«L`énergie positive de la maison nous aide à créer»

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«L`énergie positive de la maison nous aide à créer»
Art de vivre
Art de vivre
Sandrine et Riccardo Barilla
«L’énergie positive
de la maison
nous aide à créer»
C’est dans leur maison au style contemporain,
nichée aux détours de petits chemins
dans la campagne genevoise, que les
photographes Riccardo et Sandrine Barilla
travaillent en compagnie de leurs deux chats
et deux chiens. Un art de vivre teinté
d’une perpétuelle bonne humeur.
Sandrine et Riccardo Barilla dans leur atelier,
entouré de quelques-uns des accessoires qu’ils utilisent pour leurs photos.
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«N
Reconstitution pour rire – avec cette fois tous les animaux –
de la photo «It’s a pity», où Sandrine et Riccardo regrettent qu’un artiste doive
souvent attendre d’être mort pour être reconnu.
«Pour réaliser cette photo, nous avons confectionné nous-mêmes les cercueils
et la pierre tombate, explique Sandrine. Nous nous sommes placés chacun
à l’intérieur et il a fallu convaincre le chien de rester bien sage pendant
que la photo se déclenchait!».
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ous avons le rythme
de l’époque où nous
travaillions dans la
finance. Nous commençons tôt et
nous finissions tard. J’arrive encore
assez bien à passer du mode on à
off, à partir faire un tour en vélo
pour me changer les idées, mais pas
Sandrine. Elle ne sait pas s’arrêter»,
dit en riant Riccardo Barilla.
C’est au sous-sol de la maison, entièrement rénovée dans un style
contemporain épuré, que les deux
artistes ont installé leur atelier.
«Nous avons tout de suite été séduits par l’énergie de la maison et
la vue dégagée, explique Sandrine.
La bâtisse datait des années 60 et
le challenge consistait à la rénover
tout en conservant son identité».
Le pari est réussi et la maison étire
désormais sa silhouette longiligne
dans une parfaite homogénéité
entre le bâtiment original et le nouveau. La cuisine joue le rôle de lieu
de rendez-vous. «Je ne suis pourtant
pas une grande cuisinière, s’amuse
Sandrine, mais tout le monde se
retrouve là spontanément. Les enfants viennent travailler ici, alors
Les deux artistes se mettent en scène dans un immense
shopping bag, un code barre dans le dos, pour dénoncer
la starisation de l’artiste, devenu un produit de marketing
comme un autre.
Intitulé «Do we need another brain to be creative?», le triptyque met en scène
le cerveau réfléchissant de l’intellectuel, celui en or du banquier, posé
dans une boîte habillée de billets de banque, et celui teinté de vert du jardinier.
qu’ils ont leur chambre. Même Rebel, qui est pourtant un chat extrêmement indépendant, vient se
joindre à nous!».
La décoration minimaliste, mais
chaleureuse, classique, mais audacieuse, reflète bien le caractère anti-conformiste et l’humour pétillant
des deux artistes. Après avoir souligné les rapports ambigus entre
créativité et régularité, ils explorent
dans leur dernière série, intitulée
«It’s just another job», sur un ton
décalé et délicieusement provocateur, la phrase d’Andy Warhol: «Why
do people think artists are special?
It’s just another job».
Sous l’objectif de Sandrine et Riccardo, les idées préconçues sur
les artistes se traduisent par treize
mises en scène, oscillant entre
manifeste contestataire et hommage érudit. Cercueils, cordes de
pendus, crânes, cerveau humain et
boîte à outils aux allures de cabinet de curiosité se retrouvent sur
des œuvres fortes, très esthétiques,
soulignées par leur dépouillement
et le jeu de lumières. Loin d’être revendicatrice, leur approche cultive
l’humour caustique, même à leur
égard. Ils n’hésitent pas à se mettre
en scène dans des compositions
burlesques, quémandant l’aumône,
grimés en riches mendiants devant
l’entrée de la très sérieuse Art Basel.
Mieux encore, ils n’hésitent pas endosser des costumes de farfalle et
de rigatoni géants, en réponse aux
critiques s’intéressant davantage à
leur lien avec la marque italienne de
pâtes qu’à leur art.
Un cocktail réussi entre art et humour. n
Julia Rossi
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