Société civile agricole et activité commerciale

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Société civile agricole et activité commerciale
Chronique Juridique
25/02/2013
Pour parution Vienne Rurale 07/03/2013
Epandage de produits phytos pour tiers et sociétés agricoles.
Comme nous l’avons déjà évoqué dans de précédentes chroniques, les sociétés civiles agricoles
(GAEC, EARL, SCEA) n’ont pas la capacité d’exercer des travaux d’entreprise agricole d’un point de
vue juridique.
L’épandage de produits phytos pour des tiers fait partie des travaux d’entreprise agricole et la mise
en œuvre de la règlementation concernant l’épandage de ces produits est venu rouvrir le débat à
propos de cette règle juridique toujours en vigueur mais oubliée.
Les règles relatives à la certification
Les personnes ayant une activité d’épandage de produits phytos au profit de tiers devront être
titulaires d’un agrément au 1er octobre 2013. Pour pouvoir obtenir cet agrément, elles devront
répondre à un cahier des charges prévoyant notamment une certification par un « organisme
certificateur ».
Depuis le 1er octobre 2012 et à titre transitoire, les entreprises doivent, à défaut de certification,
détenir un contrat ou un devis avec un organisme certificateur démontrant leur intégration dans
cette démarche.
Or, le cahier des charges annexé à l’arrêté relatif au référentiel de certification prévu à l’Article R
254-3 du Code rural mentionne que « l’entreprise ne peut solliciter une certification uniquement
pour des activités compatibles avec celles indiquées dans ses statuts. »
L’épandage de produits phytos pour un tiers est une activité de prestation de services qui n’est pas
compatible avec l’objet social d’un GAEC, d’une EARL ou d’une SCEA. Sur le terrain, il n’est pas
rare de rencontrer des sociétés civiles agricoles réalisant des prestations rémunérées d’épandage
de phytos pour des tiers en pensant être dans leur bon droit. Alors, d’où provient cette confusion ?
L’origine de la confusion : la fiscalité
La confusion vient du principe de rattachement des produits des activités accessoires commerciales
(qui relèvent de la catégorie d’imposition des bénéfices industriels et commerciaux, « BIC ») aux
bénéfices agricoles (« BA »), pour les exploitants soumis à un régime réel d’imposition1.
Toutefois, ces dispositions ne sont que des tolérances fiscales.
Or, les sociétés agricoles ne peuvent avoir qu’un objet civil agricole. Et cet objet ne tolère pas les
activités commerciales, même accessoires, et les prestations de service sont des activités
commerciales.
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Ce principe trouve deux applications en agriculture :
possibilité de rattacher aux BA les recettes accessoires commerciales, lorsque la moyenne annuelle
des recettes accessoires commerciales des trois années civiles précédant la date d’ouverture de
l’exercice ne dépasse ni 30% des recettes tirées de l’activité agricole, ni 50 000 euros (Article 75 du
Code Général des Impôts).
possibilité de rattacher aux BA les recettes provenant des activités photovoltaïques et éoliennes, si au
titre de l’année civile précédant la date d’ouverture de l’exercice, les recettes provenant de ces
activités, majorées des recettes des activités accessoires prises en compte pour la détermination des
bénéfices agricoles en application de l’Article 75 ci-avant, n’excèdent ni 50% des recettes tirées de
l’activité agricole, ni 100 000 euros (Article 75 A du Code Général des Impôts).
L’objet agricole : la définition juridique
Les sociétés civiles d’exploitation agricole, ont pour objet l’exercice d’activités agricoles. Cette
notion est définie par le code rural, dans son article L.311-1. Les activités réputées agricoles sont
donc les activités de production (végétales ou animales), les activités qui sont le prolongement de
la production (comme la transformation et la vente des produits) ou les activités qui « ont pour
support l’exploitation » (par exemple les activités de tourisme et d’hébergement à la ferme). Il est
à noter que les activités de culture marine sont des activités agricoles.
On assimile également à l’activité agricole la préparation et l’entraînement des chevaux (pour les
centres équestres, à l’exception des activités de spectacle), la production et la commercialisation
de biogaz, d’électricité et de chaleur par méthanisation, si au moins la moitié des matières utilisées
proviennent de l’exploitation.
Il faut mentionner également la production d’énergie photovoltaïque, qui depuis la loi Grenelle II
du 12 Juillet 20102 est autorisée dans les sociétés civiles agricoles dans les limites de la tolérance
fiscale.
Par conséquent, en dehors des possibilités offertes par l’article L.311-1 et la loi Grenelle II, il n’est
pas possible d’exercer une activité commerciale au sein d’une société civile agricole.
Les solutions pour se mettre en règle
En l’état actuel des textes, la seule solution consiste à « sortir » cette activité de la société civile
agricole pour créer une structure à part, autorisée à exercer une activité commerciale.
Ainsi, un des associés de la société agricole pourrait exercer cette activité à titre individuel en
s’immatriculant à titre personnel au registre du commerce et des sociétés (démarches à effectuer
auprès du centre de formalité des entreprises de la Chambre de commerce et d’industrie).
L’autre solution peut être d’exercer cette activité au sein d’une société commerciale (SARL, SAS…)
constituée entre tous les associés de la société agricole ou certains d’entre eux.
Dans ces deux hypothèses, il est nécessaire au préalable, d’étudier les conséquences économiques,
fiscales et sociales du montage qui va être effectué.
Il ne faut pas oublier non plus, les règles propres au GAEC et à ses associés si la société agricole
est un GAEC (pluri-activité et autre).
Nathalie MICHEL,
Chambre d’Agriculture de la Vienne
Tel : 05.49.44.74.74
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Loi n°2010-788 du 12 juillet 2010