témoignage
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VERDUN 15 MARS 2016 Nous sommes allés à VERDUN La bataille de VERDUN a déjà commencé depuis le 21 février …il y a cent ans ! Nous sommes 4 anciens pour accompagner les élèves de 3ème du collège Paul BERT de CACHAN en ce matin du 15 mars déjà printanier. Mme MONTHUREUX et JC BULLIER pour les ACPG, moi même pour la FNACA, Mon épouse s’est jointe à nous, remplaçant au pied levé, un pressenti tardivement défaillant. Donc au petit matin ( pour des retraités) nous pressons le pas dans notre rue de la Marne (tout un présage pour aller à VERDUN) vers notre rendez vous du collège Paul Bert . Les 54 élèves des 2 classes de 3ème encadrés par leurs enseignants professeur d’histoire et professeur d’allemand (quelle recherche d’harmonie !) le directeur adjoint et une jeune surveillante que j’ai prise pour une élève, prennent place dans le car dans une ambiance bon enfant . Nous voilà mêlés à la jeune génération, celle qui doit prendre notre relais. Madame la Principale, avec bonne humeur nous souhaite bon voyage et nous recommande à Ahmed notre chauffeur. Après deux heures de route, il est temps de changer de chauffeur et de s’ébrouer un peu. Avec l’accord de M . MAUREL, leur professeur, qui prend la précaution de faire éteindre les portables, les élèves ont droit à mon discours d’ancien combattant et peuvent enfin savoir qui nous sommes. Ils avaient déjà deviné que les dames n’étaient ni des infirmières qui avaient soigné des blessés de la guerre de 14, ni des ‘ Madelon’ pour poilus venues du chemin du même nom, (en clair chemin des Dames). Quant à nous les hommes, nous avions bien l’air d’anciens combattants surtout après mon discours écouté poliment et même applaudi. Ils ont compris que Jean Claude BULLIER n’était pas un capitaine d’aviation de 14 /18 et que je ressemblais plus à un fantassin dans les djebels d’Algérie qu’à un poilu dans les tranchées ! Après une sortie de l’autoroute manquée par notre taxi de la Marne, notre visite au Mémorial de VERDUN un peu bousculée se déroula au pas de charge. Les élèves par binômes papillonnaient derrière les vitrines successives pour enrichir le questionnaire que leur professeur avait préparé pour eux. Ils purent ainsi découvrir sur 2 niveaux en vrai grandeur le quotidien des millions de poilus qui se sont succédés dans l’enfer de VERDUN : armes de toutes sortes, outils et paquetages, tenues vestimentaires enfin tout ce qui a constitué le quotidien de cette noria de jeunes gradés ou poilus qui ont défilé au front, venus de tous les coins de France et des colonies de l’époque, dans cet enfer de mitraille pour obéir à une seule volonté : ILS ne passeront pas ! Le musée s’est aussi animé des vidéos en boucle relatant les scènes du quotidien avec bruitages de fusillades ou déflagrations d’obus. Les vues des gueules cassées laissent une impression saisissante des dégâts sur les hommes qui, certes survivront, mais dans quel état ! Mon épouse a cru reconnaître sur une photo d’époque, le grand père qu’elle a connu, gazé à VERDUN, dans ce jeune poilu à la moustache tombante. Elle l’a photographié sur son portable. Mais ils se ressemblaient tous ces poilus ! Les jeunes ont copieusement photographié et ont rendu leurs questionnaires. « Demain nous en reparlerons », leur a promis le professeur à la sortie. Après une pause pique nique dans une clairière toute proche située dans l’environnement sauvegardé, encore bouleversé par les trous d’obus où les arbres ont tout de même repris leur droit, nous pûmes contempler le paysage alentour portant encore toutes les marques de ces combats meurtriers. Devant nous maintenant, comme une allée de cimetière nous parcourons la rue principale de ce village rayé de la carte que fut Fleury. Silence et recueillement en découvrant l’emplacement des constructions disparues : ici la mairie, là l’école puis l’église, la boulangerie, l’épicerie et les maisons des familles disparues sous un déluge de mitraille. Sept fois le village fut repris à l’ennemi, comme l’annonce le mausolée du souvenir érigé sur la place, monument funéraire dont l’épitaphe pourrait être : in memorian Fleury, un village français disparu dans la tourmente des combats de cette année 1916 . Dépêchons- nous maintenant pour notre prochain rendez-vous au fort de Vaux. Une guide Madelon nous y attend pour conter l’histoire de ces braves, accrochés à ce fort, pour le défendre coûte que coûte. Sa verve réaliste passionne l’auditoire. On pourrait presque penser qu’elle était présente dans tous les recoins de ce fort où aucune casemate, aucun détail n’échappe à sa description. Ces murailles parfois suintantes ont été les témoins il y a 100 ans des combats corps à corps, des luttes contre le feu des lances flammes, des soins des infirmiers pour renvoyer les blessés se battre avec une ration supplémentaire d’alcool pour « aider » le courage du combattant ! Aucun détail réaliste, surprenant parfois, d’une vie quotidienne ne nous fut épargné, comme la puanteur qui régnait dans tous ces souterrains et la survie avec une eau de pluie recueillie et traitée suivant une méthode particulière qui a été dénommée : « Verdunisation » ! Toute cette vie confinée se passait sous une pluie d’obus qui essayaient de percer la carapace de béton de la couverture du fort. Les pigeons voyageurs déguisés en corbeau pour demander du secours aux états majors ont dû paraître bien anachroniques à ces jeunes, accros à leurs portables ! Enfin l’épisode des vainqueurs saluant les vaincus qui n’ont pu résister aux gaz, arme redoutable dont les survivants auront toute une vie pour cracher leurs poumons. Mais ce n’était pas un match France –Allemagne ! Notre guide captivante a pu ainsi saluer et complimenter les encadrants pour l’attitude attentive des collégiens qui n’était pas acquise dès les premières minutes. La pluie commençant à tomber hâte alors notre rapatriement dans le car. Dernier lieu de visite : l’Ossuaire de Douaumont. Le nom parle de lui même. Mais la surprise reste totale en découvrant le lieu. Bien sûr le recueillement de cette fin de journée est plus difficile pour quelques uns. L’importance de tous ces milliers de morts qui n’ont pu être identifiés, dont aucun nom n’a pu être mis sur la dépouille, frappe l’imagination. Les restes de tous ces anonymes déchiquetés, accumulés dans ce qui ressemble à une cale de bateau, on en découvre par les hublots, le spectacle apocalyptique. Ces milliers de jeunes qui ont quitté leur village et n’y sont pas revenus, un jour de 1916…Heureusement, leur nom est sans doute gravé sur le monument des morts pour la France ! L’impressionnante armée des croix de tous ces cimetières pour ceux qui, par chance, ont eu leur nom gravé, mérite particulièrement notre attention. Un soin géométrique et une rigueur toute militaire président à l’alignement de ces croix blanches, classées par origine et religion, dans une perspective à perte de vue. Au pied du drapeau qui flotte au dessus, on ne peut que respecter, presque naturellement, un moment de silence devant ces morts pour la France rassemblés devant nous . La visite peut prendre fin. Le retour pour CACHAN est maintenant bienvenu. Le devoir de mémoire, je pense a été au rendez-vous tout au long de cette journée à VERDUN et je crois pouvoir dire que personne ne peut revenir sans émotion de ce voyage du souvenir ! A.SOURP