question parmi les grands enjeux de santé publique. Pour la nuisance la plus étudiée à ce jour, les pesticides, de nombreuses interrogations persistent car i) certains pesticides n’ont quasiment pas été étudiés (antiparasitaires utilisés sur animaux, biocides utilisés dans les bâtiments, nombreuses familles chimiques de pesticides très utilisées en Europe mais pas ou peu aux Etats-Unis) et ii) aucune méthode validée et consensuelle n’existe à ce jour pour identifier les personnes exposées (tâches à prendre en considération, matières actives utilisées) ou quantifier leur niveau d’exposition. La conduite de vastes études épidémiologiques est une des solutions pour répondre à ces questions. La cohorte AGRICAN a donc été mise en place pour répondre à deux objectifs principaux : 1) quel est l’état de santé de la population agricole par rapport à la population générale notamment en termes de cancers globalement et par type de cancer, et 2) Quels sont les éventuels secteurs professionnels, tâches et nuisances (dont les expositions directes et indirectes aux pesticides) à risque de cancers ? Méthodes L’étude AGRICAN (Figure 1) est une étude de cohorte prospective. Sa phase d’inclusion portait sur tous les affiliés (salariés et non-salariés, actifs ou retraités) au régime agricole adultes en 2004, ayant cotisé au moins 3 ans à ce régime et résidant dans un des départements couverts par l’étude. L’inclusion s’est déroulée entre novembre 2005 et fin décembre 2007 et a permis d’inclure, via le retour d’un auto-questionnaire, plus de 180 000 affiliés ce qui en a fait la plus vaste cohorte prospective agricole au niveau ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 63 AGRICAN : Activités agricoles et risque de cancers chez les affiliés du régime agricole – Résultats intermédiaires de l’étude AGRICAN (AGRIculture et CANcers) Figure 1 : Les phases de l’étude AGRICAN ... international. Dès leur inclusion, les membres de la cohorte ont été suivis indirectement en termes de santé par des croisements réguliers de fichiers avec les caisses locales MSA, le RNIPP, le CépiDC et les registres de cancers. La première phase de suivi des expositions par envoi de nouveaux questionnaires a débuté en janvier 2015. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto La description des données du questionnaire d’inclusion a permis de quantifier l’exposition aux pesticides selon les secteurs de production et le statut professionnel ainsi que certaines habitudes de vie (tabagisme, consommation d’alcool, corpulence). Le suivi de la santé sur la période entre l’inclusion et fin 2011 a permis de documenter les causes de décès et l’incidence de cancers au sein de cette cohorte. Même si l’incidence globale de cancers est moindre que celle de la population générale, plusieurs cancers apparaissent dès à présent plus fréquents dans cette cohorte comme les cancers de la prostate, certaines hémopathies ou encore les mélanomes cutanés ou les cancers des lèvres. Les premières analyses ont pu débuter sur le lien entre les expositions professionnelles et le risque de cancer et ceci localisation cancéreuse par localisation cancéreuse. Les premières données disponibles concernent les cancers les plus fréquents chez les hommes (prostate et poumons). Le rôle de l’exposition directe (lors de l’utilisation sur culture, animaux ou bâtiments) ou indirecte (tâches de ré-entrée et récoltes) aux pesticides est particulièrement étudié, globalement et par type de culture ou d’élevage. Ainsi, pour les cancers de la prostate, l’élevage de bovins et notamment l’utilisation d’insecticides et la désinfection des locaux seraient des facteurs de risque ainsi que la conduite de l’élevage porcin. En termes de cultures, les traitements pesticides du blé et de l’orge en plein champ, mais aussi de leurs semences, seraient également des facteurs de risque de cancers de la prostate ainsi que la réalisation des foins, le semis et la récolte du tabac ou des pommes de terre. Enfin, les traitements pesticides en arboriculture fruitière ainsi que la récolte des fruits seraient par ailleurs des tâches à risque de cancers de la prostate (Figure 2). A ce stade des analyses, aucune association n’a été trouvée avec les 3 autres élevages étudiés (équin, ovin/caprin et aviaire) ni avec les 8 autres cultures (viticulture, pois, maïs, colza, betteraves, tournesol, serres, cultures légumières en champs). Pour les cancers pulmonaires, peu de facteurs de risque ont été identifiés mis à part l’implication dans les cultures de pois fourragers et particulièrement lors des récoltes mais aussi les secteurs de l’arboriculture, des légumes et des serres. n Figure 2 : Lien entre l’implication en arboriculture et le risque de cancer de la prostate (RR= Risque Relatif) Conclusions et perspectives Les analyses internes continuent et fourniront à court terme des résultats sur d’autres cancers dont ceux particulièrement suspectés d’être impactés par l’exposition aux pesticides comme les hémopathies malignes soit dans le cadre du consortium AGRICOH soit spécifiquement pour l’étude AGRICAN. D’autre part, de prochaines analyses seront réalisées pour étudier l’effet de certaines familles chimiques de pesticides sur le risque de cancers de la prostate ou de certaines hémopathies grâce à l’utilisation de la matrice cultures-exposition Pestimat. La phase de suivi des expositions se déroulera jusqu’à fin 2016 et permettra de collecter des informations nouvelles sur des tâches non explorées dans le questionnaire d’inclusion comme le désherbage inter-cultures par exemple. Les retombées pour la population agricole et plus largement pour la population générale sont nombreuses. La population incluse dans AGRICAN reçoit régulièrement des informations sur les effets de santé par l’intermédiaire de bulletins d’information, un premier de 20 pages en juillet 2011 et le second de 32 pages en janvier 2015. Le partenariat étroit avec la MSA permet une diffusion des résultats au-delà des départements directement impliqués et des actions de prévention. Les données collectées à l’inclusion et lors du premier questionnaire de suivi permettront également de documenter les évolutions des pratiques en termes de fréquences de tâches, de port d’équipements de protection individuelle et aussi de types de matériel de traitement. Enfin, les effets de santé observés en population professionnellement exposée peuvent éclairer les pouvoirs publics sur les effets à suspecter lors d’expositions à des niveaux moindres en population générale. 64 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron AGRICAN : Activités agricoles et risque de cancers chez les affiliés du régime agricole – Résultats intermédiaires de l’étude AGRICAN (AGRIculture et CANcers) Références bibliographiques > Baldi I. et al., 2014. Agricultural exposure and asthma risk in the AGRICAN French cohort. Int J Hyg Environ Health. 217(4-5):435-42. > Leon M.E. et al, 2011. AGRICOH: a consortium of agricultural cohorts. Int J Environ Res Public Health. 8(5):1341-57. > Levêque-Morlais N. et al., 2015. The AGRIculture and CANcer (AGRICAN) cohort study: enrollment and causes of death for the 2005-2009 period. Int Arch Occup Environ Health 88(1):61-73. > Tual S. et al., 2013. Agricultural exposures and chronic bronchitis: findings from the AGRICAN (AGRIculture and CANcer) cohort. Ann Epidemiol. 23(9):539-45. > Tual S., Soutenue en décembre 2013. Rôle des expositions professionnelles en milieu agricole sur des pathologies respiratoires cancéreuses et non cancéreuses. (Recherche Clinique, Innovation technologie, Santé publique). Université de Caen Basse-Normandie. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 65 Financement Chap II : Solutions intégrées de protection Casdar, Innovation et partenariat 2010 Verger Bas intrants : Evaluation de systèmes de cultures arboricoles à bas niveaux d’intrants et transfert aux arboriculteurs Mercier Vincent Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Bussi Claude, UE0695 UERI Domaine de Gotheron, INRA PACA • Ricavy Isabelle, Chambre d’agriculture Bouches-du-Rhône • Blanc Philippe, Station d’expérimentation SERFEL, Saint-Gilles • Montrognon Yannick, SEFRA, Etoile-sur-Rhône • Charreyron Marie, Station d’expérimentation La Pugère, Mallemort • Guérin Anne, IFPC, Sées • Greil Marie-Laure, UE0393 Arboricole la Tour de la Rance, Bourran, INRA Bordeaux Aquitaine Mots clefs Conduite à faible niveau d’intrants, pommier, pêcher, prunier d’Ente, Analyse du Cycle de Vie (ACV) Les cultures arboricoles sont de fortes consommatrices d’intrants, notamment phytosanitaires. Des techniques de réductions partielles d’intrants sont au point, mais la possibilité d’une réduction très importante grâce à une combinaison logique de toutes les techniques est peu explorée. Le projet a consisté à évaluer sur trois espèces majeures, le pommier, le pêcher et le prunier d’Ente, un système innovant de verger permettant une diminution drastique de tous les intrants tout en assurant la durabilité économique et agronomique des exploitations, en comparaison à un verger conduit selon les principes de l’agriculture raisonnée. Les échanges réguliers sur les différents dispositifs permettent de diffuser les résultats auprès des professionnels. Contexte et objectifs Ce projet multipartenaire a été construit autour des trois espèces arboricoles majeures en France : la pêche, la pomme de table et cidricole, la prune d’Ente. Notre objectif a été, dans une «parcelle système», d’associer différentes techniques selon une logique «Bas-intrants» (diminution de l’irrigation, de la fertilisation et des produits phytopharmaceutiques de synthèse) afin de réduire l’impact sur le milieu (prélèvement des ressources, biodiversité, pollution des eaux de surface ou souterraine, gaz à effet de serre,...) sans nuire à la qualité des fruits et en préservant la durabilité économique des exploitations. Ce système «Bas-intrants» (B-I) est comparé à un système de référence conduit selon les principes de l’agriculture raisonnée (RAI) et, sur certains sites, à un système en agriculture biologique (BIO). Méthodes Les essais systèmes ont été conçus différemment entre les trois espèces de ce projet. Pour le Prunier d’Ente, la méthodologie expérimentale utilisée est une expérimentation factorielle classique où l’on croise différentes modalités de facteurs. Pour les autres espèces, la création de ces prototypes de vergers a nécessité la co-conception et la formalisation de règles de décision pour définir la conduite de chacun de ces systèmes. Ces règles de décision se sont appuyées sur : - le cahier des charges de l’agriculture raisonnée pour le système RAI (type Production Fruitière Intégrée) qui correspond globalement aux pratiques actuelles des producteurs, - les principes de l’Organisation Internationale de Lutte Biologique et Intégrée (OILB) pour le système B-I, - le cahier des charges de l’agriculture biologique pour le système BIO. Une démarche commune mais des logiques différentes en fonction des espèces La démarche globale suivie a consisté à intégrer différents leviers existants (choix variétaux, gestion de l’environnement du verger, application des seuils de tolérance, utilisation de méthodes culturales et de moyens de lutte physiques, biologiques, biotechniques, utilisation de produits de biocontrôle, etc.), permettant de réduire les risques de développement des bioagresseurs et de limiter les intrants (fertilisation, irrigation, énergies fossiles) et leur diffusion dans les différents compartiments de l’environnement, tout en préservant la qualité des fruits et l’équilibre économique des exploitations. ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 67 Verger Bas intrants : Evaluation de systèmes de cultures arboricoles à bas niveaux d’intrants et transfert aux arboriculteurs ... Cette démarche a été déclinée de manière progressive pour les trois espèces arboricoles étudiées : - Pêcher : 4 essais systèmes ont été implantés dans les différentes régions de production de l’espèce (UERI-INRA, SEFRA Drôme, SERFEL Gard, UE arboricole INRA Lot-etGaronne). Les systèmes de production ont surtout été différenciés par les combinaisons de méthodes culturales telles que la ferti-irrigation, l’enherbement total, les méthodes de conduite des arbres, etc. - Pommier de table, l’essai système a été implanté à La Pugère, site représentatif de la culture du pommier dans le Bassin Rhône-Méditerranée. Les stratégies de protection sont très contrastées entre les systèmes B-I et RAI du fait de la mobilisation d’un grand nombre de leviers d’action (variétés, porte-greffe, conduite des arbres, filet Alt’Carpo®, biodiversité, désherbage mécanique, pilotage de l’irrigation, adaptation des doses aux volumes des arbres, etc.) - Pommier à cidre : deux essais systèmes ont été mis en place chez les producteurs. Une combinaison de techniques culturales et de variétés a été testée; - Prunier : plusieurs techniques culturales permettant une culture à faible niveau d’intrants ont été étudiées dans une expérimentation factorielle. Elle a permis de décomposer l’effet de chaque technique donnant ainsi des références pour les «essais systèmes pêcher» ayant, par exemple, des techniques culturales identiques au « système prunier » et donc comparables (ferti-irrigation, enherbement total…). Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Les plantations des essais sur les différents sites ont été échelonnées dans le temps : 2010 pour la SERFEL, La Pugère et le site de Macé de l’IFPC, 2011 pour l’UERI INRA Gotheron et 2012 pour la SEFRA, l’UE INRA arboricole de la Tour de la Rance et le site Crédin de l’IFPC. Les arbres fruitiers commencent à produire au bout de 3 ans mais il faut encore 1 an, voire 2, pour être en pleine production. La période juvénile a permis d’affiner les règles de décisions de chacun des systèmes. Les deux premières années il est important de ne pas trop rationner les arbres pour permettre la bonne installation des racines. En effet, la diminution des intrants trop tôt a causé des baisses de vigueur des troncs, la sensibilisation de l’arbre sur les systèmes B-I et BIO pour les trois espèces étudiées et des attaques de cloque sur le pêcher. En troisième année, ces différences entre systèmes ont été rattrapées. Les premiers résultats sont très intéressants et montrent que des prises de risques, même au départ du verger, n’entamaient aucunement l’avenir du verger. Par exemple en 2013, sur pêcher, les IFT non verts (hors biocontrôle) ont été diminués de 33% dans le B-I et 42% dans le BIO par rapport au RAI à l’UERI-INRA de Gotheron et de 46% et 66% à la SERFEL. La même année, sur pommes, les IFT non verts ont été diminués de 30% dans le B-I et 70% dans le B-I avec variété résistante à la tavelure par rapport au RAI. Il en a été de même pour les autres intrants avec par exemple de 50 % à 75% de réduction d’eau sur les deux systèmes B-I de La Pugère. L’étude de la biodiversité fonctionnelle et les analyses multicritères (ACV) ne sont pas encore possibles du fait de la jeunesse des vergers. En 2013, à cause de la moindre vigueur des arbres sur le B-I, le rendement a été plus faible que celui du RAI mais la proportion de fruits en calibre A et + était plus forte sur plusieurs sites (ex. 80% pour B-I SERFEL contre 62% pour RAI SERFEL) et la rentabilité économique n’a pas été toujours affectée, du fait de la diminution des charges (limitation des intrants et temps de travaux). n Conclusions et perspectives Le but des expérimentations de ce projet est d’analyser si, grâce aux règles de décision définies au début de chaque campagne, on arrive à atteindre les objectifs de performances définis pour chaque système (agronomique, économique, état sanitaire, économie d’intrants, réduction d’impact environnemental, etc.). Il s’agit aussi d’étudier la faisabilité technique de ces systèmes (temps de travaux, difficulté d’utilisation des indicateurs pour piloter les systèmes, etc.) afin de voir si ce type de gestion des vergers pourra être mobilisé par les producteurs. L’aspect «démonstratif» de ce réseau est essentiel : la quantification précise d’un grand nombre de critères de performance des systèmes et la possibilité de voir sur le terrain, dans un même site, différents modes de conduite des vergers doivent permettre d’orienter les producteurs pour adapter et modifier leurs pratiques vers des modes de production combinant les performances économique et environnementale. Les dynamiques partenariales initiées dans le cadre de cet appel à projets Casdar, autour de la conception de systèmes de culture à bas niveaux d’intrants, se prolongent à travers 3 appels à projets EXPÉrimentation DEPHY Écophyto : EcoPêche (2013-2018), Capred (2013-2018) et Réseau National Expé Écophyto pomme (2012-2018). Références bibliographiques > Guérin A. et Alaphilippe A., 2014. Approche multicritère à l’échelle d’un système et exemple du projet « verger cidricole de demain ». Conférence Végépolys Symposium SIVAL. > Blanc P. et Gallia V., 2011. Présentation du dispositif du verger Bas-Intrants Pêcher. Journée Portes Ouvertes du 8 septembre 2011 SERFEL (Gard). > Mercier V. et al., 2014. Vergers Bas intrants 2014. Réussir Fruits et Légumes. Supplément 14p au n°342 > Mercier V. et Greil M.L., 2014. Evaluation de systèmes de cultures arboricoles à bas niveaux d’intrants et transfert aux arboriculteurs. Conférence Vinitech-Sifel Bordeaux. > Montrognon Y. et Borne S., 2014. Plateforme TAB : Accompagner les systèmes vers plus de durabilité. Arboriculture Fruitière n°680 p30-31. 68 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Financement Écophyto (redevance pollutions diffuses) Casdar, Innovation et partenariat 2009 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants L’utilisation de stimulateurs de défenses naturelles des plantes en cultures légumières, DEFILég Marie Torres Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées © Ctifl • Ade Céline, CTIFL, Carquefou • Maisonneuve Brigitte et Pitrat Michel, Génétique et Amélioration des Fruits et Légumes, INRA Avignon • Bellvert Floriant, CNRS- UMR 5557, Lyon • Guerrand Jérôme et Hallier Sonia, Vegenov-BBV Saint-Pol-de-Léon • Werbrouk Dominique et Vasseur Ludovic, Pôle Légumes Région Nord, Lorgies • Burlet Alexandre, SERAIL, Brindas • Lavigne Daniel, CEFEL, Tarn-et-Garonne, Montauban • Guigal Lucille, CEHM, Languedoc Roussillon, Marsillargues Mots clefs Stimulateurs de défense des plantes, conditions d’utilisation, mécanismes d’action, effet du génotype, stratégies de protection. Le projet DEFILég, labellisé par le GIS PIClég, a permis de mieux appréhender entre 2010 et 2013 les conditions d’action des Stimulateurs de Défense des Plantes (SDP) pour lutter contre le mildiou de la laitue et l’oïdium du melon. Associant des partenaires avec des compétences complémentaires, ce projet a permis de tester l’efficacité de différents SDP en conditions contrôlées, de déterminer l’influence du génotype et de stress abiotiques sur la réactivité aux SDP, de mieux appréhender les mécanismes d’action des SDP et de tester l’intégration de ces produits au sein de stratégies de protection en conditions de culture. Ces trois années d’expérimentation ont permis de mettre en évidence des efficacités très intéressantes de quelques substances présentant réellement une action de stimulation des défenses. Même si leurs mécanismes d’action ne sont pas entièrement décryptés, il ressort de ces expérimentations que l’efficacité des produits reste intimement liée aux contextes d’emploi de ceux-ci, puisque les conditions biotiques (génotype de la plante et souche du pathogène pour chaque couple hôte/pathogène) et abiotiques (irrigation, nutrition) ont un impact sur les résultats. Contexte et Objectifs La réduction drastique des moyens de protection chimique classique, conjuguée à la demande sociétale d’une meilleure prise en compte de l’environnement et de la santé, a amené un regain d’intérêt des producteurs pour les techniques alternatives de protection des plantes contre les agents pathogènes. Parmi ces techniques alternatives, les SDP, substances naturelles ou chimiques, induisent une mise en alerte des mécanismes de défense des plantes et permettent un contrôle des attaques de pathogènes et ravageurs. Or, de nombreux paramètres restaient à étudier pour comprendre les mécanismes d’action de ces produits avant de les intégrer au sein de stratégies de protection. C’est dans cet objectif que les participants du projet DEFILég se sont fixés pour but : - d’acquérir des connaissances sur le fonctionnement et les modes d’action des SDP (efficacité, effets des stress abiotiques…), - d’identifier les marqueurs traduisant l’activité de défense des plantes, - de déterminer l’influence du génotype sur l’activation des mécanismes de défense des plantes (réactivité aux SDP) en criblant des ressources génétiques (l’objectif était d’identifier des génotypes très réactifs, intéressants à intégrer dans des programmes de sélection), - de tester l’intégration de SDP au sein de stratégies de protection classique en les substituant aux produits phytopharmaceutiques, - de tester l’utilisation de SDP dans le cas d’impasses techniques engendrées par les bactérioses. ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 69 L’utilisation de stimulateurs de défenses naturelles des plantes en cultures légumières, DEFILég ... Méthodes Le projet s’est articulé autour de 5 grands axes complémentaires : Axe 1 : un large screening de produits revendiquant une action de type « SDP» a été réalisé au début du projet afin de sélectionner des produits non biocides et efficaces contre les agents pathogènes ciblés. Axe 2 : l’influence de stress abiotiques (stress hydriques et nutritifs) a été mesurée afin de déterminer les conditions optimales d’utilisation des SDP. Axe 3 : l’efficacité des SDP retenus dans l’axe 1 a été évaluée sur une large gamme d’accessions des deux espèces choisies, melon et laitue. Axe 4 : les SDP retenus dans l’axe 1 ont été testés, en conditions de culture, sur des génotypes dont la réactivité avait été évaluée dans l’axe 3. Axe 5 : les SDP ont été testés contre des bactérioses pour les deux pathosystèmes. Tout au long de ces essais, une compréhension des mécanismes de défense mis en place par les plantes (activité enzymatique et métabolites secondaires) et une détermination des biomarqueurs corrélés à la stimulation des voies de défense ont été réalisées. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Efficacité des SDP Vingt-trois produits de natures diverses revendiquant une action de type SDP ont été testés sur les deux pathosystèmes oïdium/melon et mildiou/laitue. Ces produits étaient très fortement soutenus par les firmes, qui avaient pour but de déposer à moyen terme une autorisation de mise sur le marché (AMM). Cinq produits ont été écartés car ils présentaient aussi une action biocide directe et neuf produits ont été écartés car ils présentaient un niveau d’efficacité trop faible. Les analyses ont permis de sélectionner quatre produits intéressants à étudier dans les autres actions, dont deux retenus pour les deux pathosystèmes. Recherche de marqueurs traduisant l’activation des mécanismes de défense des plantes Un dosage enzymatique a été effectué tout au long du projet et les activités glucanase et peroxydase, connues pour être impliquées dans les mécanismes de défense des plantes, ont été évaluées. Par ces deux marqueurs d’activité, il a été difficile de mettre en évidence une induction significative des voies de défense. Etudiés seuls, ces deux marqueurs d’activité enzymatique ne permettaient pas de suivre l’induction des systèmes de défense, d’où une approche métabolomique complémentaire réalisée par le CNRS. Une analyse des métabolites secondaires par profil chromatographique a permis de déterminer que le suivi des teneurs en flavonoïdes dans les feuilles de melon permet de détecter la mise en œuvre des défenses des plantes. La détermination d’un marqueur n’a pas été mise en évidence pour le pathosystème mildiou/laitue. 70 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Influence des stress abiotiques Pour les deux pathosystèmes, un grand nombre de stress a été testé : des stress hydriques ou nutritifs, simples ou combinés, en conditions contrôlées ou en conditions de culture. L’influence du stade de développement de la plante au moment de l’inoculation a également été testée. Alors que les résultats pour le pathosystème mildiou/laitue n’ont pas permis de mettre en évidence l’effet du stress hydrique, les résultats obtenus sur le pathosystème oïdium/ melon permettent de comprendre le rôle de stress abiotiques sur l’efficacité des produits. Il semble en effet qu’un stress hydrique ou nutritif modéré augmente les efficacités des SDP par rapport à une utilisation en conditions optimales, alors que l’efficacité des produits chute en cas de stress trop intense. Chaque SDP réagit spécifiquement cependant à chaque stress ; cela signifie qu’un SDP peut bien réagir à un stress hydrique, alors qu’un autre réagira mieux à un stress nutritif. Ceci complique d’autant plus l’interprétation des résultats obtenus lors de l’utilisation de SDP. Influence des génotypes Le criblage des ressources génétiques, sur 455 accessions de laitues et 600 accessions de melon, a mis en évidence que la réactivité des plantes à un SDP varie suivant le génotype. D’une part, une majorité des accessions testées sont non réactives aux trois quarts des produits testés sur chaque pathosystème (Acibenzolar-S-methyl, extrait de levure, extraits d’algues, Calcium+ nitrate de zinc). D’autre part, parmi les accessions réactives, une majorité est bien protégée par l’un des produits (l’Acibenzolar-S-methyl). Les trois autres SDP sont soit non efficaces sur melon, soit peu efficaces sur laitue. Enfin, pour certaines accessions, la protection dépend de la souche du pathogène, que ce soit pour l’oïdium du melon ou pour le mildiou de la laitue. Quelques accessions ont été identifiées comme étant potentiellement très intéressantes en tant que géniteurs très réactifs aux SDP. Une validation de ces résultats a été réalisée en conditions de culture mais des différences de résultats apparaissent. Il est possible que cette divergence de résultats soit due à une différence de souches, de dose d’inoculum ou de stimuli extérieurs. Tableau 1 : Stratégies de protections testées contre l’oïdium du melon, 2012 et 2013 L’utilisation de stimulateurs de défenses naturelles des plantes en cultures légumières, DEFILég Intégration des SDP au sein des itinéraires techniques Les expérimentations menées en 2012 et 2013 avaient pour but d’inclure au sein des stratégies de protection, les SDP qui présentaient la meilleure efficacité (Acibenzolar-SMethyl ; laminarine et produits à base de calcium et nitrate de zinc). Différentes stratégies ont été évaluées dans le but de déterminer la stratégie de protection la plus efficace (application en pépinière, traitements en alternance avec des produits phytopharmaceutiques classiques, traitements précoces…). Alternés avec des substances actives couramment utilisées, certains SDP se montrent très efficaces pour réduire les dégâts, parfois même mieux que les produits phytopharmaceutiques employés seuls. La Figure 1 représente pour chaque date les niveaux d’efficacité de chaque stratégie obtenus au CEHM en 2012. Nous observons notamment en fin de notation, au 8 août, une diminution significative du pourcentage de feuilles de melon présentant des symptômes d’oïdium pour la modalité à base de traitements ASM. Parmi les SDP testés en culture de melon, deux d’entre eux permettent de diminuer la maladie. Pour le produit le plus efficace (ASM), sur les 12 fois où des stratégies à base de ce produit ont été testées, 11 ont été efficaces (en prenant en compte les différences significatives et les tendances). L’intérêt des SDP dans la lutte contre l’oïdium du melon est donc avéré. Cependant, les efficacités sont variables selon les cas et les expérimentations menées n’ont pas permis de CEHM - Marsillargues Figure 1 : Pourcentage de feuilles de melon présentant des dégâts d’oïdium à chaque date d’observation (résultats CEHM, 2012) définir une stratégie unique à préconiser pour maximiser l’efficacité des SDP. De plus, des phytotoxicités ont pu être observées en 2012 dans certains essais et une prudence s’impose donc lors de l’utilisation de certains SDP. Dans le cas de la laitue, l’efficacité de ces stratégies est insuffisante pour protéger correctement les cultures contre le mildiou. Une absence totale de pathogène est en effet demandée en laitue, produit pour lequel l’aspect esthétique est primordial. Des problèmes de sélectivité ont par ailleurs pu être observés. n Conclusions et perspectives Les SDP sont des produits de composition diverse, ayant un mode d’action complexe puisqu’ils peuvent induire des modifications physiologiques (épaississement de la paroi cellulaire) ou métaboliques, locales ou systémiques. Ce projet a permis de mieux appréhender les mécanismes d’action des produits de type SDP et de comprendre l’impact de différents stress, biotiques ou abiotiques (stress hydrique, nutritif, génotype, souche de pathogène) sur l’efficacité des SDP. Les résultats de ces travaux pourraient par exemple permettre aux sélectionneurs de travailler sur des variétés réactives aux SDP. Il a ainsi été mis en avant que l’efficacité des produits est très variable en fonction du contexte dans lequel ils sont appliqués. Néanmoins, ce projet a permis de montrer qu’une utilisation de ces produits est possible et que leur efficacité est non négligeable, lorsque ceux-ci sont utilisés en complément de produits phytosanitaires classiques. Enfin, ce projet a permis de mettre au point une méthode de suivi de l’activation des mécanismes de défense des melons par le dosage des flavonoïdes totaux, mais la méthode n’a pas pu être développée en laitue. L’apparition constante de nouveaux produits et de nouveaux outils de détermination des mécanismes d’action des SDP laisse présager que leur utilisation comme méthode alternative de contrôle des maladies pourrait bientôt être étendue. Cependant, les SDP sont des produits agissant sur le métabolisme de la plante avec un impact sur un large spectre de ravageurs et pathogènes. Cet aspect mérite d’être pris en compte lors de l’homologation de telles substances. Références bibliographiques > Bellvert F., 2012. Flavonoids investigation: a tool to develop elicitor on Cucumis melo for sustainable agriculture. Colloque Natural products, Perpignan > Hamzaoui J., 2012. Profiling of phenylpropanoid compounds in lettuce leaves after treatment with elicitor. Colloque Natural products, Perpignan > Brachet ML., 2012. Trois essais pour évaluer les stimulateurs de défenses naturelles des plantes. Vaucluse agricole n° 2312 pp5 > Torres M., 2013. Use of elicitors to protect melon crops (Cucumis melo) against Podosphaera xanthii: A multisite field experiment. IOBCWPRS Bulletin Vol. 89, 2013 pp. 409-414 > Maisonneuve B., Allen-Aubouard C., Pitrat M., 2013. Effect of plant genotype on the efficacy of stimulators of plant defences in two horticultural pathosystems. IOBC-WPRS Bulletin Vol. 89, 2013 pp. 327-331 Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 71 Financement Casdar, Innovation et partenariat 2011 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants Évaluation et mise au point de méthodes alternatives aux traitements chimiques après-récolte permettant de lutter contre l’échaudure de prématurité des pommes sans dégradation de la qualité Mathieu-Hurtiger Vincent Mail : [email protected] 1 Responsables des équipes impliquées 4 • Mathieu-Hurtiger Vincent, Aubert Christophe, Ctifl, Saint-Rémy-de-Provence • Vaysse Pierre, Ctifl, Prigonrieux • Biargues Marie-Eve, Cefel, Montauban • Westercamp Pascale Ctifl / Cefel, Montauban • Decrombecque Hugues, Station d’expérimentation La Morinière, Saint-Epain • Coureau Claude, Ctifl / La Morinière, Saint-Epain • Larrigaudière Christian, IRTA, Lleida, Espagne • Gerbaud Sylvain, Société Absoger, Les Barthes • Marcone André, Société Xeda International, Saint-Andiol © Ctifl 3 2 Échaudure de prématurité : Pink Lady® (1) ; Rouge Américaine (2) ; Arianecov (3) ; Granny Smith (4) Mots clefs Pomme, échaudure de prématurité, atmosphère contrôlée dynamique, traitement à l’eau chaude, élimination de l’éthylène La pomme est un produit majeur. En 2013, avec 1,7 millions de tonnes, la France était le 7e producteur mondial. Sa clientèle internationale nécessite de proposer toute l’année un produit sans défaut, sans échaudure de prématurité, avec une qualité satisfaisante. Les évolutions techniques et sociétales ont rendu impérative la recherche de solutions pour conserver les fruits sans traitements chimiques après récolte. Trois pistes avaient été identifiées : le traitement à l’eau chaude après récolte, la conservation en Atmosphère Contrôlée Dynamique (AC Dynamique) et l’élimination de l’éthylène lors du stockage. L’AC Dynamique est ressortie comme la plus prometteuse. Elle permet un bon contrôle de l’échaudure de prématurité dans le temps (jusqu’en mars-avril pour Granny Smith). Les autres méthodes présentent un intérêt, mais d’autres travaux sont nécessaires pour affiner leur utilisation. Contexte et Objectifs La conservation est une étape clef pour les stations commercialisant des pommes. Pour certaines variétés, elle peut durer plusieurs mois. Des problèmes peuvent dégrader la qualité pendant le stockage : maladies fongiques ou physiologiques, perte de fermeté… Pour les variétés sensibles, le principal risque est l’apparition d’échaudure de prématurité (brunissement de l’épiderme). En 2009, la demande professionnelle était forte pour trouver des méthodes alternatives aux traitements chimiques après récolte. La diphénylamine (DPA), molécule alors utilisable, allait disparaître et la tendance sociétale était aussi d’aller vers des fruits « non traités après récolte ». Les professionnels se devaient de revoir leurs méthodes, celles-ci devant être utilisables en agriculture conventionnelle ou biologique. Trois solutions techniques ont donc été testées : le traitement à l’eau chaude, la conservation en AC Dynamique et l’élimination de l’éthylène. Le but était, après conservation, de proposer des fruits indemnes d’échaudure de prématurité et présentant des caractéristiques qualitatives et nutritionnelles satisfaisantes (fermeté, goût, taux de sucre, arômes, composés d’intérêt nutritionnel…). Avec les équipementiers partenaires, l’idée était aussi de travailler à la mise au point et à l’adaptation des différentes méthodes aux conditions des stations fruitières, de façon à permettre l’implantation à l’échelle industrielle. Méthodes Les techniques étudiées s’appliquent à différents stades dans le processus de conservation. - Le trempage à l’eau chaude est réalisé après la récolte, dans une eau à 48-50 °C pendant 2 à 3 min. Cette modalité a été envisagée en complément de l’atmosphère contrôlée (AC). ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 73 Évaluation et mise au point de méthodes alternatives aux traitements chimiques après-récolte permettant de lutter contre l’échaudure de prématurité des pommes sans dégradation de la qualité ... - Pour l’AC Dynamique, le principe est d’atteindre la limite en O2 la plus basse acceptable par le fruit. Elle est identifiée par une mesure de fluorescence de la chlorophylle faite alors que l’O2 baisse. Quand la limite est atteinte, un pic de stress est identifié. La consigne en O2 est alors définie pour le stockage (minimum 0,4-0,5%). En pratique, les AC Dynamique se déroulent entre 0,5 et 0,8% d’O2 contre 2 à 3% pour des AC « standards ». - L’élimination de l’éthylène se fait pendant le stockage. Elle a été associée à des conservations en AC. Pour évaluer ces méthodes, des comparaisons ont été faites avec des « témoins » : des stockages en AC, en ULO (Ultra Low Oxygen, 1,5% d’O2), voire en Extrême ULO (XLO, < 1% d’O2). Des lots traités au SmartFreshSM (1-méthylcyclopropene) ont aussi été utilisés (seul traitement phytosanitaire autorisé en post-récolte contre l’échaudure). Le projet était organisé autour de trois axes : comprendre le mode d’action au niveau biochimique et définir un marqueur capable de prédire l’altération ; identifier la ou les méthodes efficaces permettant de préserver la qualité des fruits et optimiser leur application ; tester et diffuser les techniques dans les stations fruitières et auprès de la filière professionnelle « pomme ». Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Les résultats ici présentés sont centrés sur l’efficacité par rapport à l’échaudure de prématurité et sur l’impact vis-àvis de la qualité des pommes. Impact sur le contrôle de l’échaudure Après trois années de tests, en particulier sur Granny Smith, l’AC Dynamique apparaît comme une technique permettant de conserver les fruits sans échaudure sur une longue période (5-6 mois, jusqu’en mars-avril). La Figure 1 illustre cette efficacité. Il est possible d’étendre cette période selon les variétés. Cette méthode est fiable dans la mesure où les bonnes pratiques sont respectées. L’élimination d’éthylène et le traitement à l’eau chaude ne permettent pas de contrôler l’échaudure de prématurité avec leur seule utilisation, sur des variétés sensibles comme Granny Smith. Il faut a minima les associer à une conservation en ULO. Pour d’autres variétés, une efficacité est constatée mais il est nécessaire de les combiner avec l’atmosphère contrôlée (Coureau, 2013). Impact sur le maintien de la qualité globale Concernant la qualité du fruit (fermeté, sucre, acidité), elle évolue de manière similaire aux observations sur l’échaudure. Le maintien de la qualité est très satisfaisant avec l’AC Dynamique. Selon les variétés, le traitement à l’eau chaude ou l’élimination d’éthylène sont aussi intéressants. 74 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Figure 1 : Compilation des résultats de différents essais conduits au Ctifl, au Cefel et à La Morinière sur Granny Smith. % de fruits sans échaudure de prématurité après la fin du stockage, 15 jours de froid normal et 7 jours de shelf-life. Impact sur le goût, la qualité gustative Diverses analyses sensorielles et hédoniques ont été faites sur Pink Lady® ou Granny Smith soumises à des conservations en AC, AC plus SmartFreshSM et AC Dynamique. Aucun mauvais goût, type fermentation, n’a été constaté. Les analyses sensorielles ont permis de dégager des tendances. Les notes de goût global sont moins bonnes pour les lots SmartFreshSM et AC Dynamique, mais ils sont mieux notés sur les descripteurs de texture. Cette dimension texture est néanmoins dépendante de la variété. En 2013, lors d’un test hédonique sur Pink Lady®, toutes les modalités ont reçu des notes de satisfaction élevées. En complément, un test discriminatif, réalisé sur ces mêmes pommes, n’a pas permis de différencier les fruits des paires proposées SmartFreshSM vs AC Dynamique ou AC vs AC Dynamique. Les lots ont été considérés comme gustativement identiques (Mathieu-Hurtiger, 2014). Impact sur la qualité aromatique et nutritionnelle Les teneurs en composés volatils sont grandement influencées par le mode et la durée de conservation. La diminution de ces derniers est importante avec le SmartFreshSM et dans une moindre mesure avec l’AC Dynamique. Cependant, les faibles différences dans les tests de dégustation mettent en évidence la notion complexe de « qualité gustative » qui prend en compte d’autres critères que le potentiel « aromatique ». Le gain de texture procuré est particulièrement intéressant pour des stockages longs. Concernant la qualité nutritionnelle, les teneurs en composés polyphénoliques évoluent peu au cours du temps et sont peu influencées par les modes de conservation (Aubert, 2015). n Évaluation et mise au point de méthodes alternatives aux traitements chimiques après-récolte permettant de lutter contre l’échaudure de prématurité des pommes sans dégradation de la qualité Conclusions et perspectives Les progrès réalisés à travers ce projet sont intéressants. Il existe aujourd’hui des alternatives potentielles aux traitements chimiques après récolte, mais leur utilisation doit se faire dans le cadre de bonnes pratiques et en connaissant les limites de ces systèmes. Le constat fait à la fin de ce projet est que de nombreuses stations françaises ont fait le choix de s’équiper, avec des stockages sous très basses teneurs en oxygène. Il faut laisser le temps aux stations de maîtriser ces outils. L’enjeu pour les années à venir est d’une part de consolider nos connaissances concernant ces techniques de stockage dans l’objectif de pouvoir aider les professionnels dans leurs mises en œuvre, en précisant la variabilité existante dans l’efficacité selon les variétés, ainsi que les limites de ces techniques. D’autre part, nous devons rester attentifs aux autres solutions, qui pourraient être proposées. En effet, le maintien de la qualité et la lutte contre l’échaudure de prématurité restent des enjeux majeurs pour les producteurs de pommes. Les recherches se poursuivent avec de nouvelles techniques d’AC Dynamique qui voient le jour, en suivant le quotient respiratoire des fruits, la production d’éthanol… Références bibliographiques > Aubert C. et al., 2015. Effects of Dynamic Atmosphere on Volatile Compounds, Polyphenolic Content, Overall Fruit Quality, and Sensory Evaluation of Pink Lady® Apples. Acta Hort. 1071, ISHS 2015, 275-280. > Mathieu-Hurtiger V. et al., 2014. Impact des méthodes post-récoltes sur la qualité des pommes, Infos Ctifl, 304, 33-40. > Coureau C. et al., 2013. Nouvelles techniques de conservation contre l’échaudure de prématurité. Trois ans d’expériences en réseau, Infos Ctifl, 297, 31-37. > Giné Bordonaba J. et al., 2013. Dynamic changes in conjugated trienols during storage may be employed to predict superficial scald in Granny Smith. LWT – Food Science and Technology, 54, 535-541. > Mathieu-Hurtiger V. et al., 2013. Conservation des pommes sous Atmosphère Contrôlée Dynamique, Revue Générale du Froid et du Conditionnement d’Air,1133, 49-57. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 75 Financement Casdar, Recherche finalisée et innovation 2010 Chap II : Solutions intégrées de protection EcoFusa : Lutte contre les fusarioses des épis de blés : de l’utilisation raisonnée des fongicides aux méthodes de luttes alternatives Emmanuelle Gourdain Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées © ARVALIS-Institut du végétal • Mathieu Jacques, Gourdain Emmanuelle, ARVALIS-Institut du végétal, Paris • Lebrun Marc-Henri, INRA BIOGER (BIOlogie et GEstion des Risques en agriculture), Grignon • Savoie Jean-Michel, INRA MycSA (Mycologie et Sécurité des Aliments), Bordeaux Mots clefs Blés, Fusarium, Microdochium, stratégies fongicides, pratiques culturales Pour lutter de manière raisonnée contre la fusariose des épis sur blé tendre et blé dur, il est important de connaître les agents responsables et leurs interactions avec l’environnement. Le projet EcoFusa (2011-2013) se décline ainsi en trois axes de recherche, allant de la quantification des quatre principales espèces fongiques, à l’évaluation des pratiques alternatives en passant par le raisonnement de la lutte chimique. Bien que le climat soit le facteur de risque prépondérant, les leviers agronomiques apparaissent très efficaces pour réguler cette maladie, que ce soit en termes de gestion des résidus de culture ou dans le choix de variétés tolérantes. Le recours aux traitements fongicides reste un levier efficace mais doit être envisagé uniquement en cas de risque avéré et le choix des produits doit être raisonné pour éviter l’apparition de populations résistantes. Le développement d’outils pour la détection par voie moléculaire ainsi que d’outils d’aide à la décision pour le pilotage des traitements est le grand livrable attendu du projet. Contexte et objectifs Méthodes La fusariose de l’épi est une maladie induite par un complexe de plusieurs espèces de champignons des genres Fusarium et Microdochium, ayant des caractères épidémiologiques différents, producteurs ou non de toxines et plus ou moins abondantes sur le territoire. Cette maladie peut ainsi s’accompagner de la production de déoxynivalénol (DON), toxine réglementée en Europe depuis 2006 pour les blés destinés à l’alimentation humaine. Le projet de recherche EcoFusa a été mis en place afin de mieux comprendre les interactions entre plantes/pathogènes/toxines à travers leurs modulations par les pratiques agronomiques et le climat. Les principales avancées scientifiques attendues par le projet étaient (i) la mise à disposition et l’utilisation d’un panel d’outils moléculaires optimisés pour la détection et la quantification des principales espèces de Fusarium et Microdochium, et de leurs résistances aux fongicides ; (ii) une description quantitative de la microflore fusarienne des grains de blés en France ; (iii) une analyse de l’impact des facteurs agronomiques (gestion des résidus, rotation, variété, fongicide, biomolécules anti-fongiques) sur l’équilibre de ces espèces sur les cultures de blés. Pour étudier la distribution spatiale et temporelle des espèces du complexe fusarien, un dispositif d’enquêtes auprès d’agriculteurs a été mis en place dans les grands bassins de production collectant de nombreuses données agronomiques et climatiques. À ces données ont été ajoutés les résultats des analyses de toxines et de flore fusarienne par méthode Q-PCR. Les informations récupérées ont été regroupées dans une base de données qui a permis la réalisation d’analyses statistiques des relations entre espèces fongiques, teneurs en DON, pratiques agricoles et climat. Adossés aux enquêtes, de nombreux essais en conditions contrôlées ou au champ ont été menés afin d’étudier les effets sur l’équilibre Fusarium/Microdochium de facteurs tels que la gestion des résidus, la variété, le choix des matières actives, biofongicides compris. Par ailleurs, une étude approfondie de l’impact des matières actives sur le développement de souches de Microdochium résistantes a été conduite au laboratoire. Enfin, pour affiner l’évaluation du risque fusariose, une méthode de la quantification par voie moléculaire de bandes issues de pièges à spores a été développée et a permis de suivre plusieurs pièges durant les trois années du projet. ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 77 EcoFusa : Lutte contre les fusarioses des épis de blés : de l’utilisation raisonnée des fongicides aux méthodes de luttes alternatives ... Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto À l’issue du projet, des méthodes de quantification des ADN de F. culmorum, F. graminearum, M. nivale et M. majus dans des farines de blé tendre comme de blé dur, dans des résidus de culture ainsi que sur des bandes de pièges à spores ont été développées, de même que des tests de quantification des résistances aux principales familles de fongicides. Ces méthodes ont été validées selon les critères classiques de performance et diffusées vers les trois laboratoires avec des écarts entre résultats inférieurs à 5%. Ces mises au point, indispensables à la réussite du projet, ont permis d’analyser plus de 1 000 échantillons de grains, résidus ou bandes sur les trois ans de durée du projet. Concernant les résultats sur la répartition des 4 espèces dans le temps et l’espace, l’étude a montré que F. graminearum était l’espèce dominante du complexe suivie par M. majus, puis M. nivale. F. culmorum est très peu quantifié sur les trois années du projet, ce qui confirme sa quasi disparition sur les blés cultivés en France. Ce résultat est conforme aux résultats publiés par Xu et al., 2005. Par ailleurs, les résultats montrent une disparité annuelle et régionale importante de l’occurrence des 4 espèces fongiques. Les analyses statistiques mettent en évidence l’importance du climat mais aussi des conditions pédo-climatiques régionales et par conséquent des pratiques agronomiques sur la variabilité des quantifications d’ADN. Ce constat est d’autant plus marqué pour F. graminearum puisque c’est la seule espèce pour laquelle des variables agronomiques sont ressorties des analyses de Random Forest et du modèle linéaire mixte. Ces éléments confirment que F. graminearum, et plus particulièrement son inoculum, est très fortement inféodé à la parcelle et à son historique. Il a été démontré pour la première fois, qu’il est capable de produire des périthèces et ascospores sur tous les résidus préalablement inoculés, même les résidus de plantes non hôtes. En termes de lutte alternative, une gestion fine des résidus de culture est donc fortement conseillée. Concernant les deux espèces de Microdochium, les résultats du projet publiés dans Gourdain et al., 2015 n’ont pas permis d’apporter de réponse quant à la source d’inoculum, mais il semblerait que l’inoculum soit quasi exclusivement dépendant des conditions climatiques. Les études statistiques montrent que les deux espèces ont un comportement proche. Elles semblent très peu impactées par les pratiques agronomiques. Leur statut de résistance aux benzimidazoles et strobilurines est confirmé (Batina et al., 2015), même si la lutte chimique reste le moyen actuel le plus efficace pour contrôler la maladie en attendant une évaluation plus fine des variétés. La forte corrélation (r>0.75) entre teneur en DON et quantification d’ADN de F. graminearum a été confirmée aussi bien dans les échantillons de grains des enquêtes agriculteurs que dans l’ensemble des essais. Ce résultat confirme le statut de F. graminearum de principal producteur de DON sur le territoire français. Conformément aux conclusions de Gosman et al. en 2010, il semble que le DON ne soit pas impliqué dans des processus compétitifs mais soit un facteur chimique nécessaire à la propagation de ce champignon sur son hôte. En effet, cette production ne semble pas modulée par la présence d’autres champignons puisque de nombreux échantillons analysés étaient infectés par 2 ou 3 espèces incluant F. graminearum et Microdochium spp. Les analyses ont en effet démontré qu’il n’y avait pas de phénomène de compétition et plus particulièrement d’exclusion entre ces 3 espèces, résultat conforme aux travaux de Pettitt et al., 2003. Les travaux entrepris sur les biomolécules ont permis de sélectionner des molécules candidates efficaces in vitro pour la lutte contre Fusarium et Microdochium, même si le passage du laboratoire au champ pose de nombreuses questions, notamment en termes de formulation. n Répartition des 4 espèces fongiques quantifiées par Q-PCR (F. graminearum, F. culmorum, M. nivale et M. majus) sur les échantillons de blés tendre collectés en 2012. 78 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron EcoFusa : Lutte contre les fusarioses des épis de blés : de l’utilisation raisonnée des fongicides aux méthodes de luttes alternatives Conclusions et perspectives Le projet a mis en évidence que toute méthode de lutte, quelle qu’elle soit, aura un impact sur l’équilibre de la flore et pourra le déplacer d’une population vers une autre, comme démontré dans l’étude de l’impact des fongicides. C’est donc bien par la prise en compte de cet équilibre et de la proportion entre les espèces présentes, et le cas échéant leur statut de résistance, que les méthodes de lutte doivent s’orienter. L’arrivée des analyses par Q-PCR, rapides et peu coûteuses, pourra être une aide précieuse pour leur caractérisation. Les résultats obtenus dans ce projet feront l’objet prochainement d’analyses plus approfondies sur ces proportions afin de proposer in fine des outils de pilotage du risque global « fusariose » à travers notamment des modèles de prévision. Le projet devrait par ailleurs permettre des avancées dans les années à venir sur la compréhension de l’épidémiologie par l’analyse plus fine des vols de spores en lien avec les épisodes climatiques et le développement de modèles de prévision pour le pilotage du traitement en cours de saison. Cet outil devrait permettre aux agriculteurs de réduire leur intervention aux situations les plus à risque. Néanmoins, la lutte prophylactique peut réduire considérablement le risque associé à F. graminearum et limiter par conséquent le recours aux molécules chimiques, même si aucune résistance aux matières actives homologuées n’a été mise en évidence à ce jour. Références bibliographiques > Batina H., Atanasova-Penichon V., Fourrey A., Gelisse S., Grignon G., Laval V., Maumené C., Méléard B., Valade R., Walker A.S., Gourdain E., 2015. Utilisation raisonnée des fongicides et apport des biofongicides pour lutter contre la fusariose des épis de blés. 5e Conférence Internationale sur les Méthodes Alternatives de protection des plantes, Lille, 11 au 13 mars 2015. > Gosman N., Srinivasachary, Steed A., Chandler E., Thomsett M., Nicholson P., 2010. Evaluation of type I Fusarium head blight resistance of wheat using non-deoxynivalenol-producing fungi. Plant Pathology 59(1): 147-157. > Gourdain E., Maumené C., Valade R., Labreuche J., 2015. Lutte prophylactique contre la fusariose des épis : état des connaissances acquises dans le cadre du projet CASDAR ECOFUSA. 5e Conférence Internationale sur les Méthodes Alternatives de protection des plantes, Lille, 11 au 13 mars 2015. > Pettitt T., Xu X., Parry D., 2003. Association of Fusarium species in the wheat stem rot complex. European journal of plant pathology 109(7): 769-774. > Xu X.M., Parry D.W., Nicholson P., Thomsett M.A., Simpson D., Edwards S.G., Cooke B.M., Doohan F.M., Brennan J.M., Moretti A., Tocco G., Mule G., Hornok L., Giczey G., Tatnell J., 2005. Predominance and association of pathogenic fungi causing Fusarium ear blight in wheat in four European countries. European journal of plant pathology 112(2): 143-154. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 79 Financement Casdar, Innovation & Partenariat 2009 Chap II : Solutions intégrées de protection ECOPROTECTGRAIN : Economie et innovation en protection raisonnée des céréales contre l’infestation par les insectes au stockage Barrier-Guillot Bruno Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Barrier-Guillot Bruno, ARVALIS-Institut du végétal, Boigneville • Dauguet Sylvie, Terres Inovia, Pessac • Ducom Patrick, Captsystèmes, Romainville • Leblanc Marie-Pierre, FranceAgriMer, La Rochelle • Crépon Katell, Coop de France, Paris • Frérot Elodie, Fédération du négoce agricole, Paris • Ciesla Yann, Sitona AgroExpert, Pessac • Fleurat-Lessard Francis, UR 1264 MycSA (Mycologie et Sécurité des Aliments), INRA Villenave d’Ornon Mots clefs Lutte intégrée, insecte, bonnes pratiques, stockage, céréales Une campagne de prélèvements dans les silos a permis de déterminer que plus du quart des échantillons de blés tendres, prélevés au printemps, présentent au moins un insecte. L’espèce la plus fréquente et la plus abondante est le charançon du riz (Sitophilus oryzae). Des facteurs de risque d’infestation ont pu être identifiés : conception des bâtiments, absence de silothermométrie fixe, absence de traitement des locaux vides. Un diagnostic réalisé chez des organismes stockeurs (OS) a révélé que la lutte contre les insectes restait essentiellement basée sur l’utilisation d’insecticides de contact. Les éléments de base de la lutte intégrée étaient peu connus par les opérateurs. Il n’y avait pas de suivi du niveau d’infestation, donc pas d’indicateur précis de pilotage. En termes de mesure préventive, des outils pour optimiser l’installation de ventilation des grains et sa conduite ont été proposés, basés sur une «contrainte climatique» affinée par les données météorologiques locales. Concernant les mesures de lutte directe, la désinsectisation à la chaleur est une voie prometteuse. Contexte et objectifs En situation de stockage dégradé, les insectes des grains stockés peuvent causer des pertes pondérales dépassant 20% de la quantité récoltée. En France, leur présence dans les céréales mises en marché constitue une perte économique, les contrats stipulant l’absence d’insectes vivants. Parallèlement, la présence de résidus d’insecticides sur les grains est source d’inquiétude pour les consommateurs et peut être un obstacle à la commercialisation en cas de dépassement de la limite maximale de résidu. Les récentes évolutions règlementaires, en particulier l’interdiction d’usage de deux insecticides fréquemment utilisés sur les céréales (dichlorvos et malathion) ont considérablement réduit les possibilités de lutte chimique contre les insectes du stockage. Le faible nombre de substances actives disponibles augmente le risque de résistance des insectes et incite les opérateurs à une moindre utilisation de ces insecticides au profit d’une lutte intégrée. Le projet a été construit dans une démarche intégrative avec les objectifs suivants : i) évaluer les avantages et les risques des pratiques actuelles de lutte contre les insectes au stockage ; ii) proposer des solutions pour promouvoir une démarche de protection intégrée ; iii) contribuer au développement d’avancées techniques valorisables dans un contexte de réduction des usages d’insecticides ; iv) accompagner la valorisation de nouveaux itinéraires de stockage auprès des OS et des agriculteurs. Méthodes Pour répondre à ces objectifs, le projet est articulé autour de trois actions de recherches : 1) Réaliser un diagnostic technique et économique sur les pratiques actuelles ; 2) Etudier l’amélioration possible des méthodes de lutte préventive contre les insectes des grains stockés ; 3) Entreprendre la réévaluation objective du potentiel des méthodes de lutte corrective. Ces actions ont été complétées par un volet de communication visant à diffuser les résultats du projet auprès des OS. ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 81 ECOPROTECTGRAIN : Economie et innovation en protection raisonnée des céréales contre l’infestation par les insectes au stockage ... Principaux résultats obtenus Un quart des échantillons infestés par des insectes La quantification des formes libres et cachées a montré que plus du quart des 190 échantillons prélevés contenaient au moins un individu d’une espèce d’insecte nuisible. Le charançon du riz (Sitophilus oryzae) s’est révélé l’espèce la plus fréquente suivie par les silvains (Oryzaephilus surinamensis et Cryptolestes ferrugineus). L’évolution la plus remarquable par rapport à la précédente enquête réalisée sur ce sujet en France (1977-1978) est la moindre occurrence des charançons du blé (Sitophilus granarius) et la recrudescence du capucin (Rhyzopertha dominica). L’analyse des pratiques de stockage et du niveau d’infestation des grains a mis en évidence une relation entre la présence d’insectes et le type de structure de stockage : le nombre d’échantillons infestés était significativement plus élevé dans les silos à plat que dans les silos verticaux. L’absence de silothermométrie fixe était également un élément de plus fort risque d’infestation. A l’inverse, le traitement des grains dit « préventif » (dès la réception) n’apporte aucun bénéfice sur l’infestation des grains à long terme. L’efficacité de la ventilation dépend des débits spécifiques et de l’offre climatique Parmi les mesures de prévention, figure en premier lieu la ventilation à l’air ambiant. Son efficacité dépend des débits spécifiques des ventilateurs et de «l’offre climatique» disponible dans la région pour refroidir suffisamment le grain. L’offre climatique a été modélisée grâce aux données de 203 stations météorologiques de Météo France, toutes situées 0 cellule refroidie 1 cellule refroidie 2 cellules refroidies 3 cellules refroidies 4 cellules refroidies 5 et plus cellules refroidies Silo de très grande hauteur (tour béton) 4m 3/h/m3 dans des régions de production céréalière et disposant d’enregistrements sur 20 années consécutives. Pour illustrer la diversité des silos français, quatre situations ont été modélisées, correspondant à quatre débits spécifiques (Figure 1). Pour chacune de ces situations et pour chaque palier, le rapport entre les heures disponibles et les heures nécessaires a permis d’estimer le nombre de cycles de ventilation réalisables. Une cartographie a été réalisée par extrapolation autour des stations météorologiques. La base de données des heures disponibles a ensuite été exploitée pour créer un outil d’autodiagnostic des installations de ventilation1. La chaleur : une alternative possible en cas d’infestation non maîtrisée L’utilisation de la chaleur pour désinsectiser des grains a été étudiée par de nombreux auteurs et il est reconnu que, soumis à des températures comprises entre 45 et 60°C, les insectes meurent rapidement. L’objectif était d’adapter cette technique aux séchoirs à grains déjà présents sur les sites de stockage en identifiant les paramètres (température, débit d’air spécifique, durée de traitement) nécessaires à la désinsectisation du grain. L’impact du débit spécifique sur l’efficacité de cette méthode de désinsectisation a été mis en évidence : la durée d’exposition nécessaire pour obtenir un taux de mortalité de 100% est diminuée lorsque le débit spécifique augmente. n 1. Ce logiciel d’autodiagnostic a été réalisé par ARVALIS-Institut du végétal avec le soutien financier de FranceAgriMer. Il est disponible sur demande auprès d’ARVALIS-Institut du végétal. Silo de grande hauteur (palplanche) 8m3/h/m3 Silo de moyenne hauteur 12m3/h/m3 Silo fermier, stockage à plat 16m3/h/m3 Palier 1 Palier 2 Palier 3 Figure 1. Nombre de cellules refroidies en fonction des conditions climatiques et du débit spécifique du ventilateur 82 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron ECOPROTECTGRAIN : Economie et innovation en protection raisonnée des céréales contre l’infestation par les insectes au stockage Conclusions et perspectives Lutter contre les insectes au stockage est encore trop souvent synonyme d’utilisation d’insecticides. La réduction de leur utilisation s’accompagne nécessairement d’une modification des pratiques et de la mise en place d’une lutte intégrée. Plusieurs composantes de cette lutte intégrée ont été identifiées lors de ce projet : mesures de prévention (sanitation des locaux, conception des silos), surveillance du niveau d’infestation (utilisation de pièges), mesures d’exclusion (conduite de la ventilation) et mesure de lutte directe alternative (désinsectisation par la chaleur). L’élaboration d’une stratégie de lutte est un processus complexe nécessitant la mise en relation de plusieurs facteurs (environnement, espèces ciblées, débouchés…). Ce processus de décision peut être assisté par des systèmes experts. La création d’un système expert appliqué aux conditions de stockage françaises permettrait d’accroître l’expertise des opérateurs et d’améliorer la diffusion des innovations dans le secteur du stockage. Références bibliographiques > Leblanc M.P., Fuzeau B., Fleurat-Lessard F., 2014. Influence of grain storage practices or kind of structure and pesticide use on insect presence in wheat bulks after a long-term storage : a multi-dimensional analysis. IOBC-WPRS Bull. 98, 403–420. > Losser E., 2014. Development of a self-diagnosis software to enhance stored-grain cooling aeration system performance. IOBC-WPRS Bull. 98, 171–182. > Vancrayenest L., Frérot E., Crépon K., 2014. Technical and economic analysis of pest management practices for stored wheat in 14 grain elevators in France. IOBC-WPRS Bulletin 98, 395–402. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 83 Financement Casdar, Innovation et partenariat 2009 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants Fertipro : utiliser la fertilisation pour agir sur la santé des plantes et favoriser leur protection vis-à-vis des maladies et ravageurs Christiane Raynal-Lacroix Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Raynal-Lacroix Christiane, Ctifl, Centre de Lanxade, Prigonrieux •N icot Philippe (au titre du projet Fertileg), UR0407 Pathologie végétale, INRA PACA Mots clefs Fertilisation, Bioagresseurs, Tomate, Laitue, Protection intégrée La réduction programmée de l’usage des produits phytosanitaires représente un réel défi pour les producteurs de légumes. Dans ce contexte, la fertilisation s’inscrit dans un champ de prospection de techniques innovantes pour minimiser le risque phytosanitaire. Le projet étudie, en réseau, les régimes de fertilisation favorisant la santé des plantes et renforçant leur résistance vis-à-vis des bioagresseurs. Ces voies nouvelles de fertilisation, validées en conditions de production, sont destinées à soutenir une agriculture productive et à haute valeur environnementale. Résumé La réduction programmée de l’usage des produits phytosanitaires représente un réel défi pour les producteurs de légumes. Dans ce contexte, la fertilisation s’inscrit dans un champ de prospection de techniques innovantes pour minimiser le risque phytosanitaire. Le projet étudie, en réseau, les régimes de fertilisation favorisant la santé des plantes et renforçant leur résistance vis-à-vis des bioagresseurs. Ces voies nouvelles de fertilisation, validées en conditions de production, sont destinées à soutenir une agriculture productive et à haute valeur environnementale. Contexte et objectifs La réduction de l’usage des pesticides et le renforcement des mesures en faveur de la protection de l’environnement, représentent des défis majeurs pour les producteurs de légumes. Des réponses adaptées ne peuvent se concevoir qu’à travers des stratégies globales combinant de manière cohérente des techniques complémentaires limitant l’usage des produits phytosanitaires. Or, la fertilisation agit sur la santé des plantes et conditionne leur état de sensibilité aux bioagresseurs. L’objectif du projet est de définir et de développer des régimes de fertilisation assurant une meilleure résistance des plantes aux maladies et ravageurs pour limiter leur dépendance vis-à-vis des produits phytosanitaires. De plus, l’effet de la fertilisation sur l’efficacité des produits de protection biologique doit être précisé pour associer judicieusement ces deux facteurs de gestion des risques dans les stratégies de protection des cultures. Les deux espèces légumières supports pour l’étude sont la tomate et la laitue dans leurs modes de culture les plus représentés en France : plein champ et abri pour la laitue, abri et serre hors sol pour la tomate. Elles ont été retenues en raison de leur importance économique (12 284 ha, 328 503 tonnes pour la laitue, 4 096 ha, 711 559 tonnes pour la tomate, Source Agreste, 2008). In fine il s’agit, pour ces différents modes de culture de la laitue et de la tomate, de parvenir à une gestion équilibrée de la fertilisation pour l’intégrer dans une combinaison de techniques assurant une meilleure protection des cultures. Méthodes La réalisation du projet s’appuie sur un travail en réseau et conduit à agir en synergie sur un sujet qui requiert des compétences dans des domaines aussi variés que l’agronomie, la physiologie végétale, la fertilisation et la nutrition des plantes, la pathologie végétale et une bonne connaissance des systèmes de culture en place. Pour ce faire, six stations régionales d’expérimentation et quatre chambres d’agriculture sont parties prenantes du projet qui interagit avec le projet PICLég FERTILEG. Tous les travaux sont menés sur la base de protocoles et ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 85 Fertipro : Utiliser la fertilisation pour agir sur la santé des plantes et favoriser leur protection vis-à-vis des maladies et ravageurs ... méthodes de travail relevant d’une approche commune. Le projet s’articule autour de 5 tâches complémentaires. Tâche 1 : Enquête nationale sur les pratiques de fertilisation et recensement conjoint des problèmes sanitaires (FERTIPRO) Cet état des lieux est réalisé dans les principales zones de production et dans la diversité des itinéraires techniques. Il s’appuie sur un questionnaire établi avec les partenaires techniques, scientifiques et le concours de statisticiens, et des suivis en culture des bioagresseurs. Cette enquête est réalisée par les techniciens des chambres d’agriculture et des stations régionales. Les bioagresseurs concernés sont : Botrytis, oïdium, aleurodes sur tomate ; Botrytis, Sclerotinia , Rhizoctonia, Bremia et pucerons sur laitue. Tâche 2 : Caractériser l’impact de la nutrition de la plante sur la sensibilité aux bioagresseurs en conditions de laboratoire (FERTILEG) Cette tâche est réalisée par les partenaires scientifiques du projet FERTILEG. Elle consiste à étudier, en conditions d’apports fertilisants strictement contrôlés, les interactions plante-bioagresseur en lien avec la nutrition azotée, potassique et calcique. Les travaux s’intéressent également à l’effet de la fertilisation sur la protection biologique. Ils sont de nature à orienter les essais en conditions agronomiques de production en apportant des références propres à l’effet « nutrition des plantes ». Tâche 3 : Modélisation (FERTILEG) Cette action relève du projet FERTILEG. Elle vise l’élaboration d’un modèle Botrytis/tomate. Tâche 4 : Essais en sites expérimentaux pour évaluer l’effet de la nutrition des plantes sur leur sensibilité aux bioagresseurs en conditions de culture (FERTIPRO) Il s’agit de traduire en références pratiques les résultats obtenus en laboratoire. Les essais, réalisés sur la base de protocoles communs, visent à évaluer et valider en conditions de culture et dans la diversité des situations pédo-climatiques, des régimes de fertilisation azotée « guidée » en référence à la pratique du producteur. L’ensemble des résultats est mis à profit pour définir des stratégies de production intégrée. Tâche 5 : Définir et tester des stratégies de production intégrée avec des fertilisations agissant favorablement sur la santé des plantes (FERTIPRO) Sont testées des stratégies intégrant les régimes de fertilisation les plus efficaces dans la défense des plantes, des variétés choisies et la protection biologique. Le dispositif d’essais multi-sites et la proximité avec les conditions d’application au champ doivent offrir une première approche des progrès associés à des stratégies à moindres coûts sanitaire et environnemental. 86 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Le Tableau 1 rend compte de l’effet du niveau d’azote sur la sensibilité à deux maladies majeures chez la tomate : oïdium et botrytis et sur le rendement (+ effet relativement modéré, ++ effet moyen, +++ effet important). Tableau 1 : Sensibilité de la tomate à oïdium et botrytis selon le niveau d’azote Niveau d'azote Sensibilité à l'oïdium Sensibilité à botrytis Rendement + +++ + + à ++ + à ++ ++ ++ à +++ ++ ++ Bas Moyen Elevé Tableau 1 :protection Sensibilité de la tomate à opeut et botrytis selon lpar niveau d’azote d’azote mais ces résultats méritent D’autre part, 1l’action de la biologique renforcée le niveau Tableau : Sensibilité de la tomateïdium àêtre oïdium et e botrytis selon d’être précisés par des études complémentaires. Niveau le niveau d’azote d'azote Sensibilité à botrytis Sensibilité à l'oïdium Rendement La fertilisation azotée intervient aussi sur la sensibilité des laitues aux bioagresseurs comme mentionné dans le t ableau 2 (+ Bas relativement modéré, ++ e+ ffet moyen, +++ effet important). +++ + effet L’action de la protection biologique peut être renforcée par Moyen à ++ + à ++ ++ le niveau d’azote + mais ces résultats méritent d’être précisés Tableau 2 : Sensibilité de la laitue à sclerotinia, botrytis et pucerons selon le niveau d’azote par des études complémentaires. Elevé ++ à +++ ++ ++ Niveau Sensibilité à Sensibilité aux pucerons La fertilisation azotée intervient aussi sur la sensibilité des b otrytis Sensibilité à sclerotinia d'azote D’autre part, l’action de la protection biologique peut être renforcée par le niveau d’azote mais ces résultats méritent laitues aux bioagresseurs comme mentionné dans le d’être précisés par des études complémentaires. Bas + + + Tableau 2 (+ effet relativement modéré, ++ effet moyen, +++ La fertilisation azotée intervient aussi sur la sensibilité des laitues aux bioagresseurs comme mentionné dans le t ableau 2 (+ effet relativement modéré, ++ effet moyen, +++ effet important). effet important). ++ Moyen ++ + (+) Rendem + ++ Elevé Niveau d'azote Tableau 2 : Sensibilité de la laitue à sclerotinia, botrytis et pucerons selon le niveau d’azote +++ +++ + (+) ++ (+) Sensibilité à sclerotinia Sensibilité aux pucerons Sensibilité à botrytis Bas + + + + Moyen ++ + (+) ++ ++ Elevé +++ + (+) +++ ++ (+) Rendement Tableau 2 : Sensibilité de la laitue à sclerotinia, botrytis et pucerons selon le niveau d’azote In fine, il apparaît que la maîtrise de l’azote engendre en général des effets positifs sur la protection des cultures. En première approche, les moyens à mettre en œuvre pourraient être résumés comme suit : - Tomate hors sol : réduire et moduler la concentration en azote sur le cycle cultural. Il apparaît qu’une composition nutritive à 10 meq/L concilie « moindre sensibilité aux attaques des champignons étudiés » et « niveau de production optimale ». Cette concentration minérale peut encore être réduite en période de forte évapotranspiration (ETP) quand la fréquence des fertirrigations est élevée (printemps/été) en lien avec la demande accrue en eau des plantes. - Tomate sous abri : les résultats plaident pour la mise en œuvre d’une gestion raisonnée de l’azote dans la pratique. La méthode PILazo®, basée sur un bilan simplifié en azote avant mise en place de la culture et des tests NO3 pétiolaires en cours de culture, permet d’optimiser les apports tout en préservant un niveau de production élevé. Cet ajustement de Fertipro : Utiliser la fertilisation pour agir sur la santé des plantes et favoriser leur protection vis-à-vis des maladies et ravageurs la fertilisation azotée aux besoins réels de la culture s’insère favorablement dans une stratégie à moindres risques sanitaires et environnementaux. - Laitue plein champ et sous abri : la sensibilité aux champignons sclerotinia et botrytis et aux pucerons peut être réduite via une gestion équilibrée de l’azote. Celle-ci repose sur des apports fractionnés (à la plantation puis quand la vitesse de développement des plantes s’accélère, soit 3-4 semaines après plantation au printemps) en déduisant les fournitures du sol à chacun des deux apports par cycle cultural. n Conclusions et perspectives La réalisation de ce projet a permis de fournir de nouvelles références à l’appui d’une gestion intégrée de l’azote pour limiter les risques phytosanitaires et environnementaux tout en maintenant le niveau de production. D’ores et déjà, l’accompagnement des pratiques peut se faire par des apports raisonnés à partir de références acquises, par l’application de PILazo® aux cultures de tomate sous abri et par la prise en compte des fournitures du sol. Les travaux sont à poursuivre sur les agents de protection biologique dont les Stimulateurs de Defense des Plantes. Ces travaux mériteraient aussi d’être élargis à d’autres éléments nutritifs. Ainsi, une première étude menée en conditions de nutrition contrôlée et avec inoculation artificielle de mildiou chez la laitue, au Centre Ctifl de Lanxade, montre l’effet de la fertilisation phosphatée sur l’intensité des attaques de Bremia. Par ailleurs, les enquêtes « terrain » soulignent des marges de progrès réalisables en fertilisation potassique. Enfin, des connaissances supplémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre les mécanismes en jeu (métabolisme secondaire). Ceci détermine le champ d’actions possibles pour assurer une meilleure santé des plantes et être en mesure de limiter le recours aux produits phytosanitaires en production de légumes. Références bibliographiques > Dordas C., 2008. Role of nutrients in controlling plant diseases in sustainable agriculture. A review. Agron. Sustain. Dev. 28: 33-46. > Hoffland E. et al., 2000. Effect of nitrogen supply rate on disease resistance in tomato depends on the pathogen. Plant Soil. 218: 239-247. > Huber D.M., 1980. The role of mineral nutrition in defense. In Plant Disease, and Advanced Treatise. Vol. 5, How Plants Defend Themeselves, in: Horsfall J.G., Cowling E.B. (Eds), Academic Press, New-York, p. 381-406. > Jansson J., 2003. The influence of plant fertilisation regime on plant aphid parasitoïd interactions. Doctoral thesis. Swedish University of Agricultural Sciences, Uppsala. > Walters D.R. and Bingham I.J., 2007. Influence of nutrition on disease development caused by fungal pathogens: implications for plant disease control. Review article. Ann App Biol. 151: 307-324. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 87 Financement Casdar, Innovation et partenariat 2010 Chap I : Surveillance biologique du territoire INFLOWEB : Un site pédagogique sur les adventices pour aider leur gestion intégrée Jean Lieven Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Lieven Jean, Waller Florence, Pontet Célia, Terres Inovia (ex CETIOM), Thiverval-Grignon • Rodriguez Alain, ACTA, RMT FLORAD, Baziège • Guillemin Jean-Philippe, AgroSup Dijon • Bonin Ludovic, Arvalis – Institut du végétal, Boigneville • Ravenel Coraline, FNAMS, Ouzouer-le-Marché • Fontaine Laurence, ITAB, Angers • Quilliot Emilien, ITB, Paris Mots clefs Site internet, flore adventice, gestion intégrée, enquête INFLOWEB est un site internet qui rassemble, synthétise et vulgarise des connaissances utiles pour aider à gérer les principales mauvaises herbes des grandes cultures. Cet outil pédagogique a été mis au point en 2012. Le site vise à sensibiliser le monde agricole sur la gestion intégrée de la flore adventice et lui propose d’adopter des techniques plus économes en herbicides basées sur cette gestion.Une enquête nationale adressée, en 2011, à des conseillers agricoles, techniciens d’expérimentation et ingénieurs agronomes a permis de connaître la distribution des principales adventices en grandes cultures sur le territoire français. Contexte et objectifs Le rapport de l’étude Écophyto R&D (janvier 2010) évoque le besoin de proposer des outils didacticiels afin d’accompagner les agriculteurs vers de nouveaux schémas de raisonnement moins dépendants des pesticides et/ou adaptés au mode de production biologique (Butault et al., 2010). Dans ce contexte et avec l’appui du RMT Florad, le site internet INFLOWEB a été mis en place. Il vise à rassembler, synthétiser et vulgariser, de façon pédagogique, des connaissances malherbologiques sur une quarantaine d’adventices majeures des grandes cultures. Les contenus sont destinés à un large public d’agriculteurs, conseillers, enseignants et étudiants, pour favoriser le raisonnement des stratégies de désherbage économes en pesticides. Pour enrichir le site, une enquête a collecté des informations d’experts afin de décrire de façon opérationnelle la répartition sur le territoire français et l’abondance des 40 adventices traitées par Infloweb. Méthodes Les ouvrages (Editions ACTA, INRA, Arvalis - Institut du Végétal…), les communications issues de congrès (AFPPCOLUMA, colloques sur la biologie et écologie des mauvaises herbes, Crop Protection Brighton…), les thèses, les articles scientifiques (Agronomy Journal, Weed Research, Weed Science, Plant Science…) et les brochures et articles techniques (guides de cultures, presse agricole nationale spécialisée) ont alimenté INFLOWEB sur la description des adventices, leur biologie, leur écologie dans les milieux cultivés et leur nuisibilité, ainsi que sur les méthodes de lutte agronomiques, mécaniques et chimiques. Des experts techniques et scientifiques de la biologie et de la gestion des adventices (ACTA, AgroSup Dijon, Arvalis-Institut du végétal, Terres Inovia, FNAMS, INRA, ITAB et ITB) ont fourni ces informations et le développement informatique a été confié à une société prestataire de service. Pour actualiser les connaissances sur la distribution des mauvaises herbes et leur affinité vis-à-vis des grandes cultures, un sondage internet a été adressé à un panel de techniciens, conseillers et ingénieurs agricoles (instituts techniques, chambres d’agriculture, firmes phytosanitaires) en 2011. Les personnes enquêtées étaient invitées à caractériser le niveau de présence des 40 adventices sélectionnés dans INFLOWEB, avant désherbage, dans les principales grandes cultures de leurs bassins de production. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Le site est accessible gratuitement : www.infloweb.fr. Une page d’accueil propose un accès aux informations malherbologiques indexées par nom d’adventice sous trois formes possibles : nom commun, nom latin, code EPPO / BAYER. ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 89 INFLOWEB : Un site pédagogique sur les adventices pour aider leur gestion intégrée ... Chaque « fiche adventice » est composée de différents onglets : - « Identification » : classification de l’espèce, description botanique succincte et illustrations des stades plantule, adulte et semences, - « Biologie » : type biologique, calendrier de développement, profondeur de levée, production de semences, dormance et persistance du stock semencier dans le sol, - « Habitat » : affinités de l’adventice vis-à-vis des milieux, des cultures et des modes de production (agricultures conventionnelle et biologique), - « Facteurs favorables » : origine et progression de la mauvaise herbe au cours du temps, - « Nuisibilité » : niveaux de pertes de rendement et de qualité des récoltes, - « Méthodes de lutte » : • niveau d’efficacité des méthodes de lutte agronomique (rotation, labour, faux-semis…), • facilité du contrôle herbicide et noms des herbicides les plus efficaces dans les cultures concernées par l’adventice, • présence de cas de résistance à un ou plusieurs herbicides sur le territoire, • recommandations de lutte spécifique au désherbage mécanique et au mode de production en agriculture biologique. Les références bibliographiques sont mentionnées pour chaque fiche. Des pages annexes développent les principes de lutte agronomique et de lutte mécanique. Un lexique des termes botaniques utilisés est également proposé. En donnant les caractéristiques des espèces adventices, INFLOWEB accompagne les agriculteurs et les conseillers vers un désherbage plus adapté à la flore des parcelles. Les informations sur les résistances et les recommandations concernant le désherbage mécanique et la gestion agronomique de la flore permettent de raisonner les traitements et de réduire le recours aux herbicides. Le sondage d’experts régionaux sur la présence des adventices dans les différentes cultures a permis de compiler les connaissances des 182 participants, ensuite valorisées dans l’onglet « Habitat ». Cette base de données, initialement destinée à donner la répartition des adventices par région, a abouti à une typologie de la distribution de 40 espèces adventices en fonction des principales grandes cultures. L’affinité marquée entre espèces adventices et cultures a ainsi pu être mise en évidence. n Conclusions et perspectives Neuf mois après la mise en ligne d’INFLOWEB, près de 40 000 connexions avaient déjà été enregistrées. 36% des internautes y sont retournés à plusieurs reprises et il a été constaté que le site intéresse également le grand public. Au fil du temps, le site est actualisé par les partenaires du projet en fonction de l’actualité et des besoins émergents (nouvelles solutions de lutte, adventices en voie de progression, etc.). INFLOWEB enrichit efficacement la collection d’outils destinés aux agriculteurs et aux conseillers pour faire évoluer les pratiques agricoles vers une diminution de l’usage des herbicides. Cet outil répond ainsi à la demande d’Écophyto concernant les outils d’accompagnement des producteurs. Le projet INFLOWEB a aussi permis de centraliser des informations d’experts du désherbage sur la présence des principales mauvaises herbes en grandes cultures. Références bibliographiques > Bouët A., Crouzier S., Mamarot J., Montégut J., 1981. Dénominations régionales et locales des mauvaises herbes. Edition ACTA, 119 p. > Butault J.P., Dedryver C.A., Gary C., Guichard L., Jacquet F., Meynard J.M., Nicot P., Pitrat M., Reau R., Sauphanor B., Savini I, Volay T., 2010. Ecophyto R&D. Quelles voies pour réduire l’usage des pesticides ? Synthèse du rapport d’étude, INRA Editeur (France), 92 p. > Guyot L, Guillemat J, Becker Y, Barralis G, Demozay D, Le Nail F, 1962. Semences et Plantules des Principales Mauvaises Herbes. ACTA, Paris, 95 p. > Maupas F., Fortin E., Escriou H., 2006. Développement d’outils d’aide à la décision pour la culture betteravière. Industries alimentaires et agricoles, 122, 20-22. > Mamarot J., Rodriguez A., 2011. Mauvaises herbes des cultures. Editions ACTA, 569 p. 90 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Financement Chap II : Solutions intégrées de protection ANR, SYSTERRA 2010 LANDSCAPHID : Influence du paysage sur les pucerons ravageurs des cultures et le potentiel de contrôle biologique – Application à l’ingénierie écologique pour la gestion des ravageurs Marie Torres Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Vialatte Aude, UMR DYNAFOR (Dynamiques et écologie des paysages agriforestiers), INP-ENSAT Toulouse • Gauffre Bertrand, Centre d’Etudes Biologiques de Chizé, INRA Poitou-Charente • Rasplus Jean-Yves, UMR CBGP (Centre de Biologie pour la Gestion des Populations), INRA Montpellier • Baudry Jacques, UR SAD (Sciences pour l’Action et le Développement) - Paysage, INRA Rennes • Plantegenest Manuel, UMR IGEPP (Institut de Génétique, Environnement et Protection des Plantes), Agrocampus Ouest, Rennes Mots clefs Contrôle biologique, Gestion écologique, Paysage, Barcoding moléculaire, Pucerons L’étude, à large échelle conduite dans trois sites français engagés dans des suivis à long-terme, a porté sur les pucerons et leurs ennemis naturels, associés aux principales grandes cultures (céréales à paille, colza, tournesol, pois et autres légumineuses). Des méthodes ont été développées pour aborder l’étude de l’écologie des populations et communautés de ces organismes à l’échelle du paysage, en prenant en compte les compartiments semi-naturels de l’environnement connus pour être des habitats-clés pour de nombreuses espèces d’insectes. L’étude de l’effet des caractéristiques du paysage sur le fonctionnement des communautés d’arthropodes est difficile du fait du niveau élevé de complexité du système paysager, de l’échelle d’étude étendue et de l’importante quantité de données à collecter et à analyser. Les analyses suggèrent des effets limités et inconstants du contexte paysager proche sur le fonctionnement des populations et communautés de pucerons et d’ennemis naturels et indiquent une prédominance des effets des conditions locales (pratiques agricoles) ou régionales (orientation agricole, climat). Nous avons observé une relative étanchéité des compartiments cultivés et semi-naturels de l’agroécosystème avec des espèces d’auxiliaires probablement spécialisées sur l’habitat cultivé et peu de liens trophiques entre les compartiments. Ces travaux contribuent à mieux comprendre les relations ambiguës entre complexité paysagère, biodiversité et régulation des populations de ravageurs. Contexte et objectifs La littérature suggère que la gestion du paysage pourrait influencer les processus écologiques qui déterminent l’abondance des populations de ravageurs et contribuer à leur gestion durable (Veres et al., 2013). Cependant, bien qu’il existe une tendance à ce que les communautés les plus diversifiées procurent un contrôle plus important des arthropodes phytophages (Letourneau et al., 2009), des effets neutres voire négatifs sont également observés (Straub et al., 2008). Une meilleure connaissance du réseau d’interactions, en particulier trophiques, qui lient les ravageurs et leurs ennemis naturels est nécessaire pour progresser dans notre compréhension des relations entre biodiversité et contrôle biologique (Crowder & Jabbour, 2014). Du fait notamment des difficultés à conduire des études agroécologiques spatialement explicites à large échelle, les patrons généraux des relations entre caractéristiques du paysage et risques agricoles liés à l’activité des ravageurs des cultures restent méconnus, limitant l’émergence de stratégies de gestion durable à l’échelle du paysage. Une seconde limitation résulte du manque d’outils et de méthodologies performantes pour identifier en conditions naturelles les réseaux d’interactions impliquant les arthropodes. Pour aborder ces questions nous avons choisi de nous intéresser aux pucerons et à leurs principaux ennemis naturels, associés aux grandes cultures (céréales à paille, colza, tournesol, pois et autres légumineuses). La première partie du projet a eu pour objectif de produire des connaissances générales sur l’écologie de ces organismes à l’échelle du paysage, en incluant les compartiments semi-naturels ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 91 LANDSCAPHID : Influence du paysage sur les pucerons ravageurs des cultures et le potentiel de contrôle biologique – Application à l’ingénierie écologique pour la gestion des ravageurs ... de l’agrosystème qui sont connus pour être des habitats essentiels pour de nombreuses espèces d’insectes (Tscharntke et al., 2005). Nous avons ensuite étudié l’impact des caractéristiques du paysage (composition, hétérogénéité, fragmentation, connectivité) sur les populations d’arthropodes cibles. D’un point de vue appliqué, l’ambition du projet était de produire des connaissances utiles pour aider à la conception de stratégies de gestion du paysage pouvant contribuer au contrôle durable des ravageurs. Méthodes Nous avons développé notre stratégie de recherche dans trois directions : - En premier lieu, un important jeu de données portant sur les abondances de pucerons et d’ennemis naturels a été collecté de manière coordonnée dans les trois sites d’étude (Zone Atelier Armorique, Zone Atelier Plaines et Val de Sèvres et site atelier Val et Côteaux de Gascogne). Les caractéristiques paysagères ont été évaluées autour de chaque point d’échantillonnage et soumises à des procédures complexes d’analyses de données, afin d’explorer sans a priori les relations entre populations d’insectes et propriétés du paysage. - Des études ont été conduites sur les caractéristiques biologiques importantes pour comprendre les processus biologiques sous-jacents responsables de l’influence des caractéristiques paysagères sur les populations d’insectes ciblés. Nous nous sommes particulièrement intéressés à la dispersion, la stratégie d’hivernation et la spécialisation trophique, déterminants majeurs du fonctionnement des populations à l’échelle du paysage. - Enfin, nous avons développé des outils moléculaires spécifiques pour identifier les liens trophiques entre ennemis naturels (prédation intra-guilde) et entre ennemis naturels et pucerons ravageurs au champ. Ces outils ont ensuite été utilisés pour identifier les réseaux d’interactions trophiques liant les arthropodes dans le paysage agricole. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto L’échelle majoritairement adoptée au cours de l’étude (paysage local, de l’ordre du kilomètre) est apparue relativement inadéquate pour les organismes cibles de ce travail (espèces généralistes à forte capacité de dispersion) dans le contexte agricole considéré. Les résultats suggèrent que les échelles d’influence pertinentes sur le fonctionnement des populations d’organismes étudiées sont plus larges (de la petite région au continent) et/ou plus restreintes (parcelle et son environnement immédiat). Enfin, nos travaux confirment l’importance de la complexité écologique qui doit être explicitement considérée dans les études et qu’il est difficile de résumer au moyen d’indicateurs simples. Les analyses suggèrent des effets limités et inconstants du contexte paysager proche sur le fonctionnement des populations et communautés de pucerons et d’ennemis naturels et indiquent une prédominance des conditions locales (pratiques agricoles) ou régionales (orientation agricole, climat). Nous avons observé une relative étanchéité des compartiments cultivés et semi-naturels de l’agroécosystème avec des espèces d’auxiliaires probablement spécialisées sur l’habitat cultivé et peu de liens trophiques entre les compartiments. Ces travaux contribuent à mieux comprendre les relations ambiguës entre complexité paysagère, biodiversité et régulation des populations de ravageurs. Nos résultats suggèrent une influence majeure des pratiques agricoles et de leur historique à l’échelle de la parcelle ainsi que de son environnement immédiat. Quelques pistes telles que l’identification d’éléments paysagers ou de successions culturales qui leur sont favorables permettent d’élaborer des préconisations pour accroître la présence des ennemis naturels. n Conclusions et perspectives Les travaux réalisés dans le cadre de LANDSCAPHID ont confirmé la difficulté de conduire un projet ambitieux et multisite à l’échelle du paysage. Ils démontrent la nécessité de poursuivre les efforts de normalisation des méthodes et des outils et le développement d’outils haut-débit pour les recherches en écologie. Le maintien de dispositifs du type « zone atelier », permettant des suivis à long terme et à large échelle, est crucial pour ce type de projet. La mise en évidence d’une relative compartimentation écologique entre zones agricoles et non-agricoles incite à s’interroger sur les aménagements et les pratiques susceptibles d’augmenter la connectivité entre les différents éléments, dans le but d’accroître la fourniture de services écosystémiques, notamment le service de régulation des ennemis des cultures. La spécificité des interactions et la fréquence des interactions intra-guilde rappellent l’importance de considérer l’identité spécifique des organismes et la structure du réseau écologique. Elles questionnent la pertinence d’indicateurs composites usuels tels que les indices de biodiversité ou l’abondance globale au sein d’une guilde. De même, elles posent la question de la pertinence de catégories paysagères grossières (espaces boisés, haies, prairies, cultures, …) souvent insuffisantes pour inférer leur fonction écologique en l’absence d’information sur les espèces végétales qu’elles accueillent. 92 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron LANDSCAPHID : Influence du paysage sur les pucerons ravageurs des cultures et le potentiel de contrôle biologique – Application à l’ingénierie écologique pour la gestion des ravageurs Références bibliographiques > Andrade T., Outreman Y., Krespi L., Plantegenest M., Vialatte A., Gauffre B., van Baaren J., 2015. Spatiotemporal variations in aphidparasitoid community structures in agricultural ecosystems. Ecosphere, 6(7): 113 > Derocles S.A.P., Le Ralec A., Besson M., Maret M., Walton A., Evans D., Plantegenest M., 2014a. Molecular analysis reveals strong compartmentalisation in aphid-parasitoid trophic networks between crop and non-crop habitat. Molecular Ecology, 23(15): 3900-3911. > Marrec R., Badenhausser I., Bretagnolle V., Börger L., Roncoroni M., Guillon N., Gauffre B., 2014b. Crop succession and habitat preferences drive the distribution and abundance of carabid beetles in an agricultural landscape. Agriculture, Ecosystems and Environment, 199:282289. > Puech C., Baudry J., Joannon A., Poggi S., Aviron S., 2014. Organic vs. conventional farming dichotomy: Does it make sense for natural enemies? Agriculture, Ecosystems and Environment, 194:48-57. > Raymond L., Sarthou J.P., Plantegenest M., Gauffre B., Ladet S., Vialatte A., 2014a. Immature aphidophagous hoverflies overwinter within agricultural fields and significantly control aphid populations in autumn. Agriculture, Ecosystems and Environment, 185: 99-105. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 93 Financement Chap VIII : Exposition aux pesticides et santé humaine Écophyto (redevance pollutions diffuses), ANSES EST 2010 MEPIMEX : Multi Exposition de l’homme aux Pesticides : évaluation des Interactions Métaboliques et Xéno-hormonales in vitro Roger Rahmani Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Rahmani Roger, de Sousa Georges, Kadar Ali, UMR 1331 TOXALIM 1331, Equipe de Toxicologie Cellulaire et Moléculaire des Xénobiotiques, INRA, Sophia Antipolis. Mots clefs Toxicologie in vitro, Biotransformation, Pesticides, Mélanges, Modélisation mathématique Vers une meilleure compréhension des effets « cocktails » ? Le projet MEPIMEX avait pour objectifs d’évaluer les impacts toxicologiques de mélanges de pesticides auxquels la population française est la plus exposée, via son alimentation. Plusieurs biomarqueurs d’effet ont été criblés in vitro : cytotoxicité, processus de détoxication, activation du récepteur nucléaire PXR humain. Parmi les 14 pesticides étudiés, 4 se sont avérés être de puissants agonistes du hPXR, 4 de moyenne et 6 de faible action. La plupart des mélanges activent fortement ce récepteur et induisent l’expression du gène cible CYP3A4. L’application d’un modèle mathématique de concentration-addition, montre, selon les cocktails de pesticides et leurs proportions, des effets additifs, supra- ou infra-additifs. Une étude métabolique a été menée sur un des mélanges (éthion, linuron, chlorfenvinfos) pour étudier les interactions entre les pesticides le composant (Km, Vm, clairance…). Au total, des interactions métaboliques et toxicologiques entre les pesticides composant ces mélanges ont ainsi pu être démontrées, dont les incidences sanitaires restent encore à examiner. Contexte et objectifs Via leur environnement et en particulier leur alimentation, les consommateurs sont exposés de façon chronique à des résidus de pesticides. Selon leurs concentrations, leurs sites de bioaccumulation, leurs voies métaboliques, leurs cibles cellulaires et moléculaires… Ceux-ci peuvent donner lieu à des interactions pharmaco-toxicologiques, susceptibles d’engendrer des processus toxiques non prévisibles, voire néfastes (perturbations hormonales…). Des effets additifs, supra-additifs ou synergiques, infra-additifs ou antagonistes peuvent ainsi survenir. Le nombre considérable de xénobiotiques ajouté à leurs effets combinatoires rend l’évaluation toxicologique réglementaire des mélanges difficile à l’aide des méthodes traditionnelles. Cette complexité impose le recours à des approches expérimentales in vitro (modèles cellulaires..) et théoriques (modélisation mathématique). L’estimation pertinente des dangers et des risques sanitaires liés à ces cocktails de molécules impose donc une meilleure connaissance à la fois de leur mode 1 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron d’action et de leur biotransformation. Intégrées aux données d’exposition, épidémiologiques et obtenues chez l’animal, ces approches permettent d’optimiser la gestion des risques sanitaires. Les objectifs de ce projet étaient donc d’évaluer les potentielles interactions métaboliques et toxicologiques de pesticides en mélanges, auxquels la population française est exposée à travers son alimentation. Méthodes Les cocktails, composés de 2 à 6 pesticides, ont été sélectionnés parmi ceux identifiés par l'AFSSA dans le cadre du projet ANR Périclès. Les impacts toxicologiques de ces pesticides seuls et/ou associés ont ensuite été caractérisés in vitro (hépatocytes, lignées d’hépatomes HepaRG et HepG2 parentale ou transfectée par le hPXR…) au moyen de biomarqueurs cellulaires et moléculaires: cytotoxicité en temps réel par mesure d'impédance, transactivation du récepteur nucléaire hPXR et expression génique de ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 95 MEPIMEX : Multi Exposition de l’homme aux Pesticides : évaluation des Interactions Métaboliques et Xéno-hormonales in vitro ... certains gènes cibles. Les données obtenues et leur modélisation ont permis de hiérarchiser les différents produits et leurs mélanges, en termes d’effet biologique. Nous avons ensuite appliqué le modèle de concentration addition et estimé l’effet mélange en comparant les données expérimentales et théoriques (modélisation des effets attendus). Enfin, certaines molécules ont fait l’objet d’études métaboliques in vitro, nécessitant la mise en place de méthodes de dosage par GC-MS et LC-MS/MS spécifiques, afin de caractériser leurs paramètres cinétiques (Km, Vm, clairance…), seules ou combinées. Principaux résultats Le modèle Bayésien développé par l’ANSES avait permis de sélectionner les 7 mélanges sur lesquels nous avons axé nos recherches. Activation du PXR Concernant l’activation du hPXR, les molécules prises séparément et les mélanges constitués ont été testés. Les courbes dose-réponse ont été modélisées par régression linéaire associée à des techniques de bootstrap (Figure 1). Tableau 1 : Facteurs de transactivation des pesticides composant les cocktails 2, 3 et 4, vis-à vis du PXR entre les données expérimentales et modélisées, n’excèdent pas un facteur ± 1,5 en tenant compte des incertitudes. Ainsi, pour le mélange 4 (Figure 2), les ECvs0.5RIF expérimentales sont estimées à 17.6 µM et à 26.3 µM, en proportions équimolaire et réelle respectivement. Lorsque calculé par le modèle de concentration addition, ces valeurs s’élèvent à 27.6 et 18.85 µM. Cela montre l’importance de l’affinité des pesticides pour le hPXR dans les mélanges, mais aussi de leurs proportions respectives dans l‘effet toxicologique global. Figure 1 : Modélisation de l’activation du hPXR par les 5 pesticides du cocktail n°4 Les facteurs de transactivation des pesticides constitutifs des cocktails 2, 3 et 4, normalisés par rapport à la rifampicine (agoniste modèle du hPXR ; EC50 : 1.8 µM) sont consignés dans le Tableau 1. Une classification a pu ainsi être établie en termes de pouvoir agoniste vrai (V), modéré (M) ou faible (F) vis-à-vis du récepteur nucléaire hPXR, l’éthion s’avérant plus puissant que la rifampicine (x 1.98). En termes d’effet « mélanges », tous s’avèrent significativement activer le hPXR de façon dose-dépendante. Les données expérimentales d’activation du PXR et théoriques (utilisation d’un modèle mathématique de concentration addition, associé au bootstrap) ont été ensuite comparées. Pour le mélange 2, constitué majoritairement d’agonistes vrais du PXR, l’effet cocktail s’avère très bien prédit par le modèle. Pour les autres cocktails, nous avons en revanche noté des effets infra- ou supra-additifs, selon la proportion des pesticides (équimolaire vs réelle). Les différences observées 96 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Figure 2 : Application du modèle de concentration addition aux pesticides du cocktail n°4 Interactions métaboliques Après avoir développé et validé des méthodes de dosage par GC-MS et LC-MS/MS, nous avons analysé le métabolisme in vitro (microsomes et hépatocytes d’origine humaine) de 3 molécules (éthion, linuron, chlorfenvinfos). (Figure 3) Nous avons pu estimer les paramètres cinétiques des molécules (Km, Vm, clairance intrinsèque…), seules ou en combinaison et avons pu démontrer leurs interactions métaboliques mutuelles (Tableau 2). Le chlorfenvinfos semble être le composé qui subit le moins d'interactions métaboliques. Seules les combinaisons incluant le linuron et l'éthion simultanément réduisent la clairance intrinsèque MEPIMEX : Multi Exposition de l’homme aux Pesticides : évaluation des Interactions Métaboliques et Xéno-hormonales in vitro Enfin, la biotransformation de la dernière substance active est affectée par la présence individuelle d'une forte teneur en éthion et quelle que soit la quantité de chlorfenvinfos testée. Au regard des données obtenues, l'inhibition de la dégradation de ce pesticide est réduite de 70 % dans le cas de la dernière combinaison envisagée. n Figure 3 : Démarche expérimentale in vitro de ce composé. A l'inverse, la métabolisation de l'éthion est inhibée par la présence de linuron et plus fortement par la co-incubation du chlorfenvinfos. De plus, la clairance de ce composé est fortement réduite lorsque les deux produits sont présents. Tableau 2 : Effets des co-incubations sur les clairances intrinsèques individuelles Conclusions et perspectives Applications envisageables en lien avec le Plan Ecophyto Ces travaux s’inscrivent dans les priorités des axes 2 et 3 du plan Ecophyto portant sur l’étude des impacts sanitaires potentiels d’une multi-exposition aux pesticides. Ils montrent pour la première fois l’existence d’interactions métaboliques entre des pesticides en mélanges, auxquels la population française est exposée, via son alimentation, ainsi que vis-à-vis du récepteur nucléaire hPXR. Compte tenu des effets sur ce dernier, sur les gènes qu’il régule (transport, métabolisme, survie et mort cellulaire), et sur le devenir de ces molécules, ces interactions pourraient contribuer à des déséquilibres hormonaux. Le PXR a en effet été décrit comme pouvant intervenir dans plusieurs pathologies dont le syndrome métabolique, l’obésité et le cancer. Des interactions pharmacocinétiques et toxicologiques avec d’autres contaminants chimiques environnementaux ne sont pas à exclure, suite à des expositions multiples à ces molécules. Ces travaux devraient trouver leur intérêt pour les analyses de risque ultérieures (Facteurs d’Equivalence Toxiques). Ils viennent d’ouvrir la voie au contrat Européen EUROMIX dont l’originalité réside dans la définition de critères de priorisation et d’une démarche rationnelle d’évaluation toxicologique des contaminants chimiques auxquels la population européenne est multi-exposée au travers de son environnement au sens large. Références bibliographiques > de Sousa G, Nawaz A, Cravedi JP, Rahmani R, 2014. A Concentration Addition Model to Assess Activation of the Pregnane X Receptor (PXR) by Pesticide Mixtures Found in the French Diet. Toxicological Sciences. Toxicol Sci. Sep;141(1):234-43. > de Sousa G, Nawaz A, Cravedi JP, Rahmani R, 2013. Concentration addition model to assess activation of the Pregnane X receptor by pesticides mixtures found in the French diet. Tox Letters. Vol. 221S, p198. > Rahmani R, de Sousa G, Nawaz A, Cravedi JP, 2013. A Concentration Addition Model to Assess Activation of the Pregnane X Receptor (PXR) by Pesticide Mixtures Found in the French Diet. Chemical mixtures: challenges for research and risk assessment ANSES Conference. Maison de la RATP. Paris, 10 Décembre 2013. Communication orale sur invitation. > Rahmani R, de Sousa G, Cravedi JP, 2013. Etude in vitro des impacts cellulaires et moléculaires de mélanges de pesticides. Journées Francophones de Nutrition. Bordeaux, 12 Décembre 2013. Communication orale sur invitation. > Nawaz A, de Sousa G, Rahmani R, 2012. Use of pregnane X receptor (PXR) activation for risk assessment of pesticide mixtures using concentration addition model. INRA Occupational Health Research Conference 2012: «Health risks associated with mixed exposures». 02-04 Avril 2012. Nancy. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 97 Financement Casdar, Recherche finalisée et innovation 2011 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants OAD SERRE : Développement d’outils d’aide à la décision en cultures horticoles sous serres : vers une horticulture de précision Fabien Robert Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Paris Bruno, Chambre d’Agriculture des Alpes-Maritimes mis à disposition pour ASTREDHOR au sein de l’INRA de Sophia Antipolis • Robert Fabien, ASTREDHOR, Unité nationale, Paris • Lhoste Ange, ASTREDHOR Méditerranée (SCRADH), Hyères • Deogratias Jean-Marc, ASTREDHOR Sud-Ouest (GIE Fleurs et Plantes), Villenave d’Ornon • Tragin Maud, ASTREDHOR Loire Bretagne (Arexhor Pays de la Loire), Les Ponts-de-Cé • Poncet Christine, INRA, UMR1355 ISA Institut Sophia Agrobiotech Mots clefs Outil d’Aide à la Décision, Protection Intégrée, Serre, Prototypage, horticulture de précision Face à la difficulté de protection des cultures avec les méthodes conventionnelles de lutte, il s’avère nécessaire de sécuriser la protection intégrée. Le projet OAD Serre a permis de développer des méthodes de suivi des populations de ravageurs et d’auxiliaires et de permettre aux responsables de la protection des cultures de prendre les bonnes décisions quant aux interventions à réaliser. Les outils développés nécessitent toutefois d’être éprouvés à grande échelle et agrémentés d’autres modules pour être complètement opérationnels. Contexte et objectifs Dans les cultures sous abri, comme dans les productions de plein champ, la protection chimique conventionnelle a perdu de son efficacité et les entreprises se retrouvent bien souvent sans solution efficace contre certains bioagresseurs majeurs. La protection intégrée est clairement identifiée comme une méthode pouvant répondre à ces problématiques de production. Les prises de décisions sont malgré tout souvent trop tardives voire peu optimales. La fiabilisation de la protection intégrée doit en conséquence être assurée au travers du développement d’outils dédiés au suivi des risques et à l'assistance à la prise de décision. Une plateforme, le Sophi@datamarket, conçue initialement au sein de l’INRA de Sophia Antipolis et comportant des modules de suivi d’épidémiosurveillance, de cartographie spatio-temporelle des bio-agresseurs et d’un module de consultation des données, s’avère être d’un grand intérêt pour assister les professionnels dans leurs prises de décision. Le projet s’est donc intéressé à développer ces outils pour la profession, à les optimiser et à les valider dans un réel contexte de production. Méthodes Le projet s’est intéressé à développer (i) des outils de monitoring de la culture, permettant un suivi global de l'ensemble des espèces présentes (ravageurs et auxiliaires) avec une précision suffisante pour acquérir une vision fiable et rapide de l'état sanitaire de la culture, (ii) des outils permettant la représentation visuelle des épidémies ou de la répartition des auxiliaires et leurs dynamiques dans le temps (cartographie des dynamiques des différentes espèces couplées aux techniques de monitoring) afin de faciliter la prise de décision, (iii) des modèles de prévision des dynamiques spatio-temporelles des bioagresseurs pour anticiper les risques de déclenchement d'une épidémie sur la culture, (iv) le couplage de ces outils à une structure informatisée reposant sur une base de données en ligne. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Dans un premier temps, 9 sites de production ont été sélectionnés pour la mise au point du protocole d’observation ‘’QuickSampling’’. Les modules correspondants aux différents outils (cités plus haut) ont été créés et ont été rendus accessibles et opérationnels en ligne. Un suivi de saisie hors ligne a également été rendu possible. Les suivis des productions sur les 9 sites ont ensuite permis de valider les différents outils de la plateforme Sophi@datamarket géré par l’INRA de Sophia-Antipolis. Chaque expérimentateur, via son compte personnalisé, a utilisé les ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 99 OAD SERRE : Développement d’outils d’aide à la décision en cultures horticoles sous serres : vers une horticulture de précision ... différents outils et fait valoir les besoins de modification pour optimiser l’ergonomie et la validité de ces outils. L’outil de monitoring selon la méthode du ‘’QuickSampling’’ nécessite encore un long temps d’utilisation pour permettre le développement sur un site de production de plusieurs ares. Le suivi de la dynamique des populations de ravageurs et auxiliaires s’est en revanche avéré très performant. Pour exemple, le suivi de la dynamique des populations d’aleuro- des sur rosiers dans l’exploitation de la Crau (Var), Figure 1. La présence d’aleurode sur la culture a été relativement bien maîtrisée, le contrôle par l’apport d’auxiliaire a permis de limiter les traitements chimiques (interventions plus rapides et plus ponctuelles sur les foyers), ce qui a favorisé la présence de parasitoïdes indigènes qui ont contribué au maintien de la population des ravageurs (Figure 2). n Figure 1 : Dynamique de la population d’aleurodes des serres dans le « poumon » du rosier Figure 2 : Dynamique de la population de parasitoïdes indigènes des aleurodes des serres dans le « poumon » du rosier Conclusions et perspectives Le projet OAD Serres a validé plusieurs outils gérés par la plateforme Sophi@datamarket, nommée aujourd’hui S@M, qui permettent de connaître les dynamiques des populations de ravageurs et d’auxiliaires, pour pouvoir optimiser la protection biologique intégrée des cultures. Ces outils permettent aussi d’identifier la présence de populations de parasitoïdes et de prédateurs indigènes qui contribuent à la lutte contre les ravageurs. Des outils complémentaires sont toutefois à développer pour rendre complètement opérationnelle la plate forme S@M : reconnaissance des bioagresseurs, solutions de biocontrôle, liste des produits phytopharmaceutiques compatibles avec les auxiliaires. La méthode d’échantillonnage des bioagresseurs et des auxiliaires reste également trop longue et nécessite d’être améliorée. Références bibliographiques > Journée de valorisation, 9 décembre 2014, entreprise Fourmillier, La Crau (83), 4 posters présentés. Un outil d’aide à la décision pour réduire l’emploi des pesticides (projet Otelho, suite d’OAD Serre) : Otelho, une formation sur mesure, Fertile, n° 35, juin-juillet 2014, p. 14-15 et 34-36. > Vidéo sur le projet OAD Serre en ligne (23/10/2014), site ASTREDHOR, http://www.astredhor.fr/video-technique-n-05-le-programme-oad-serre-41680.html 100 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Financement Écophyto (redevance pollutions diffuses) 2012 Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants TABLE-RES : analyse des résistances de créations variétales de raisin de table et pré-développement en vue de leur inscription Loïc Le Cunff Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Loïc Le Cunff, UMT Géno-Vigne®, IFV, Montpellier • This Patrice, UMR 1334 AGAP, INRA, équipe DAVEM, Montpellier • Audeguin Laurent, IFV, Le Grau-du-Roi © Institut Français de la vigne et du Vin Mots clefs Sélection assistée par marqueurs, résistance durable, raisin de table Nous observons un intérêt croissant pour les créations variétales résistantes du fait notamment de la demande justifiée de la part des consommateurs et des producteurs de fruits qui souhaitent être le moins possible en contact avec des résidus phytosanitaires. En 2008, l’ensemble des partenaires de l’UMT Géno-Vigne® a relancé un programme de création variétale de variété de vigne résistante au mildiou et à l’oïdium afin de réduire le nombre de traitements. L’enjeu est bien sûr l’obtention de variétés présentant des résistances durables et des caractéristiques spécifiques de la filière raisin de table (grosses baies, grappes lâches, rendement élevé), pour cela il faut pouvoir cibler, sélectionner les variétés candidates grâce à des tests moléculaires mais aussi phénotypiques. Grâce à ce projet nous avons pu étudier plus finement les 285 variétés candidates et en sélectionner 4 qui subissent actuellement l’ensemble des tests nécessaires et obligatoires pour une inscription au catalogue des variétés de vigne en 2020 permettant alors leur diffusion. Contexte et objectifs La production de raisin de table en France est essentiellement basée sur des variétés Vitis vinifera traditionnelles qui présentent une sensibilité plus ou moins marquée au mildiou et à l’oïdium : Alphonse Lavallée N, Cardinal Rg, Chasselas B, Muscat de Hambourg N, pour ne citer que les variétés plus importantes. Les fongicides représentent 80 % des produits phytosanitaires utilisés en viticulture. La filière de raisin de table est directement exposée à ce problème car le fruit frais est consommé directement à la différence des cépages de cuve. Il est admis que l’utilisation de cépages résistants aux maladies fongiques (mildiou, oïdium) permettrait de réduire de 80 à 90 % l’emploi de fongicides sur de telles parcelles et donc d’atteindre les objectifs de réduction énoncés dans le plan Écophyto. Répondre à cet objectif permettrait également de relancer une production concurrencée par les variétés produites dans des pays plus chauds (Espagne, Italie, Afrique du Nord, voire dans l’Hémisphère Sud) : Italia, Flame seedless, Crimson seedless, Red Globe, Sugraone, Sultanine (Thompson seedless)… Les créations variétales résistantes permettraient aussi de répondre à la demande croissante de la part des consommateurs de fruits conte- nant le moins possible de résidus phytosanitaires. D’un point de vue scientifique, il est important d’obtenir du matériel végétal présentant des résistances durables, c'est-àdire ayant plusieurs sources de résistances, on parle alors de résistances polygéniques ou oligogéniques. Ce projet s’est orienté sur cet objectif. Méthodes Recherche de loci de résistance au mildiou et à l’oïdium Les espèces apparentées du genre Vitis et du genre Muscadinia, interfertiles avec Vitis vinifera L. sativa, présentent des résistances monogéniques ou quantitatives aux stress biotiques et abiotiques, mais malheureusement des caractères de qualité défavorables. Certaines de ces résistances ont déjà été utilisées au travers d’hybrides mais du fait des caractères qualitatifs défavorables des espèces, elles n’ont pas permis l’obtention de variétés de qualité. L’utilisation des méthodes de sélection assistée par marqueurs devraient permettre d’atteindre plus facilement ce but. L’étude de populations en ségrégation issues de croisements interspécifiques (Vitis vinifera L. sativa avec ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 101 TABLE-RES : analyse des résistances de créations variétales de raisin de table et pré-développement en vue de leur inscription ... d’autres espèces des genres Vitis et Muscadinia ou d’autres hybrides interspécifiques) mais aussi de croisements intraspécifiques (Vitis vinifera L. sativa X Vitis vinifera L. sativa) a permis l’identification de gènes majeurs (Rpv1, Rpv2 et Rpv3 pour le mildiou et Run1 et Ren1 pour l’oïdium) mais aussi de QTLs de résistance au mildiou et à l’oïdium (Pauquet et al., 2001 ; Merdinoglu et al., 2003 ; Fisher et al., 2004 ; Barker et al., 2005 ; Hoffmann et al., 2008 ; Marguerit et al., 2009). Des amorces PCRs ont été définies dans ces études et sont utilisées ici pour réaliser un criblage moléculaire afin d’identifier et donc de sélectionner les descendants porteurs de deux gènes de résistance à l'oïdium et deux gènes de résistance au mildiou. Évaluation du niveau des résistances sur la plateforme de phénotype de l’INRA de Colmar. • Cas du mildiou Pour chaque génotype et pour chaque témoin, 3 plantes de taille homogène sont choisies. Une feuille de même rang est prélevée sur chaque plante. Sur chaque feuille, 3 disques de 2cm de diamètre ont été réalisés. Chaque disque est inoculé, à concentration identique, avec les souches de mildiou suivantes: EAU08, LEDNICE et RESDUR. Ces souches présentent chacune des caractéristiques différentes (la première est résistante au Famoxadone, à l’Iprovalicarbe, sensible au Méfénoxam ; la seconde contourne le gène Rpv3 et la troisième est la souche répandue en France). Après 6 jours d’incubation en conditions contrôlées, chaque disque a été observé à la loupe binoculaire afin d’évaluer les symptômes de la maladie selon l’échelle de notation OIV 452, constituée de 5 classes (1, 3, 5, 7, 9). La note 1 correspond à une sensibilité maximale résultant d’une sporulation abondante alors que la note 9 correspond à une résistance totale associée à l’absence de sporulation. De la nécrose peut être observée pour les notes OIV de 7 et de 9. Les génotypes dont la note OIV était supérieure à 5 pouvaient être considérés comme résistants. • Cas de l’oïdium Pour chaque génotype et chaque témoin, 6 plantes de taille identique ont été choisies. Sur chaque plante, une jeune feuille vernissée a été prélevée. Les 6 feuilles d’un même génotype ont été désinfectées puis disposées dans 6 boites de Pétri carrées. Les souches d’oïdium C13 et EN356 (appartenant à deux groupes génétique différents A et B) ont été utilisées pour inoculer chacune 3 feuilles d’un même génotype. Après incubation en conditions contrôlées pendant une durée de 9 jours, le développement du pathogène a été observé sur chaque feuille à la loupe binoculaire. Sur chaque feuille, 5 champs ont été observés. Le développement du mycélium (MYC) et de la sporulation (SPO) a été noté indépendamment selon une échelle de notation constituée de 5 classes (1, 3, 5, 7, 9) pour laquelle la note de 1 correspond à un développement mycélien ou à une sporulation très abondante et la note de 9 correspond à l’absence de mycélium ou de sporulation. Ainsi pour chaque feuille et pour chaque trait (MYC et SPO), la moyenne de la note obtenue pour les 5 champs a été calculée puis la moyenne générale a été calculée pour les 3 feuilles d’un même génotype, pour les deux souches. A partir de ces deux notes, une note OIV 455 a été attribuée pour chaque génotype. 102 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron Photo 1 : Evaluation du niveau de résistance des génotypes sélectionnés au vignoble Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Sélection assistée par marqueurs Ce projet a démarré avec les 285 génotypes porteurs du locus contenant Run1 et Rpv1 issus de 10 croisements différents réalisés par l’INRA de Montpellier. Cependant des sélections supplémentaires étaient nécessaires pour identifier des génotypes candidats à l’inscription. En effet, les individus devaient être porteurs d’un deuxième gène de résistance au mildiou et à l’oïdium pour garantir une résistance durable. Suite au crible moléculaire, 59 individus se sont révélés porteurs d’au moins deux gènes de résistances au mildiou (Rpv1 et Rpv3) et deux gènes de résistance à l’oïdium (Run1-Ren3). Sélection sur critères morphologiques La sélection morphologique est réalisée lorsqu’aucune donnée moléculaire n’est disponible pour la sélection précoce par marqueurs. Cette sélection a été réalisée en deux temps et en présence des professionnnels de la filière raisin de table. Dans un premier temps nous avons conservé un sous-ensemble de 16 plantes selectionnées en serre. Ces plantes ont été surgreffées sur 4 souches et conduites sans traitement avec des témoins sur une parcelle à l’extérieur (Photo 1, résistant à gauche et témoin à droite). Parmi ces 16 plantes, 4 semblaient intéressantes. Elles ont été multipliées et greffées pour une installation dans un dispositif VATE (Valeur Agronomique, Technologique et Environnementale) pour une inscription potentielle au catalogue en 2020. Une description DHS (Distinction, Homogéneité et Stabilité) devra aussi être réalisée. Evaluation du niveau de résistance au mildiou et à l’oïdium sur la plateforme de l’INRA de Colmar Les 20 génotypes testés (dont les 4 qui passeront le test VATE) sont tous d’un haut niveau de résistance à l’oïdium et au mildiou. Cependant ces « futures variétés » ne permettront pas une culture sans aucun traitement fongicide, puisqu’il faudra maîtriser les autres pathogènes présents dans l’environnement comme le Black Rot contre lequel aucun QTL de résistance n’est actuellement connu. Il sera conseillé d’effectuer de un à trois traitements ce qui permettra de réduire de 80 à 90 % le nombre de traitements actuellement nécessaires. n TABLE-RES : analyse des résistances de créations variétales de raisin de table et pré-développement en vue de leur inscription Conclusions et perspectives Ces génotypes sont un premier pas pour réduire le nombre de traitements, il faudra dans un milieu précis analyser la possible recrudescence de maladies dites secondaires comme la pourriture noire (Black Rot). De plus ces génotypes sont aussi utilisées comme géniteurs dans des croisements avec notamment les variétés Muscat d’Alexandrie pour le goût muscat, Alphonse Lavalée connue pour avoir des descendants à grosses baies et avec Centennial seedless pour le goût aromatique et l’apyrénie (absence de pépins). Références bibliographiques > Hoffmann S., Di Gaspero G., Kovács L., Howard S., Kiss E., Galbács Z., Testolin R., Kozma P., 2008. Resistance to Erysiphe necator in the grapevine ‘Kishmish vatkana’ is controlled by a single locus through restriction of hyphal growth. Theoretical and Applied Genetics 116:427-438. > Barker CL., Donald T., Pauquet J., Ratnaparkhe MB., Bouquet A., Adam-Blondon AF,. Thomas MR., Dry I., 2005. Genetic and physical mapping of the grapevine powdery mildew, resistance gene, Run1, using a bacterial artificial chromosome library. Theoretical and Applied Genetics 111:370–377. > Welter LJ., Göktürk-Baydar N., Akkurt M., Maul E., Eibach R., Töpfer R., Zyprian ME., 2007. Genetic mapping and localization of quantitative trait loci affecting fungal disease resistance and leaf morphology in grapevine (Vitis vinifera L). Molecular Breeding 20:359–374. > Wiedemann-Merdinoglu S., Prado E., Schmidlin L., Mestre P., Coste P., Dumas V., Butterlin G., Bouquet A., Merdinoglu D., 2006. Analyse génétique de la résistance au mildiou de la vigne issue de Muscadinia rotundifolia. Rencontres Scientifiques du Département de Génétique et d’Amélioration des Plantes 25-27 septembre 2006, Batz-sur-Mer. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 103 Financement Casdar, Innovation et partenariat 2011 Chap IV: Durabilité des méthodes et robustesse des systèmes VASCUlég1 : Maîtrise des maladies vasculaires telluriques en cultures maraîchères, cas de l’aubergine et du melon Villeneuve François Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Clerc Henri, Invenio, domaine de Lalande, Sainte-Livrade • Daunay Marie-Christine, Pitrat Michel, INRA, UR1052, Génétique et Amélioration des Fruits et Légumes, Montfavet • Edel-Hermann Véronique, Steinberg Christian, INRA, UMR 1347, Agroécologie - Pôle IPM, Dijon • Goillon Claire, , APREL, St Rémy de Provence • Guigal Lucille, Cehm, Mas de Carrière, Marsillargues • Henry-Leix Françoise, Cefel, domaine de Capou, Montauban • Lhote Jean-Michel, Bouvard David, ACPEL, Le petit Chadignac, Saintes • Torres Marie, Erard Patricia, Ctifl, Centre de Balandran • Villeneuve François, Latour François, Théry Théophile, Ctifl, Centre de Lanxade, Prigonrieux • Les chambres d’agriculture du Tarn et Garonne, du Vaucluse et de la Vendée • Les semenciers : ASL, Enza Zaden, Gautier semences, HM Clause, Monsanto, Rijk-Zwaan, Sakata, Syngenta, Takii, Vilmorin Mots clefs Melon, aubergine, Fusarium oxysporum f.sp. melonis, Verticillium dahliae, résistance génétique, techniques de protection Les maladies vasculaires des cultures légumières restent un problème important des producteurs d’aubergine et de melon en particulier. Après quelques années d’utilisation de résistance génétique à Fusarium oxysporum f.sp. melonis et à Verticillium, les producteurs se trouvent de nouveau confrontés aux mêmes problèmes. Le projet VASCUlég a permis d’avoir une idée précise de la situation chez les producteurs. Dans la majorité des cas, outre le champignon responsable de la maladie vasculaire (F.o. melonis ou Verticillium), d’autres pathogènes sont présents formant un cortège de bioagresseurs et cela dans les différentes zones de production. Diverses techniques alternatives de contrôle ont été expérimentées : plantes de coupures, biofumigation, stimulateur de défense des plantes et agents biologiques. Aucune ne permet de réguler les pathogènes, en revanche nombre d’entre elles retardent l’apparition des symptômes. La recherche de nouvelles sources de résistance à ces bioagresseurs a été couronnée de succès que ce soit pour F.o. melonis ou pour Verticillium. Enfin, des pistes intéressantes ont été dégagées grâce aux travaux concernant la recherche de nouveaux porte-greffes dans la famille des Solanaceae, en particulier dans le genre Solanum (64 espèces testées pendant le projet). Les résultats de VASCUlég ont confirmé la nécessité de combiner plusieurs techniques de protection, en particulier lors de l’utilisation de résistances génétiques totales ou partielles afin de les rendre plus durables. De même, certaines techniques complémentaires méritent d’être approfondies. Contexte et objectif Les cultures d’aubergine, de melon et de tomate sont particulièrement sensibles aux maladies vasculaires : Fusarium oxysporum et Verticillium dahliae. La protection chimique n’a jamais donné entièrement satisfaction. Aussi, face à cette situation, la recherche de solutions génétiques a débuté voici plus d’une cinquantaine d’années soit au travers de variétés résistantes, soit avec le greffage. Mais ce n’est qu’au cours de 1. VASCUlég : Maîtrise des maladies vasculaires telluriques en cultures maraîchères : comment préserver durablement l’efficacité du greffage et des résistances variétales par l’intégration de techniques complémentaires ? ces dernières années que la technique du greffage s’est largement diffusée chez les producteurs. Après quelques années d’emploi de ces résistances, les producteurs ont commencé à observer de nouveau des problèmes dans leurs cultures avec des symptômes de maladies vasculaires dont l’origine n’est pas encore clairement établie. Face à ce contexte, l’objectif du projet VASCUlég, labélisé PIClég, a été de : • faire l’état des lieux de la situation phytosanitaire chez les producteurs et d’identifier les maladies et ravageurs émergents dans les systèmes de production utilisant des techniques alternatives à la désinfection chimique (en particulier le greffage) ; ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 105 VASCUlég : Maîtrise des maladies vasculaires telluriques en cultures maraîchères, cas de l’aubergine et du melon ... • chercher des combinaisons de techniques alternatives de protection pour proposer aux producteurs des systèmes de production innovants et durables, garantissant à la fois un niveau de protection élevé, le maintien de la performance technico-économique des exploitations et des pratiques respectueuses de l’environnement ; • caractériser les interactions « hôtes – pathogènes » qui aboutissent à l’apparition de nouvelles races et/ou à des virulences supérieures ; • identifier de nouvelles sources de résistance au sein des ressources génétiques pour proposer du matériel végétal innovant et hautement résistant à utiliser en porte-greffes ou dans les programmes de sélection. Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto Principaux résultats Aubergine L’analyse des différents échantillons d’aubergine, greffée ou pas, a montré la présence d’un cortège de bioagresseurs en plus du Verticillium dans la majorité des cas, principalement Pythium sp., Colletotrichum coccodes... L’utilisation de la technique de greffage avec les porte-greffes actuels n’améliore pas la situation. Il y a une adaptation des bioagresseurs aux techniques mises en place par les producteurs, ce qui renforce l’idée de la nécessité d’avoir des techniques combinées pour la protection des pathogènes telluriques. Les travaux sur les techniques complémentaires (biofumigation, utilisation d’agents biologiques, utilisation de Stimulateur de Défense des Plantes ou SDP) n’ont pas permis d’exprimer d’importantes réductions des dégâts. Cette situation peut être due à une trop forte pression parasitaire, notamment la présence dans les essais de nématodes de type Meloidogyne. En revanche, les travaux concernant la recherche de nouveaux porte-greffes dans les espèces de Solanum (64 accessions testées pendant le projet) ont permis de dégager des pistes intéressantes que ce soit en termes de compatibilité, de croissance, de résistance aux différentes races de Verticillium et même de comportement face aux Meloidogyne. Principaux résultats Melon L’analyse de la situation sanitaire révèle une situation assez comparable à l’aubergine, à savoir une adaptation du cortège des bioagresseurs en fonction des pratiques. Ainsi, nous avons montré une nette prédominance de Fusarium oxysporum f.sp. melonis race 1.2 dans l’ensemble des zones françaises de production que ce soit seul ou en association avec d’autres pathogènes. L’analyse de la variabilité génétique des souches de F.o. melonis indique une forte variabilité assez surprenante pour un champignon dont on n’a pas connaissance d’une phase sexuée : au moins onze types génétiques différents dont six types « nouveaux ». D’autre part, cette évolution semble récente et pourrait être concomitante à l’utilisation des gènes de résistance. Les travaux sur les techniques complémentaires (biofumigation, utilisation de plantes de service, d’agents biologiques, de SDP) ont mis en évidence des pistes intéressantes qu’il est nécessaire d’approfondir. Ainsi, nous avons pu enregistrer des effets de retard de mortalité avec l’utilisation des vesces comme plantes de service, de même qu’avec la combinaison de différents agents biologiques ou encore avec l’emploi de SDP. Concernant le volet « recherche de nouvelles sources de résistances », les travaux menés dans le cadre de VASCUlég ont confirmé que la résistance à la race 1.2 de F.o. melonis est rare dans les ressources génétiques. Néanmoins, de nouvelles sources de résistance ont été mises en évidence. n Conclusions et perspectives Le projet CASDAR VASCUlég a permis de dresser précisément la situation des parcelles présentant des problèmes de maladies vasculaires dans les principales zones françaises de production. Que ce soit pour les cultures de melon ou d’aubergine, il est assez remarquable de constater que dans la plupart des cas, un cortège de bioagresseurs s’est adapté aux pratiques agricoles : greffage dans le cas de l’aubergine, variétés résistantes dans le cas de melon. Il est notable qu’il n’y ait pas de différences entre les aubergines greffées ou non. A notre connaissance, c’est la première fois que la présence de V. isaacii est mise en évidence en France. Pour le melon, l’utilisation généralisée dans les variétés actuelles des gènes de résistances Fom-1 et Fom-2, a engendré le développement de la race 1.2 (contournant les deux gènes) dans l’ensemble des zones françaises de production, que ce F.o. melonis soit seul ou en association avec d’autres pathogènes. C’est la forme jaunissante de la race 1.2 qui est la plus fréquente. Une importante diversité d’agressivité ainsi qu’une grande diversité génétique entre les souches de F.o. melonis ont également été mises en évidence. Les travaux sur les techniques agronomiques complémentaires (biofumigation, agents biologiques, SDP) n’ont pas permis de réduire notablement l’incidence des maladies d’origine tellurique dans le cas des cultures d’aubergine. Ce n’est pas le cas pour le melon, pour lequel des pistes intéressantes ont été mises en évidence, mais des recherches complémentaires sont nécessaires pour conforter ces premiers résultats, pour mieux comprendre les mécanismes en cause et déterminer les modes et époques d’apport les plus appropriées. L’exploitation intensive des ressources génétiques intrapécifiques (melon) et interspécifiques (Solanacées) en sélection a montré que les collections, en particulier celles de l’INRA, recelaient des accessions très intéressantes à exploiter à l’avenir par les sélectionneurs, tant pour la résistance à F.o. melonis race 1-2 (melon) que pour la résistance à Verticillium et l’affinité en greffage (aubergine). Cependant le déploiement ultérieur de nouvelles résistances chez les producteurs devra être accompagné de techniques de production favorisant plus les équilibres biologiques des sols que les techniques actuelles, afin de réduire le cortège parasitaire qui accompagne ces deux agents vasculaires. 106 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron VASCUlég : Maîtrise des maladies vasculaires telluriques en cultures maraîchères, cas de l’aubergine et du melon Références bibliographiques > Villeneuve F., Latour F., Théry T., 2012. Protection contre les maladies vasculaires des cultures légumières : VASCUlég, un programme à la recherche de solutions durables. Infos-Ctifl, 281 : 59-65 > Villeneuve F., Mention P., Thery T., Fournier C., Latour F., 2012. Evolution du cortège de maladies telluriques sur melon et aubergine dans les conditions françaises suite à l’utilisation de résistances pour contrôler les maladies vasculaires. AFPP –10e Conférence Internationale sur les Maladies des Plantes, Tours, 3, 4 et 5 décembre 2012, 404-414 > Villeneuve F., Latour F., Théry T., Steinberg C., Hedel-Hermann V., Pitrat M., Daunay M.-C., 2014. The control of soil borne vascular diseases: Limits of genetic resistance of cultivars and rootstocks for controlling Fusarium oxysporum f.sp. melonis (melon) and Verticillium sp. (eggplant). Proc. VIIIth IS on Chemical and Non-Chemical Soil and Substrate Disinfestation Eds.: M.L. Gullino et al, Acta Horticulturae 1044, ISHS, 57-65 > Villeneuve F., Latour F., Théry T., 2015. Les maladies vasculaires de l’aubergine et du melon et techniques de protection envisageables pour rendre durables les résistances variétales. Innovations agronomiques (à paraître) > Villeneuve F., Latour F., Théry T., Edel-Hermann V., Steinberg C., Pitrat M., 2015. Fusarium oxysporum f.sp. melonis chez le melon, enseignements acquis au travers du projet VASCUlég. Infos-Ctifl (à paraître) Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 107 Financement Chap III : Diversification des méthodes et limitation des intrants ANR, Systerra 2010 VirAphid : Impact des résistances des plantes sur les populations de pucerons et de virus Nathalie Boissot Mail : [email protected] Responsables des équipes impliquées • Boissot Nathalie, UR 1052 Génétique et Amélioration des Fruits et Légumes, INRA Avignon • Moury Benoît, UR 407 Pathologie Végétale, INRA Avignon • Vanlerberghe Flavie, UMR 1062 Centre de Biologie et de Gestion des Populations, INRA Montferrier-sur-Lez Mots clefs Durabilité des résistances, résistances quantitatives, agrosystèmes Le projet VirAphid a caractérisé à différentes échelles, du génome à la population, l’impact de résistances aux pucerons sur les pucerons, l’impact de résistances aux pucerons sur les virus transmis par pucerons et enfin l’impact de résistances aux virus sur les virus. Les travaux aux laboratoires montrent que, mise à part la résistance aux virus élicitée par pucerons, les résistances aux virus stricto sensu et les résistances aux pucerons étudiées sont contournables. A l’échelle de l’agrosystème, si le choix du gène de résistance est primordial pour la durabilité de la résistance, la connectivité temporelle pour les pucerons (étude in situ) et spatiale pour les virus (étude par modélisation) est un facteur agissant sur la durabilité des résistances. Par ailleurs nous avons montré que des QTL de durabilité de la résistance aux virus stricto sensu pouvaient être identifiés, ce qui ouvre la voie vers la définition de nouveaux critères de sélection pour la création variétale. Enfin, la résistance aux pucerons comme facteur de la durabilité de la résistance aux virus est en cours d’exploration. Contexte et objectifs Les résistances génétiques des plantes aux bioagresseurs sont des composantes essentielles d’une production alimentaire durable. Elles permettent de réduire significativement l’utilisation des pesticides, répondant ainsi aux exigences réglementaires et aux attentes des agriculteurs et consommateurs. Les limites majeures à leur utilisation résident dans les possibilités d’adaptation des bioagresseurs (les contournements de résistance sont fréquents) et dans la rareté des gènes de résistance à effets forts (gènes majeurs) parmi les ressources génétiques. Pour faire face à ces difficultés, nous devons (i) développer de nouvelles méthodes de création variétale intégrant la durabilité des résistances, (ii) concevoir de nouvelles stratégies pour gérer durablement les résistances présentes chez les variétés actuellement disponibles et (iii) explorer les potentialités de gènes de résistance à effets partiels (QTL) beaucoup plus largement répandus parmi les ressources génétiques. Nous avons exploré ces approches pour les cultures maraîchères et deux types de bioagresseurs, les pucerons et les virus qu’ils transmettent, qui causent de lourdes pertes de quantité et de qualité des productions maraîchères. Nos objectifs étaient 1) d’évaluer l’impact de résistances au puceron Aphis gossypii sur la dynamique et la structure génétique des populations de cette espèce, 2) d’évaluer l’impact de résistances à A. gossypii sur les populations de virus transmis par pucerons, 3) d’évaluer l’impact de résistances à deux virus sur les populations de ces virus et, 4) de définir des stratégies de management durable des résistances aux pucerons et aux virus. Méthodes Des expérimentations ont été conduites en plein champ et au laboratoire pour comprendre les processus impliqués dans l’adaptation des pucerons et des virus aux résistances (gènes majeurs et QTL) à différentes échelles (depuis les génomes individuels des pucerons et des virus jusqu’aux bassins de production agricole). Des modèles mathématiques du contournement des résistances par les virus ont été utilisés pour explorer la durabilité des résistances (c’est-à-dire le maintien de leur efficacité dans le temps) en fonction de différentes stratégies d’utilisation des variétés résistantes. ... Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 109 VirAphid : Impact des résistances des plantes sur les populations de pucerons et de virus ... Principaux résultats obtenus et applications envisageables, lien au plan Écophyto 1/ Impact de la résistance à Aphis gossypii sur la dynamique et la structure génétique des populations de cette espèce - Stratégies de management de la résistance Le gène Vat chez le melon confère une résistance quantitative à A. gossypii, plus ou moins forte selon les clones de puceron considérés [1]. En présence de l’allèle Vat-11, les densités de pucerons sont réduites dans les trois bassins de production de melon étudiés, le Sud-Est, le Sud-Ouest et les Antilles [2]. Cependant, si la réduction de la dynamique des pucerons est toujours suffisante dans le Sud-Ouest pour maintenir les niveaux de populations sous ou au niveau du seuil d’intervention chimique, cet effet est suffisant seulement jusqu’en 2012 dans le Sud-Est et rarement suffisant en Guadeloupe. Au niveau de la parcelle, Vat-11 affecte un groupe génétique particulier d’A. gossypii. La durabilité de la résistance Vat-11 est extrêmement variable selon les bassins de production [2]. Elle est nulle en Guadeloupe et la résistance Vat-11 ne devrait y pas être déployée. Nos résultats suggèrent que la durabilité de la résistance Vat-11 serait forte dans le Sud-Ouest de la France (où elle n’a pas encore été déployée), du fait d’une production très faible de pucerons ailés sur les cultures de melon (résistants comme sensibles) et l’absence pendant un longue période de l’année de cucurbitacées qui permettraient le maintien des clones contournant. Dans le Sud-Est où la résistance Vat-11 a été largement déployée, nous avons révélé un déplacement graduel des populations de pucerons en défaveur des clones assignés au groupe génétique contre-sélectionné par Vat-11 au niveau de la parcelle. Ceci suggère que, 20 ans après son déploiement à grande échelle la résistance Vat-11 est en danger dans cette région, d’autant plus que des cucurbitacées y sont cultivées pratiquement toute l’année et offrent des relais aux clones contournant la résistance Vat-11. 2/ Impact des résistances aux virus transmis par pucerons sur la dynamique et la structure génétique de ces virus Stratégies de management des résistances La résistance Vat n’impacte que les virus transmis par A. gossypii : ce puceron élicite la résistance aux virus non-persistants qu’il transmet et réduit la fréquence de 110 • Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron transmission des virus persistants qu’il transmet. Quand les épidémies de virus sont importantes sur melon dans un agrosystème, i.e. quand les pucerons visiteurs sont nombreux, en présence de Vat-11, les épidémies sont ralenties pour les virus persistants (CABYV) et certains virus non persistants (CMV), mais pas pour d’autres (WMV). La structure génétique des populations de chaque espèce de virus n’est pas modifiée en présence de Vat. Les expériences d’évolution en laboratoire ont montré que les virus non persistants (CMV, ZYMV) ne pouvaient pas évoluer pour contourner la résistance Vat-11 élicitée par A. gossypii [1]. Une résistance aux virus stricto sensu chez le piment (efficace quel que soit le puceron vecteur ou quand les virus sont transmis mécaniquement), polygénique et quantitative, peut être contournée, comme nous l’avons montré pour le CMV et le PVY [3]. Ce contournement est associé à un coût chez la variété sensible. Plus surprenant, le contournement conduit à un niveau d’adaptation plus important qu’après plusieurs passages successifs chez la variété sensible. On observe donc en quelque sorte un « super-contournement » rendant l’utilisation de telles résistances assez risquée. Le séquençage des populations virales n’a révélé que très peu de différences par rapport au virus initial, non adapté. Les épidémies de virus ont été modélisées dans un paysage composé d'une mosaïque de champs cultivés de plantes résistantes et/ou sensibles, soumis à la saisonnalité, et d'un réservoir virus efficace toute l'année [4]. Le choix du gène de résistance (caractérisé par la fréquence des virus contournant à l'équilibre mutation-sélection dans une plante sensible) est le levier le plus influent pour la durabilité. Les stratégies optimales de déploiement des résistances varient des mélanges à la variété pure, dépendant aussi bien des caractéristiques de la résistance que du contexte épidémiologique (incidence, connectivité). D’un point de vue génétique de la plante, un fond génétique partiellement résistant au PVY peut augmenter très fortement la durabilité d’un gène récessif de résistance peu durable. Trois mécanismes sont en jeu : l’efficacité de la résistance, la nécessité d’accumuler davantage de mutations pour le contournement et une sélection plus lente des mutants [5]. Nous avons cartographié chez le piment 4 QTLs de fréquence de contournement et 3 de ces QTL colocalisent étroitement avec des QTL de résistance partielle (diminuant l’accumulation virale et/ou l’intensité des symptômes) chez les lignées porteuses du gène majeur [6]. n VirAphid : Impact des résistances des plantes sur les populations de pucerons et de virus Conclusions et perspectives Nous avons montré, pour les pucerons comme pour les virus, que la durabilité d’une résistance dépend en partie de l’agrosystème dans laquelle elle est déployée. Si le choix du gène de résistance reste primordial pour la durabilité de la résistance, d’autres facteurs génétiques chez la plante peuvent entrer en jeu. Nous avons cartographié des QTL affectant directement la durabilité d’une résistance au virus stricto sensu, ce résultat ouvre de nouvelles voies en sélection de variétés. Par ailleurs nous explorons, via le modèle développé dans VirAphid, le rôle potentiel d’une résistance de type Vat en tant que réducteur de l’incidence des virus dans l’agrosystème, pour augmenter la durabilité de la résistance aux virus stricto sensu. Pour augmenter la durabilité des résistances aux pucerons, nous envisageons de rechercher des QTL de durabilité de la résistance aux pucerons, comme nous l’avons fait pour la résistance aux virus. Pour ceci nous avons engagé une modélisation de la dynamique de pucerons ailés émis par une parcelle afin de conduire une analyse de la sensibilité de cette prédiction aux différents paramètres biologiques considérés dans le modèle. Les paramètres clés seront utilisés pour la recherche de QTL de durabilité. Références bibliographiques 1. oissot N., Thomas S., Chovelon V., Lecoq H., en révision. NBS-LRR-mediated resistance triggered by aphids: viruses do not adapt; aphids adapt via different mechanisms. BMC Plant Biology. 2. Thomas S., Vanlerberghe-Masutti F., Mistral P., Loiseau A., Boissot N., submitted. Insight into the durability of aphid resistance from the demo-genetic study of Aphis gossypii populations in melon crops. 3. Montarry J., Cartier E., Jacquemond M., Palloix A., Moury B., 2012. Virus adaptation to quantitative plant resistance: erosion or breakdown? Journal of Evolutionary Biology, 25:11. 4. Fabre F., Rousseau E., Mailleret L., Moury B., 2012. Durable strategies to deploy plant resistance in agricultural landscapes. New Phytologist, 193:1064-1075. 5. Quenouille J., Montarry J., Palloix A., Moury B., 2013. Farther, slower, stronger: how the plant genetic background protects a major resistance gene from breakdown. Molecular Plant Pathology, 14(2):109-118. 6. Quenouille J., Paulhiac E., Moury B., Palloix A., 2014. Quantitative trait loci from the host genetic background modulates the durability of a resistance gene: a rational basis for sustainable resistance breeding in plants. Heredity, 112(6):579-587. Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 111 Glossaire ACTA : Réseau des instituts des filières animales et végétales APREL : Association Provençale de Recherche et d’Expérimentations Légumières CA : Chambre d’agriculture CEFEL : Centre d’Expérimentation Fruits et Légumes CEHM : Station Expérimentale Fruits et Légumes CNRS : Centre national de la recherche scientifique CTIFL : Centre Technique Interprofessionnel des Fruits et Légumes DAVEM (équipe INRA) : Diversité et adaptation de la vigne et des espèces méditerranéennes ENSAT : Ecole Nationale Supérieure Agronomique de Toulouse IBB : Réseau de l’initiative Bio en Bretagne IFPC : Institut français des productions cidricoles IFV : Institut Français de la Vigne et du Vin IRBI : Institut de Recherche sur la Biologie de l’Insecte IRTA : Investigación y tecnología agroalimentarias ITAB : Institut Technique de l’Agriculture Biologique ITB : Institut Technique de la Betterave LCBE-UPVD : Laboratoire de Chimie des Biomolécules et de l’Environnement de l’Université de Perpignan Via Domitia LIPM : Laboratoires des Interactions Plantes-Microorganismes RMT : Réseau Mixte Technologique FNAMS : Fédération Nationale des Agriculteurs Multiplicateurs de Semences SEFRA : Station Expérimentale Fruits de Rhône-Alpes FREDON : Fédérations Régionales de Défense contre les Organismes Nuisibles SERAIL : Station d’Expérimentation Rhône-Alpes Information Légumes GRAB : Groupe de Recherche en Agriculture Biologique Terres Inovia : Depuis le 9 juin 2015, le CETIOM est devenu Terres Inovia GIE : Groupement d’intérêts économique UERI : Unité Expérimentale Recherches Intégrées INED : Institut National des Etudes Démographiques UMR : Unité Mixte de Recherche INP : Institut National Polytechnique UMT : Unité Mixte Technologique INRA : Institut National de la Recherche Agronomique UR : Unité de recherche InVS : Institut de Veille Sanitaire Colloque 13 et 14 octobre 2015 • Paris • Salons de l’Aveyron • 113 RECHERCHE ET INNOVATION DANS LE PLAN ÉCOPHYTO ue Programme scientif iq Date de parution : 13 octobre 2015 • Contacts : Laure Dreux (INRA) : [email protected] • Gérard Gautier-Hamon (Ministère chargé de l’agriculture): [email protected] • Imprimeur : BiPrint • Maquette : m.factory