Le Chantier
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Le Chantier
« LE CHANTIER » Un spectacle de théâtre-forum sur le travail issu des grands chantiers de la Cie NAJE Écrit par Fabienne Brugel, Jean-Paul Ramat, Célia Daniellou-Molinié et Perrine Capon Photo : Teeny Duchêne Avec : Andrée VIRLY, Antoine CATHELINEAU, Arlette KONNERT, Bakary Nicolas MASSALY, Aurelia LEON, Bénédicte DUFOUR, Benoit LABBOUZ, Brigitte ABEL, Catherine BRUGEL, Christel BOISSIER, Claudine CURCIO, Danielle CUNY, Delphine DEFLANDRE, Dominique BRUBACH, Driss BELASSRI, Fatima BERRAHLA, Flore LASSALLE, Francine CARPHAZI, Hanna ALLOUCH, Jean-Marc SCHRAMM, Jeanne CHEVALIER, Jorge ECHEVERRY, Laura C GOFFRE, Magalie BEN BACHIR, MarieAgnès GAYAT, Marie-Thérèse DELEPLACE, Marion MUSCAT, Martine N'SUNDA, Marysa CAMBORDE, Mayalou LUKA, Michel HIRTZ, Michèle DELAERE, Muriel BOMBARDI, Myriam CHEKLAB, Nadia ZANOUN, Nathalie MEURZEC, Noëlla GUILLEMIN, Nora ZANOUN, Odile GHERMANI, Patrick SALLES, Pauline TOURNIER, Pierre de la MORINERIE, Renée THOMINOT, Sandy BENIN, Sophie DE MULLENHEIM, Sylvie UMBA, Yasmine KACI, Clara GUENOUN, Emy LEVY, Farida AOUISSI, Jean Paul RAMAT, Mostafa LOUAHEM-M'SABAH, Pauline CHRISTOPHE, Perrine CAPON, Catherine LAMAGAT, Celia DANIELLOU, Jules CHOISNEL, Fabienne BRUGEL, Vianney DAVIENNE, Asmahan BAUCHET. Dans ce texte, à quelques exceptions près les prénoms des comédiens ont été gardés. Le réveil des ombres Avec leur ombre papier : Antoine, Asmahàn, Bakary, Catherine, Céline, Delphine, Dominique, Driss, Marysa, Myriam, Nadia, Nathalie, Sophie. Un réveil sonne. SOPHIE - Oh non. BAKARY - Déjà?! CATHERINE - Humpf... MYRIAM - Allez c'est parti ! On saute du lit ! DOMINIQUE - Encore 10 minutes... NADIA - Debout ! DRISS - (ronfle) ANTOINE - Bon... MARYSA - Il fait même pas jour... Deuxième sonnerie. DELPHINE - (se réveille en sursaut) Ah ! MYRIAM - On va se prendre un petit café-clope... et hop hop hop ! NATHALIE - Quand faut y aller, faut y aller ! Je te rappelle qu'on a un dossier à finir ! CELINE - (parlant à son ombre qui est déjà debout) C'est bon, on a 5 minutes... NADIA - Toi tu t'occupes de la lessive, moi je leur fais prendre leur petit déjeuner... DOMINIQUE - Encore 10 minutes et tu te lèves... NATHALIE - Je me demande si on ne devrait pas demander un report pour la livraison. T'en penses quoi? MARYSA - Il fait même pas beau... ASMAHAN - Oui, je sais que tu es fatigué... On a fait la java, faut assumer maintenant... SOPHIE - On se secoue, on se secoue, on se secoue ! CATHERINE - Tu vas retrouver tes collègues ! (chantonne) BAKARY - Aujourd'hui tu vas mettre ta petite veste verte, tu seras tout beau. DELPHINE - Respire, respire, ça va aller... CELINE - Bon, d'accord, je me lève, mais on y va mollo. Mollo, j'ai dit! DOMINIQUE - Je compte jusqu'à 10 et tu te lèves ! Sinon je me fâche! MYRIAM - Petits exercices du matin... (il se met à sauter) MARYSA - On s'en fout qu'il fasse pas jour, pas beau ! Debout ! BAKARY - Souris ! Bonne humeur, bonne humeur ! DOMINIQUE - Si tu te dépêches pas maintenant, tu vas devoir courir pour prendre le bus, et tu sais bien que tu n'aimes pas ça... CATHERINE - (chantonne) SOPHIE - Tu sais ce qu'on va faire? Tu te prépares vite vite vite, comme ça, on a le temps de passer à la boulangerie et on s'achète un gros pain au chocolat ! ANTOINE - Oui je sais que t'as mal au dos. On n’a pas le choix. Tu vas prendre tes calmants et ça va aller. NADIA – P'tit déj ok, toilettes ok, étendage du linge ok, habillage des deux ok, cartables ok… Merde ! Faut remplir le réservoir du scooter ! Où t'as mis le jerrican ?! Bon bah tu iras plus vite sur la route... CELINE - Non, tu pars pas comme ça le ventre vide. Sinon tu ne tiendras pas ce matin ! MARYSA - T'as vu la tête que t'as ? On va arranger ça. BAKARY - J'espère que y a pas d'embouteillages ce matin, parce que sinon, on est cuits. ASMAHAN - Café serré, vitamines C, paracétamol, et c'est parti ! NATHALIE - Parce que, tu vois, si on n'est pas prêts à temps pour la livraison, ça repousse d'autant pour la commande de mars, et… CATHERINE - Et youpla ! En avant ! ANTOINE - Bon, bah, on y va. BAKARY - Pôle Emploi, me voilà ! CELINE - Mais pourquoi tu cours ? J'arrive… NADIA - Attends ! T'as pensé à signer son carnet de correspondance ?! DELPHINE - Respire, respire... T'as encore une demi-heure de transports avant d'arriver, respire, ça va aller... MARYSA - Où t'as encore mis les clefs ? Ah, les voilà. (tous sont sortis. Driss se réveille en sursaut) DRISS - Il est déjà... Merde !!! T'es en retard! (sort en courant) Taylor Ford et Toyota Taylor par Benoît, Ford par Vianney, Toyota par Jeanne (Ils repasseront plusieurs fois pendant le spectacle) Les marionnettes sur une chaîne d’usine. TAYLOR - Je me présente : Frédérick Winslow Taylor. Taylor comme taylorisme. J’ai inventé l’organisation scientifique du travail. C’est une idée tellement simple vous savez ! La production des biens, la production, nécessite la collaboration des patrons qui ont le capital et des ouvriers qui ont le savoir-faire. Les patrons paient les ouvriers le moins possible et les ouvriers flânent systématiquement et rusent pour se fatiguer le moins possible. J’ai observé un homme qui poussait une énorme brouette très lourde, eh bien il la poussait très vite à pleine charge pour moins se fatiguer et revenait à vide bien lentement pour se reposer. La solution, c’est le chronomètre : tout chronométrer dans le travail, chaque geste, chaque déplacement, pour fixer à chaque ouvrier le geste qu’il doit effectuer et le temps pour le faire. Il faut chronométrer les meilleurs ouvriers, fixer des objectifs élevés ; vous serez surpris de voir que les ouvriers y arrivent presque toujours, et payer chaque ouvrier selon sa valeur. Là, on charge de la fonte à raison de 12 tonnes par jour et par ouvrier. Je vais leur en faire charger 47 tonnes par jour. Bien sûr il faudra les payer plus, mais pas quatre fois plus, non, une fois et demi plus, ce sera suffisant. Taylor s’adresse à un ouvrier : TAYLOR - Schmidt, êtes vous un homme de valeur ? OUVRIER - Ben je n’vois pas où vous voulez en v’nir. TAYLOR - Oh voyons, répondez à mes questions. Ce que je veux savoir, c’est si vous êtes un homme de valeur ou un de ces ouvriers bon marché. Ce que je veux savoir c’est si vous voulez gagnez un dollar 85 par jour ou si vous êtes satisfait avec un dollar 15 comme tous ces gens de peu. OUVRIER - Si je veux un dollar 85 par jour, c’est ça un homme de valeur. Alors ouais je suis un homme de valeur. TAYLOR - Bien-sur que vous voulez un dollar 85 par jour, personne ne dirait non. Venez par ici. Vous voyez cette pile de fonte. OUVRIER - Oui. TAYLOR - Vous voyez ce wagon ? OUVRIER - Oui. TAYLOR - Et bien si vous êtes un homme de valeur, demain vous me chargerez cette fonte dans ce wagon pour 1 dollar 85. OUVRIER - Y’en a beaucoup de la fonte. TAYLOR - 47 tonnes. Vous voyez cet homme là-bas, il vous dira comment gérer votre effort pour y arriver. TAYLOR (au public) - Bien sûr, s’il y a beaucoup de chômage, vous pouvez exiger des cadences plus élevées. Par contre, si la main d’œuvre manque, vous devrez évidemment être moins exigent. Voyez-vous, ce qui gêne considérablement la mise en place de l’organisation scientifique du travail, c’est l’existence de syndicats qui montent la tête aux ouvriers. Entrée de FORD. Ah ça mon cher Taylor, vous avez bien raison. Henri Ford. J’ai utilisé vos méthodes et je les ai poussées jusqu’au bout : j’ai inventé le travail à la chaîne, la mise en pièces du travail, la parcellisation absolue des tâches. C’est la chaîne qui dicte sa loi. La chaîne, c’est un gigantesque chronomètre, mais un chronomètre qui contraint l’ouvrier. Entrée de TOYOTA. Messieurs, chez Toyota, et désormais dans toutes les usines du monde et même dans toutes les formes de travail, nous avons amélioré votre système. Désormais la productivité est l’alpha et l’oméga. La chaîne est un monde absolu, intransigeant. Celui de la qualité absolue, du zéro défaut, zéro stock et chaque élément arrive juste à temps. Dans ce mécanisme d’horlogerie implacable, l’ouvrier est un engrenage qui contraint les autres et qui est contraint par les autres. Le stress et la peur du stress seront les coachs universels des travailleurs. Désormais pour survivre, le salarié devra coopérer physiquement et mentalement et se mettre à la disposition de l’entreprise corps et âme. Intermittent, polyvalent, flexible, mobile, désormais chaque salarié devra être consacré à son travail, organiser son temps, sa vie, pour lui. Et là où la chaîne n’existe pas, l’informatique organisera, contrôlera, prévoira, sanctionnera. Le travail est enfin l’absolu du monde. Travail bien fait travail mal fait : l’assurance suicide (Scène de forum) Une vendeuse par Michèle, une chef par Brigitte, cliente 1 par Andrée, cliente 2 par Mayalou, une bonne conscience par Bénédicte, une mauvaise conscience par Laura. Cliente 1 - Bonjour madame, je voudrais acheter une machine à laver mais j'hésite entre ces deux-là. Vendeuse - Celle-ci est bien plus performante. Et surtout, pour très peu d'écart de prix, elle est bien moins bruyante. Cliente 1 - Moins bruyante, c’est mieux. Vendeuse - Très bien, si vous voulez bien me suivre, je vais imprimer le bon. Cliente 1 - Et l’extension de garantie de 5 ans, c’est intéressant ? Vendeuse - C’est à vous de voir mais c’est une machine plutôt solide. Bien, je vous laisse aller régler en caisse et voir pour la livraison. Cliente 1 - Merci beaucoup. La chef qui a écouté la conversation Chef - Dites-moi, vous n'essayez pas de vendre l'extension de garantie de 5 ans ? Vendeuse - Ca sert à rien l’extension de garantie. Soit la machine a un vice de fabrication et elle tombe en panne pendant les premiers mois et alors elle est sous garantie, soit elle tient plus de 5 ans. Chef - C'est justement parce qu'il n'y a pas de panne pendant l'extension de garantie que cette extension est rentable pour le magasin ! Vous devez donc inciter fortement chaque client à prendre une extension de garantie. Vendeuse - Mais c’est de l’arnaque. Chef - Ecoutez, si ça ne vous convient pas, la porte est là. Et il y a plein d'autres vendeurs qui attendent et qui n'auront pas vos états d'âme, croyez-moi! Vendeuse - Bien Madame. Cliente 2 - Bonjour Madame, je voulais acheter cette machine, mais j'hésite à prendre l'extension de garantie. Vous, vous connaissez le produit. Vous feriez quoi à ma place ? Vendeuse - Je fais quoi ? Les deux consciences entrent sur les deux côtés de la scène. Bonne conscience - Tu fais comme d'habitude, tu n'arnaques pas ta cliente. Mauvaise conscience - Tu as entendu ta patronne ? Tu veux te retrouver au chômage ? La dernière fois, ça a duré 3 ans... Bonne conscience - Tu aimes ton métier. Ton métier c’est bien conseiller ton client. Mauvaise conscience - Et Mathilde ? Elle veut faire des études de commerce. Tu sais combien ça coûte ??? Tu veux qu'elle renonce ? Cliente 2 - Excusez-moi Madame, vous me conseillez quoi ? Vendeuse - D’expérience, prenez l'extension de garantie. Cliente 2 - Merci. Mauvaise conscience (applaudissant) - Tu auras de la part variable. Bonne conscience - Bon, je crois qu'on a plus rien à se dire, salut. La vendeuse prend un cachet avant de sortir. Violences dans l’usine (Scène de forum) Vieux 1 par Danielle, Vieux 2 par Odile, Vieux 3 par Noëlla, Vieux 4 par Renée, Jeune 1 par Marion, Jeune 2 par Francine, Jeune 3 par Pauline T, Jeune 4 par Pauline C, Petite chef par Flore, La direction par Farida. 1/ Les altercations Micheline en vieille, Juliette en chef, un jeune Jeune - Je vous remplace. Vous, vous allez là-bas. Vieux - Et puis quoi ? C’est ma machine. Jeune - C’est la chef qui m’a dit de prendre ta place. Vieux - La dernière fois, les jeunes vous me l’avez laissée en bordel. J’ai du la nettoyer, refaire les réglages. C’est ni fait ni à faire votre travail. Jeune -Tu te prends pour le chef toi ? Tu crois qu’elle est à toi perso cette machine ? Chef ! Chef - Micheline vous allez là-bas. Nous sommes tous polyvalents maintenant, vous aussi. Vieux - Avant c’était pas comme ça et on faisait de la qualité. Chef - Vous suivez le planning ou je vous colle un rapport ? Ginette en vieille, Rachida en jeune Jeune - Ginette le chef a dit que vous devez aller là bas. Je dois former la nouvelle. Vieux - C’est ma machine, je peux la former moi la nouvelle. Depuis 30 ans que je travaille dessus, je connais le boulot, S’il y a quelqu’un qui peut montrer ici, c’est moi. Jeune - Et bien c’est moi qui forme. Vieux - T’es en intérim et c’est toi qui forme. N’importe quoi. Jeune - Si c’est à moi qu’ils demandent de faire la formation, c’est peut-être pas pour rien. Tu t’es pas posé pas la question ? Josette en vieille et Natasha en jeune Jeune - On change de poste, laisse-moi la place. Vieux - Attends, j’ai pas fini ma soudure. Jeune - Les horaires c’est les horaires. Tu veux jamais aller aux cartons. Vieux - Les cartons, j’y étais quand j’ai commencé il y a trente ans. C’est aux jeunes de commencer par les cartons. Jeune - Ah ouais, tu veux que je me tape le sale boulot à ta place et toi tu resterais tranquillement à ta machine ? Vous parlez tout le temps de solidarité les anciennes. Elle est belle votre solidarité. Rester planquées et laisser les autres se taper le sale boulot. Tu sais pourquoi j’y vais pas à ton syndicat hein ? Tu sais pourquoi ? Vieux - Pfff Louise en vieille et Zina en jeune Vieille - C’est quoi ce tas de bazar qui reste là, au milieu de l’atelier. C’est le bordel. Les jeunes de la cité, vous foutez le bordel comme dans votre cité. Jeune - Je t’emmerde. La cité elle t’emmerde. Elles se battent. 2/ La direction Oui il y a des actes de violence dans l’entreprise. Ce sont les ouvrières qui s’insultent et parfois se battent. Que voulez-vous qu’on y fasse. Ces jeunes qui viennent de la cité, elles sont violentes. Forcément, elles vivent dans la violence depuis qu’elles sont toutes petites. Elles ont appris à brûler les voitures, à s’entre tuer… Alors forcément, leur violence elles l’apportent dans l’usine. C’est un problème pour nous. Bien sûr. Les changements que nous avons apportés à l’organisation pourraient y être pour quelque chose ?! Quels changements ? Oui, on a progressivement réorganisé le travail pour que l’entreprise soit plus performante, bien sûr ! Comment voulez-vous faire autrement que vous adapter aux lois du marché ?! Mais le personnel est bien traité ici. Les conditions de travail sont excellentes chez nous. Et puis vous savez, il ne faut pas trop généraliser nous avons aussi plein de jeunes qui apportent du dynamisme, de l’élan. Je le dis toujours, ce qui est important, c’est l’élan. 3/ Les personnages en images parlent à tour de rôle Vieille 1 - Micheline, 50 ans. 28 ans sur la chaine. Ce que j’aime c’est la précision, les micro-soudures. Je suis bonne à mon poste. Je comprends pas. On m’y laisse pas. On arrive, on nous met là deux heures puis ailleurs, il faut être polyvalents soit disant. Je comprends pas. J’ai plus de métier. Jeune 1 - Juliette. 30 ans. C’est moi qui organise le travail. Je suis là depuis un an et ils m’ont donné de l’avancement. J’adore mon travail. Le problème ici, c’est les vieux, ils sont fainéants et ils râlent tout le temps ; ils mettent la mauvaise ambiance. Avec les jeunes ça va. Ils en veulent. Vieille 2 - Ginette 55 ans. Je fais le boulot depuis 35 ans. Ils font rentrer de plus en plus de jeunes cons qui veulent prendre notre place et nous virer. Mais je me laisserai pas faire. Jeune 2 - Rachida. Moi je suis en intérim ici depuis 5 ans. Maintenant ils me demandent de former les nouveaux. J’aime bien. Les vieux, ils font que râler ; ils parlent tout le temps de solidarité mais ils sont pas du tout solidaires avec nous. Vieille 3 - Josette, 52 ans. 30 ans que je bosse là. Avant y’avait de la solidarité ici. Quand j’ai commencé, on était fières d’être là. On faisait des machines qui duraient 30 ans. Maintenant on fait de la merde. Jeune 3 - Natasha. Je suis intérimaire ici. Les vieux, ils veulent pas bouger mais moi je trouve que la polyvalence, c’est génial parce qu’on a plusieurs expériences, plusieurs métiers, c’est bien pour mon cv de montrer que j’ai fait plein de postes différents, pour retrouver du travail. Vieille 4 - Louise. Quand je suis rentrée y’avait pas le choix, c’était les études ou l’usine. J’ai choisi l’usine, comme mes copains. Le premier jour, j’ai failli partir en courant, j’ai tout fait tomber. Elles sont toutes venues m’aider à ramasser. C’est fini tout ça. J’en ai marre. Jeune 4 - Zina, 22 ans. En intérim. On est 5 à vivre sur mon salaire : mon père ma mère mes deux frères. Y’a pas de travail dans la région. Ce travail, c’est une chance pour nous. Si je le perds, je sais pas ce qu’on deviendra. Si je bosse bien peut être ils me garderont. Travail invisible : L’aide soignante (Scène de forum) Aide-soignante 1 par Hannah, Aide-soignante 2 par Sandy, Mme Capon par Arlette, Mme Ramat par Yasmine, Mme Moustier par Fatima. Le médecin par Emy, la cadre de santé par Christel, l’infirmière par Marie-Agnès. Les deux aides-soignantes en rentrant, l’une enfilant sa blouse. AS2 - Salut ! AS1 - Salut ! AS2 - Ça a l’air d’aller toi ! Ça s’est bien passé ton concours d’infirmière alors !? AS1 - J’ai apporté une bouteille de champagne AS2 - T’es folle, tu devrais attendre les résultats. Moi quand je passerai le concours, j’attendrai les résultats. AS1 - Les résultats, je les connais déjà… J’y suis pas allée. AS2 - Quoi ? Et tu apportes le champagne ? T’es vraiment folle ! AS1 - Non. En fait je ne veux pas être infirmière, je veux rester aide soignante. AS2 - Tu veux nettoyer la merde toute ta vie ? Et en plus tu seras toujours moins payée ! Pourquoi t’as fait ça ? AS1 - Parce que les vrais soignants, c’est nous. C’est toi comme aide-soignante qui t’occupes vraiment des personnes. Les infirmières, elles font des actes techniques, des piqûres, des pansements, mais un malade, c’est pas qu’une cicatrice tu sais, c’est une personne. C’est tout son corps qui est là. Elle a aussi mal ailleurs, au ventre, au dos, elle est triste ou seule, ou heureuse. Viens on va mettre madame Ramat dans son fauteuil. Bonjour madame Ramat, comment vous allez aujourd’hui ? Vous allez vous mettre dans le fauteuil ? Allez, venez contre moi. Laissez vous aller. Faites moi confiance. Sonnette AS1 à AS2 - Tu vas voir ? AS2 - Bonjour madame Capon, vous avez appelé ? Mme Capon - Oui j’ai pas eu mon médicament bleu aujourd’hui, pourquoi ? AS2 - Le médecin a dit de l’arrêter, que vous le reprendrez plus tard peut-être. Mme Capon - Allez me chercher l’infirmière. AS2 - Elle est occupée vous savez. Et puis elle vous dira la même chose. Mme Capon - Allez me chercher l’infirmière, vous êtes pas infirmière vous. Elle sort et croise l’infirmière : Dis tu peux venir chambre 18 ? Madame Capon veut savoir pourquoi elle n’a plus son médicament bleu. Infirmière - Je suis occupée là, tu lui as pas dit ? AS2 - Si si mais elle veut une infirmière. Infirmière - Ah oui évidemment. Elle va à Madame Capon : (très vite) Madame Capon, votre médicament, le médecin a dit de l’arrêter pour l’instant. Voilà. A plus tard. Les deux aides soignantes se rejoignent dans le couloir. AS1 - Chambre 19, Madame Moustier, on va y aller, je suis même pas sure qu’elle comprenne ce qu’on dit mais il faut lui parler comme si elle comprenait. On sait jamais. Elles entrent. AS1 - Bonjour madame Moustier, on vient voir comment ça va. On va vous relever un peu, vous serez mieux pour respirer. à AS2 - Tu la prends sous le bras (à madame Moustier) Allez on compte jusqu’à trois et on vous relève. Un Deux Trois. Voilà. Elles arrangent un peu le lit. AS1 - A tout à l’heure madame Moustier. Elles sortent de la chambre et se dirigent vers l’autre bout. AS2 - Pourquoi t’utilises pas l’araignée pour lever les malades ? Tu vas te faire mal au dos. AS1 -L’araignée, c’est une machine. Ca fait peur aux malades. Et puis c’est lent. T’as plus le temps de t’occuper du malade. J’ai essayé. J’avais l’impression d’être garagiste et de changer un moteur. J’aime mieux les prendre contre moi c’est plus doux. Pendant qu’elles parlaient, un médecin, un cadre de santé et une infirmière vont dans la chambre de Madame Moustier. Médecin au cadre de santé - Est ce qu’elle a vomi cette nuit ? Cadre de santé à l’infirmière - Est ce qu’elle a vomi cette nuit ? Infirmière sort en courant et va voir AS1 - Madame Moustier, est ce qu’elle a vomi cette nuit ? AS1 - Oui un peu Infirmière au staff - oui un peu Médecin - C’est la première fois ? Cadre de santé à infirmière - C’est la première fois ? Infirmière va voir AS1 - C’est la première fois ? AS1 - Non, ça fait trois nuits qu’elle vomit un peu. Infirmière au staff - Ca fait trois nuits. Médecin - Bon on va diminuer par deux sa posologie. Le staff passe à la chambre d’à-côté. Médecin - Bonjour. Les deux aides soignantes : AS2 - Tu sais plein de choses sur les malades. Comment tu fais ? AS1 - Je leur parle, je les console, je les lave… Quand il n’y a plus la parole, le corps continue de raconter beaucoup de choses tu sais. AS2 - Pourquoi on est pas à la visite pour répondre nous mêmes aux questions du médecin ? AS1 - On n’est pas assez importantes pour ça. La Zoé : 5 personnages Conteur par Michel, 1 par Pierre, 2 par Mos, 3 par Jean Marc, 4 par Christel. Conteur - Quand la première Zoé est sortie de la chaîne, j'en aurais pleuré. Pendant ce temps, les 4 autres poussent la voiture (symbolisée en bâtons) et entrent dedans… 1 - Ça c'est une voiture, hein. 2 - Oui, Notre voiture. C’est nous qui l’avons montée. 3 - Elle est belle. 1 à 4 - Eh tu vas pas chialer quand même. 2 - Les vitres c’est moi, 4 - T’as vu les sièges s’ils sont bien montés 3 - Il est bien notre levier de vitesse 4 - Je voudrais bien que mon fils soit là. 2 - Et le tableau de bord hein ? C’est nous le tableau de bord. 1 - La voir comme ça toute belle, finie, ca fait quelque chose hein. 4 - On a fait une belle voiture. 2 - La Zoé, c’est nous qui l’avons monté. 1 - Zoé, c’est bien comme prénom 3 - Tu vas pas appeler ta fille Zoé quand même ? Les objets : 7 personnages et des objets Noëlla, Magalie, Jules, Sylvie, Andrée, Muriel, Marie-Thérèse Noëlla - J'ai 16 ans. Il n'y en a pas beaucoup de mes collègues scotcheuses qui sont encore de ce monde... Faut dire que Noëlla, elle me bichonne... A l'époque où on était à l'usine, on était inséparables. Ah j'en ai dévidé pour elle du ruban adhésif ! Ce qu'on préférait, c'était les grosses commandes : on scotchait, on scotchait, des kilomètres et elle chantait. Quand la boîte a fermé, pour pas que je m'ennuie, vous savez quoi ? Elle m'a emmenée chez elle. Des fois elle me laisse même dormir à côté d'elle sur sa table de nuit. Magalie - Je ne suis pas un sac à dos. Non ! Je suis un bureau ! Je pèse huit à treize kilos, eh oui ! Je contiens tout ce dont Magalie a besoin : ses livres, ses documents, les brochures qu'elle distribue, même son thermos et sa gamelle - la pauvre, elle travaille sur tout un département et elle n'a même pas un placard à elle, pas un coin de bureau, rien ! Elle a beau râler, dire qu'elle en a plein le dos de me porter, franchement, je ne vois pas comment elle ferait sans moi. Sylvie - La première fois que Sylvie nous a portés, nous les gants de plastique rose, elle était si fière que ça nous a intimidés. On a nettoyé ensemble les quatre étages de bureau, vidé les corbeilles, passé l'aspirateur et la serpillière. Elle était tellement heureuse. C'était son premier travail en France. Jules - Quand Jules travaillait chez Quick, il me portait tous les jours. On ne peut pas dire qu'on était très amis; il m'appelait "l'uniforme de l'armée du capital". Bien sûr les patrons l'obligeaient à me garder propre, il devait me laver tous les soirs, mais lui, en rentrant, disait qu'il était fatigué, qu'il n'avait pas envie... Il m'emmenait de force, avec lui, sous la douche, me lavait au savon sans même me quitter. Quelle horreur. Andrée - Je m'appelle Pèse-Lettre. Avant, je pesais des lettres. Les gens venaient me voir pour toutes les choses importantes de leur vie : les faire-parts de mariage, de décès, les recommandés, les lettres d'amour. Un jour, on m'a dit que j'étais trop ancien, pas assez performant. On m'a rangé dans un placard, tout au fond, entre les cartons. Oublié de tous, j'entends au loin, très loin, les autres vivre sans moi. Muriel - Je suis le Badge. Qui, ici, peut se passer de moi ? Personne. Il faut vivre avec son temps. Qui ouvre la porte ? C'est moi. Qui donne accès à la cantine ? C'est moi. Qui vérifie que les horaires de travail sont bien tenus? C'est encore moi. Je suis celui sans qui vous n'existez pas. Nous sommes ceux sans qui vous n'existez pas. Rien qu'au Conseil Général, nous sommes 7000. Nous nous glissons dans vos poches, tout contre vous. Rien ne nous échappe, nous veillons sur vous. Marie-Thérèse - Je me souviens de ce premier jour de mobilisation d'octobre 95, de cette grande marche où j'ai été brandi pendant des kilomètres. Je me souviens des autres drapeaux, de toutes ces couleurs pour tous les services publics. Je me souviens de l'attente longue, de leur fatigue à l'arrivée, leurs bras qui tremblaient à me porter si haut. Je me souviens de leur espoir, de leur détermination. Je me souviens du dernier jour du mouvement, de la déception, de la colère, de ses larmes lorsqu'elle m'a replié. Je ne suis pas resté rangé longtemps. Santé et fragilité (Scène de forum) Suzy par Flore, 3 par Arlette et 2 par Fatima, 1 chef par Muriel, 2 profs antistress par Marie Thérèse le premier et Marysa le second, 1 copine par Odile et des figurants Tableau 1. Trois collègues femmes au travail Suzy - J’y arriverai jamais à temps 3 - C’est de plus en plus dur ici. 2 - Ben, on a de plus en plus de pression ?! 3 - Les objectifs qui augmentent sans cesse, les évaluations permanentes, 2 - Et c’est toujours pour dire qu’il faut en faire plus, jamais pour dire qu’on fait tout ce qu’on peut… 3 - Suzy, tu t’angoisses trop quand tu ne fais pas ses objectifs, ça te mine. Suzy - Ça te mine pas toi ? Tableau 2. L’entretien entre Suzy et sa supérieure Chef - Bonjour Suzy, C’est bien qu’on ait cet entretien toutes les deux. Je vous sens en difficulté en ce moment. Vous avez du mal à tenir vos objectifs. Suzy - C’est le nouveau logiciel, on n’a pas été formées, il est très compliqué et il a des bugs. J’ai perdu beaucoup de temps. Chef - Vous êtes fragile Suzy en ce moment. Il y a quelque chose qui va pas dans votre vie ? Suzy - Non… C’est le nouveau logiciel. Et puis les objectifs, ils sont très haut depuis cette année. C’est beaucoup de pression pour y arriver. Chef - Vous avez du mal à résister à la tension ? Vous vous stressez ? Suzy - Oui un peu, c’est dur pour tenir les objectifs. On a de plus en plus de choses à faire. Chef - Vous savez que l’entreprise a mis en place un atelier antistress le mercredi midi ? Je vous conseille d’y aller. C’est un premier pas pour réagir. Oui ? Suzy - J’irai. Chef - A la bonne heure. Et vous savez quoi, moi j’ai fait il y a quelques années de la rirothérapie. Ça permet d’expulser par le rire tout ce que vous avez à expulser. Essayez aussi. Moi je trouve ça génial. Suzy - Et pour le logiciel, c’est possible d’avoir une formation supplémentaire ? Ou réduire un peu mes objectifs, revenir à ceux de l’an passé ? Chef - Suzy, franchement, je ne crois pas que le problème soit là. Bon, on en reparle dans un mois, après vos ateliers antistress. J’attends une nouvelle Suzy, moins fragile, plus battante. Oui ? Tableau 3. Le cours antistress Prof 1 - Suzy, ici, nous allons recaler notre énergie pour que le corps et la tête fonctionnent mieux ensemble. Parce qu’aller mieux dans son corps, c'est aller mieux dans sa tête. Nous sommes tous des personnes fragiles. Je suis fragile, vous êtes fragile, ils sont fragiles. Prof 2 - Nous sommes fragiles. Prof 1 - Alors, comme d’habitude, nous allons commencer par un petit nettoyage des énergies négatives… On commence par s’épousseter… D’abord les bras… Prof 2 - Voilà, on s’époussette, on se nettoie… On époussette, on époussette... On se débarrasse de tous les tracas du quotidien… Le grille-pain en panne… La voiture qui refuse de démarrer… Prof 1 - On n’oublie pas les jambes… Prof 2 - L’ordinateur qui bug… Le métro qui n’arrive pas… On époussette… On se débarrasse… On se débarrasse de tous les petits énervements… On enlève la colère… Tout ce qui nous empêche d’avancer… On se nettoie… Et quand on est propres, débarrassé de toutes ces scories, on se redresse, on se remet au milieu de nous-mêmes. Prof 1 - Plus rien n’existe. L’énergie coule en vous comme un torrent d’eau chaude… On suit ce torrent… On coule avec lui… On devient eau sur le sable chaud… Les personnages s’estompent, Suzy reste, une copine arrive. Copine - Ça va Suzy ? Suzy - Je suis fragile en ce moment. Je file il ne me reste pas beaucoup de temps pour déjeuner. Santé et danger : les nombres par Brigitte et marionnette par Bénédicte, Benoît et Christel Brigitte - Pendant des années, j'ai été dactylo-codeuse. Je saisissais des chiffres toute la journée pour des enquêtes. 1-8-4-5, 3-9-5-6, 1-2-4-3... Toute la journée, saisir du chiffre, sans me tromper, à toute vitesse. Un soir, je suis sortie de là, contente de pouvoir enfin prendre l'air. Je suis allée attendre mon bus. Le 128, je devais prendre. J'étais là, assise sur mon banc, le bus est arrivé, avec son grand panneau 1-2-8 à l'avant. 1-2-8. Et mon 128, il était où? Et d'abord, 128, c'était comment? Je n'en savais rien. Je paniquais. Les chiffres se promenaient tout seuls sur le panneau, ils refusaient de s'attacher. Avec le temps, je me suis habituée au phénomène. Chaque soir, en sortant du bureau, les chiffres perdaient leur sens. J'ai pris l'habitude de rentrer à pied. Le temps du trajet, ils avaient retrouvé leur épaisseur. Santé et danger : Arthur (Scène de forum) Gérard par Mostafa, Vianney par Bakary, intérim 1 par Pauline T et intérim 2 par Driss, Lucien par Francine Gérard - Bon le décor est fini d’installer. Il reste à régler les projecteurs. Ah, comme le décor est très haut, il faut garder les perches à 8 mètres 50 sinon on va avoir des ombres portées et ce sera très laid. Ca va aller ? Arthur - Il faudra bien. Le problème c’est qu’on est sur le pont depuis 7h30 ce matin. On devrait avoir fini et on est déjà en dépassement d’horaire. Gérard - Je sais bien mais si le deuxième camion n’avait pas eu de retard, on aurait fini. Intérimaire 2 - Ouais ouais, mais plus de 12 heures d’affilée, c’est pas légal. Gérard - T’aura une prime va. Arthur - Bon ça va le faire. Gérard à Arthur - Dis, il faut que je fasse un saut chez moi. T’as fini ta régie son, tu peux commencer le réglage lumières ? Arthur - Pas de problème Gérard sort. Arthur aux deux intérimaires - Toi et toi vous allez m’aider en déplaçant l’échelle roulante pour que j’ai pas à descendre sinon j’y passe la nuit. Qui peut s’occuper de la console lumière ? Intérimaire 1 - Ben moi je connais pas trop mais je devrais y arriver. Arthur à l’autre - Toi tu finis les câblages ? Tout le monde sort en courant. Arthur hors de scène - Tu peux faire le noir ? Noir Arthur - Envoie le circuit 20 Un circuit s’allume Arthur - Non, le 20 Intérimaire 1 - Ah pardon Un autre circuit s’allume Intérimaire 2 : Arthur, la P40, je la branche où ? Arthur - Regarde coté cour, t’as une P40 Intérimaire 2 - Je la trouve pas Arthur - Derrière le pilier Intérimaire 2 - Merde j’y vois rien Arthur - Pourquoi ? T’as pas ta frontale ? Intérimaire 2 - J’ai plus de pile. Sonnerie de téléphone et Arthur répond : Allo. Comment ça tu restes chez toi ? Bon bon d’accord. Oh les gars, Gérard ne revient pas donc c’est moi qui vais régler les lumières. Tu peux envoyer le circuit 22 ? Une nouvelle voix (Lucien) - Y’a quelqu’un ? Arthur - Oui c’est pourquoi ? Lucien - C’est Lucien. Je trouve pas Gérard, c’est lui qui a les clés de la camionnette. Arthur - Bon je descends. Remet les services. Lucien est au milieu de la scène, Arthur arrive. Arthur - Gérard est parti, il a laissé les clés dans le local technique. Lucien - Gérard est parti ? Arthur - Ouais, il avait un problème de famille je crois. Lucien - Et t’es tout seul ? Arthur - Non, enfin presque. Y’a les intérimaires mais ils savent même pas déplacer l’échelle mobile. Franchement à 8 mètres 50, j’ai peur. Lucien - Attends, t’es seul responsable, t’es pas de régisseur lumières, t’es en dépassement d’horaire absolu… et tu fais pas jouer le droit de retrait pour danger imminent ? Arthur - Ben… Si je fais ça, le spectacle de demain, il a pas lieu. Lucien - C’est toi qui vois mais… si tu tombes de là-haut t’es mal et si un intérimaire se blesse, tu vas en prison. Arthur - Ben, je vais pas planter le spectacle quand même. Lucien sortant - C’est toi qui vois mais… Arthur - Allez les gars, on y retourne mais faites gaffe, j’ai pas envie de tomber de làhaut. Santé et danger : La maladie du père Le père par Michel, la fille par Magalie et le médecin par Yasmine Dr - Monsieur Vermont Bonjour, Bonjour (à Magalie) Fille - Bonjour Dr. Dr - Asseyez vous, monsieur Vermont, Père - Vermont Arthur, enfin Tutur. Dr - Comment vous sentez vous aujourd’hui ? Père - Ça va. Fille - Il est fatigué. Dr - Vous êtes fatigué ? Père - Oui. Dr - Vous avez eu 20 séances de radiothérapie, en deux fois. C’est ça ? Fille - Oui c’est ça. Dr - Alors les analyses ne sont pas bonnes. Votre cancer a recommencé à grossir. Ce qu’il faudrait dans votre cas, ce serait une chimiothérapie mais là je crois que vous êtes trop fatigué pour la supporter. Père - Je suis foutu. Dr - Dites-moi c’était quoi votre métier ? Père - Couvreur étanchéiste Dr - Couvreur étanchéiste ? Insert fille petite (fille en jeu devenue enfant, père reste en vieux sur sa chaise) Fille - Je peux rester là pour te regarder papa ? Père - Tu peux rester mais n’approche pas, ça brûle. Tu restes là. Fille - Oui je bouge pas papa. Je te regarde. C’est quoi le noir, c’est quoi papa ? Père - C’est du bitume. Fille - Ca fume papa. C’est beau. Ca fume partout. Père - Oui T’as vu ça hein ? Fille - Je sens le chaud. Tu vas pas te brûler papa ? Père - T’inquiète pas j’ai des chaussures spéciales. Fille - Ça coule le noir, c’est comme de la réglisse. On peut pas le manger dis papa ? Père - Non ma puce, on ne peut pas le manger. Fille - C’est beau. Et papa pourquoi y’a le feu là ? Père - C’est pour chauffer la gamelle. On va se régaler. Ta mère nous a fait un bœufcarottes Fille - C’est beau ton travail papa. Reprise de l’entretien avec le médecin. Dr - Monsieur Vermont, vous ne pensez pas que c’est à cause du bitume, à cause de votre métier que vous avez un cancer du poumon ? Père - C’est parce que je fume. Les autres médecins, c’est ce qu’ils disent. Dr - A mon avis pas seulement. Vous avez respiré des vapeurs toxiques toute votre vie. Vous avez fait une demande de reconnaissance de maladie professionnelle ? Père - ???? Dr à fille - Madame ? Fille - C’est la première fois qu’un médecin nous en parle. Dr - Je pense qu’il faudrait le faire. Père en se levant - Couvreur étanchéiste, c’était un bon travail ça.. Fille - Oui papa, c’était un beau travail. Père - Il nous a fait vivre. Fille - Oui. Le Colloque des militaires La présentatrice par Céline, l’amiral Tica par Pierre, la Générale par Danielle et le quartier-maître par Jean-Marc Première réaction de participant par Patrick et 2eme réaction par Dominique Plus des figurants Présentatrice - Bienvenue à notre colloque, les RH bienveillantes au service du bonheur. Applaudissements des participants. Présentatrice - Le nom n’est pas de moi ! Nous allons donc parler de comment être au service du bonheur des salariés dans le travail pour qu’ils soient au service de l’entreprise. Notre colloque est d’ailleurs d’une grande actualité puisque, grâce à la loi Macron, les contrats de travail avec nos salariés vont bientôt pouvoir changer de nature pour devenir des contrats de gré-àgré et être ainsi libérés des lourdeur du code du travail. Nous avons sollicité trois intervenants de haute qualité : l’amiral Tica, le Général Lambert et le Quartier-maître Dominique pour leur approche managériale tout à fait impressionnante. Amiral. Amiral - Amiral Tica. Je vais vous relater une expérience, assez innovante je dois dire, que nous avons faite sur nos sous-marins nucléaires. Evidemment, une mission de trois mois dans un sous marin nucléaire où tout peut arriver à tout moment, constitue quasiment un laboratoire d’expérimentation pour réfléchir sur les conditions de la disponibilité totale dont vous rêvez aussi pour vos salariés. Alors voilà nous nous sommes posés la question simple : qu’est ce qui fait obstacle à la disponibilité totale de nos sous mariniers pendant leurs trois mois de mission. Et bien mesdames et messieurs, le service de psychologie nous a donné la réponse : la peur. Eh oui, la peur. Chez ces hommes courageux sélectionnés pour leur solidité psychologique, la peur… La peur d’être trompés par leur épouse restée seule à terre pendant ces trois longs mois. Et cette peur mesdames et messieurs, se scénarise dans la possibilité de la rencontre fortuite à un moment de détresse, d’un homme qui viendrait secourir leur femme et ce dans un univers intime. Je veux parler de la panne de la machine à laver ou de la fuite d’eau et de l’arrivée de ce superman occasionnel : le plombier. Mesdames et messieurs, nous avons trouvé la parade à l’installation de cette peur. Général, à vous. Général - Eh oui, nous avons créé un service inter-armes de dépannage des armées. L’équivalent du service de santé des armées mais pour la maison. La femme restée au foyer doit appeler le SDA qui vient immédiatement dépanner madame sans crainte d’adultère. N’est ce pas premier maître ? Premier maître - Affirmatif mon Général. Depuis la mise en place du SDA, le moral des sous mariniers est au beau fixe. Applaudissements des participants. Présentatrice - Bien, nous allons nous répartir en ateliers pour approfondir cette idée nouvelle. Comment assurer le bonheur et la quiétude de nos salariés pour obtenir des salariés vraiment disponibles. Participante en sortant -Nous, nous avons un service de livraison de fleurs pour les maris retenus au travail … ou les femmes bien-sur. Participante en sortant - Nous allons mettre en place une crèche sans limitation de durée pour les salariés qui doivent terminer tard. Rythmes de travail et rythmes de vie : la coupure Par Antoine avec marionnette par Magalie, Sandy, Michèle Antoine - Quand je me suis réveillé, James Bond sortait la tête de l'eau. "Chouette, je me suis dit, pour une fois je vais voir la fin du film". La veille, j'avais raté la moitié d'Indiana Jones, le jour d'avant celle de je-ne-sais-plus-quel film à l'eau de rose. Le noir de la salle, le moelleux du fauteuil mes yeux se fermaient tout seuls. J'étais maître d'hôtel dans une grande chaîne de restaurant en banlieue sud, j'habitais en banlieue nord, une heure et demi de transport entre les deux. Alors pendant ma coupure, fin de service à 15h, reprise à 19h, pas d'autre choix que d'aller au cinéma. "Pourquoi tu viens pas me voir au foot mercredi après-midi puisque tu travailles pas, papa?" "Désolé mon gars, pas le temps de rentrer" Parti à dix heures du matin, rentré à trois heures la nuit d'après. Je dormais quand mes enfants partaient, ils dormaient quand je rentrais. Je passais mes soirées, mes week-ends au resto, mes après-midis au ciné. Je n'ai pas vu mon fils jouer au foot, pas aidé ma fille à faire ses devoirs. J'ai perdu peu à peu mes enfants, ma famille mais, ce jour-là, j'ai vu James Bond sortir la tête de l'eau. Rythmes de travail et rythmes de vie : le journal (Scène de forum) Chef par Jean-Paul , Sonia par Oré, Asmahan, Laura, Bénédicte, Christel, Marie-Agnès, Marion, Nadia, Nathalie, Sophie Ecole par Marie Thérèse, Fille par Delphine et Grand-mère par Danielle (muet) Tableau 1 Nadia - Sonia, envoie moi le fichier corrigé de l'interview de Champlin. Sonia - C'est parti ! Oh merde ! La photo de Pedro est toute pixellisée ! Asmahan, où est celle au bon format ? Asmahan - J'en sais rien, moi, je t'ai tout donné hier ! Nathalie - Je t'envoie la version fushia. Jean-Paul (le chef) - Tout sauf fushia on avait dit. Marie-Agnès - Ca bug sur la 4. Christel - Envoie la turquoise alors! Sophie - Laura, ramène-toi, je crois qu'il faut qu'on change de titre... Laura - J’arriiiiiive ! Bénédicte - Faut qu'on se magne les gars, faut vraiment qu'on se magne ! Marion - On n'aura jamais fini à temps... Jean-Paul (le chef) - Qu'est-ce que j'entends ? Eh les cocos, on en a vu d'autres! C'est pas une petite charrette qui va nous décourager! Un journal, c'est comme de l'escalade... Si on est bien attachés les uns aux autres et qu'on suit le premier de cordée, on arrive tout en haut ! On va y arriver les cocos ! On est une team, on va se défoncer, et on va le finir à temps ce putain de numéro ! Sonia - Laura, j'ai toujours pas eu la fin de ton article ! (Ils accélèrent... machine silencieuse.) Sonia - Et c'est parti !!! Envoyé à l'imprimerie ! Tous - Ouaaaais ! (ils s'applaudissent) JP le chef : Je vous l'avais dit, c'était pas si compliqué! Tu vois Marie, c'est comme au kite-surf, faut pas avoir peur d'aller contre le vent! On a bien pris la vague les cocos! Je suis fier de vous! Asmahan - On va boire un verre pour fêter ça ! Nathalie - Carrément ! Bénédicte - On se retrouve chez Nono ? Nadia - Ben oui ! Comme d'habitude ! Laura - Tous chez Nono!!! Marion - Ca va Sonia ? Sonia - Ça va. Allez-y, je vous rejoins. Laura (chantonne) - Tous chez Nono, on va fêter le nouveau numéro! Christel - Et après, on sort en boîte! Laura (chantonne) - On va danser jusqu'au bout de la nuit... (ils partent, chantant et riant) Sonia - Bonsoir, pourriez-vous m'envoyer une ambulance s'il-vous-plaît... Je viens de perdre les eaux. (Elle raccroche) Eh merde. Je pourrai pas être à la réunion demain. Passage infirmiers avec brancard Tableau 2 : Sophie - Elle est passionnante cette interview ! Asmahan - Oui bah va falloir la couper de moitié ! Sonia - Faut que ce soit fait pour 15h30 ! Christel - C'est quoi encore ce titre ?!!! Laura - J'arriiiiive! Le téléphone sonne. Ecole - Oui, bonjour Madame Sebiane, Léa est malade, elle a 39 de fièvre... Encore un cas de grippe je suppose. C'est l'hécatombe à l'école en ce moment! Vous pourriez venir la chercher ? Sonia - Euh... oui... je vais voir... je vous rappelle... (elle raccroche) Asmahan - Un souci ? Sonia - Euh... non... juste un problème de... de fuite d'eau... Asmahan - Tant mieux parce que le boss a besoin de toi en urgence. Il t'attend au deuxième. Sonia - J'arrive tout de suite... j'appelle juste le plombier et j'arrive... Asmahan - Traîne pas trop... Tu sais comme ça l'énerve quand la vie privée interfère avec le boulot. Sonia - J'arrive, je te dis. (Elle sort. Elle prend le téléphone et, très discrètement…) Allo maman ? Passage de la grand-mère avec poussette. Tableau 3 : Sonia (très discrète, au téléphone) - Ça va ma puce ? Fille - J'ai mal à la tête... Mais Mamie elle m'a fait un lait chaud avec du miel et elle a dit que ça irait mieux. Sonia - Je te promets de rentrer tôt ce soir. Je vais bientôt partir. Fille - T'as déjà dit ça hier Sonia - Oui, je sais, mais hier j'avais une réunion très très très importante. Fille - T'as toujours des réunions très très très importantes. Sonia - Non, pas toujours, tu vois ce soir je rentre tôt. Allez, repose toi. Quand je rentre je te raconterai toutes les histoires que tu veux. On pourra lire Chien bleu si tu veux. Fille - C'est vrai ? Promis juré ? Sonia - Promis juré. (elle raccroche) Nadia - Sonia, il y a un souci sur la mise en page de l'article de José... Il est furieux. Sonia - Vois avec Annabelle, moi je... (moue de Charlotte) Non, t'inquiète, j'arrive. Jean-Paul (le chef) - Eh les cocos, Pedro nous lâche pour le shooting du Louvre. Réunion d'urgence à 19h30 ce soir. Passage de la gamine trainant son édredon Tableau 4 Sonia est aux toilettes. Sort son téléphone. Sonia - Poussinette, je vais rentrer plus tard ce soir... J'ai une réunion très très très importante qui a été rajoutée. Fille - … Sonia - Je suis désolée ma puce. Fille - De toutes façons Mamie elle m'a déjà lu Chien bleu. (silence) Sonia - Je t'aime, ma puce. Fille - ... Sonia raccroche et assise sur les toilettes, se met à pleurer. Puis se reprend, se lève, se remaquille. Sort des toilettes. Sonia (faussement pleine d'entrain) - J'arrive !!! Le non travail : la lettre par Myriam, avec marionnette par Perrine et Jorge Myriam - Salut les copains, Je touche le fond du trou du travail. Ce foutu travail. Celui qui fait que tu es quelqu'un en société, celui qui te fait bouffer, celui qui te permet d'avoir un toit au-dessus de la tête. Celui avec lequel tu peux répondre sans problème à la plus violente des questions quand t'en n'as pas : "Tu fais quoi dans la vie ?". J'aimerais un jour avoir la force de répondre comme Pierre : "du tricot et de l'équitation". Pour leur clouer le bec à ces blancs becs de CDI bien au chaud. Mon "chômage" est tout neuf de 10 jours. Les cauchemars et les questions tourbillonnent en continue, sans pause, c'est incontrôlable : et si je n'arrive pas à payer mon loyer ? Et si je dois retourner chez papa et maman ? Et si je refuse trop souvent d'aller boire un verre avec les copains ? Est-ce que ce sera encore mes copains ? Et si je me suis éloignée de mon "métier" est-ce que j'aurais un jour la chance de le "repratiquer" ? Et si ça se trouve, je suis dans un sale engrenage et je serais chômeuse toute ma vie ? Et puis je pense à Pépé, qui dort pas en ce moment. Parce que sa petite-fille n'a pas de travail. Alors je le rassure en lui disant que je suis pas seule, qu'il y en à 3 millions, 6 millions, et même encore plus... Mais ça suffit pas. Et mon petit frère qui s'inquiète, parce que je lui ai promis que pour ses 10 ans on irait en Amazonie voir les animaux. Et que là... ça paraît compromis. Et ce petit mec, qui m'accompagne dans mes doutes et mes moments de grande faiblesse. Lui, il a trop de travail, et je ne sais même plus accueillir tout ça. Mon cerveau décroche parce que moi aussi j'aimerais bien avoir des collègues relous, être épuisée en rentrant le soir. J'aimerais râler quand le réveil sonne. Râler, râler, râler pour se sentir un peu vivre. Et me dire enfin : c'est cool de bosser. Tout ça pour dire que je ne serai pas là ce week-end à NAJE, parce que le travail me fait violence, parce que là maintenant, je ne me sens légitime d'aucun métier, d'aucun travail, d'aucune activité. Pour l'instant, j'ai besoin d'aller prendre l'air. J'ai besoin de me dire que la vie peut être jolie et que le travail c'est pas tout. Je vous embrasse tous bien fort. Le non travail : deux se croisent avec forum minute 1 par Clara et 2 par Mayalou 1 - Tu sais que j’ai changé de job ? Et toi t’as trouvé ? 2 - Ben 1 - T’es toujours au chômage. Ma pauvre ! Le non travail : deux autres avec forum minute 3 par Nathalie et 4 par Yasmine 3 - T’as l’air en forme ? C’est vrai que tu dors le matin toi ! 4 - Je cherche à monter mon projet… 3 - Tant mieux, tant mieux. Le non travail : ailleurs, deux avec des sacs de courses 5 par Andrée et 6 par Noëlla 5 - Mais pourquoi tu fais tes courses à 21h30 alors que t’as toute la journée pour les faire ? 6 - Si on fait ses courses dans la journée, c’est clair qu’on est chômeur pour tous ceux qu‘on croise. Au bout d’un moment, j’ai plus supporté ces regards. Le non travail : ailleurs, deux autres 7 par Odile et 8 par Martine 7 - Et toi tu fais quoi dans la vie ? 8 - Ben … Rien. Le non travail : le coach (2 personnages) avec forum minute Dominique le coach (B) et Fatima la coachée (A) A - Tu peux pas savoir comment c’est dur à vivre, les gens ils te dévalorisent. Tout ça, ça travaille trop l’esprit. J’y pense tout le temps, je crois que je suis pas bien. B - Je te comprends mais tu rumines, il faut pas ruminer. Tu rumines trop, C’est pas bon pour toi. Mais je te comprends tu sais, je te comprends. Il faut que t’aies du courage quoi, il faut foncer, il faut foncer, il faut foncer quoi. C’est pour t’aider que je te dis ça. Je te comprends j’te comprend, mais arrêtes de ruminer, tu dis toujours la même chose. A - Je suis un peu désespérée. B - Il faut pas. Il faut pas. Ca il faut pas, le cafard il faut pas. Il faut se lever, faut prendre sa douche, faut s’habiller. Et puis allez hop tout de suite il faut regarder sur l’ordinateur, faut faire des curriculum vitae. Tu vois il faut quoi, il faut vraiment. A - Mais j’ai fait ça pendant deux ans B - En même temps, c’est pas normal que tu trouves pas. Comment ça se fait que tu trouves pas. Je comprends pas, enfin je comprends mais… Des fois je me dis : c’est bizarre, comment ça se fait qu’elle trouve pas. Faudrait que tu travailles quand même au moins un petit peu quoi. Et puis, ça prend du temps de désespérer. Tu te dis : j’arrête les mauvaises idées, j’arrête. A la limite tu prends n’importe quoi pour te remettre dans la dynamique quoi… Le non travail : la vieille (Récit avec marionnette) Par Claudine et à la marionnette Delphine, Jeanne, Pauline, Sophie pour la marionnette Claudine - 10 ans de chômage et maintenant la retraite. Quand le bus est bondé, y’a des jeunes qui disent que j’ai pas à encombrer, que je ferai mieux de rester chez moi. Pour moi c’est cauchemardesque. Je suis femme encore, militante, bénévole, avec des projets à la pelle. Je suis une enfant de l'aprèsguerre. Quand j'étais à l'école, je pensais que quand je serai adulte le monde connaîtrait la paix. On en a encore du pain sur la planche. C'est pas le travail qui manque. Le non travail : sans date de retour (Récit avec marionnette) Par Cathy et en marionnette Marie-Agnès, Marion, Nadia, Laura J'étais programmatrice informatique, super bien payé. J'étais sur l'ordinateur toute la journée, les soirs, la nuit. "Jeanne, il faut impérativement que ce soit fini mardi", "Jeanne, c'est très bien mais il faut changer la police de titre", "Jeanne, le client veut du bleu azur plutôt que du cyan, je sais que tu dînes avec ta mère mais c'est urgent". Alors je changeais, je changeais, et plus je changeais plus il fallait changer, ça n'avait jamais de fin. Finir à temps pour le client absolument, continuer, continuer, il fallait finir. Et puis recommencer un nouveau projet... Le stress, la fatigue - j'en venais à taper sur mon clavier n'importe quoi, au hasard. Je pétais les plombs, enchaînais les dépressions. J'avais perdu le sens de ma vie. Un jour, j'ai vendu mon ordinateur et je suis parti en voyage, loin, sans date de retour. J'ai commencé par la jungle. Je ne suis toujours pas rentré et je ne rentrerai pas. La chaîne de montage Copain 1 par Delphine, copain 2 par Céline, ouvrier A par Sylvie, ouvrier B par Jean-Marc, Ouvrier D par Oré, chef qualité par Patrick, Ouvrière 4 par Marysa, conteur par Asmahan, ouvrier 2 par Driss, petit chef par Arlette, référente 1 par Renée, référente 2 par Myriam , grand chef 3 par Catherine, ouvrier 3 par Pierre, Maintenance par Flore, Chef ampoule par Brigitte, Marcel par Jules et ouvrier 5 par Bakary , ouvrier 7 par Nathalie, les 2 syndicalistes par Antoine qui y croit et Michel celui qui doute Chercheur par Pauline Tournier, référente nouvellement élue par Delphine Ils arrivent au travail pendant que la chaîne s’installe. Copain 1 - Qu’est ce que tu fais là toi ? Copain 2 - J’embauche. L’agence d’intérim m’a proposé un contrat d’intérim chez vous. Copain 1 - Sur la chaîne ? Copain 2 - Oui, et dans ton unité. Copain 1 - T’as dit oui ? T’es fou, c’est les postes les plus durs. Sur la chaîne. Ouvrier A - Eh oh, tu peux pas descendre comme ça sur moi. Comment tu veux que je pose ma pièce si t’es là. Ouvrier B - J’y arrive pas, je suis dans le bouillon. Ouvrier A - T’appelles mais tu bouffe pas mon espace de travail. Ouvrier d’avant lui D - Je te pose la première Ouvrier B - Merci Ouvrier D - J’avais quelques secondes d’avance Ouvrier B - Merci Ouvrier D - J’ai pas le choix, si tu y arrives pas, c’est toute l’équipe qui coule. À l’autre bout de la chaîne. Chef qualité - Ça ne va pas. Vous laissez passer trop de défauts. C’est pas du travail sérieux, ça ! Ouvrière 4 - C’est pas vrai, je suis une bonne opératrice. Chef qualité - Vous avez laissé passer beaucoup trop de micro-rayures sur les modèles blancs ces derniers mois. Ouvrière 4 - Je demande à voir. Chef qualité - C’est tout vu, j’ai les chiffres… CONTEUR - On est sur une chaîne de montage dans une grande entreprise très moderne. Il y a là plusieurs milliers d’ouvriers. Dans un autre endroit de la chaîne. Ouvrier 2 - Chef, j’en peux plus : c’est trop dur, les caoutchoucs. Ils rentrent pas, on se fait trop mal à forcer comme des fous. 300 par jour, ça tue les bras. Ils disent qu’il suffit d’appuyer avec les doigts, mais c’est pas vrai, il faut les rentrer en force. J’ai une tendinite là. Je peux aller à l’infirmerie ? Chef - Écoute, si tu peux pas faire ce travail, faut pas le faire ! Les Turcs le font sans râler, eux. Ouvrier 2 - Mais là j’ai mal au poignet. C’est une tendinite. Chef - Écoute, reste à ton poste, demain je tacherai de te faire tourner. CONTEUR - Sur cette chaîne de montage, depuis trois ans, des chercheurs à la demande de la direction et avec l’accord des quatre syndicats de la boîte, testent un dispositif pour que la parole des salariés soit entendue. Il y a des référents travail qui ont un peu de temps pour aller voir leurs collègues sur leur poste et listent avec eux les problèmes à résoudre. Ensuite, tous les problèmes sont examinés en réunion avec les responsables. Au milieu : réunion des chefs et référents, mais les autres dont on parle sont dans la chaîne arrêtée et peuvent prendre la parole. Référente 1 - Les caoutchoucs, ça va pas. Ils ne peuvent pas les monter en une minute 40 comme c’est prévu et ils se font pas mal parce que c’est mal calibré, c’est trop dur. Premier chef - : Oui, c’est dur, ça va pas. Référente 1 - Il y a un collègue qui a fini en incapacité de travail. Grand chef 3 - Il y aurait quoi comme solution ? Ouvrier 3, depuis son poste - C’est pas normal qu’on s’y abime comme ça Au moins, si c’était lubrifié. Grand chef 3 - On va demander aux ingénieurs de plancher là-dessus en urgence. Référente 2 - Ah le contrôle qualité en fin de chaîne. On a constaté que l’ampoule du projecteur est grillée. Ouvrière 4 depuis son poste - Voilà, c’est pour ça qu’on voit pas les micro-rayures ! Et après vous nous engueulez. Grand chef 3 - pourquoi vous n’avez pas demandé de changer l’ampoule ? Ouvrière 4 - On l’a demandé il y a 6 mois. Grand chef 3 - Dites, la maintenance, il faut changer la lampe. Maintenance - Ah oui, on sait, on n’a pas le temps. On a d’autres urgences. On voit un chef passer avec une ampoule - Je la change moi-même il n’y a plus de problème voilà. Chercheurs - Non. Le problème est qu’elles ont demandé le changement d’ampoule et qu’elles n’ont pas été écoutées, depuis six mois. Le problème à traiter, il est là. Si vous changez l’ampoule comme ça, alors que ce n’est pas votre fonction, vous occultez le problème. Chef ampoule - Y’a une lampe, y’a plus de problème. CONTEUR - Plusieurs mois plus tard. Marcel - Ah, bonjour, tu reviens, ça va, ta tendinite ? Ouvrier 3 - Ça va, oui, trois semaines, ça m’a duré. Côté fric, ça a tiré, parce que les indemnités maladie, c’est pas grand chose. Ça va : j’ai une nouvelle mission pour deux mois. Marcel passe un produit sur un caoutchouc. Ouvrier 3 - C’est quoi ? C’est du lubrifiant ? Marcel - C’est du propylène de glycol. Avec ça, ça rentre. Regarde ! Ouvrier 5 arrive avec un seau - Le propylène de glycol, on est nombreux à pas le supporter pas. Ca, c’est du savon. On le prend dans les toilettes. Avec ça, ça va. Ouvrier 3 - Ah, c’est pour ça la sciure ? Marcel - Oui, c’est pour ça. Sinon, on se casse la gueule parce que ça glisse trop. Ouvrier 3 - Ça fait un peu dégueulasse l’atelier. Marcel - Même qu’on se fait engueuler par les chefs, soi disant qu’on est des porcs d’avoir un atelier aussi sale. Qu’est-ce qu’on y peut ? Sur un autre poste. Référente 1 arrive avec son carnet - Alors, c’est quoi le problème ? Chef 2 - Dites, j’ai besoin de quelqu’un là-bas. Vous laissez vos discussions et vous y allez. Je sais très bien ce qui va et ce qui ne va pas dans mon atelier. Je n’ai pas besoin de vous pour me le dire. Référente 1 - Je fais mon travail de référente. J’ai une heure par mois pour faire ce travail avec les collègues. Chef 2 - Reprenez le travail avant d’avoir des problèmes. La référente s’en va. Ouvrier 7 à référente sur le chemin - T’es une jaune, toi ! T’es du côté des patrons, tu travailles pour eux. Référente 1 - Pour qu’on puisse faire du bon boulot et qu’on puisse en être fiers, qu’on s’abime pas la santé au travail, qu’on soit écoutés quand on parle, comme des gens de métier. Tu t’en fous de tout ça, toi ? Ouvrier 7 - N’empêche que tu rends service au patron, pour qu’on produise mieux et plus vite. La référente va à son poste Ouvrier 6 aux autres de la chaîne - Le chef a renvoyé Lydia sur la chaîne. Il ne veut pas qu’elle sorte de la chaine pour parler avec nous. - Ils s’étaient engagés. - Ils tiennent pas leurs engagements - Dans ces conditions, on débraye. - Oui on débraye ! CONTEUR - Leur débrayage, ça a failli remettre en cause l’expérience. Parce qu’il y a des responsables qui la soutiennent et voudraient la voir généralisée à toute l’usine et d’autres qui sont pas du tout d’accord. Ils ont obtenu que les référents puissent faire leur travail. Désormais, les référents sont élus. Groupe d’ouvriers au centre avec le référent élu qui parle. Référent élu - Merci. Maintenant je suis votre référent du travail, jusqu’aux prochaines élections. Mais c’est pas tout ça. Maintenant il va falloir bien m’expliquer les problèmes quand je passe vous voir, et les solutions que vous voyez. On a recensé 1000 problèmes depuis le début. 600 sont traités mais il en reste encore 400 sans compter les nouveaux qui arriveront. Ouvrier 7 en repartant - C’est bien beau tout ça, les élections et tout, les problèmes du travail qui avancent… Mais ça change rien aux cadences ; ça les fait pas diminuer, ça nous donne pas plus de salaire et ça fait pas embaucher. On a toujours 70% d’intérims dans notre atelier. Le truc de trois postes pour un ouvrier, ça marche pas, on tourne pas sur les postes. Deux syndicalistes. 1 - Pourquoi on ne présente pas des gens de notre syndicat pour être représentants du travail ? 2 - Y'a confusion des genres. Ce truc là, ça va remplacer l’action syndicale. 1 - Sauf si on se saisit de ce truc là pour parler plus du travail avec les ouvriers. 2 - On le fait ça. 1 - Pas vraiment, pas assez, pas bien. 2 - Et la lutte pour l’augmentation des salaires, les embauches… C’est fini, on abandonne ? Le rapport de force, on abandonne ? 1 - Je te signale qu’ils ont fait grève pour défendre les référents qui pouvaient pas faire leur boulot. T’en déclenche si facilement que ça toi des grèves toi? 2 - Idéologiquement, ce truc, c’est épineux. Scène des vacataires Oré par Nadia, Amélie par Christelle , Caro par Bénédicte, Dany par Laura, Elise par Sandy, Isabelle par Jeanne. La prof par Sophie, Les étudiants en figuration Deux se retrouvent au milieu. Amélie - Ça va ? Oré - Oui j’ai trouvé un texte génial à donner aux étudiants, je suis en train de réorganiser tout mon TD autour de ce texte. Amélie - Ah oui, tu me le passeras. Ah tiens moi j’ai fait un TD super la semaine dernière, si tu veux je te donne le plan ? Oré - T’as l’air fatiguée. Amélie - J’ai fait le service de nuit à l’hôtel. Oré - Ma pauvre. Amélie - Faut bien que je paie le loyer Trois autres arrivent (Caro, Dany et Elise) Toutes - Bonjour, bonjour, bonjour. Caro - J’ai pas bien compris. Je suis venue parce que de toute manière je venais à la fac. Vous voulez faire quoi ? Amélie - T’es vacataire toi ? Caro - Oui Amélie - T’as eu ton contrat de travail ? T’es payée ? Caro - Non. Rien depuis la rentrée de septembre` Oré - Et bien voilà, on veut obtenir nos contrats, nos salaires. Dany - On veut ne pas avoir 50 élèves en TD parce qu’on peut pas faire du bon travail en Travaux Dirigés avec 50 étudiants. Oré - Pôle Emploi vient de me signifier qu’ils ne me verseraient plus rien tant que je n’aurai pas fourni mes feuilles de paie. J'ai beau leur expliquer que l'université ne m'a pas payée et que je n'ai donc pas de bulletin de salaire, que je n'ai même pas de contrat de travail, ils veulent rien savoir. Amélie - Moi j’en suis à faire des gardiennages d’hôtel la nuit pour payer mon loyer. On en est toutes à faire des trucs comme ça. Comment on peut préparer nos TD correctement dans ces conditions, et avancer notre thèse ? Caro - Mais on risque d’avoir des ennuis ? Moi j’ai pas envie que le Président refuse de me signer l’autorisation de soutenir ma thèse si je fais grève ? Dany - Si on est 200… Caro - T’as raison ! On ne peut pas ne rien faire. D’autres arrivent ou passent. Oré l’appelle - Tu nous rejoins Gisèle ? Gisèle - Je suis solidaire avec votre mouvement, mais je n’ai pas le même statut, moi, c’est pas la même histoire… Oré - Y’a pas que le statut. Y’a aussi les cinquante étudiants que tu as en TD, les locaux pourris même pas chauffés, les fenêtres qu’on peut pas ouvrir sinon elles tombent, les photocopies en nombre limité, la salle d'informatique fermée parce que 1/3 des postes ont été supprimés. Hortense est hélée par Dany. Dany - Hortense tu nous rejoins ? Hortense - Ca fait 20 ans que je suis vacataire. Rien n’a jamais marché. Ça sert à rien. Isabelle passe. Elise à Isabelle - On veut mobiliser un maximum de vacataires et exiger du président de l'université qu’il nous donne notre contrat de travail et nos salaires. Isabelle: Il vaudrait mieux aller au tribunal ! Elise - Mais on ira au Tribunal, mais collectivement. Dany - Vous vous rendez compte, ca fait 4 ans que le Président de l’université s’octroie une prime qu’il ne peut toucher que s’il fait 42 h de cours par an, il ne fait aucun cours mais la prime il se la verse. 26800 euros exactement, alors qu’il gagne déjà 91 000 euros par an. Oré - Il faut trouver les vacataires. Il y en a des centaines et des centaines. Caro - 2.600 on m’a dit si on compte les profs, les techniciens et les personnels administratifs et sociaux. Elles se dispersent. Oré et Caro Caro - On fait comment pour les trouver les vacataires ? Oré - Regarde le tableau d’affichage des salles, quand c’est noté inconnu à la place du nom du prof, c’est que c’est des vacataires. Caro - Ah oui c’est vrai moi c’est toujours noté inconnu quand c’est moi qui fais le cours. Oré - Donc il y a des inconnus dans les salles 87 120 167 158 195 … Amélie et Dany Dany - Ah là il y a un casier collectif avec trois noms dessus, en métal, sans serrure, c’est forcément des vacataires. Amélie - Trois tracts. Dany - Là, 4 dans le même casier. Dans le cours avec Caro et Oré Prof qui était déjà là en silence et commence à causer aux étudiants (public) Aujourd’hui nous travaillons sur l’évolution de la notion de travail. Les deux premières arrivent (Oré et Caro) Caro - Excusez nous de déranger le cours. Oré - On suppose que tu es vacataire puisqu’il y a inconnu à la place de ton nom Prof - Oui (discrètement et gênée) Caro - On peut parler ? On ne prendra que 5 minutes. Oré - Peut être que vous êtes au courant du fait qu’il y a une mobilisation des vacataires de l’université. Caro - Depuis septembre, on est mobilisées en collectif des vacataires et précaires pour exiger de meilleures conditions de travail et d’abord simplement pour avoir un contrat de travail et toucher nos salaires. On fait une AG ce soir. Oré - Il faut savoir que ça fait 5 mois qu’on enseigne sans contrat et sans salaires. On nous a promis tout ça pour octobre, décembre puis pour février et maintenant on entend parler de juin pour la paie. Etudiant 1 - Pourquoi vous donnez les cours si vous n’êtes pas payées ? Caro - Parce que c’est notre métier. On a étudié pour ça. On adore ça. Prof - Moi j’adore vous faire cours. Caro - Et puis c’est obligé de donner des cours si on veut obtenir une validation au CNU pour avoir le droit d’enseigner une fois qu’on aura notre thèse. Oré - On commence à être nombreux et nombreuses dans le mouvement. On est en grève depuis 3 semaines. Caro - On appelle les vacataires, les enseignants titulaires et les étudiants à la solidarité avec notre mouvement. Oré - On vous invite à l’AG ce soir. On voudrait faire deux journées d’actions avec les étudiants. Etudiants - On y sera. On y sera. À ce soir. Merci. Les ombres rentrent à la maison avec leur ombre papier Tous rentrent en scène avec leur ombre. Tous ne parlent pas. Parlent : Michèle, Muriel, Sandy, Odile, Flore, Marion, Marie-Agnès, Dominique, Francine, Noëlla, Benoît, Mostafa, Martine, Claudine, Magalie, Andrée, Bénédicte. MICHELE - Allez cours, cours, cours! Rien de tel qu'un jogging pour évacuer le stress! MURIEL - Waoh la journée de ouf! Tu peux être fier de toi vieille branche! ça a été un sacré succès! On sort fêter ça! SANDY - Non, tu sais, je crois qu'on va pas aller à la soirée, je suis crevé... Oui, je dis ça tous les soirs mais vraiment je peux pas... ODILE - Bon. Je crois qu'on a fait les bons choix. Je regarde juste si la commanditaire a répondu à mon mail… FLORE - C'est beau le béton, non ?! Je pensais pas que lisser une dalle comme ça, dans une cave, ça pouvait être autant l'éclate... Bon, mais arrête de rêvasser, la journée est pas finie. Je te rappelle qu'on a une demi-heure pour les devoirs, après faut faire couler le bain, et puis t'as même pas encore fait à manger. MARION chante - Il est beau il est frais le beaujojo le beaujolais! Oui, je sais, t'as des coupures partout, le dos en compote, les cuisses en béton mais c'était génial, non?... Chanter, boire, se coucher tard, se lever tôt, les copains 24 heures sur 24, boire, boire... Les copains, les courbatures et la biture!!! Expérience de ouf. MARIE-AGNES - Arrête de pleurer. N'y pense plus. C'est qu'un travail après tout. (un temps) Allez, on sort tracter ! Ouais, il fait froid mais avec toute la colère que tu emmagasines au boulot, ça va te faire du bien! DOMINIQUE - Courage, fais tes étirements... Tu vas quand même pas laisser ton boulot te détruire le dos sans rien faire! FRANCINE - Oui, je sais que c'était dur. Je sais que t'en peux plus. Mais tu fais du bon boulot tu sais. Franchement, j'en connais pas beaucoup des assistantes sociales qui accueillent les gens autour d'une table ronde et d'une théière fumante! T'as eu du mal à l'obtenir mais tu l'as eu ta table ronde! Elle était drôlement touchée Mme Malau. ODILE - oh et puis merde! Lâche l'ordi, t'as les yeux qui se touchent! Et si on faisait de la contrebasse ?... NOELLA (rentre en dansant) - C'était la folie ! La fiesta qu'on a fait avec les copines après le service ! Dans les bus qu'on nettoie, dans le noir, la musique à fond, et tout ça à la barbe du patron ! Waow, ça fait un bien fou. (à l'ombre) Non ? MARTINE - T'as vu comment je l'ai retournée, la pancarte ! Ils en ont fait une tête les clients quand ils ont vu qu'on n'avait pas le droit de mettre plus de deux morceaux de mozzarella par pizza ! Je l'ai bien eu le patron avec ses règles à la con ! Eh ouais, c'est des radins, maintenant tout le monde le sait ! MOSTAFA - Back office, back office… Vos attestations sont dans le back office, vous n’êtes pas toute seule madame ! Conasse !!!! Quatre mois qu’on attend nos indemnités de chômage. Alors aujourd’hui, t’as bien pleuré et t’as crié ta faim à PôleEmploi. Même la directrice s’en est mêlée. Bravo. T’as gagné. Ils vont enfin traiter notre dossier. BENOIT - Non mais t'as vu sa tête à l'autre de Bouygues ! Il a jamais fait un plâtre de sa vie, il se ramène avec son costard et il voudrait nous expliquer notre métier (imite) "maintenant, il n'y a plus de maçons, il n'y a plus de plâtriers, il n'y a que des Bouygues"... Ah je lui ai bien rabattu son caquet à celui-là! "Si il n'y a plus de plâtriers, qui c'est qui va faire le plâtre", je lui ai dit ! T'as vu ça ?!!! CLAUDINE - T'es drôle toi, t'as jamais eu autant d'énergie en rentrant du boulot ! Elle a eu une super idée Nadia de proposer qu'on mette toutes nos primes en commun, sans que la direction le sache... On est une vraie équipe maintenant au magasin ! T'avais pas la même tête, hein, le mois dernier ! MAGALIE - (au téléphone) "Oui, bonsoir madame Galvan, je sais qu'il est presque 22h, mais je vous appelle pour vous dire que je sors tout juste de réunion et que ça s'est très bien passé... voilà!". Bon, cette fois-ci, je crois qu'elle va arrêter de nous appeler au bureau à 8h tous les matins pour vérifier qu'on n'a pas un quart d'heure de retard ! Et sinon, on recommencera tous les soirs de réunion ! (Fou rire avec l'ombre) PHRASES DU FINAL 1 La solution n’est pas le chronomètre LA SOLUTION C’EST PAS LE CHRONOMETRE 2 Ce n’est pas la chaîne qui dicte sa loi 3 J’aime mon métier 4 Depuis 30 ans que je travaille dessus, je connais le boulot 5 Intermittent, polyvalent, flexible ensemble en lutte 6 D’expérience, ne prenez pas d’extension de garantie CA SERT A RIEN L’EXTENSION DE GARANTIE 7 Je suis bonne à mon poste 9 Mais je ne me laisserai pas faire 10 Je ne veux pas être infirmière, je veux rester aide-soignante, JE M’EN FOUS DE LA PROMOTION 11 Les vrais soignants, c’est nous 12 La Zoé c’est nous qui l’avons monté 13 Ce n’est pas nous qui sommes fragiles 14 Résistons aux objectifs, les objectifs, les objectifs, les objectifs, ils ont que ce mot à la bouche 15 Usons de notre droit de retrait 16 J’ai pas envie de tomber de la haut, J’AI PAS ENVIE DE TOMBER DE L’ECHELLE MOI 17 Couvreur étanchéiste, ÇA C’EST UN METIER 18 Ce jour-là j’ai vu James Bond sortir la tête de l’eau 19 On s’en fout de finir à temps votre journal 20 Je n’irai pas à votre réunion très très importante 21 Le travail c’est pas tout PLEURE PAS C’EST QU’UN TRAVAIL 22 On ira au tribunal collectivement 23 J’ai vendu mon ordinateur 24 Je suis une bonne opératrice 25 On débraye 26 Ce n’est pas normal qu’on s’y abime comme ça 27 Pour qu’on puisse faire du bon boulot 28 Quand y’a plus la parole, le corps continue à parler 29 On n’abandonne pas le rapport de force 30 On ne s’abime pas la santé au travail La Cie NAJE (Nous n’Abandonnerons Jamais l’Espoir) Association loi 1901 déclarée le 14 mars 1997 à Antony N°SIRET : 412 376 477 000 11 Code APE : 9001Z N° de formation professionnelle : 11 92 0976 392 Adresse postale : 16 rue des Coquelicots 92160 Antony Courriel : [email protected] Site web : www.compagnie-naje.fr Tel. : 01 46 74 51 69