Etat des lieux et baux ruraux - Chambre d`Agriculture de la Vienne

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Etat des lieux et baux ruraux - Chambre d`Agriculture de la Vienne
Chronique Juridique
15/06/2011
Pour parution Vienne Rurale 16/06/2011
Etat des lieux et baux ruraux
Bien que constituant une pièce annexe d’un bail rural, la rédaction d’un état des lieux s’avère plus
que nécessaire pour apprécier l’état des biens qui seront confiés à une personne pour une durée
souvent indéterminée.
L’intérêt de l’état des lieux est majeur pour chacune des parties (bailleur et preneur) notamment
au regard de la durée du bail et de l’activité économique exercée qui peut entraîner la réalisation
d’investissements pouvant modifier ou transformer le fonds loué.
Selon l’article 1731 du Code civil, s’il n’a pas été dressé d’état des lieux, le fermier est présumé les
avoir reçus en bon état de réparations locatives et doit les rendre tels sauf preuve contraire. Il
convient donc d’être vigilant puisque cette présomption est simple et ne s’applique pas aux terres
agricoles.
L’état des lieux permet entre autre de déterminer lors de l’entrée en jouissance les travaux et
réparations qui seront à la charge du propriétaire. Lors d’une éventuelle demande de résiliation du
bail à l’initiative du bailleur pour dégradation du fonds, il constituera un élément de preuve
matérielle pour apprécier ces dégradations. En fin de bail, à la sortie du preneur, il permettra de
déterminer les améliorations ou dégradations qui sont de nature à ouvrir des droits à
indemnisation.
Les améliorations ou dégradations peuvent être prouvées par tous moyens, toutefois l’état des
lieux s’avère être un instrument d’une grande importance pratique qui présente l’avantage d’être
incontestable dès l’instant où celui-ci a été établi de manière contradictoire.
Une obligation légale :
L’article L. 411-4 du Code rural dispose que l’état des lieux doit être établi contradictoirement et à
frais communs dans le mois qui précède l’entrée en jouissance ou dans le mois suivant celle-ci. A
défaut et passé ce délai d’un mois, la partie la plus diligente pourra établir de manière unilatérale
un état des lieux qu’elle notifiera à l’autre partie par lettre recommandée avec demande d’avis de
réception. A compter de cette réception, l’autre partie dispose de deux mois pour formuler des
observations sur le projet d’état des lieux ou bien l’accepter. Passé ce délai de deux mois le
silence conservé vaudra accord sur le projet d’état des lieux qui deviendra définitif et sera réputé
avoir été établi contradictoirement.
Le non-respect par les parties de l’établissement d’un état des lieux n’a aucune incidence sur la
validité du bail et n’est pas de nature à remettre en cause les aménagements fiscaux qui sont
attachés aux baux à long terme.
De nombreux contentieux existent du fait de l’absence d’état des lieux, cela devrait donc inciter les
parties à redoubler de vigilance puisqu’il est très difficile d’apprécier le bien fondé, par exemple,
d’une demande en résiliation pour mise en péril du fonds loué, dès lors qu’aucun état initial ne
permet de dresser une comparaison.
Absence de formalisme particulier :
Aucun formalisme particulier n’est prévu par le Code rural pour établir un état des lieux. Il peut
donc être établi par acte authentique ou par acte sous-seing privé qui sera contresigné par les
parties. L’article 1325 du Code civil précise toutefois que l’état des lieux rédigé sous-seing privé
doit faire l’objet d’une rédaction en double exemplaire.
Si le bail rural porte sur une exploitation agricole comprenant des terres et un corps de ferme, les
parties peuvent désigner d’un commun accord un expert agricole et foncier qui sera chargé
d’établir un état des lieux précis et complet des biens loués. Le recours à un expert agricole et
foncier évitera toute discussion et malentendu entre les parties, qui rémunèreront celui-ci en se
partageant les frais de son intervention.
Un contenu complet et le plus précis possible :
L’état des lieux rédigé par les parties elles-mêmes ou par un expert agricole et foncier contient
une description détaillée de l’ensemble des biens loués. Il a pour objectif de dresser l’inventaire
des lieux au jour de l’entrée en jouissance du fermier. Il est également l’occasion de venir préciser
des points qui ne l’auraient pas été dans le bail (exemple : un propriétaire bailleur qui se réserve la
jouissance partielle d’un bien figurant dans le bail).
Pour les terres agricoles, l’état des lieux devra préciser leur étendue, leur qualité, leur degré
d’entretien, le rendement moyen obtenu sur les cinq dernières années…
Il conviendra également de répertorier l’état de fonctionnement des systèmes d’irrigation et de
drainage présents, la présence d’arbres, de haies, de clôtures ainsi que les chemins d’exploitation
figurant dans le bail.
Concernant les bâtiments, il conviendra de faire une description des plus précises à la fois pour
l’intérieur et pour l’extérieur de ces derniers.
Concernant l’aspect extérieur, il conviendra de mentionner la situation du bâtiment, ses abords et
moyens de desserte, l’état des murs, de la couverture, des menuiseries et volets…
Pour l’intérieur, les éléments diffèreront selon qu’il s’agit d’une maison d’habitation ou un bâtiment
d’exploitation. Toutefois il conviendra de décrire la superficie et l’ensemble des aménagements
réalisés (état du sol, des murs …)
Enfin, il est d’usage de faire figurer dans l’état des lieux les quantités de paille, foin, fumier que le
fermier trouvera lors de son entrée sur l’exploitation.
Anthony ARLOT
Juriste
Chambre d’Agriculture de la Vienne