Ecole, enseignement supérieur : diplôme, démocratisation

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Ecole, enseignement supérieur : diplôme, démocratisation
Ecole, enseignement supérieur : diplôme, démocratisation,
compétitivité
Les jeunes, y compris diplômés, éprouvent aujourd’hui de grandes difficultés à s’insérer sur
le marché du travail. Certains en déduisent que l’élargissement de l’accès au baccalauréat
et aux diplômes de l’enseignement supérieur fonctionne comme un « piège démographique
», contraignant des générations d’étudiants à des études inutiles et concourant à dévaloriser
les diplômes.
Cette thèse, qui s’inscrit dans un mouvement de remise en cause de la démocratisation
scolaire, n’est qu’une idée reçue. Les difficultés d’insertion rencontrées par les jeunes ne
doivent pas occulter les acquis de la démocratisation scolaire en termes de moindres
inégalités : l’emprise des « puissances de l’hérédité » sur les inégalités de destin a reculé,
même si l’accès aux formations les plus élitistes demeure marqué par de fortes inégalités
sociales.
Ensuite, le sentiment de déclassement partagé par nombre de jeunes quand ils confrontent
leurs conditions d’insertion dans la vie active aux diplômes obtenus est en partie contredit
par les faits : les bénéficiaires de l’élévation moyenne du niveau de formation ont en
moyenne gagné des salaires plus élevés que les générations antérieures, moins diplômées.
Loin de s’être dévalorisés, les diplômes offrent à leurs détenteurs des avantages cumulatifs,
en termes de salaires, de statut et de protection. Il est vrai que le mieux-être des diplômés
par rapport aux non-diplômés tient aussi aux évolutions du marché du travail, devenu plus
dur pour les non-diplômés, pour des raisons qui tiennent à la fois aux transformations des
structures de l’emploi et à la concurrence induite par le chômage de masse. La persistance
d’inégalités scolaires conduit donc à un constat d’inachèvement : il faut désormais continuer
d’élargir l’accès à l’enseignement supérieur tout en luttant efficacement contre l’échec
scolaire, de manière à assurer la formation et la qualification de tous.
L’élévation générale du niveau de formation est un facteur d’élévation de la productivité du
travail. L’investissement éducatif constitue une excellente opération non seulement pour ses
bénéficiaires directs, mais aussi pour l’ensemble de la société. La démocratisation de l’Ecole
satisfait non seulement un objectif de justice sociale, mais également d’efficacité globale de
notre système économique. Toute la question demeurant cependant de savoir comment ces
gains sont répartis.
En outre, la coïncidence entre la demande de développement économique humain et durable
et la nécessité de former des femmes et des hommes doués d’un esprit critique, responsables,
créatifs, solidaires, suppose qu’ils aient acquis des qualifications et des diplômes qui, dans
leurs contenus, leurs modalités d’obtention, valorisent connaissances, compétences, aptitudes
et les capacités qui y concourent. ce titre, citons en exemple les « projets pluridisciplinaires
à caractère professionnel » des lycées professionnels.
Notre système éducatif et notre enseignement supérieur ont donc, plus que jamais, à trouver
les voies et moyens nécessaires pour atteindre les objectifs qui lui ont été fixés :100% d’une
classe d’âge disposant d’une formation et d’une qualification de niveau V (CAP/BEP); 80%
d’une classe d’âge atteignant le niveau IV (Baccalauréats) ; 50% d’une classe d’âge accédant
aux qualifications de niveau III et II ; relance, enfin, de la formation tout au long de la vie, et
de la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE), au bénéfice de tous.
Philippe Frémeaux, Editorialiste à Alternatives économiques
Arnold Bac, membre du Comité National Education de la Ligue de l’enseignement