PACIFIC 231
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PACIFIC 231 D’Arthur HONEGGER (1892-1955) I) Repères biographiques : Né au Havre en 1892, mort à Paris en 1955. Né de parents zurichois, HONEGGER reçut de son origine alémanique l’empreinte protestante, mais devint assez rapidement français de cœur et d’adoption. Il acheva sa formation à Paris pour le violon, les classes d’écriture et la composition avec WIDOR et la direction d’orchestre avec Vincent d’INDY. C’est au Conservatoire de Paris qu’il rencontre MILHAUD qui sera son ami toute sa vie. Peu après, il adhèrera au Groupe des Six, tout en restant en partie étranger aux principes esthétiques du mouvement car très indépendant d’esprit. Qualifié de néo-romantique, ennemi de tout système (aussi bien de SCHOENBERG que de toute autre école), sa réputation est vite établie avec Le Roi David (oratorio) en 1921 et Pacific 231 (poème symphonique) en 1923. Vouant un culte à BACH et à BEETHOVEN, cultivant volontiers les grandes formes classiques, son écriture, d’un lyrisme vigoureux, adopte des polyphonies complexes et tend vers un dramatisme (qu’on retrouve particulièrement dans ses oratorios comme Jeanne au Bûcher). Œuvres essentielles a) musique instrumentale a1. musique de chambre - 2 sonates pour piano et violon - 3 quatuors à cordes a2. musique symphonique - Pastorale d’été (1920) - Trois mouvements symphoniques Pacific 231 (1923) Rugby (1928) Mouvement n°3 (1932-33) - Cinq symphonies - Concerto da camera (1948) b) musique vocale - Mélodies sur des textes d’Apollinaire, Fort, Laforgue, Giraudoux… - Le Roi David (1921), oratorio biblique - Jeanne au Bûcher (1935), oratorio dramatique - La Danse des Morts (1938), oratorio sur un texte de Claudel c) musique théâtrale - 13 ballets dont Les Noces d’Amour et Psyché (1930), Les Mariés de la Tour Eiffel (1921), œuvre collective sur un texte de Cocteau - 37 musiques de film II) Pacific 231 (1923-24)) : A. Circonstances de composition et de diffusion : L’œuvre a longtemps été la plus célèbre de HONEGGER, bien qu’elle soit « mineure » dans sa production symphonique. Le titre, donné après coup, fait allusion à une locomotive à vapeur, la « Pacific » qui fit la renommée des chemins de fer français. Dans ce poème symphonique, s’est-il tracé un programme ? Il s’en est, assez maladroitement, défendu en déclarant : « J’ai toujours aimé passionnément les locomotives ; pour moi, ce sont des êtres vivants et je les aime comme d’autres aiment les femmes ou les chevaux… Ce que j’ai cherché…, ce n’est pas l’imitation des bruits de la locomotive, mais la traduction d’une impression visuelle et d’une jouissance physique par une construction musicale. Elle part de la contemplation objective : la tranquille respiration de la machine au repos, l’effort du démarrage, l’accroissement progressif de la vitesse pour aboutir à l’état lyrique, au pathétique du train de 300 tonnes lancé en pleine nuit à 120 à l’heure… J’ai voulu donner le sentiment d’une accélération mathématique du rythme, tandis que le mouvement lui-même se ralentit » La partition fut composée en 1923 et créée à Paris en 1924 et connut un succès considérable. HONEGGER – Pacific 231 – 1/9 Pacific 231 est une œuvre très personnelle de HONEGGER, grand amateur d’automobiles et de chemins de fer. Bien qu’elle s’inscrive, de façon générale, dans la tendance anti-expressive des arts du début XXe. siècle, il ne l’a jamais considérée comme dénuée d’émotion ou d’expression. La fascination pour les machines et la mécanique se propageait alors autant dans les arts graphiques que dans la musique et dans le cinéma. En 1922 sortit le film magistral d’Abel GANCE, La Roue, pour lequel HONEGGER écrivit sa première musique de film. La thématique du film est sans aucun doute à l’origine du projet Pacific 231. L’œuvre s’inscrit dans la tradition du poème symphonique en un mouvement. La technologie (ou le sport comme dans Rugby) prise comme contenu de l’œuvre rappelle les conceptions développées par les Futuristes italiens, PRATELLA et RUSSOLO (L’Art des Bruits, 1913), auxquels les usines, les trains, les avions et les machines modernes servirent de modèles mais dont les résultats musicaux, pour la plupart constitués de montages de bruits, se révélèrent assez décevants. L’empreinte des Futuristes demeura importante ainsi qu’en témoignent les œuvres de ANTHEIL, Airplane Sonata et Mechanisms, donnés à Paris en 1923 et Ballet Mécanique (1925, composé pour un film abstrait de Fernand LEGER). ANTHEIL d’ailleurs affirma avoir inspiré HONEGGER : « Mechanisms et le Ballet Mecanique suscitèrent d’autres œuvres leur rendant hommage. Honegger suivit cette ligne avec Pacific 231, ainsi que Prokofiev avec son ballet Pas d’Acier, chef d’œuvre mécanique pour grand orchestre symphonique et morceau tout à fait extraordinaire. » HONEGGER rectifia plus tard : « C’est en effet ce qu’on a dit, et pourtant là n’était pas mon dessein. Il ne faut jamais faire au public une peine inutile… Tant et tant de critiques ont si minutieusement décrit la ruée de ma locomotive à travers les grands espaces qu’il serait inhumain de les détromper !.. Musicalement, j’ai composé une sorte de grand choral varié, sillonné de contrepoint, ce qui donne une impression de Jean-Sébastien BACH. » L’influence décisive de Pacific 231 ne se limita pas à PROKOFIEV, alors installé à Paris (2de Symphonie en 1924/25 et ballet Pas d’Acier en 1925/26), mais s’étendit à MOSSOLOV (poème symphonique et « musique de machine » Les Fonderies d’Acier en 1927) et à des musiciens comme Max BRAND (opéra Machinist Hopkins de 1929). L’ambition de transposer artistiquement l’ère des machines résonna d’un large écho. Ainsi la musique mécaniste fut-elle valorisée, à une certaine période, en Union Soviétique en concordance avec la glorification de l’industrialisation et HONEGGER fut célébré dans le monde entier, en URSS comme aux USA. B. Analyse de l’œuvre - C1. Considérations générales L’orchestre utilisé par HONEGGER est important en taille : Cordes : quintette à cordes d’orchestre : violons 1, violons 2, altos, violoncelles, contrebasses Bois par 3 : avec notamment flûte piccolo, cor anglais, clarinette basse, contrebasson Cuivres : 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, 1 tuba Percussion : caisse claire, cymbales, grosse caisse, tam-tam (cf. gong) HONEGGER – Pacific 231 – 2/9 C2. Les thèmes principaux Premier thème Présenté tout d’abord aux cors, puis avec plus de vivacité aux trompettes : - courbe en arche : ligne mélodique ascendante puis descendante - symétrie rythmique (la 2nde mesure est le rétrograde de la 1ère) - mélodiquement fondé sur un arpège de sol, rythmiquement par des noires - deux phrases ouvertes (sans sentiment de fin) - nuance forte - présentation variée aux trompettes avec des valeurs plus brèves (sentiment d’accélération) Second thème Annoncé par les cors sur une note répétée, il est présenté par les bassons : - thème long et sinueux, classique par sa carrure (2 x 4mes) - caractérisé par ses notes répétées au début et ses rythmes d’anapeste (deux croches + noire) insistants - rythmiquement fondé sur des croches - nuance forte - soutenu par le martèlement de la caisse claire - écriture contrapuntique ensuite en fugato Après un tutti en crescendo, les bassons, les cors et les trompettes, puis la plupart des instruments reprennent le second thème en fugato. La caisse claire souligne le rythme des notes répétées. Troisième thème Présenté aux flûtes et aux hautbois : - fondé aussi sur un arpège comme le 1er thème - coloration chromatique (sol # vers fa x puis vers sol #) des notes importantes - plus martial avec ses rythmes de trochée (croche pointée + double croche) - accompagnement plus sec en staccato (notes détachées et courtes) - sera repris en augmentation pour le passage choral Quatrième thème Annoncé par des trilles aux flûtes, il est présenté tout d’abord aux clarinettes et au cor anglais : - rythmiquement en deux parties : mesure en triolets de croches + mesure en trochées - couleur modale : ni majeur, ni mineur, mais en mode de Mi transposé Mi – fa – sol – la – si do – ré – mi Caractérisé par son demi-ton au départ - mélodiquement en arche (comme le 1er thème) : ascendant puis descendant mais en lignes conjointes (les notes se suivent) - fait l’objet de nombreuses imitations entre les instruments HONEGGER – Pacific 231 – 3/9 C3. Structure générale PACIFIC 231 Direction Charles Dutoit REPERES 0’ à 26’ TEMPI 60 à la blanche, 2/2 MESURES mes 1 à 11 27’ à 1’32 80 à la blanche, 2/2 mes 12 à 53 80 à la blanche pointée, 6/4 152 à la noire (73) 2/2 puis 4/4 mes 54 Thème 1, cors Machine accélère et prend de la vitesse mes 67 Thème 1, trompettes 2’09 à 2’54 mes 80, mes 97 Thème 2, bassons Machine lancée 2’54 à 3’08 mes 109 Thème 3, flûtes et hautbois mes 118 Thème 4, cor anglais et clarinettes Machine à sa pleine vitesse mes 132 Thème 1, trompettes mes 140 Thème 4, flûtes Nouvel effort de la machine mes 153 Thème 2, cors et bois 1’32 à 1’49 1’49 à 2’09 3’08 à 3’31 144 à la noire 3’31 à 3’45 3’45 à 4’09 138 à la noire (147) 4’09 à 4’36 EVENEMENTS Introduction Machine est à l'arrêt, puissance contenue, jets de vapeur Mise en mouvement Machine se met progressivement en mouvement 4’36 à 5’36 132 à la noire (169) mes 169 Thème 3, cors puis trompettes Ivresse de la vitesse 5’36 à 6’12 126 à la noire mes 204 Thème 1, ralentissement Coup de frein brutal, ralenti et arrêt de la machine CARACTERISTIQUES - trémolos sourds - rondes dominantes - accélération rythmique par changements de valeurs (blanches/triolets de blanches/noires/triolets de noires/croches/triolets de croches) - noires dominantes au final - annoncé par des balancements d’accords - les cors se partagent le thème - accompagnement chromatique aux bois - noires dominent - modification du thème (cf. développement) - partagé aux trompettes - polyrythmie et modes de jeux variés - croches dominent - thème annoncé aux cors - traité ensuite en fugato - rythmes réguliers - croches dominent - accompagnement scandé - valeurs plus longues au thème - double-croches aux cordes - thème en notes conjointes - rythme régulier - repris en imitations - modes de jeux aux cordes - triolets de croches dominent - superposition th.4 et th.1 - th.1 plus heurté - coups de caisse claire - polyrythmie - répété en diminuendo - mesures plus paisibles - rythme haletant avec triolets et croches aux bassons et pizzicati aux cordes - crescendo de tout l’orchestre - rappel de motifs du th.4 - double-croches vont progressivement dominer - climax de la pièce : CHORAL - th.3 en valeurs longues - superposition et citation de tous les thèmes de la pièce - complexité rythmique - processus rythmique du début inversé - forte jusqu’au bout - fin sur unisson d’orchestre HONEGGER – Pacific 231 – 4/9 C4. Eléments du langage musical de HONEGGER Au carrefour des univers français et germanique, HONEGGER a défendu avec détermination son indépendance dans le monde musical du XXe. siècle. Il a su se démarquer du passé tout en s’y rattachant de même qu’il a ouvert l’avenir pour certains sans les contraindre à être des disciples : - hétérogénéité des matériaux : superposition de tonalités et de rythmes différents - importance des ostinatos, nombreux et rythmiques et des pédales harmoniques - superpositions des thèmes dans une écriture toute empreinte de contrepoint (fugato et imitations) - effets sonores d’une grande richesse par la grande variété des modes de jeux, notamment aux cordes - clarté du discours : thèmes facilement repérables et mémorisables - classicisme de la forme, où la variation domine, comme élément de développement des idées - orchestre brillant, utilisé pleinement dans une tradition française et une influence russe. HONEGGER résumera son style dans un texte écrit pour sa 2nde Symphonie : « Mes préoccupations générales sont restées les mêmes que celles qui présidèrent à la composition de toutes mes œuvres symphoniques : 1) Rigueur de la forme 2) Recherche de thèmes suffisamment dessinés pour attirer l’attention de l’auditeur et lui permettre de suivre le développement de l’histoire 3) Je n’ai cherché aucun programme, aucune donnée littéraire ou philosophique. Si cette œuvre exprime ou fait ressentir des émotions, c’est qu’elles se sont présentées tout naturellement, puisque je n’exprime ma pensée qu’en musique, et peut-être sans en être absolument conscient. » HONEGGER – Pacific 231 – 5/9 INDEX A CONSULTER ACCELERANDO/RITENUTO : termes italiens déterminant des modifications de tempo. Accelerando signifie « en accélérant », ritenuto signifie « en retenant » ACCELERATION MATHEMATIQUE : procédé de composition musicale utilisant la diminution comme principe d’accélération. Chaque valeur rythmique est ensuite divisée pour donner un sentiment d’accélération : ex : deux rondes, deux blanches, deux noires, deux croches, deux double-croches… AUGMENTATION/DIMINUTION : prolongation uniforme des durées constitutives d’une mélodie/diminution uniformes des durées constitutives d’une mélodie : un canon est une forme musicale polyphonique ainsi qu'un procédé compositionnel basé sur l'imitation, dans lequel une idée musicale — le thème — s'énonce et se développe d'une voix à une autre, de sorte que les différentes voix interprètent la même ligne mélodique, mais de manière différée : ce décalage produit une superposition de mélodies, c'est-à-dire, un contrepoint. Les différentes parties d'un canon peuvent se succéder à l'unisson — cas le plus répandu —, mais également à d'autres intervalles — octave ou quinte, principalement. CHORAL : un choral (au pluriel, chorals) est un genre musical liturgique, d'origine luthérienne, créé au XVIe. siècle dans le cadre de la réforme protestante, pour être chanté en chœur par les fidèles pendant le culte. La particularité est que les paroles sont uniquement en langue vernaculaire (le plus souvent en allemand). Il est destiné à être chanté et retenu par les fidèles. Il est organisé en phrases régulières et en rythmes simples. CHORAL FIGURE ET VARIE : le choral figuré est généralement un choral comprenant de nombreux éléments de contrepoint en imitations ; le choral varié se présente comme une fantaisie-choral, à rapprocher d’autres formes musicales. A l'orgue, le choral varié se présente comme un commentaire du chant du choral par l'assemblée. La mélodie du choral est exposée et accompagnée en un contrepoint dont les éléments rythmiques, harmoniques et mélodiques illustrent de façon souvent figurée et poétique les thèmes liturgiques et les intentions religieuses exprimées par le texte du choral. Le thème du choral se prête aussi à être traité en sujet de fugue, en fantaisie ou en partita : la mélodie, exposée en harmonisation simple, fait ensuite l'objet de variations (une par strophe de texte). Le chef-d'œuvre du choral varié est les texte). Le chef-d'œuvre du choral varié est les Variations Canoniques sur Vom Himmel hoch de J. S. Bach. CHROMATISME : ligne mélodique qui procède par demi-tons, de façon ascendante ou descendante. Le demi-ton est le plus petit intervalle utilisé dans la musique occidentale (jusqu’au XXe. siècle). Sur un piano, c’est la distance entre une touche et sa voisine la plus proche. CLIMAX : point culminant de l’œuvre (souvent dans la nuance forte) CONTREPOINT : en musique, le contrepoint rigoureux (souvent appelé contrepoint) est une discipline d'écriture musicale qui a pour objet la superposition organisée de lignes mélodiques. Le contrepoint mené dans les règles de l'art n'implique nullement l'identité ou la parenté des thèmes dont les mélodies se superposent. Il suffit que soient respectées des règles concernant les consonances et les dissonances, la modulation, les fausses relations, etc. C'était d'ailleurs la marque des plus grands maîtres, comme BACH et HAENDEL, que de savoir produire de telles combinaisons de thèmes distincts. Le contrepoint trouve son apogée dans l’écriture polyphonique de l’époque baroque (XVIIe – 1ère partie XVIIIe. Siècle) Cependant, le plus souvent, l'imitation était un procédé très utilisé. Étant donné un thème musical (mélodique), les imitations qui en étaient tirées pouvaient faire appel aux procédés suivants : - augmentation de la durée des notes - diminution de la durée des notes - thème inversé (mouvement contraire) — les intervalles montants sont remplacés par des intervalles descendants et inversement - mouvement rétrograde — comme en lisant la partition en partant de la fin - ainsi que toutes leurs combinaisons possibles, qui peuvent rendre un thème méconnaissable. COR ANGLAIS/BASSON : instruments à vent de la famille des bois, et de la sous-famille des anches double. La famille comprend dans l’ordre (de l’aigu au grave) : hautbois, cor anglais, basson, contrebasson. Le cor anglais est donc un hautbois alto. CRESCENDO/DECRESCENDO : termes italiens déterminant des modifications de nuances. Crescendo signifie « en augmentant », decrescendo signifie « en diminuant ». CANON HONEGGER – Pacific 231 – 6/9 DUREES DE NOTES ET DES SILENCES : représentation traditionnelle (chaque valeur de notes ou de silences représentant le double de la suivante) FORMULES RYTHMIQUES : certaines associations rythmiques, par leur fréquence, ont reçu des noms issus des modes rythmiques anciens. Les plus courantes sont : - iambe : brève + longue (ex : double-croche suivie d’une croche pointée) - trochée : longue + brève (ex : croche pointée + double-croche) - anapeste : deux brèves + longue (ex : deux double-croches suivies d’une croche) - dactyle : une longue + deux brèves (ex : une croche suivi de deux double-croches) FUGATO : fugato est un terme italien utilisé par extension pour dire « en style fugué », ou « (un peu) comme une fugue ».Traditionnellement, il indique qu'un passage d'un morceau (et non le morceau tout entier) est traité dans le style de la fugue, mais sans posséder toute la rigueur de celle-ci. FUTURISME : le futurisme est un mouvement littéraire et artistique européen du début du XXe. siècle (de 1904 à 1920), qui rejette la tradition esthétique et exalte le monde moderne, en particulier la civilisation urbaine, la machine, la vitesse. C’est un courant essentiellement présent en Italie et en Russie. GROUPE DES SIX : c’est au critique Henri COLLET qu’est dû le baptême du Groupe des Six, dans un article de 1920 intitulé « les Cinq Russes, les Six Français et r SATIE. » A l’instar de leurs aînés russes, les six jeunes compositeurs français entendent réagir contre les deux esthétiques dominantes de leur temps : l’impressionnisme et le post-wagnérisme, sous le parrainage d’Erik SATIE et de Jean COCTEAU. Les Six ne collaboreront que très épisodiquement, à part dans leur ballet les Mariés de la Tour Eiffel (mais sans DUREY). Le groupe était composé de : - HONEGGER Arthur (1892-1955) : le plus important par l’originalité et la puissance de l’écriture - AURIC Georges (1899-1983) : compositeur célèbre pour ses musiques de film (Orphée, La Grande Vadrouille…) - DUREY Louis (1888-1979) : plus attaché à la musique de chambre (trois quatuors) - MILHAUD Darius (1892-1974) : compositeur prolifique (opéras, quatuors à cordes, symphonies, concertos), célèbre pour ses musiques de ballet (Le Bœuf sur le Toit, La Création du Monde) et par l’influence brésilienne dans sa musique (Saudades do Bresil, Scaramouche) - POULENC Francis (1899-1963) : compositeur remarquable par sa production vocale (Dialogue des Carmélites, Mélodies, Stabat Mater), concertante et pianistique (Mouvements Perpétuels) - TAILLEFERRE Germaine (1892-1983) : la plus discrète, a illustré tous les genres musicaux (ballet Le Marchand d’Oiseaux, concerto Concertino pour harpe et orchestre, vocal Cantate de Narcisse…) HARMONIQUES : en musique, un son harmonique est un composant à part entière d’un son musical. Il s’agit d’une fréquence multiple de la fréquence fondamentale. Concrètement, sur les instruments à cordes, il est possible d’obtenir des sons harmoniques dont le timbre sera différent, un peu « flûté », dans un registre aigu. IMITATION : reproduction dans une ou plusieurs parties d'un dessin musical proposé précédemment par une autre partie. L'imitation est la base du style contrapontique, du canon et de la fugue. Elle est dite simple, lorsqu'une seule partie imite le thème, double, lorsque deux parties en imitent deux autres, exacte, lorsque le fragment imité est reproduit sans changements, libre ou irrégulière, lorsqu'elle diffère du thème en un détail quelconque de sa structure mélodique. MODES DE JEUX : techniques propres à chaque instrument permettant de modifier le son. Très nombreuses chez les cordes frottées, les principales sont : - pizzicato(i) : action de pincer les cordes avec les doigts (cf. harpe) - sourdine : artifice qui permet d’assourdir le son - spiccato : action de faire rebondir l’archet sur chaque note (légèreté) - arco : jeu avec l’archet (s’oppose au pizzicato) - au talon / à la pointe : jeu avec la partie la plus près de la main de l’archet (puissance) / l’inverse HONEGGER – Pacific 231 – 7/9 - sul ponticello : jeu sur le chevalet (sons très doux) sul tasto : jeu sur la touche de l’instrument col legno : jeu avec le bois de l’archet retourné (effet percussif) trémolos : tremblements obtenus par un va-et-vient rapide de l’archet OSTINATO : l’ostinato est un procédé de composition musicale consistant à répéter obstinément une formule rythmique, mélodique ou harmonique, accompagnant de manière immuable les différents éléments thématiques d’une pièce. Un ostinato rythmique est à la base du Boléro de RAVEL Ce procédé compositionnel est l'un des éléments de base du courant minimaliste américain ; il est utilisé par Philip GLASS dans Glassworks. PACIFIC 231 : locomotive à vapeur qui fit la renommée mondiale de la France en matière de chemins de fer à grande vitesse. 231 signalait dans l’ordre : 2 petites roues latérales avant, 3 grandes roues centrales, 1 roue arrière. « J’ai toujours aimé passionnément les locomotives ; pour moi, ce sont des êtres vivants et je les aime comme d’autres aiment les femmes ou les chevaux » déclarait Honegger. PEDALE : élément rythmique, mélodique ou harmonique, répété ou tenu obstinément, quel que soit le contexte. POEME SYMPHONIQUE : écrit pour orchestre, généralement en une seule partie, le poème symphonique est le genre le plus accompli de la musique à programme, c’est-à-dire une composition inspirée d’une idée extramusicale (dramatique, littéraire, philosophique ou descriptive), suggérée dans le titre ou en préface. Il met toutes les ressources du timbre au service de l’évocation, de l’illustration, de la méditation ou de la description. Sa caractéristique musicale majeure reste sa grande liberté structurelle, instrumentale et harmonique, qui permet aux compositeurs d’utiliser les couleurs les plus rutilantes et les accords et les rythmes les plus originaux. Parmi les plus belles réussites, on peut relever : - LISZT Franz : Mazeppa (1851) d’après Victor HUGO - MOUSSORGSKY Modeste : Une Nuit sur le Mont Chauve (1867) - BORODINE Alexandre : Dans les Steppes de l’Asie Centrale (1880) - STRAUSS Richard : Ainsi parlait Zarathoustra (1896) - DUKAS Paul : L’Apprenti Sorcier (1897) d’après GOETHE - HONEGGER Arthur : Pacific 231 (1923) - Les plus grands compositeurs du XXe. siècle s’y sont essayé, d’une manière particulière à chacun : DEBUSSY, SATIE, ROUSSEL, RAVEL, STRAVINSKY, HONEGGER, le champion de la polytonalité demeurant à jamais MILHAUD chez qui elle devient un principe habituel d’écriture. POLYRYTHMIE : la polyrythmie consiste à jouer simultanément deux ou plusieurs parties rythmiques de portées différentes dont les débits de notes ne sont pas multiples l’un de l’autre. Chaque partie rythmique est appelée pattern quand il s’agit d’un rythme qui se répète. - Exemple de rythme “trois sur quatre” : Partie 1 en 4/4 : o × × × o × × × o × × × Partie 2 en 3/4 : o × × o × × o × × o × × POLYTONALITE : caractère d'une composition musicale admettant différentes tonalités superposées. Les compositeurs usant de ce procédé ne l’ayant pas fait pour renouveler le système tonal classique mais pour développer davantage encore les recherches contrapuntiques et harmoniques propres au premier XXe. siècle. THEME : en musique, un thème est une ligne mélodique ou rythmique, ou bien une séquence harmonique reprise tout au long d'une œuvre (opéra, film, symphonie, etc.). Il structure l'œuvre musicale tout en subissant des reprises, des variations et modulations. TREMOLOS : terme italien signifiant tremblements. Effet de tremblement obtenu par la répétition rapide d'un son, essentiellement aux cordes, aux timbales et au piano. TROMPETTE/COR/TUBA : instruments à vent de la famille des cuivres, à embouchure. La famille comprend dans l’ordre (de l’aigu au grave) : trompette, cor, trombone, tuba. TUTTI : terme italien signifiant « tous ». Indique un passage où tous les instruments sont sollicités. Les o symbolisent chacun une noire et les × un soupir (un silence de la durée d’une noire) UNISSON : le fait que tous les instruments (ou plusieurs) jouent la même note (ou à une octave de distance) : grande puissance expressive (cf. début de la 5ème Symphonie de BEETHOVEN) Liens pour écouter ou voir l’œuvre : PACIFIC 231 http://www.youtube.com/watch?v=rKRCJhLU7rs (version de Jean MITRY) http://www.youtube.com/watch?v=xp80cHYVh2Q (version orchestre) HONEGGER – Pacific 231 – 8/9 ŒUVRES SATELLITES - ADAMS John : Short Ride in a fast machine (Two Fanfares) http://www.youtube.com/watch?v=Pi4A9bPDvTc - LIGETI György : Etude pour piano “Désordre” http://www.youtube.com/watch?v=qj9QlWltv8s - LIGETI György : Etude pour piano “L’Escalier du Diable” http://www.youtube.com/watch?v=0OxiM9ramHM - BACH Jean-Sébastien : Prélude n°2 (1er livre du Clavier Bien Tempéré) http://www.youtube.com/watch?v=JcFHuUJE0mU - SCHAEFFER Pierre : Bilude (sur le Prélude n°2 de BACH) http://www.youtube.com/watch?v=D_3OsELv7D8&playnext=1&list=PL6BCBBD3BD32BE177&feature= results_video - RILEY Terry : In C http://www.youtube.com/watch?v=OjR4QYsa9nE - REICH Steve : Six Pianos http://www.youtube.com/watch?v=edKE10Yz_zs - XENAKIS Iannis : Metastasis http://www.youtube.com/watch?v=SZazYFchLRI - PROKOFIEV Sergueï : Sonate n°7 pour piano, 3ème mouvement http://www.youtube.com/watch?v=erLLwj8jP3Y - PROKOFIEV Sergueï : Le Pas d’Acier http://www.youtube.com/watch?v=M09G0M2tdd4 - RAVEL Maurice : Sonate pour violon et piano, 3ème mouvement « Perpetuum Mobile » http://www.youtube.com/watch?v=-6FX8iIg3C4 (version originale pour violon) http://www.youtube.com/watch?v=d-2Ol6ppvic (version contrebasse) - RAVEL Maurice : Concerto en Sol pour piano et orchestre, 3ème mouvement http://www.youtube.com/watch?v=bq1ueeJucA8 (à 17’54) - RAVEL Maurice : Toccata, Tombeau de Couperin http://www.youtube.com/watch?v=qg1EGcGZV2I - POULENC Francis : « En chemin de fer » (Promenades) http://www.youtube.com/watch?v=wxDRUba5Udw - POULENC Francis : « En auto » (Promenades) http://www.youtube.com/watch?v=VfX37D6uIXE (à 2’20) - BARTOK Bela : Quatuor n°4, 5ème mouvement http://www.youtube.com/watch?v=hKr93F6c2L0 (version originale) http://www.youtube.com/watch?v=4KVCzNJodqQ (version percussions) - BARTOK Bela : Musique pour cordes, percussion et célesta, 4ème mouvement http://www.youtube.com/watch?v=ppsV4HoCVqc - MOSSOLOV Alexander : Les Fonderies d’Acier http://www.youtube.com/watch?v=-jmcMyhMRxU - ANTHEIL George : Ballet Mécanique http://www.youtube.com/watch?v=V_oH32-M_jA - SATIE Erik : Parade http://www.youtube.com/watch?v=Yqqmga6Weh8&noredirect=1 - ALAIN Jehan : Litanies pour orgue http://www.youtube.com/watch?v=8jyNogNXMUc - DUTILLEUX Henri : Sonate pour piano, 3ème mouvement « Choral et Variations » http://www.youtube.com/watch?v=kX_nJ1jKOTk - RUSSOLO Luigi : Macchina Tipografica http://www.youtube.com/watch?v=VcHJySm7ZO0 - RUSSOLO Luigi : Veglio di Una Città http://www.youtube.com/watch?v=pSuqDExaopg - BOULEZ Pierre : La Symphonie Mechanique http://www.youtube.com/watch?v=7hAIN2ueeIo - VARESE Edgar : Déserts http://www.youtube.com/watch?v=d39-92i1NDk - VARESE Edgar : Poème Electronique http://www.youtube.com/watch?v=0YlBmx3VulY - SCHAEFFER Pierre : Etude aux Chemins de Fer http://www.youtube.com/watch?v=N9pOq8u6-bA HONEGGER – Pacific 231 – 9/9