Extraits de presse Leçons Indiennes SANJAY SUBRAHMANYAM

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Extraits de presse Leçons Indiennes SANJAY SUBRAHMANYAM
Extraits de presse
Leçons Indiennes
SANJAY SUBRAHMANYAM
Presse écrite
L'auteur, qui a enseigne en France à l'EHESS et au Collège de France, est un historien
particulièrement original. Sa biographie de l'explorateur Vasco de Gama, vu depuis les archives
indiennes, s'appuyait sur une profonde connaissance des relations commerciales dans l'océan
Indien aux XVe et XVIe siècles, et a fait de lui une figure de l'histoire « connectée ».
Cette variante originale d'histoire comparée consiste dans un récit historique, avant tout appuyé
sur des archives, proposant de décentrer le regard par rapport à une approche séparée des aires
géographiques. C'est ainsi qu'il travaille sur la connexion entre le monde de la Méditerranée, les
Ottomans, l'Iran, l'Inde et même l'Asie du Sud-Est. Si plusieurs textes de ce volume expliquent
cette démarche, les autres articles rassemblés ici témoignent d'une large curiosité. En tant
qu'intellectuel indien, Subrahmanyam est invité à écrire sur Naipaul ou Rushdie En tant
qu'historien, il intervient avec une grande assurance, et parfois un sens maîtrisé de la polémique,
sur des questions de démarche historienne. Quelle place accorder au rôle des « grands hommes »
dans le récit historique .Qu'est-ce qu'un empire ? Peut-on comparer les civilisations ? Enfin,
comme universitaire polyglotte et globalisé, il livre quelques récits caustiques de ses
pérégrinations académiques (« Jours tranquilles à la D. School », « Un été à Lisbonne», « Un
Parisien ambigu »). Une manière savante de sortir des débats sur l'impérialisme occidental en
proposant une autre approche des rencontres entre civilisations.
Marc-Olivier Padis
Les Affiches de Normandie, 22 avril 2015
L’Histoire au présent
Figure de proue de l'histoire globale, Sanjay Subrahmanyam, professeur au Collège de France,
s'emploie à rassembler des mondes. Dans Leçons indiennes, traduit par Jacques Dalarun, se trouvent
rassemblés une vingtaine d'articles disséminés dans des revues inaccessibles au grand public,
même très cultivé. Ils constituent un retour sur soi, balisent l'itinéraire très particulier d'un
historien indien que le hasard a fait, peu ou prou, citoyen du monde, polyglotte, analyste très fin
de routes commerciales entre l'Europe et l'Asie extrême.
Homme de l'archive, c'est aussi un homme perpétuellement en quête du sens. Le champ
conceptuel qu'il balaie est immense. Il nous parle aussi bien des Thugs, qui ont tant fait fantasmer
l'Occident, que du sécularisme - qui a peu à voir avec la laïcité... -, des visions de l'homme de
Gabriel Garcia Marques, Hemingway, V. S. Naipaul, Salman Rushdie ou Churchill, de la politique
suicidaire de l'État d'Israël que des intégrismes, du 11 septembre 2001 et de ses séquelles que du
goût de l'archive. Historien engagé, mais exigeant, il se met volontiers en scène, balise un
parcours, évoque des maîtres et des villes, avance des idées, brasse les civilisations et en écoute les
échos multiples. Cela ne va pas sans prises de positions. Subrahmanyam est un polémiste
redoutable, apte à détecter incohérences ou faux-semblants, petites et grandes lâchetés, dérives et
compromissions. Bref, une pensée en prise sur son temps, au miroir de l'histoire. Et c'est
singulièrement roboratif (Éd. Alma, 354 pages).
Pierre Aubé
Le Monde, 17 avril 2015
Briser les frontières
Sanjay Subrahmanyam refuse le « mythe de l’auteur seul, du héros », et insiste sur la nécessite d'écrire
les livres a plusieurs. « Si vous me demandez quels sont mes meilleurs livres : surtout ceux que j’ai écrits avec
d’autres », car c'est en multipliant
les compétences que les recherches trouvent leur qualité. Seul ou en collaboration,
il est l'auteur d'une œuvre importante, dont certains ouvrages ont été traduits en français, telle sa
passionnante biographie de Vasco de Gama (Alma, 2012), ou il s'attaque au mythe du grand
explorateur.
Sa définition du projet de l'histoire connectée s'est affinée et il insiste sur la nécessite de
continuer a « briser les frontières habituelles » pour « aller regarder la
où personne n’a voulu regarder ». En laissant de côté la « nation », souvent artificielle et peu pertinente
pour les périodes antérieures au XIXe siècle, il faut se départir des conventions
historiographiques spatiales ou temporelles tout en prenant garde de ne pas banaliser le projet.
« Des que I histoire connectée devient une histoire conventionnelle, alors il faut trouver autre chose ». Sanjay
Subrahmanyam aime les discordes intellectuelles et n'est pas avare de ses jugements. Dans Leçons
indiennes, avec humour et parfois férocité, il raconte ses expériences d'enseignement et de
recherche, s'amusant des effets de décalage entre un milieu académique et un autre. C'est la
richesse de son propos d'historien, comme d'intellectuel engagé dans le débat public. Un style,
une écriture et une pensée qui font se rencontrer des points de vue et des héritages, prenant
souvent le lecteur à contre-pied et l'obligeant à penser sans paresse.
Claire Judde de la Rivière
L’Histoire, avril 2015
Ouvrez les fenêtres !
N’avez-vous jamais remarqué qu'on voit mieux les choses, et que l’on perçoit mieux le réel de
biais ? Frontalement, c'est toujours plus plat. Henri Cartier-Bresson, qui ne prenait pas ses photos
autrement, soutenait que ce pas de côté suffit à modifier une vision du monde. L'historien indien
Sanjay Subrahmanyam, qui a enseigné à la Delhi School of Economics, puis a l'EHESS (Pans), à
l’université d'Oxford et depuis dix ans à UCLA (Los Angeles), ne dit rien d’autre dans Leçons
indiennes (Alma). Une vingtaine d’articles et entretiens, écrits entre 1995 et 2012 et publies en Inde,
en Europe et aux États-Unis, y sont réunis. Heureuse tentative de composer une histoire de soi
qui ne soit pas un récit égoïste Et sans notes de bas de page. Le livre idéal pour se familiariser
avec la pensée d'un intellectuel particulièrement critique, que son goût de l'anecdote de la formule
ou du trait ne fait jamais renoncer aux exigences de la complexité.
Qu'on l'appelle « histoire globale », « histoire connectée » ou « world history », qu’importe, surtout
lorsqu’un de ses pionniers nous y engage. Venu de l’histoire économique, cet Indien né en 1961
s’est attaqué tôt aux frontières. Pas seulement celles des zones géographiques mais celles, non
moins tenaces, des conventions historiographiques. II ne s'agit pas pour lui de favoriser une
approche universelle mais une perception multipolaire des faits. Disons une histoire globale,
libérée d'une vision centrée sur l’Europe et d’une grille d’analyse modélisée sur l'État nation.
Pour y parvenir, il invite à juxtaposer les échelles locales, régionale, nationale, continentale puis à
exploiter les sources écrites de première main et les archives - en maintes langues, à travers les
bibliothèques et les centres de recherches de nombreux pays. Encore faut-il être aussi polyglotte
que lui. Car son franc parler peut s’exercer en plusieurs langues. II s'illustre ici pour dénoncer le
« filon » des études postcoloniales, moquer « les carnets de voyage pleins de bile de V. S. Naipaul »,
déplorer le flou épistémologique de ses collègues. La liberté du ton participe d'un style littéraire
qui est aussi sa signature. En témoignent les pages assez caustiques dans lesquelles il s'interroge
sur l’énigme que constitue l'arrêt du développement mental chez Churchill, grand homme dont
« l'intelligence a pu être largement surestimée ».
Sanjay Subrahmanyam est l'homme des grands espaces, des horizons élargis, des ensembles qui
décloisonnent, des vastes aires culturelles. Pour autant, son projet n'est en rien comparatif, travers
universitaire qu’il juge absurde et vain. Attentif aux connexions entre empires et zones
commerciales, entre l’Inde du Sud l’Empire moghol et l'Eurasie à l'époque moderne, il est tout
aussi bien a son affaire lorsqu’ il s’agit du fossé qui sépare notre laïcité du sécularisme anglosaxon. Mais son éclectisme et sa curiosité sont tels qu’il ne peut s’empêcher de digresser en
passant par les chansons des Beatles (sa madeleine) sans oublier Maha Huhu, merveilleuse
nouvelle de Vishvanatha Satyanarayana écrite en télougou dans les années 1930.
Au fond, Sanjay Subrahmanyam est un homme de conversation Ses articles, ses conférences, ses
interviews, dont il n’est pas avare (il ne sait pas dire non), témoignent de ce que cet authentique
littéraire entretient une conversation avec les lecteurs mais dès qu'on s’y installe sous le feu de son
érudition on comprend mieux que son grand art est de susciter une conversation illimitée entre
les histoires des mondes, des continents, des civilisations. Ce qui ne l'empêche pas de situer un
grand basculement culturel « l’année de la sortie de Sergent Pepper’s»
Pierre Assouline
Page des libraires, avril 2015
Un observateur engagé
Sanjay Subrahmanyam constate d’un air amusé que dans certaines librairies américaines, celles qui
subsistent malgré Amazon, existe une section au rayon histoire intitulée « Oversize Anthropology »
que l’on pourrait traduire par «Anthropologie surdimensionnée ». Si cela désigne en l’occurrence
les ouvrages en grand format, il émet l’idée de créer un rayon « Histoire en surpoids » pour des
livres comptant de 600 à 1 200 pages, publiés par de grandes maisons commerciales. Rien à voir
avec les publications d’histoire universitaires, de plus petit format et qui doivent leur existence à
de multiples subventions.
Leçons indiennes n’est ni l’un ni l’autre de ces ouvrages. Sollicité par son éditeur pour rédiger « un
livre sans notes de bas de page » et qui pourrait intéresser un large lectorat, il regroupe ici des
articles et des entretiens publiés entre 1995 et 2012.
On y découvre les « itinéraires d’un historien », de Delhi à Lisbonne, puis à Paris et Los Angeles,
en passant par Amsterdam, que ce soit comme étudiant, enseignant ou chercheur. Ce parcours
nous permet de mieux connaître ce défenseur de l’Histoire connectée, dont l’ouvrage sur Vasco
de Gama lui valut la reconnaissance internationale. Au fil des pages se dessine le portrait d’un
observateur engagé d’un point de vue politique, mais également au niveau culturel, dont le regard
acéré et la liberté de ton portent souvent à sourire.
Combattant toutes les formes d’intégrisme et de nationalisme, égratignant au passage ses
confrères historiens tout autant que des grands noms de la littérature indienne comme Salman
Rushdie ou V. S. Naipaul, on a plaisir à découvrir la vision du monde de ce brillant savant, très
éloignée de la bien-pensance ambiante ou des critiques stériles.
Christine Lechapt
L’Alsace, 7/8 mars 2015
Un autre regard sur le monde
Universitaire de formation, Sanjay Subrahmanyam a d'abord enseigné l'économie avant de se faire
connaître par ses travaux sur l'histoire de l'Inde Et c'est à partir de l'Inde, dont il est originaire,
qu'il a développé en Europe et aux États- Unis « l'histoire globale de la première modernité »
dont il reste le plus brillant représentant.
Dans ce livre, on voit l'historien au travail, maïs aussi l'observateur engagé de la vie politique et
culturelle. Il voyage entre le passé et le présent, de Vasco de Gama jusqu'aux attentats du 11
septembre2001.Il s'interroge entre autres sur la France des terroirs, sur l'État d'Israël, sur Salman
Rushdie. À travers des sujets aussi divers que «le sentiment anti science, antimoderne, antitechnique » ou les nationalismes et les intégrismes, avec un esprit critique et une évidente liberté
de pensée, il propose une approche résolument« décentrée » de notre monde actuel.
Livres Hebdo, le 26 février 2015
Un recueil de textes littéraires, politiques ou personnels, par un Sanjay Subrahmanyam décapant.
Jean-Claude Perrier
L’Express, 18-24 février 2015.
En compagnie des Indes
L'« histoire connectée », l’ « histoire globale »,la « World History », dont Sanjay Subrahmanyam
est l'un des plus illustres représentants, est d'abord une manière d'aborder les sujets en s'écartant
de l'Europe et de ses archives, pour mieux se nourrir de toutes les autres sources, jusqu'ici en
jachère, dans d'autres langues. Cette gymnastique suppose de maîtriser un large éventail
d'idiomes. Subrahmanyam parle tamoul, sa langue maternelle, hindi, ourdou, persan, anglais,
français, portugais, espagnol, italien, allemand, danois, néerlandais. .. «Le goût de l'archive est
polyglotte », répète-t-il. Une « histoire globale », c'est aussi un déplacement du champ de vision.
Par exemple : la carte des Grandes Découvertes de nos manuels scolaires. Elle suit la route des
navires : les ports européens, l’Afrique, le cap de Bonne-Espérance, pour déboucher sur la côte
occidentale de l'Inde. Mais une autre carte est envisageable, limitée à l'ouest par les terres
s'étendant de l'Empire ottoman au Mozambique, via la péninsule arabique, et à l'est, par la Chine,
le Japon et les Philippines. Dans cet espace se love l'Empire portugais, l’Estado da India, qui se
révèle sous sa véritable nature : une thalassocratie, reposant sur une succession de comptoirs au
contact d'autres empires et royaumes. Cette vision-là du monde du XVIe siècle est
révolutionnaire, quand jadis, on n'avait d'yeux que pour Lisbonne (ou Valence).
L'histoire globale n'a rien de théorique. La géographie et les destins individuels sont ses meilleurs
alliés. Lorsque Sanjay Subrahmanyam s'interroge sur ce qu’est un « empire », il le fait par le
truchement du voyageur ottoman Al-Baghdadi au Brésil de l’empereur Don Pedro dans les
années 1860. S'il s'interroge sur l'identité et la posture de l'étranger au XVIe siècle, il prend en
exemple les destins d'un prince indien musulman retenu en otage par les Portugais, d'un Vénitien,
authentique marchand et médecin autoproclamé, d'un diplomate et théoricien politique anglais
méconnu. Et sans doute songe-t-il à son itinéraire personnel entre trois continents et quatre villes,
Delhi, Lisbonne, Paris, Los Angeles pour mieux percer à jour l’« altérité culturelle ».
Né dans la capitale indienne en1961, Subrahmanyam est issu d'une lignée de brahmanes tamouls.
Il appartient à une « famille de bureaucrates »de l'empire colonial, puis de l'État indépendant.
Après des études d'économie et d'histoire économique à la Delhi School of Economics, il donne
des cours à la fin des années 1980 au Portugal. Il est l'un des rares étrangers à parler la langue du
pays. Treize ans plus tard, il publie en anglais L'Empire portugais d'Asie : 1500-1700, la somme
qui le fait entrer dans la cour des grands. L'année suivante, il est appelé à l'École des
hautes études en sciences sociales, à Paris. Il occupe parallèlement la chaire d'histoire indienne qui
vient d'être créée à Oxford, avant de rejoindre l'Université de Los Angeles (Ucla). Il y a un peu
plus d'un an, il devient professeur invité au Collège de France. Il est le premier titulaire de la
nouvelle chaire d'histoire globale de la première modernité. (…)
On peut étudier les XVIe et XVIIe siècles et être à l'écoute du monde. Le dernier recueil de
Subrahmanyam foisonne de sujets. « La civilisation indienne est-elle un mythe ? » : éreintage de la
vision xénophobe de l'histoire nationale, soumis eaux coups de boutoir des étrangers,
musulmans, Britanniques et aujourd'hui Indiens occidentalisés, propagée par le BIP, le parti
nationaliste hindou. Comment relier qualité littéraire, vénération du pouvoir, culte de la
personnalité de l'écrivain colombien Gabriel Garcia Marquez ?
Éclectique, l’historien revient sur l'œuvre de l'écrivain V. S. Naipaul, questionne le destin des
Thugs, bandits de grands chemins du XIXe siècle, mais aussi le 11 septembre2001... Il sait
également ausculter ses contemporains. Sans ménagement. Dans un « Parisien ambigu »,il avoue
sa surprise devant la « très étrange attitude » des Français de la capitale à l'égard des criminels :
comme Nadine Vaujour, Jacques Mesrine, Florence Rey et Audry Maupin, « absous » parce que
grands justiciers, lecteurs de Bakounine ou adversaires du Front national autoproclamés. Il
constate une« tension entre discours et solidarité collective », dont « le voisin parisien », monstre
d'égoïsme, est le parangon. Quant à la présence de centaines de chiens polluant les trottoirs, il la
trouve consternante. « Cela doit être un reste de brahmane en moi », concède-t-il.
Les contemporains de Montesquieu avaient des Persans pour leur écarquiller les yeux, profitons
aujourd’hui de notre historien indien.
Emmanuel Hecht

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