Quand la banda fait le doctorat

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Quand la banda fait le doctorat
Quand la banda fait le doctorat
A la Une / Pontonx-sur-l'Adour /
Publié le 21/02/2016 . Mis à jour le 22/02/2016 à 07h45 par Benjamin Ferret
Voilà dix ans que la docteur en géographie humaine a mené ses premières études sur les identités
landaises. © Louvier Isabelle
Géographie - Marie Pendanx a publié sa thèse sur les cultures
locales et les identités en pays landais
La prochaine fois que les festayres et hestayres des Landes croiseront Marie Pendanx, ceux-ci seraient bien
inspirés de la remercier. Grâce à sa thèse, ils auront de quoi argumenter leur appétence folle pour les
fêtes. Ils verront qu'ils n'y sont finalement pas pour grand-chose si, chaque été venu, ils aiment à s'offrir un
temps de plaisir ; cela est juste lié à leur culture.
« La fête et le bien-vivre font partie d'un triptyque identitaire avec le sport et la musique », assure la
trentenaire dont les travaux de recherches sont aujourd'hui édités par la Société de Borda. Riche comme
une garbure, l'ouvrage titré « Cultures locales et identités en pays landais » a permis à Marie Pendanx
d'être reçue en 2014 docteur en géographie humaine.
Aboutissement d'« une dizaine d'années de recherches », cette thèse fait suite aux premières études de la
jeune femme de Pontonx-sur-l'Adour. En troisième année à l'université Michel-de-Montaigne Bordeaux 3,
déjà, l'étudiante avait suscité la curiosité de ses professeurs en se penchant sur les bandas.
« Rupture de transmission »
« Il y a plus de 40 bandas dans les Landes. Pourquoi une telle importance ? Parce que la langue a disparu. Il
y a eu un vide qui s'est créé, une rupture de la transmission que les bandas ont comblée », explique Marie
Pendanx.
Grosse caisse à la Txunga de Pontonx et seule femme à avoir joué avec les Calientes de Dax, la thésarde a
appliqué la méthode de « l'observation participative » pour mener à bien ses recherches. Afin d'étayer ses
propos, elle s'est aussi appuyée sur les mots collectés auprès de 38 familles et sur les entretiens réalisés
avec des membres de 51 associations.
« L'universel, c'est le local moins les murs. » Cet appel à la fraternité et à l'échange de l'auteur portugais
Miguel Torga, Marie Pendanx l'a fait sien pour sa thèse. « Mon terrain, c'est la Chalosse et Dax », précise la
géographe en présentant ses résultats. C'est qu'il ne faudrait pas se tromper, même si cela y ressemble : «
Nous sommes sur une culture rurale, mais je ne peux pas parler de culture du département. Les Landes
sont d'ailleurs le seul département dont le nom parle d'une forme paysagère qui ne concerne pas
l'ensemble de son territoire. »
Au-delà de son calendrier où les fêtes et les amis cèdent leur place au rugby et au basket en deux saisons
bien distinctes, Marie Pendanx a aussi cherché à aller voir ailleurs. En bonne Landaise curieuse, elle est
allée de la San Fermín de Pampelune à la feria de Nîmes, en passant par les harmonies du Thiérache, entre
France et Belgique. « Pour ces cultures locales, il y a un mot clef : le “branchement”. Sur le terreau des
fêtes patronales, des éléments venus d'ailleurs sont venus se brancher. C'est comme si les Landais avaient
souffert d'un malaise identitaire et avaient eu besoin, pour exister, d'aller chercher des choses ailleurs. »
La force de l'aimant
À ce constat, la thèse de Marie Pendanx ajoute la force d'une culture de « l'Ici », avec une majuscule,
comme un goût pour « les plaisirs de peu », selon la géographe. « Ce territoire a une force d'aimant. À la
différence des Basques et de leur diaspora, les Landais finissent toujours par revenir. Plutôt que de partir
en vacances à l'étranger, certains prennent des congés pour revenir faire les fêtes. »
Convaincue que ce sujet pouvait être objet d'étude depuis la découverte de « La Géographie en fêtes » - un
ouvrage de celui qui fut ensuite son directeur de thèse, Guy Di Méo -, Marie Pendanx se montre
intarissable sur ce qui fonde la culture des Landais. « Il y a un rapport étroit entre l'individu et les lieux d'ici,
un sentiment d'appartenance. La localité contribue à produire des pratiques sociales, un vivre ensemble, à
travers des moments comme les fêtes. » Du lien social qui se rapproche d'un enjeu de société.

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