1 Notes de cours sur Karl Marx La pensée de Marx est complète
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1 Notes de cours sur Karl Marx La pensée de Marx est complète
Notes de cours sur Karl Marx La pensée de Marx est complète, puisqu’elle propose un système intégrant, sans les dissocier, philosophie, histoire et économie. a – Le sous-système philosophique Toute l’œuvre de Marx constitue une critique de l’économie politique, qui décrit le mode de production bourgeois (le capitalisme). Cette critique repose sur le constat d’une aliénation (au sens de divorce avec la nature humaine) générale, associée à ce mode de production. - l’aliénation : Le régime de propriété privée prive le travailleur du fruit de son travail. Dans ce mode de production, l’ouvrier est assimilé à une force de travail ; il est traité comme une chose (déshumanisation), comme un simple instrument de travail, sans intéressement au travail (dépossession) et étranger au travail (dépersonnalisation). De plus, le mode de production capitalisme génère une grande misère ouvrière. Ce sont les ingrédients de l’aliénation de l’ouvrier. Pour le capitaliste, l’aliénation consiste en un dépérissement des sens physiques et intellectuels, remplacés par un sens de l’avoir. L’aliénation, selon Marx, ne saurait être combattu par l’Etat, dans la mesure où il est luimême un instrument de la classe dominante (les capitalistes) et participe donc de l’aliénation de ces derniers. L’avènement du communisme, dont le programme est l’abolition de la propriété privée et le dépérissement progressif de l’Etat, après une phase préparatoire de dictature du prolétariat, est alors nécessaire pour permettre « la réconciliation de l’homme avec la nature. » - Le matérialisme historique : Parallèlement à ce concept d’aliénation, Marx donne un éclairage particulier sur le mode de production capitaliste. Le marxisme est aussi une philosophie de l’histoire : le matérialisme historique et dialectique. Marx expose ainsi son point de vue : Première relation : « les hommes nouent des rapports déterminés, nécessaires, …, rapports de production qui correspondent à un degré de développement déterminé de leurs forces productives matérielles… L’ensemble de ces rapports de production constitue la structure économique de la société… Seconde relation : sur laquelle s’élève une superstructure juridique à laquelle correspond les formes de conscience social déterminées. Le mode de production de la vie matérielle conditionne le processus de vie sociale, politique et intellectuelle en général : Ce n’est pas le conscience des hommes qui détermine leur être ; c’est inversement leur être social qui détermine leur conscience. » Mais ce déterminisme est figé dans cette expression seule (à ce stade, l’homme est privé de tout libre arbitre). A un état des forces productives correspond une organisation sociale et une seule, une conscience sociale et une seule. Or, Marx considère que le matérialisme historique est dialectique. Autrement dit, il existe des forces contraires susceptibles de rompre l’équilibre précédent : Prem. force contraire : « A un certain stade de leur développement, les forces productives matérielles… entrent en collision avec les rapport de production Synthèse : 1 existants » Sec. force contraire : « avec leur expression juridique » Synthèse : « Alors commence une ère de révolution sociale. Les changements dans les fondations économiques s’accompagnent d’un bouleversement dans tout l’édifice. » (L’épaisseur des flèches indique l’intensité de la détermination. Une flèche pleine indique la détermination matérialiste. Forme de conscience sociale Institutions juridiques et politiques Superstructure (mode d’existence sociale) Structure (mode de production) Forces productives matérielles Rapports sociaux Marx résume sa pensée de la manière suivante : « Le moulin à bras vous donnera la société avec le suzerain ; le moulin à vapeur, la société avec le capitalisme industriel. » Donc, la base économique (infrastructure), constitué par les forces productives et les rapports sociaux, détermine l’édifice (superstructure) juridique, politique, mais aussi religieux, intellectuel, artistique et philosophique (la conscience sociale). Le système n’est pas figé, car la relation entre les forces productives et les rapports de production est dialectique. La lutte des classes en vue de modifier les rapports sociaux est le moteur de cette dialectique. b – Le sous-système économique de Marx : la critique de l’économie politique Marx complète et boucle son système philosophique de la société (le matérialisme historique et dialectique) d’un sous-système scientifique qui décrit le mode de production capitaliste. L’outil de base de cette description scientifique du mode de production capitaliste est la théorie de la valeur travail. Il est ensuite utilisé dans une représentation du système économique sous la forme d’un circuit, dans lequel le travail est l’origine de toute valeur. 2 La théorie de la valeur travail de Marx est une version revue et corrigée de celle de Ricardo. L’idée de base consiste à distinguer la valeur du travail (valeur, en temps de travail, des marchandises vendues par le capitaliste) et la valeur de la force de travail (salaire reçu par le salarié, i.e. supposé égal au temps de travail nécessaire pour reproduire sa force de travail), qui conduit à la notion de plus-value, puis à celle d’exploitation économique. - La théorie de la plus-value et de l’exploitation Marx accepte l’héritage ricardien : - la valeur d’échange s’applique à des marchandises qui ont une valeur d’usage (CN pour avoir une valeur d’échange) ; - le travail est la substance de la valeur ; -le travail transmet l’intégralité de sa valeur aux marchandises, sous forme de travail direct ou indirect (au travers des machines et des consommations intermédiaires). Marx va ensuite systématiser la théorie de la valeur travail. La valeur d’échange d’une marchandise exprime rigoureusement la quantité moyenne ou sociale de travail général nécessaire pour la produire. Dans cette définition, le travail est conçu comme un agrégat ; Marx parle de « travail général abstrait ». Le passage du « travail complexe » à ce « travail général abstrait » se fait par décomposition en unités de travail simple. Ainsi peut-on comparer la valeur produite par un ingénieur et un ouvrier non qualifié. Par ailleurs, le travail socialement nécessaire est constitué de travail direct, dit « travail vivant », et de travail indirect, dit « travail cristallisé » ou « travail mort », correspondant à la valeur des matières premières et des équipements utilisés par le travail direct. Sur le marché, la valeur n’est pas exprimée sous cette forme. La forme générale de la valeur utilise une marchandise particulière pour exprimer la valeur de toutes les autres. Si la marchandise en question remplit aussi la fonction de transaction, elle devient l’ « équivalent général des marchandises » ou « monnaie ». Marx distingue deux types de marchandises : - celles produites puis échangées avec pour finalité la consommation : cette marchandise est achetée pour sa valeur d’usage, qui disparaît immédiatement après l’acte de consommation. - celles produites puis destinées à la production d’autres marchandises : au cours de l’échange, la valeur d’échange disparaît et est transmise à la « descendance ». Marx appelle capital constant toutes les marchandises de ce type, c’est-à-dire celles qui participent à l’acte de production et transmettent, sans perte ni surplus, leur valeur, ainsi que les moyens financiers qui servent à leur acquisition. Au sein de cette catégorie, on retrouve la distinction classique introduite par Smith entre le capital fixe, i.e. l’ensemble des biens de production qui ne disparaissent pas au cours de l’opération de production (machines, équipements, …) et le capital circulant, défini par opposition (matières premières et force de travail). Marx donne, pour sa part, une place à part à la force de travail. Certes, comme Smith, il considère qu’elle fait partie du capital circulant (par définition, le travail est détruit après l’acte de production) ; mais, par ailleurs, Marx considère que le travail fait plus que transmettre sa valeur, ce qui fait qu’elle ne peut pas être rangée dans le capital constant. Ainsi, Marx est-il amené à proposer une nouvelle catégorie, le capital variable, défini comme l’ensemble des moyens financiers employés à acquérir la force de travail. 3 Capital Constant (C) Bâtiment Installation Outillage Capital Fixe Matières premières Capital Variable (V) Matières auxillières Capital Circulant Classification de Marx Force de travail Classification de Smith Marx voit une particularité dans la force de travail, qu’il expose de la façon suivante : « ce que l’ouvrier vend, ce n’est pas directement son travail [le produit de son travail], mais sa force de travail. » En d’autres termes, le travailleur ne vend pas un résultat, mais un moyen, c’est-à-dire sa force de travail, définie comme ses facultés pendant un temps donné. Or, la valeur d’échange de la force de travail se mesure, comme toute marchandise, par la quantité de travail nécessaire à sa production (le temps nécessaire pour produire les subsistances nécessaires à la reproduction de la force de travail). La rémunération du travail est définie comme une norme sociale et non naturelle. Mais, en raison du chômage, elle oscille socialement autour du salaire de subsistance ; le salaire payé aux travailleurs correspond à la valeur de leur force de travail. Marx démontre ensuite qu’il existe une plus-value : « Supposons que la valeur de la force de travail pour une journée est de 6h de travail moyen, correspondant à une valeur monétaire des marchandises nécessaires au travailleur de 3 shillings. Mais la journée de travail est quant à elle de 12h. Les marchandises obtenues seront vendues 12h, soient 6 shillings, par le capitaliste. Il y a ainsi un sur-travail – ou temps extra – de 6h par rapport au temps de travail nécessaire de 6h. » Ainsi, la différence entre la valeur du travail et la valeur de la force de travail constitue une plus-value. Cette dernière sert à la consommation des capitalistes et à l’accumulation (investissement). Une question vient ici : qu’est-ce qui explique que le travailleur se satisfasse de cette situation ? Il pourrait obtenir, en vendant le produit de sa force de travail, la même valeur. En fait, ce rapport social de dépendance, dit aussi rapport salarial, est imposé au prolétariat, car il ne dispose que de sa force de travail, qu’il est obligé de vendre pour subsister. C’est donc la possession du capital qui permet d’établir le rapport salarial. Donc, puisque cette situation résulte d’un état de fait (la possession ou non du capital), il y a exploitation. (Comme le capitaliste rémunère la force de travail à sa valeur, il n’y a pas, à proprement dire, exploitation au sens où le travail serait sous-payé.) La plus-value s’interprète alors comme la mesure exacte de l’exploitation. Marx note V pour le capital variable (la valeur de la force de travail utilisée) et PL pour la plus-value. Dans la citation précédente, on a V = 6h et PL = 6h. Le taux de plus-value PL/V (rapport entre la plus-value et le capital variable) « est donc l’expression exacte du degré d’exploitation de la force de travail. » Marx met en évidence trois méthodes pour accroître la plus-value : - le capitaliste peut dégager une plus-value absolue (supplémentaire) en prolongeant la durée du travail, en intensifiant le travail et en accélérant les cadences ; 4 - la société peut réaliser une plus-value relative (supplémentaire) en faisant des gains de productivité dans les secteurs nécessaires à l’entretien de la force de travail (baisse du salaire de subsistances) ; - enfin, il peut y avoir des plus-values différentielles lorsqu’une entreprise s’avère plus performante que la moyenne de la branche. - Le problème de la transformation des valeurs en prix Dans la réalité, la loi de la valeur est masquée par les prix, la plus-value par le profit. Le capitaliste ignore (n’observe pas) le taux de plus-value ; ce qui l’intéresse, d’ailleurs, ce n’est pas le taux de plus-value, i.e. PL/V, qui, en monnaie, exprime le rendement du capital variable, mais le taux de profit, noté r, qui mesure la rentabilité de tous les capitaux. Le taux de profit est le rapport entre la plus-value et la somme des capitaux avancés C+V, soit les coûts de production : r = PL/(C + V) Marx montre que, si les « compositions organiques du capital q = C/V [le coefficient d’intensité capitalistique K/L dans la terminologie néoclassique] varient d’un secteur à l’autre, les taux de profit vont être différents. » En effet, en partant de la relation précédente, on montre que le taux de profit est inversement proportionnel à la composition organique du capital : r = PL/(C + V) = PL/[(C/V + 1) V] = PL/(q + 1) V Or, il est impossible qu’un différentiel de taux de profit puisse se maintenir durablement. En effet, en pareille situation, les capitaux abandonnent les activités peu rentables, pour aller s’employer dans les autres secteurs. A terme, il doit y avoir une égalisation des taux de profits entre les branches. Ainsi émerge un taux de profit moyen. A partir du taux de profit moyen, on peut alors déterminer les prix de production ; celui-ci sera un centre de gravité autour duquel fluctueront les prix de marché (loi de la gravitation du prix de marché autour du prix naturel chez les classiques). Secteurs I II III IV V Total Moyenne Capitaux Engagés Capitaux Engagés Taux de plusvalue Plusvalue Taux de Profit (Donné) C 80 70 60 85 95 390 78 (Donné) V 20 30 40 15 5 110 22 (Donné) e=PL/V 100 id. id. id. id. id. id. (Calculé) PL 20 30 40 15 5 110 22 (Calculé) r=PL/(C+V) 20 30 40 15 5 22 Capital Consommé sur la Période (Donné) C’ 50 51 51 40 10 Valeur de la Marchandise Coût de Production (Calculé) C’+V+PL 90 111 131 70 20 (Calculé) C’+V 70 81 91 55 15 Sont donnés : - les compositions organiques du capital dans les 5 secteurs (en valeur-travail) ; - le taux de plus-value (en %) ; - le capital consommé en un cycle de production (en valeur-travail). Sont déduits : - la plus-value : PL = V e ; - le taux de profit : r = PL/(C+V) ; - la valeur-travail de la marchandise : C’ + V + PL ; 5 - le coût de production de la marchandise : C’ + V. Prenons un exemple : dans le secteur I, les capitaux engagés sont 100 (80C + 20V). La composition organique du capital est q = 80C/20V = 4. Sachant que le taux de plus-value est 100 % (sur le capital variable), la plus-value dégagée est 20. On en déduit le taux de profit r = 20/100 = 20 %. Par hypothèse, le capital consommé est 50 (usure des équipements). Le coût total de production est donc 50C + 20V = 70. Tandis que la valeur-travail de la marchandise est la somme du capital constant et variable consommé, et de la plus-value : 50C + 20V + 20PL = 90. Au total, dans cette économie fictive, le capital engagé est 500 (390C + 110V). La plus value totale dégagée est 110 (100 % de 110V). Le taux de profit moyen de l’économie est donc 110V/(390C + 110V) = 22 %. La composition organique moyenne du capital est 78C et 22V, soit q = 78C/22V = 3,55. Tous les secteurs où la composition organique du capital est plus faible ont un taux de profit plus faible que la moyenne, et inversement. Par exemple, dans le secteur I, le taux de profit est de 20 %, contre 22 % en moyenne. Comme on a vu précédemment, cette situation n’est pas tenable. Les mouvements des capitaux des secteurs moins rentables vers les secteurs plus rentables étant faits, la structure du capital dans chaque secteur ne change pas (les proportions de C et de V sont des données technologiques propres à chaque branche) : - les volumes changent : afflux des capitaux ; - les proportions sont constantes : q = C/V invariable. Donc, si q = C/V est invariable, les coûts de production, la plus-value et la valeur-travail des marchandises ne se modifient pas non plus. Pourtant, l’uniformisation des taux de profit doit se faire. Marx pense que les prix de production vont s’ajuster. Par exemple, dans le secteur I, le coût de production est de 70 ; si le taux de profit moyen est de 22 % dans le reste de l’économie, il faut que le prix de production soit de 70 + 22 = 92, soit + 2 par rapport à la valeur-travail de la marchandise. Il faut noter que, s’il est vrai que la théorie de la valeur travail n’est pas satisfaite sur telle ou telle marchandise particulière, son prix différant de sa valeur travail, en moyenne, elle reste vérifiée. Néanmoins, on conçoit que le raisonnement n’est pas rigoureux. C’est l’erreur de Marx, selon certains commentateurs. D’un côté, les facteurs de production sont appréciés en valeurtravail ; de l’autre, les biens produits sont finalement appréciés en prix. En fin de compte, les deux sont déconnectés, alors que la valeur-travail est censé expliquer les prix. - La dynamique économique chez Marx La dynamique économique chez Marx a pour étape clé la réalisation de la plus-value, car c’est elle qui permet de poursuivre l’accumulation capitaliste et d’entreprendre la production à une échelle élargie. Cette dynamique s’explique par la concurrence à laquelle se livrent les entreprises. Le réinvestissement d’une partie des profits est une nécessité pour leur survie. Mais ce mouvement débouche sur des contradictions et des crises. x La réalisation de la plus-value Dans une économie d’échange des marchandises existantes, le circuit économique en valeur s’ouvre et se ferme sans changement ; les marchandises de valeur M s’échangent contre de l’argent A qui, à son tour, s’échange contre des marchandises de valeur M : Cycle MÆAÆM Dans le circuit du capital, dit encore circulation capitalistique, la plus-value intervient, conduisant à des valeurs en fin de cycle supérieures aux valeurs en début de cycle : un capital 6 argent A, provenant d’une accumulation primitive, permet d’acquérir un capital productif P d’une valeur A, comprenant du capital constant et du capital variable : A=P=C+V La mise en œuvre de P, dans le cycle de production, permet d’obtenir un capital marchandise M: M = C + V + PL Enfin, la réalisation de M sur le marché (la vente) procure un capital argent A* supérieur au capital avancé A. La différence provient de la réalisation de la plus-value qui, sous la forme argent, s’appelle le profit. A Æ P Æ M Æ A* Ce nouveau circuit est à la fois une circulation de marchandises (flux réels) et, en sens inverse, une circulation monétaire. Capital argent Capital productif A P=C+V Achat des moyens de production et de la force de travail Production Vers un nouveau cycle A* = C+V+PL Capital argent Réalisation de la valeur (Vente de la marchandise) M = C+V+PL Capital marchandise x Les schémas de reproduction Marx élabore (dans le livre II du capital) deux modèles bisectoriels pour représenter la circulation marchande selon deux modes d’utilisation de la plus-value. Les deux secteurs sont : - le secteur I, qui produit avec le capital C1 + V1 des biens de production d’une valeur : P1 = C1 + V1 + PL1 ; - le secteur II, qui produit avec le capital C2 + V2 des biens de consommation d’une valeur : P2 = C2 + V2 + PL2. Le produit social est la somme des produits sectoriels : P = P1 + P2 = C + V + PL. Marx adopte un certain nombre d’hypothèses simplificatrices : une économie fermée, les remplacement total du capital constant au bout d’un cycle annuel (le capital constant est détruit pendant la production), les prix de marché et les prix de production du même montant que les valeurs. Les deux modes d’utilisation de la plus-value sont : - sa consommation intégrale : ceci aboutit à une reproduction simple du système ; - sa répartition entre la consommation et l’accumulation : ceci aboutit à une reproduction élargie du système. 7 Schéma de reproduction élargie : La production se reproduit à l’identique d’une année sur l’autre. Une telle situation nécessite : - l’égalité en valeur de l’offre de moyen de production C1 + V1 + PL1 et de la demande de moyen de production C1 + C2 ; - l’égalité en valeur de l’offre de biens de consommation C2 + V2 + PL2 et de la demande de moyen de production V1 + V2 + PL1 + PL2 (V1 et V2 sont la consommation des travailleurs des deux secteurs ; PL1 et PL2 sont la consommation des capitalistes, qui n’épargnent rien dans ce schéma). En résumé, l’équilibre implique donc : Marché des biens de production : C1 + V1 + PL1 = C1 + C2 ; Marchés de biens de consommation : C2 + V2 + PL2 = V1 + V2 + PL1 + PL2. qui se ramène à une condition unique : V1 + PL1 = C2. Ces égalités ne signifient pas que la reproduction simple puisse échapper aux crises. Chez Marx, l’équilibre est seulement une égalité comptable, une possibilité théorique, très éloignée du point de vue de Say et de la loi des débouchés. Cet équilibre comptable prouve seulement la possibilité de l’équilibre. Mais il est loin d’être certain, car les décisions des entrepreneurs sont indépendantes de celles des consommateurs. Schéma de reproduction élargie : il s’agit d’une modélisation d’une économie engagée dans un processus de croissance. L’accumulation d’une partie de la plus-value modifie la condition de l’équilibre du schéma de reproduction simple. Il existe un excédent des moyens de production qui doit être compensé par une augmentation de la demande de biens de production. Dans le cas du schéma de reproduction élargie, une partie de la plus-value est consommée par les capitalistes : a (PL1 + PL2) ; l’autre partie est capitalisée : (1 – a) (PL1 + PL2). On a évidemment a compris entre 0 et 1. La production du secteur I sert au remplacement du capital usé C1 + C2, comme dans la reproduction simple, et à l’accumulation nette égale à (1 – a) (PL1 + PL2). La production du secteur II sert à la consommation ouvrière V1 + V2 et à la consommation capitalistique a (PL1 + PL2). L’équilibre implique donc : Marché des biens de production : C1 + V1 + PL1 = C1 + C2 + (1 – a) (PL1 + PL2) ; Marchés de biens de consommation : C2 + V2 + PL2 = V1 + V2 + a (PL1 + PL2). qui se ramène à une condition unique : V1 + a PL1 = C2 + (1 – a) PL2. Plusieurs remarques d’imposent : - en reproduction simple comme en reproduction élargie, la condition d’équilibre est formellement identique : la demande de biens de consommation émanant du secteur I doit être égale à la demande de biens de production émanant du secteur II ; - les deux secteurs se servent mutuellement de débouchés ; - donc, à un déséquilibre dans un sens dans un secteur correspond un déséquilibre dans l’autre sens dans l’autre secteur. Marx tire de cette analyse l’enseignement suivant. La réalisation de l’équilibre a peu de chances d’être spontanée, car les conditions posées sont rigides et aucun mécanisme correcteur ne semble exister pour les respecter. Le mode de production capitaliste est donc fondamentalement instable. x Les lois tendancielles chez Marx 8 Selon Marx, la logique de la concurrence dans l’économie capitaliste contraint les capitalistes à accumuler une partie de la plus-value avec une forte part pour le capital constant. L’objectif est d’augmenter la production pour un coût salarial constant ou moindre, afin d’être plus compétitif. Un tel comportement conduit à des évolutions de long terme qui constituent des lois tendancielles du capitalisme. * 1-ière loi tendancielle : La composition organique du capital augmente. En effet, en vertu des motivations décrites plus haut, la recherche d’économie sur les coûts en main-d’œuvre fait que l’accumulation se fait en faveur du capital constant et au détriment du capital variable. Donc : q = C/V augmente. * 2-ière loi tendancielle : La paupérisation des travailleurs augmente. La première loi implique un machinisme croissant, qui n’est pas sans effet sur l’évolution du marché du travail. Il se produit une baisse des besoins en main-d’œuvre et la constitution d’une armée industrielle de réserve. Cette tendance pèse sur les salaires, qui convergent vers le salaire de subsistance. D’où la seconde loi. * 3-ième loi tendancielle : Le taux de profit baisse. Le taux de profit égale : r = PL/(C + V) = PL/(q + 1)V = (PL/V)/(q + 1) = e/(q + 1) avec q = C/V et e = PL/V le taux d’exploitation. Comme q augmente, en vertu de la première loi, on voit que le taux de profit doit diminuer. Cette tendance est parfaitement cohérente avec la pensée de Marx. En effet, seul le travail, grâce à la différence entre la valeur de la force de travail et la valeur du produit de cette force de travail, est source de plus-value. Si donc la part du travail diminue dans les moyens de production, le taux de profit doit diminuer. Marx met également en évidence des contre-tendances. A sont avis, elles ne peuvent que ralentir le phénomène. Il s’agit d’accroître le taux d’exploitation e = PL/V (Cf. plus value absolue, relative). 9