La réunion du Comité International Olympique à Londres.

Transcription

La réunion du Comité International Olympique à Londres.
LA RÉUNION
du Comité International Olympique
A LONDRES
Le Comité International Olympique s’est réuni à Londres les 20,
21 et 22 juin 1904. C’était sa quatrième session, la première ayant
eu lieu à Athènes en 1896, la deuxième au Havre en 1897, le
troisième à Paris en 1901. Selon l’usage, le patronage de cette
session devait être exercé par S. M. le roi d’Angleterre. Prié de
consentir à ce qu’il en fut ainsi, le roi avait daigné accéder avec
le plus gracieux empressement au désir que lui avait exprime le
président du Comité, ainsi qu’en témoigne la lettre suivante
parvenue à M. de Coubertin le 6 juin et signée de Lord Knollys.
Buckingham Palace
Sir
I am commanded by the king to acknowledge the receipt of
your letter and to inform your in reply that he has much pleasure
in complying with you request that His Majesty would consent
to become the patron of the meeting of the Comité International
Olympique. Thinking that you would wish to hear of the Kings
decision as soon as possible I telegraphed it to you this morning.
I have the honour to be
Sir
Your most obedient Servant.
Knollys.
Le Comité Anglais qui avait pris en mains l’organisation du
meeting se composait de Sir Howard Vincent, du Rév. R. S. de
Courcy Laffan et de M. C. Herbert, représentants de l’Angleterre
dans le Comité International auxquels s’étaient joints le comte
de Darnley, Lord Kinnaird, l’Honorable Herbert Gladstone M. P.,
Sir Lees Knowles M. P., M. C. B. Fry et le Dr W. G. Grace. Ces
messieurs n’avaient rien négligé pour rendre le séjour à Londres
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des membres du Comité International aussi intéressant et aussi
confortable que possible. Avaient répondu à la convocation du
président : M. E. Callot, le Comte Albert de Bertier de Sauvigny,
le Dr Gebhardt, le Comte Brunetta d’Usseaux, le colonel Balck,
le Comte Clarence de Rosen, le Baron F. W. de Tuyll, le Comte de
Baillet Latour, M. Miguel de Beistegui, le Comte de Wartensleben,
M. de Nordenfelt, chambellan de S. M. le roi de Suède et Norvège
accompagnait le colonel Balck et le comte de Rosen. Le baron de
Blonay et M. James Hyde avaient été retenus au dernier
moment. Le Comte Mercati, le Comte de Mejorada, le capitaine
Holbeck, le professeur Sloane et le Comte de Ribeaupierre
avaient fait parvenir leurs excuses. MM. Kemeny et Guth
représentant le Comité aux Jeux olympiques de Saint-Louis
n’avaient pu être présents.
Réception par le Lord Mayor
Le Lord Mayor de Londres avait mis à la disposition du Comité
International, pour y tenir les séances, le grand salon de Mansion
House. C’est là que le lundi matin 20 juin, il a tenu à recevoir luimême les membres du Comité et à leur souhaiter la bienvenue. Ce
même jour à 1 heure 1/2 le Lord Mayor et la Lady Mayoress ont
offert un « State-Luncheon » en l’honneur de leurs hôtes. Au
dessert, le président du Comité International a proposé la santé
du Lord Mayor et de la Lady Mayoress en exprimant au nom de
tous ses collègues présents et absents, la gratitude du Comité pour
l’hospitalité qui lui était offerte. Le Lord Mayor a répondu en
proposant la santé des membres du Comité et en formant des
vœux pour le succès de toutes leurs entreprises.
Le dîner des Fishmongers
La célèbre corporation des Fishmongers avait invité les membres
du Comité International à un dîner de 180 couverts qui a été servi
le lundi soir 20 Juin dans le splendide Hall de la Corporation
situé à l’entrée de London-Bridge. Le « prime warden » assisté
des membres de son conseil recevait ses invités dans les s alons
du premier étage d’où l’on a passé dans la salle du banquet qu’emplissait une immense table en fer à cheval entourant une autre
table centrale, La fameuse argenterie historique de la corporation
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scintillait au milieu des fleurs. Au centre le « prime warden »
présidait entouré du président et des membres du Comité. Vers
la fin du dîner a commencé un très beau concert vocal et instrumental dont les morceaux ont alterné avec les toasts. Le toast au
Roi a été suivi du chant du God Save the King repris en chœur par
tous les assistants. Après un discours fort applaudi de Sir Howard
Vincent, le « prime warden » a bu à la renaissance olympique et
à la cause de la paix entre les nations dont elle est un facteur
bienfaisant. Il a terminé en proposant un triple hurrah en l’honneur du Comité. Le baron Pierre de Coubertin, après avoir
remercié, a indiqué que le rôle du sport était d’autant plus important à une époque de pacifisme démocratique qu’il donne satisfaction au besoin de bataille et aux instincts de rivalités nationales
qui sont en nous. Les convives en se séparant ont reçu suivant un
vieil usage chacun une boîte de bonbons à rapporter a leur famille.
Visites à Lord’s et à la Toxophilite Society
Deux séances avaient été tenues à Mansion House lé matin et
l’après-midi du lundi. Une troisième séance eut lieu le mardi
matin 21. L’après-midi de ce jour, le Marylebone Cricket Club
avait prié les membres du Comité d’assister à un match joué
contre une équipe Sud-Africaine sur le Lord’s Cricket Ground. Sur
invitation du Colonel Walrond, ils se rendirent ensuite à la
Toxophilite Society, l’une des plus importantes associations de tir
à l’arc du Royaume-Uni dont le terrain se trouve situé dans
Regent’s Park. Sous la verandah qui entoure le gracieux pavillon
de la société, un goûter avait été préparé à leur intention.
Dîner à la Chambre des Communes
Le soir, Sir Howard Vincent offrait un grand dîner à la Chambre
des Communes auquel le premier ministre, qui avait accepté d’y
prendre part. se trouva malheureusement empêché de se rendre.
Avant le dîner les membres du Comité visitèrent dans le plus
grand détail le palais de Westminster et dans la soirée ils assistérent à la séance de la Chambre, après avoir pris le café sur la
terrasse qui s’étend le long du palais au bord de la Tamise. Leur
fut remise en souvenir la très intéressante petite brochure com-
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posée par Sir Howard et intitulée « A companion to the Stranger’s
Gallery » guide ingénieux et complet à travers les complications
et les méandres des rouages parlementaires anglais.
Fixation de la IVe Olympiade
Le mercredi matin 22 juin le Comité a tenu sa quatrième et
dernière séance. Les séances, précédentes avaient été employées
à écouter le rapport présenté par le Comte Brunetta d’Usseaux au
nom du Comité d’initiative formé à Rome en vue d’obtenir que la
IVe olympiade fut célébrée dans cette ville — et aussi à discuter
les conditions dans lesquelles pourrait avoir lieu le congrès
Belge de 1905. Un échange de vues était aussi intervenu à propos
de l’emploi abusif qui tend à se repandre du terme de Jeux
Olympiques : l’accord s’était fait sur cette opinion qu’un tel abus
est regrettable et que les membres du Comité doivent employer
leurs efforts et leur influence pour empêcher autant que possible
que ce nom ne soit attribué à des manifestations sportives ne
présentant pas le caractère olympique ; M. de Coubertin ayant
d’autre part donné lecture de la lettre qu’il avait adressée au cours
de l’hiver à M. le Comte Mercati, le chargeant d’une mission
auprès de S. A. R. Monseigneur le prince royal de Grèce,
relativement au nom sous lequel seraient désignés ultérieurement,
les jeux d’Athènes, le Comité avait approuve cette démarche de
son président et l’avait engagé à la renouveler au besoin. Nous
indiquerons tout à l’heure les décisions prises par le Comité
concernant le congres de 1905. Quant à la fixation de la IVe
olympiade disons tout de suite qu’elle a eu lieu à l’unanimité des
votants, présents et absents. Apres son exposé le Comte Brunetta
d’Usseaux avait donné lecture du document suivant émanant de
la municipalité de Rome.
Roma 10 marzo 1904
Mi pregio comunicare alla S. V. E. che la Guinta comunale,
nella seduta del 27 febbraio u. s. in ordine alla domanda fatta
per avere il patronato del Comune di Roma per la formazione
di un Comitato generale nel quale sieno rappresentate tutte le
grandi Societa sportive d’Italia et che dovrebbe presiedere alla
preparazione della quarta gara dei Giuochi olimpici da tenersi in
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Roma nel 1908,
l’appoggio morale
geniale e feconda
Con
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è stata ben lieta di dichiarare di concedere
dell Amministrazione Comunale di Roma alla
iniziativa.
distinta stima.
Il sindaco : COLONNA.
Sur ces entrefaites le docteur Gebhardt, parlant tant en son nom
qu’en celui de ses collègues allemands, rappela qu’a Paris en 1900
il avait déjà été déposé une proposition tendant à ce que Berlin
fut choisi comme siège de la IVe olympiade et, déclara en conséquence renouveler cette proposition, certain qu’un pareil vote
serait accueilli avec enthousiasme en Allemagne. De la discussion
qui suivit il résulta qu’un grand nombre de membres du Comité
eussent été heureux de voter pour Berlin mais que, devant
considérer avant tout les intérêts de l’institution, Rome présentait,
pour cette fois et malgré le désavantage dune situation géographique moins centrale, de plus grandes chances de succès. Le
docteur Gebhardt, adhérant à cette manière de voir, déclara alors
qu’il retirait sa proposition. Le baron Pierre de Coubertin, président,
proposa aussitôt une motion de remerciements au docteur Gebhardt,
motion dont le texte fut acclamé et une seconde motion portant
que le Comité tiendrait sa prochaine séance à Berlin en 1906 ce
qui fut accepte à l’unanimité. Un vote solennel proclamant Rome
siège de la IVe olympiade clôtura la session.
Le Congrès de 1905
Avec l’autorisation de S. M. le roi des Belges, qui en est le
président d’honneur, le congrès international, primitivement
convoque pour 1903, avait été ajourné à 1905. Le Comité s’est
occupé d’en préparer la réunion et a délégué à cet effet le Comte
de Baillet-Latour pour prendre toutes les mesures utiles. Après
une longue discussion, le vote par pays a été reconnu impraticable
et le Comité a décide de s’en tenir autant que possible au règlement
adopté par le congres de Paris en 1894, règlement d’après lequel
les fédérations étaient admises à envoyer cinq représentants et
les sociétés isolées un ou deux selon le nombre de leurs membres,
les adhérents individuels étant admis mais sans pouvoir voter.
D’ailleurs l’importance de cette question se trouve réduite, les
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résolutions du congrès devant revêtir la forme de vœux et le
programme des questions à traiter s’étant trouvé considérablement
accru. Le Comité en effet a décidé de ne pas se restreindre aux
sujets purement techniques mais d’admettre tous ceux se référant
à l’éducation physique et à l’organisation des sports.
Déjeuner au Sports-Club
A l’issue de la dernière séance, le baron Pierre de Coubertin a
donné au Sports-Club un déjeuner auquel étaient invités tous les
membres du Comité International et du Comité Anglais. Après
avoir proposé la santé de S. M. le roi d’Angleterre et de tous les
souverains et chefs d’États dont les pays se trouvaient représentés, M. de Coubertin a exprimé à Sir Howard Vincent et au
Révérend de Courcy Laffan la vive reconnaissance dont chacun
se sentait animé envers eux pour le dévouement avec lequel ils
avaient organise la présente session, La médaille commémorative
du rétablissement des Jeux Olympiques a été remise ensuite à
Sir Howard Vincent, aux applaudissements de tous les assistants.
A l’Ambassade d’Italie
A trois heures, le baron Pierre de Coubertin, président du
Comité International, et le Comte Brunetta d’Usseaux se sont
rendus à l’ambassade d’Italie pour prier S. E. Monsieur le Commandeur Pansa d’informer S. M. le roi Victor-Emmanuel du
vote émis le matin même et de lui présenter les respectueux
hommages du Comité. L’ambassadeur s’est empressé, très gracieusement, de télégraphier à Sa Majesté et le télégramme suivant
a été reçu en réponse :
Baron Coubertin, Président Comité International Olympique,
Mansion House — Londres.
Le roi, mon auguste souverain, fort sensible à l’hommage
dont vous et vos collègues avez bien voulu être les interprètes,
en remercie vivement le Comité qui, en proclamant. Rome siège
quatrième Olympiade 1908, a donné à l’Italie un si efficace témoignage de cordiale sympathie.
Ministre Maison Royale,
P O N Z I O V AGLIA .
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La municipalité de Rome, prévenue de même, a répondu par la
communication suivante :
Ho ricevuto con piacere il telegramma cortese col quale la
S. V. Illma volle comunicarmi la deliberazione di cotesto comitato internazionale olimpico che designava Roma a sede delle
Olimpiadi del 1908 e La prego di gradire e far gradire agli
illustrissimi suoi colleghi del comitato stesso i ringraziamenti
sinceri di questa rappresentanza municipale.
Con distinta stima.
Il sindaco,
C OLONNA .
Ajoutons, tout de suite, que le prince Colonna, syndic de
Home, a accepté la présidence du comité d’organisation des Jeux
Olympiques de 1908, présidence qui avait été réservée jusqu’à ce
que le comité international eut fixé le lieu de la IVe olympiade.
Conférence du Colonel Balck
Le mercredi 22, à cinq heures du soir, le colonel Balck a fait
une très intéressante conférence sur les Jeux du Nord à la Society
of Arts. La séance était présidée par Lord Alverstone, lord
chief Justice d’Angleterre. La conférence était accompagnée
d’une très belle série de projections qui ont eu le plus vif succès
auprès du nombreux auditoire emplissant la salle. Après quelques paroles du baron Pierre de Coubertin, le lord chief Justice a
prononcé une allocution chaleureuse dans laquelle il a fait
l’éloge de l’athlétisme.
Visite à Windsor
S. M. le roi Edouard VII ayant eu la bonté d’inviter les membres du Comité à visiter le château de Windsor, ceux-ci s’y sont
rendus le jeudi matin 23 juin (ce jour était le dixième anniversaire du rétablissement des Jeux Olympiques proclamé, par le
congrès de Paris le samedi 23 juin 1894). La visite a eu lieu dans
la matinée sous la conduite de M. Miles, l’aimable inspecteur en
chef du château, et de Lord Normanby, chapelain de Windsor. Les appartements privés, fermés au public, avaient été
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spécialement, ouverts. A une heure Lord Kinnaird a offert un
luncheon au White Hart ; les membres du Comité ont été ensuite
conduits en voiture au Collège d’Eton, dont le Révérend Docteur
Warre, headmaster, leur a fait les honneurs; ils ont été invités
par lui à prendre le thé avant de rentrer à Londres.
Parade de la Garde
Le vendredi matin 24 juin, fête de Sa Majesté, avait lieu, à la
caserne des Horse Guards, la parade traditionnelle connue sous
le nom de Trooping of the Colours. Elle était présidée par
S. A. R. le prince de Galles. Le président du Comité avait été
invité par le chancelier de l’Echiquier à y assister de son jardin
qui donne sur Saint-James’s Park. Des places avaient été réservées aux membres du Comité dans les tribunes édifiées de
chaque côté de la loggia où se tenait S. M. la Reine.
Réceptions
Le même soir, le Révérend et Mrs de Courcy Laffan ont donné,
dans leur demeure de Saint-George’s Road, South Belgravia, une
réception en l’honneur des membres du Comité. Un orchestre,
dissimulé derrière un rideau de fleurs et de verdure, a joué pendant la fête à laquelle assistaient la Lady Mayoress et un très
grand nombre d’invités.
Le samedi matin 25 juin, Lord Newlands a donné un déjeuner
dans son bel hôtel de Grosvenor Place. Dans l’après-midi, Lord
Newlands qui est président du Coaching-Club et renommé pour
ses attelages, a conduit quelques-uns de ses hôtes dans son coach
au Ranelagh, le fameux club de sport situé aux portes de Londres. Les autres se sont rendus à Osterley Park pour la gardenparty de la comtesse de Jersey, à laquelle assistait S. A. R. le
prince Royal de Suède et Norwège. Le prince a pris part, quelques jours plus tard, à une réception donnée en son honneur par
le colonel Balck et le comte de Rosen.
Diverses autres invitations avaient été adressées aux membres
du Comité ; M. W.-H. Grenfell les avait notamment conviés à
venir à Taplow Court pour une excursion en bateau à vapeur sur
la Tamise; mais l’heure du départ ayant sonné pour tous, il fut
impossible de donner suite à ces aimables projets.
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Visite à S. A. R. le Prince de Galles
En l’absence du Roi qui se trouvait à Kiel, S. A. R. le prince
de Galles reçut le lundi matin 27 juin le baron Pierre de Coubertin, président du Comité, accompagné du colonel Balck et du
docteur Gebhardt. M. de Coubertin, après avoir exprimé la
reconnaissance du Comité pour le splendide accueil reçu à Londres, pria Son Altesse Royale d’accepter la médaille commémorative du rétablissement des Jeux Olympiques. Mgr le prince de
Galles se déclara heureux de posséder ce souvenir d’un « grand
événement » et causa longuement des choses du sport dont il se
montra admirablement informé.
Telle fut cette session de 1904 qui marquera dans les annales
du Comité International comme l’une des plus fécondes en heureux résultats et en souvenirs agréables et pour la parfaite
organisation de laquelle leurs collègues ne cesseront d’être profondément reconnaissants à Sir Howard Vincent, au Révérend,
de Courcy Laffan, à M. Herbert et aux membres du Comité
Anglais.
L’OLYMPIADE ROMAINE
Sous ce titre et sous la signature de M. de Coubertin, le Figaro
a publié ces jours-ci l’article suivant :
Au moment où s’inaugurait à Saint-Louis la troisième olympiade, le Comité international olympique s’est réuni à Londres pour
fixer le lieu de la quatrième. Quatre olympiades — douze ans, —
c’est de quoi faire sourire les anciens qui comptaient par siècles,
et de quoi nous intéresser, nous autres, dont chaque minute vaut
de l’argent. La réunion de Londres n’a point été orageuse ; après
en avoir discrètement disputé, elle a choisi Rome pour y tenir les
Jeux de 1908, en même temps qu’elle décidait d’organiser en

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