La Sardaigne – naviguer au milieu des rochers

Transcription

La Sardaigne – naviguer au milieu des rochers
La Sardaigne – naviguer
au milieu des rochers
En Sardaigne, la Costa Smeralda est surtout connue pour ses célébrités et ses yachts de
luxe. Mais le soleil, le vent et la mer y font aussi le bonheur du commun des navigatrices et
des navigateurs. Toute croisière qui se respecte y sera par ailleurs couronnée par un petit
crochet en Corse via le détroit de Bonifacio.
avril 11 marina.ch
seaside
87
côte a été pour ainsi dire découverte dans les années
1960 par l’Aga Khan, le chef politique et spirituel des
musulmans ismaéliens modérés. Depuis, elle s’est
transformée en un véritable paradis pour les riches.
Les villas s’y confondent avec les falaises au milieu
d’un paysage de granit et de macchia.
Après avoir passé le Golfo degli Aranci et le cap Figari
qui s’élance abruptement dans le ciel, nous mettons
le cap vers le nord-ouest en direction de Porto Rotondo et Porto Cervo. Le phare blanc imposant du
cap Ferro et son petit chapeau rouge brillent dans le
crépuscule. Nous contournons le cap et nous nous
dirigeons, poussés par un vent doux, entre le cap et
l’île delle Bisce vers la première île de l’archipel de la
Maddalena: Caprera.
Ouverte sur le sud et bien protégée ce soir-là, la baie
de Porto Palma nous offre une belle occasion de passer une bonne nuit. Nous prenons un petit dernier
verre de «mirto» et jetons un oeil attentif aux prévisions météo. Le temps devrait être agréable pendant
trois jours, puis nous devrons faire avec des vents
importants du sud-est. C’est la direction exacte que
nous devrons reprendre à la fin de notre semaine
Mahi Mahi. Dans de telles conditions, les 60 milles
marins qui nous séparent de Porto Vecchio sont trop
importants et nous devons donc nous rabattre sur
Bonifacio, situé plus près.
Un trône sur une falaise
Texte et photos: barbara siegrist
L’anémomètre s’arrête sur 35 nœuds. Heureusement:
si nous avions su que des rafales de près de 48 nœuds
étaient à nos trousses, nous ne sommes pas sûrs que
nous aurions arisé nos voiles avec autant d’insouciance pour nous diriger vers cette baie sécurisante.
En juin, une croisière à la voile en Sardaigne n’est pas
toujours de tout repos: si ce n’est pas le mistral, ce
sera le sirocco qui donnera du fil à retordre aux navigateurs. Mais commençons depuis le début.
Nous sommes un dimanche après-midi et il n’y a
presque pas de vent au Circolo Nautico d’Olbia. Le
soleil brille au milieu d’un ciel sans nuages. Le port
d’Olbia est bien protégé au fond d’une baie de près
de trois milles marins de profondeur. De nombreux
ferries font l’aller-retour plusieurs fois par jour vers
différentes villes du continent italien.
Nous faisons partie de l’équipage du «Mahi Mahi»,
un Gib Sea de douze mètres de long. Nous nous rendons maintenant au Supermercato du coin pour embarquer tout ce dont nous aurons besoin pour passer
une bonne semaine en mer. Notre liste de commis88
Seaside
sions comporte bien évidemment du vin sarde, un
fromage de brebis régional bien connu et différents
fruits.
Nous passons à côté d’énormes ferries, d’un bateau
de croisière et de plusieurs élevages de moules
avant de nous lancer en haute mer. Nous hissons
les voiles dans le golfe d’Olbia pour mettre le cap
vers le nord-est, poussés par une jolie brise. Notre
objectif? L’archipel de La Maddalena et ses eaux
cristallines aux reflets bleu turquoise. Cet archipel
compte des centaines d’îles. La région est une réserve naturelle: il n’est permis de mouiller que dans
certaines baies et il y a seulement deux ports. Tous
deux se trouvent sur la plus grande île de l’archipel,
La Maddalena.
Un petit verre de «mirto»
Premier jour de navigation. Nous voulons aller le plus
loin possible pour pouvoir avoir plus tard un peu plus
de temps dans l’archipel de La Maddalena et peutêtre même nous offrir un petit crochet par la Corse.
Nous souhaiterions nous rendre à Porto Vecchio.
Nous longeons la Costa Smeralda à la voile. Cette
marina.ch avril 11
Bonifacio vaudra de toute façon le détour. Difficile
de trouver des paysages plus imposants et la route
qui y mène via le détroit de Bonifacio est une véritable aventure. La proximité de la Corse et de la
Sardaigne canalise ici les vents, provoquant ainsi un
effet de goulot. Les vents y soufflent en général à
deux Beaufort de plus qu’annoncé. Le Mahi Mahi
vole toutes voiles dehors en direction de la Corse
sous un vent d’ouest de trois Beaufort. Le ciel est
d’un bleu étourdissant. Le bonheur de la voile à l’état
pur! Ou presque… Le Mahi Mahi n’est pas un grand
amateur des allures au près serré. Ainsi, au lieu de
tirer des bords éreintants, nous mettons en marche
le moteur pour parcourir les derniers milles marins.
Devant notre proue apparaissent les imposantes
falaises de calcaire de la côte sud de la Corse. Nous
apercevons enfin Bonifacio. Cette ville de corsaires
trône majestueusement au sommet de la falaise.
L’entrée du port située près du phare de Madonetta
n’est visible que lorsque l’on arrive juste devant, soit
au dernier moment.
Aucun port n’est aussi bien protégé: il se cache en
effet comme un long fjord étroit derrière la falaise sur
laquelle a été construite la ville. Le Mahi Mahi reçoit
une place d’amarrage sur le quai, tout près des nombreux cafés et autres boutiques de plage.
avril 11 marina.ch
Baie de Porto Lungo: on peut
amarrer à des bouées devant le
port. Mais les bateaux sont
plus tranquilles dans la Marina
di Porto Massimo.
seaside
89
A l’heure du souper, nous décidons de monter des
escaliers abruptes afin de profiter de la vue sur la mer
et de déguster un poisson (une dorade dans le cas
présent) dans l’un des petits bistrots du coin. Les
petites boutiques regorgent de souvenirs, de vêtements et de chaussures moins chers que sur l’île de
La Maddalena.
Rocailles et gueules de monstres
Le Mahi Mahi n’est pas le seul bateau à hisser les voiles
tôt le lendemain matin afin de se rendre à Bonifacio
dans de bonnes conditions météo. Nous passons au
large des Îles Lavezzi, puis retournons dans les eaux
sardes et changeons le fanion du pays hôte sous la
barre de hune tribord. Le temps est magnifique! On
ne peut se douter à aucun moment qu’une tempête ne
va pas tarder à arriver. Le plaisir de la voile à l’état pur!
L’archipel de La Maddalena réapparaît très rapidement
au large de notre proue. A gauche, nous croisons l’Isola
Budelli et sa fameuse Spiagga Rosa (plage rose)
connue dans le monde entier grâce à d’innombrables
cartes postales. A droite, l’Isola Spargi. Cette fois-ci,
nous nous dirigeons dans le Porto Massimo, situé dans
la baie de Porto Lungo, à la pointe nord-est de La
Maddalena. Selon notre skipper, ce nouveau port privé,
véritable complexe de luxe pour bateaux appartenant
à l’hôtel Cala Lunga, serait le plus beau port de la région. Tout le monde se réjouit à bord, même si nous
naviguons déjà dans une région paradisiaque. Nous
nous concentrons. Nous devons réussir à passer dans
le trou d’une aiguille: entre les îles de Budelli et La
Maddalena se trouve l’Isola Barrettini, à l’est de cette
dernière les Isolotti Barrettinelli et seul un détroit plutôt étroit sépare l’île principale des petites îles. Les
deux îles surgissent de la mer comme deux monstres
de granit prêts à dévorer les plus imprudents. Le Mahi
Mahi est poussé par un vent léger au milieu de cette
rocaille.
Bonifacio, un port sûr, créé par
la nature. Tel un fjord, il
pénètre loin à l’intérieur des
terres. En haut, trône la vieille
ville.
marina.ch
Ralligweg 10
3012 Berne
Tél. 031 301 00 31
[email protected]
www.marina-online.ch
Service des abonnements:
Tél. 031 300 62 56
90
Seaside
marina.ch avril 11
avril 11 marina.ch
fort dans les voiles. Le barreur a besoin de toutes
ses forces pour garder le cap, l’eau vole, l’écume
nous éclabousse et le vent crie. L’anémomètre n’a
pas dépassé les 35 nœuds. «Affalez les voiles et
dirigez-vous vers la prochaine baie», crie le skipper.
Nous nous mettons à trois pour enrouler le génois
centimètre par centimètre et démarrons le moteur.
Nous cherchons à nous protéger dans le Golfo di
Arzachena. La traversée entre les trois montagnes
(Tre Monti) dure une éternité… Nous jetons enfin
l’ancre. Sous le pont, tout est calme. Nous nous
couchons, nous attendons et nous écoutons la
tempête fulminer.
A 17 heures, tout se calme. Les vagues s’aplatissent.
La baie se détend paisiblement à la lueur du soleil
du soir et les navigateurs marchent à quatre pattes
autours de leurs couchettes. Nous profitons de l’occasion pour mettre le cap vers Olbia. Nous mouillons
pour la dernière fois dans le Golfo di Cugagna. A
gauche le port de Portisco et à droite le Porto Rotondo. Des super-yachts rutilants attendent patiemment qu’on les sorte. Quelques matelots bossent sur les ponts. Le golf est calme. Dans notre
cuisine, nous faisons revenir tout ce qui reste dans
le réfrigérateur, pour nous accorder ensuite un petit
«mirto» au clair de lune. Le lendemain matin, le Mahi
Mahi passe le Capo Figari au moteur avant d’entrer
dans la baie d’Olbia. Nous regardons alors avec nostalgie les bateaux qui pre
Costa Smeralda, Archipel Maddalena, SARDaigne
Voyage: en ferry ou en avion jusqu’à Olbia. Plusieurs offres disponibles. Il vaut
la peine de faire un comparatif des prix sur Internet.
Informations portuaires: www.portomassimo.it
A ne pas manquer: une bouteille de «mirto», une liqueur de myrtille typique
de la Sardaigne. Elle favorise la digestion et sent bon les herbes fraîches. Outre
le «mirto rosso» produit à base des baies, il existe également du «mirto bianco»
produit avec les fleurs et les feuilles des buissons de myrtilles.
Karte «Europa Grundkarte» Format: 6,5 cm x 6,5 cm hoch
Cala Gavetta est le port très
fréquenté de Maddalena d’où
des ferries rallient Palau
plusieurs fois par heure.
Derrière la Punta Lunga se trouve notre prochaine
étape: il s’agit de la marina de Porto Massimo, notre
destination du jour. Nous découvrons ici l’eau la plus
claire et la plus turquoise que nous n’avons jamais
vue. Il n’y a pas encore beaucoup d’animation ici au
début du mois de juin. Les douches laissent à désirer.
C’est alors que venu de nulle part, le vent se met à
souffler. Nous nous étendons dans nos couchettes,
écoutons le chant du vent et la réponse des vagues
jusqu’à ce que le sommeil nous emporte. Reste à
savoir si nous pourrions dormir aussi bien à l’extérieur
du port…
Le vent est bien là…
Le lendemain matin, la mer est démontée et le vent
rugit. Nous décidons malgré tout de faire le tour
de La Maddalena et de naviguer vers la capitale
et seule ville de l’île. Sous génois uniquement, nous
contournons l’île par l’ouest. Le détroit entouré de
rocailles que nous avons passé le jour précédent est
recouvert d’écumes et de tourbillons… Plusieurs
embarcations suivent le même cap que le Mahi
Mahi. Et le vent forcit encore aux alentours de midi.
Il s’abat maintenant sur nous à 30-35 nœuds, soit
92
Seaside
huit Beaufort. C’est alors qu’apparaît la Cala
­Gavetta, le port de La Maddalena. Le gardien du
port et ses collègues sont débordés et aident les
bateaux qui arrivent à s’amarrer. Après l’agréable
tranquillité de Porto Massimo, nous sommes ici
entourés de bruits et d’activité. Nous nous trouvons
sur le quai où passent les ferries qui relient Palau
plusieurs fois par heure.
Dès que l’on a fait ses achats, flâné, mangé et observé
l’activité locale pendant un petit moment, on peut
ensuite reprendre la mer en toute tranquillité. Notre
semaine touche à sa fin et nous devons arriver dans
les temps à Olbia, malgré les vents qui soufflent
contre nous. Nous larguons donc les amarres, direction le cap Ferro!
Kohli Ka
CORSE
Porto Vecchio
Bonifacio
La Maddalena
Porto Torres
Olbia
Alghero
SARDAIGNE
Derrière les trois montagnes
Nous commençons par filer à toute allure sous génois par des vents de six Beaufort. Selon le skipper,
nous devrions atteindre sans problème la baie de
Liscia di Vacca située au large du cap. Mais il a fait
son calcul sans prendre en compte le vent. Peu de
temps après en effet, le Capo d’Orso se trouve déjà
dans notre dos et le vent souffle de plus en plus
marina.ch avril 11
avril 11 marina.ch
seaside
93

Documents pareils

Petite villa à Cugnana, Olbia , Sardaigne Bâtiment typiquement

Petite villa à Cugnana, Olbia , Sardaigne Bâtiment typiquement proches îles de Mortorio, Le Camere, Capo Figari, Golfo degli Aranci, Tavolara. Pour la mondanité, à 5 km vous trouvez Porto Rotondo e Portisco, avec tous les divertissements de l’été. A peu de min...

Plus en détail