1 « La construction d`une liturgie en basque »

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1 « La construction d`une liturgie en basque »
Château Lota Jauregia - 64480 Ustaritz - Uztaritze
Tél. 05 59 93 25 25 - Fax. 05 59 93 06 84 - [email protected]
Egilea - Auteur : Jean-Jacques Castéret - Patricia Heiniger
Iturria - Source : Extrait du livre «Kantuketan, l’univers du chant basque
(Denis Laborde dir.) - Article de Jean-Jacques Castéret et Patricia Heiniger
«Le chant basque à l’église, nature du couplet, culture du refrain»
Ed. Elkarlanean-Institut culturel basque - Donostia 2002
ISBN 2-913156-45-2
Urtea - Année : 2002
« La construction d’une liturgie en basque »
La rencontre des prêtres apporte une précision importante quant à la pratique chantée contemporaine.
En effet, avant d’être une pratique millénaire, le chant à la messe apparaît comme le fruit d’une
volonté clairement énoncée : user d’une liturgie romaine, certes, mais en langue basque ;
s’agissant, au-delà, de pérenniser, de respecter certains éléments présentés comme culturels,
incontournables pour ces prêtres. L’analyse de cette motivation qui participe pleinement de
la définition de la pratique religieuse chantée dépasse le cadre de ce premier état des lieux,
dépasse aussi vraisemblablement les réponses des prêtres brièvement interrogés à ce sujet.
Grâce aux aimables indications du Père Marcel Etchehandy, de Belloc, et de l’Abbé Emile Larre, nous
pouvons toutefois présenter quelques jalons de la construction de la « messe Basque » telle que nous
la rencontrons aujourd’hui. Des exemples anciens de recueils de cantiques en basque existent, tel celui
de Joannes Etcheberry vers 1630. Ils témoignent d’une pratique paraliturgique ancienne en langue
vernaculaire, à l’image de nombreuses régions d’Europe. D’autres recueils doivent exister pour les
XVIIe et XVIIIe siècles. Au XIXe s., les recueils de folkloristes tels que Charles Bordes puis, au sud, du
Père Donostia notamment (XXe s.), contiennent des cantiques en basque. Il semble que le mouvement
de compilation de cantiques en langue basque et leur édition s’intensifient au cours des deux derniers
siècles c’est-à-dire à une époque marquée par le courant folkloriste, encore que cette impression
de développement puisse peut-être tenir au seul problème de conservation des archives anciennes.
Selon les religieux interrogés, un certain volontarisme s’affirme peu à peu, se dessine dès le
début du siècle, époque où l’ordinaire de la messe est encore, pour tous, en latin. Ce volontarisme
vise, selon eux, une participation active des fidèles qui ne peut donc se réaliser que dans la seule
langue qu’ils maîtrisent : le basque. Ce que l’on pourrait qualifier d’impasse linguistique conduit
donc encore les acteurs, comme au XVIIe siècle, à s’appuyer sur le domaine paraliturgique
: prières en basque et plus encore cantiques (chants religieux en langue vernaculaire).
La collecte des cantiques de la tradition basque, orale ou écrite, par le Père
Lerchundi à la fin des années 30, collecte publiée en 1946, semble bien constituer
la pierre d’angle d’un plus large investissement de la langue locale dans l’église.
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Elle va en effet, selon le Père Marcel Etchehandy et l’Abbé Emile Larre, servir
de base lisible – édition très complète et récente – au moment où Pie XII, vers
1950, amorce l’évolution liturgique qui conduira au Concile Vatican II, en 1962.
A partir de ce moment, à chaque évolution vers une participation des fidèles, le basque se substitue au latin
(dit ou chanté) avant même que le français n’ait le temps de le faire. Le Cardinal Etchegaray, alors Secrétaire
de l’Episcopat français, a, semble-t-il, facilité ce passage, en communiquant immédiatement au niveau
local, de façon systématique, les textes de la Liturgie renouvelée afin qu’ils soient traduits ou adaptés.
L’Abbaye de Belloc est au centre de ce mouvement, jusqu’à devenir maison d’édition. Elle dispose déjà
sur place de traducteurs, d’auteurs en liaison avec les religieux séculiers. Belloc – ou une partie des frères
– semble d’ailleurs avoir souhaité devenir le Centre liturgique basque du Pays Basque mais sans finalement
parvenir à faire accepter cette position ou à obtenir les moyens humains pour cette mission exclusive.
Des messes seront ainsi composées, enregistrées, diffusées toujours à partir de Belloc. La
première, Jainko Jaun zerukoa 11, est enregistrée en 1953 – déjà précédée de l’enregistrement
de vêpres en basque en 1947 – c’est-à-dire dans les toutes premières années de la préparation de
Vatican II. Puis, entre 1964 et 1966, pas moins de cinq messes complètes seront encore produites.
S’adaptant à la technologie, cassettes audio et disques compacts suivront jusque dans les
années 90. Lerchundi, Père de Belloc puis, plus largement l’abbaye, ont donc joué un
rôle structurant pour une liturgie en basque, qui servira également au Pays Basque sud,
en passe d’être pris de vitesse, lors de la disparition du latin, par la liturgie en espagnol.
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