Chapitre 3 - Laseve

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Chapitre 3 - Laseve
CHAPITRE 3
LE MATÉRIEL VÉGÉTAL ET L’EXTRACTION
Bachir Benjilali, professeur
Département des sciences alimentaires et nutritionnelles, Institut agronomique et
vétérinaire (I.A.V.) Hassan II, B. P. 6202, Rabat, Maroc.
[email protected]
INTRODUCTION
Plusieurs techniques sont disponibles pour la préparation d’extraits, à intérêts aromatiques,
à partir des plantes aromatiques et médicinales (chapitre 2). La distillation (entraînement à
la vapeur d’eau) est l’une de ces techniques la plus ancienne et la plus courante. Avant de
procéder à cette opération qui vise à recueillir l’huile essentielle, la préparation du
matériel végétal est une opération importante qu’il faut mener avec soin, car la gestion du
procédé d’extraction et la qualité de l’extrait obtenu seront largement tributaires de cette
préparation.
Plus généralement, ce chapitre traitera des opérations portant sur le matériel végétal depuis
sa récolte (formes cultivées ou spontanées) jusqu’à l’obtention des produits de
l’extraction.
1. L’ENTREPOSAGE DU MATÉRIEL VÉGÉTAL : LE SÉCHAGE
La gestion d’une usine d’extraction n’est pas simple dans la mesure où la matière végétale
n’est disponible qu’à des périodes particulières de l’année : de quelques jours (cas des
fleurs et de certaines plantes cultivées,) à plusieurs mois (feuillages de conifères). Il est
évident que pour amortir les coûts d’infrastructure, il est préférable d’étaler dans le temps
le fonctionnement de l’usine, ce que ne permet pas nécessairement le traitement de la
matière végétale au fur et à mesure de sa récolte, d’où l’intérêt éventuel de son stockage.
D’autre part, il est généralement difficile de régler l’activité de la récolte, exactement, sur
la capacité journalière de traitement de la distillerie. Ceci est particulièrement vrai dans le
cas des espèces végétales spontanées. En effet, dans ce cas, la récolte dépend de la
disponibilité de la main-d’œuvre, des conditions climatiques, des habitudes sociales (jours
de fêtes, de souks, …), etc. alors que la distillation ne dépend, à priori, que de la capacité
des installations. Il est, ainsi, normal que la distillerie procède à un stockage, pendant une
période plus ou moins longue, de la biomasse végétale avant son traitement.
Durant le stockage, quelle que soit la raison de ce dernier, la plante se dessèche. On peut
se demander si ce pré-séchage du matériel végétal à extraire, n’a pas d’effet sur
l’opération d’extraction. En particulier, en étant plus sec, le matériel végétal contiendra
Huiles essentielles : de la plante à la commercialisation – Manuel pratique
moins d’humidité et demandera donc moins d’énergie pour l’amener au voisinage de
100 ºC.
Les exemples qui suivent montrent les résultats de certaines études consacrées à cette
question.
Une étude (1) a été réalisée dans le cas du romarin de la façon suivante: un lot de
plusieurs kg de feuilles est bien homogénéisé et exposé à l'air libre et à l'ombre. Chaque
jour, on prend trois échantillons pour effectuer la distillation (hydrodistillation). Un
quatrième échantillon est utilisé pour la détermination de la matière sèche par étuvage à
104 °C. Le rendement augmente d'abord jusqu'à atteindre un optimum puis diminue. En
particulier, le maximum est atteint après 6 jours pour une espèce et 8 pour l'autre (Fig. 1).
À la comparaison de l’évolution de la teneur en eau pendant le séchage et celui du
rendement, il semble que les deux phénomènes sont totalement indépendants l’un de
l’autre.
On perçoit bien, dans cet exemple, les avantages qu’il y a à sécher le matériel végétal, à
l’ombre, pendant une semaine environ : multiplication par quatre du rendement et
diminution de 40 % de la teneur en eau (Fig. 2).
3
Rendement
en huile (%)
Humidité 50
(%)
40
2
Rendement
30
1
20
Humidité
0
10
10
20
Durée du séchage en jours
Figure 1. Distillation du romarin : humidité de la plante et rendement en huile après
séchage à l’air libre et à l’ombre.
Toujours selon le même protocole, le séchage au soleil donne un effet similaire à celui
observé à l'ombre mais avec deux différences importantes. Tout d’abord, l'optimum est
atteint plus rapidement Par contre, l'augmentation du rendement est moins importante
qu'à l'ombre (Fig. 2). Évidemment ce cas de figure est celui du romarin.
En résumé, le séchage de la plante, avant sa mise en distillation, est un traitement qui a
des effets très nets sur le rendement en huile essentielle. Plusieurs travaux ont été menés
sur cette question et ont confirmé un phénomène général. Le rendement en huile
essentielle, exprimé par rapport à la matière sèche, évolue durant le séchage du matériel
végétal avant sa distillation ; ce rendement commence, dans une première phase, par
62 Corporation LASEVE
Chapitre 3. Le matériel végétal et l’extraction
Rendement
en huile (%)
2
en MS
Séchage à l'air
libre
1
Séchage solaire
0
4
8
12
16
Durée du séchage en jours
Figure 2. Distillation du romarin :
effet du séchage sur le rendement en huile, à l'air libre et au soleil.
augmenter très nettement. Il atteint un maximum. Puis dans une deuxième phase, il
baisse régulièrement. La durée de la première phase et le niveau du rendement optimal
dépendent de l’espèce végétale concernée et des conditions de séchage mises en œuvre
(séchage naturel à l’ombre ou au soleil). Cette règle a été confirmée pour l’eucalyptus
(Fig. 3) (2,3), pour la verveine (figure 4) (4,5), pour les lavandes (6), pour la tanaisie
annuelle (Fig. 5) (7, 8) et pour le romarin (9, 10). Sur l’ensemble des travaux réalisés sur
cette question au laboratoire des plantes aromatiques, à l’I.A.V. Hassan II, seule une
espèce a échappé à cette règle. Il s’agit du ciste ladanifère. Dans ce cas, la teneur en
huile essentielle reste constante pendant plusieurs semaines (11). Au Québec, la même
observation a été faite dans les cas des feuillages du sapin baumier (Abies balsamea (L.)
Mill.), de l’épinette noire (Picea mariana (Mill.) B.S.P.) et du bois de Thuja occidentalis
(12).
Zrira (3) a cherché à comprendre l’origine de ce phénomène. Après avoir vérifié
plusieurs hypothèses, elle a conclu qu’il s’agit d’un phénomène biologique. La plante,
après sa récolte continue à vivre et son activité de biosynthèse des terpènes et dérivés
s’accentue. Il paraît s’agir pour la plante d’un moyen de défense contre le stress
hydrique. C’est ce qui expliquerait l’augmentation des rendements en huiles essentielles
pendant les premières phases des courbes représentées dans les figures 1 à 5. Après la
mort définitive de la plante, toute l’activité de biosynthèse s’arrête et les pertes d’huiles
essentielles par évaporation ne sont plus compensées, d’où les baisses des rendements de
distillation.
63
Huiles essentielles : de la plante à la commercialisation – Manuel pratique
Figure 3. Cas des feuilles d’Eucalyptus camaldulensis) : rendement en
huile essentielle et taux d’humidité après séchage naturel à l’ombre (2).
Figure 4. Cas de la verveine (Lippia citriodora) : rendement en huile
essentielle après séchage naturel à l’ombre (4, 5).
Figure 5. Cas de la tanaisie annuelle (Tanacetum annum) : rendement en huile
essentielle après séchage naturel à l’ombre (7).
64 Corporation LASEVE
Chapitre 3. Le matériel végétal et l’extraction
Même si ce phénomène paraît, ainsi, être commun à de nombreuses espèces aromatiques,
il faut, cependant, éviter une généralisation trop hâtive. Des exceptions peuvent exister :
on a déjà signalé le cas du ciste ladanifère, pour lequel, la teneur en huile essentielle reste
constante pendant plusieurs semaines (11). Dans le cas de certains conifères, le séchage
n’a que peu d’importance sur la quantité et la qualité de l’huile recueillie (13). Il diminue
seulement la masse du végétal chargé dans l’alambic puisque celui-là a perdu une part
importante de son humidité.
2. LE BROYAGE
Certaines technologies modernes de distillation des plantes aromatiques exigent un
broyage du matériel végétal avant qu’il ne soit mis au contact de la vapeur d’eau pour
l’entraînement des constituants volatils. L’opération du broyage est exigée par les
procédés eux même et elle faciliterait, d’après les auteurs de ces derniers, l’extraction de
l’huile essentielle par l’augmentation de la surface d’échange. Ainsi, dans le cas du
procédé de distillation en continue mis au point par AROMAPROCESS, dit "turbodistillateur" (voir chapitre précédent), c’est le matériel végétal lui-même qui, comprimé à
la sortie et à l’entrée du corps du distillateur par une vis sans fin suffisamment puissante,
permet de diriger la vapeur en continu suivant le chemin habituel : générateur de vapeur,
écoulement en contre courant du matériel végétal dans le corps d’extraction, évacuation
de la vapeur chargée des constituants de l’huile essentielle vers le condenseur puis le
séparateur de l’huile essentielle. Pour réussir cette opération (formation de bouchons en
matériel végétal, mobiles et suffisamment étanches à la vapeur d’eau), ce matériel végétal
doit subir, au préalable, un broyage conséquent. Par ailleurs, ce broyage, s’il est bien
étudié, augmente en principe la surface d’échange entre le milieu solide et la vapeur d’eau
et améliore la vitesse d’extraction de l’huile essentielle et le rendement de l’opération de
distillation. C’est en tout cas l’un des points forts que défendent les auteurs du procédé.
La distillation en containers (voir chapitre précédent) telle qu’elle est utilisée par
plusieurs distilleries modernes, exige un minimum de broyage de la plante pour faciliter
le chargement mécanique de "l’alambic" sur le lieu de récolte.
Dans d’autres cas, le broyage est exigé par la nature de la matière première. Ainsi, la
distillation du bois (bois de cèdre, bois de thuya …) ne peut nullement être envisagée
sans un broyage approprié. Parfois, la distillation n’est économiquement envisageable
que pour une matière déjà broyée et pulvérisée. La distillation du bois du cèdre de l’Atlas
en est un bon exemple. En effet, vu le coût de ce bois et le prix de son huile essentielle, il
est difficile d’envisager la distillation d’autres choses que de la sciure et des résidus qu’on
récupère dans les scieries spécialisées.
Le broyage n’a pas que des retombées positives sur la vitesse de distillation et sur le
rendement en huile essentielle. Un broyage trop fin, risque de gêner la circulation de
vapeur et ralentir la vitesse de distillation. Il peut également entraîner l’apparition des
chemins préférentiels pour la vapeur et réduire donc les rendements en huile essentielle.
L’occasion nous a été donnée plusieurs fois de constater ce phénomène lors de la
distillation de la sciure du bois de cèdre de l’Atlas au Maroc. Les distillateurs ne
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Huiles essentielles : de la plante à la commercialisation – Manuel pratique
produisent pas la sciure et donc ne maîtrisent pas la granulométrie de la matière traitée.
Ils traitent ce qu’ils peuvent récupérer dans les scieries et c’est généralement de la sciure
trop fine pour l’opération de distillation ; on voit nettement l’effet négatif de cette
granulométrie tant sur la vitesse que sur le rendement de distillation.
L’exploitation de feuillages de conifères au Québec implique l’introduction de branches
dans l’alambic. Dans les cas du sapin baumier et de l’épinette noire, les bois ne
contiennent pas ou peu d’huiles (13). L’ajout de grosses branches n’ajoute rien à
l’extrait, augmente la charge à chauffer et laisse un pourcentage élevé d’espace inoccupé
dans l’alambic, espace qui permettra à la vapeur de s’échapper rapidement sans entrer en
contact avec le feuillage. Il faut donc réaliser un bon équilibre entre le broyage grossier
et le broyage fin. Les exploitants indiquent qu’un broyage produisant des ramilles de 2 à
3 cm est tout à fait convenable.
3. LE CHARGEMENT DE L’ALAMBIC
Dans la littérature on trouve souvent des indications assez ambiguës sur la façon de
charger un alambic en matériel végétal :
1- Il faut que le chargement soit suffisamment régulier pour éviter des passages
préférentiels pour la vapeur d’eau ;
2- Il faut bien tasser la biomasse végétale dans l’alambic pour éviter l’écoulement trop
rapide de la vapeur ;
3- Mais un tassement trop fort risque de provoquer un "colmatage" de la masse végétale
ce qui ralentit la distillation et force la vapeur à se créer des chemins préférentiels.
Muñoz (14) a estimé la capacité de charge d’un alambic comme celle qui correspond à
une densité apparente de 0,20 à 0,25 kg/dm3 pour les espèces aromatiques les plus
courantes (romarin, lavande, etc.). Autrement dit, un alambic de 3 m3 de volume utile
aurait la capacité de charge de 3 000 × 0,20 à 3 000 × 0,25, soit 600 à 750 kg de matériel
végétal. De notre part, nous avons essayé d’évaluer l’effet de la charge, en matériel
végétal sur le rendement en huile essentielle et sur la qualité physico-chimique de cette
dernière. Ce travail a été réalisé sur l’eucalyptus, par vapohydrodistillation et grâce à un
appareil pilote de 100 litres de volume utile. Les résultats obtenus sont reproduits dans le
tableau 4.1. La charge maximale, dans nos conditions de travail (feuillus d’eucalyptus
légèrement fanés), était de 20 kg, soit une densité apparente de 0,2. La forme sous
laquelle le végétal est traité (feuilles seules ou brindilles feuillues) a également un effet
sur le rendement en huile essentielle.
Ces données montrent que la distillation des feuilles est difficile. Les feuilles seules se
tassent plus facilement et s’agglutinent entre elles rendant difficile la circulation de
vapeur et donc l’entraînement de l’huile essentielle. Les brindilles feuillues donne à la
charge végétale dans l’alambic une forme plus spongieuse qui facilite la circulation de la
vapeur d’eau. Mais dans ce cas, la charge maximale de l’alambic est de 15 kg soit une
densité apparente de 0,15 au lieu de 0,20. Mieux encore, les données de ce tableau
montrent que la diminution de la charge à 12 kg (densité apparente de 0,12) améliore
66 Corporation LASEVE
Chapitre 3. Le matériel végétal et l’extraction
encore le rendement en huile essentielle. Il est évident que ces résultats ne sont donnés
qu’à titre indicatif : ils concernent l’eucalyptus et un appareil pilote de petite contenance.
Tableau 4.1. Effet de la forme du matériel végétal traité (feuilles ou brindilles feuillues)
et de sa charge dans l’alambic, sur le rendement en huile essentielle d’Eucalyptus
camaldulensis Dehn. (durée de distillation 40 min).
Nature du
matériel végétal
traité
Charge
(kg)
feuilles seules
brindilles feuillues
brindilles feuillues
20
15
12
Pourcentage
des feuilles
dans la
charge
100
66
65
Rendement en huile
essentielle (en % de
matière sèche des
feuilles)
0,59
0,94
1,11
En conclusion, on pourrait retenir que :
- La capacité de charge d’un alambic dépend de la nature du matériel végétal et de son
état (humidité par exemple). La donnée qui limiterait la charge à des densités
apparentes de 0,20 à 0,25 doit être considérée comme étant vraiment à titre indicatif.
Seule l’expérience ou encore mieux l’expérimentation, donneront pour chaque espèce
végétale la charge optimale d’un alambic donné.
- La forme du matériel végétal joue un rôle très important dans la réussite de
l’opération de distillation. Même si l’huile essentielle est localisée essentiellement
dans les feuilles (eucalyptus, romarin, armoise, myrte, …), la présence d’un minimum
de bois dans la charge végétale peut faciliter la circulation de vapeur et donc assure un
meilleur entraînement de l’huile essentielle.
- La répartition aussi régulière que possible de la charge végétale tout le long de
l’alambic est une condition nécessaire pour la réussite d’un bon épuisement de la
plante. La maîtrise de cette opération (opération de chargement de l’alambic) ne peut
s’acquérir que par l’expérience. On ne devient pas conducteur d’une distillerie du
jour au lendemain.
Le tassement de la charge dans des alambics classiques (3 m3 de volume) peut se faire par
des techniques simples. Pendant le remplissage de la cuve, 1 ou 2 ouvriers montent audessus de la charge pour la fouler au pied. Dans des alambics plus grands (10 m3) on peut
utiliser des moyens de tassement plus conséquents. Certains producteurs espagnols
utilisent des portes charges qui actionnent un poids quelconque, par exemple des grands
pneus (pneus de gros engins) sur lesquels on a fixé une masse de béton construite pour cet
objectif. Dans tous les cas, on réussit mieux le tassement en commençant dès le début de
l’opération de chargement.
Par ailleurs, pendant le remplissage de la cuve, l’injection d’un peu de vapeur dans la
biomasse facilite son tassement à travers une pré-cuisson.
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Huiles essentielles : de la plante à la commercialisation – Manuel pratique
4. LA DUREE DE LA DISTILLATION
4.1. La durée et la quantité
En pratique, la gestion d’une distillerie pose deux questions fondamentales :
1- À quelle vitesse faut-il mener l’opération de distillation c’est-à-dire à quel débit de
vapeur (ou d’eau blanche) faut-il travailler ? En général, la vitesse de distillation est
jugée par le conducteur de l’opération que les professionnels appellent, parfois, un
″chauffeur″ de l’alambic. Il doit avoir une bonne expérience. La vitesse de
distillation (donc du chauffage) doit être aussi régulière que possible. On peut
l’estimer grâce à la quantité d’eau blanche produite (= c'est-à-dire la quantité de
vapeur condensée) par unité de temps. Pour une distillation de 3 h et demi environ, la
quantité d’eau blanche est de l’ordre de 70 litres (pour une charge de 500 à 700 kg de
matériel végétal) ou 10 à 14 litres d’eau par quintal de matériel végétal soit un débit
moyen de 20 litres par heure.
2- Quelle est la durée optimale d’une opération de distillation pour une plante donnée ?
La figure 6 montre que l’extraction de l’huile de tanaisie vulgaire (Tanacetum vulgare)
récoltée au Québec est à peu près complète après 20 minutes dans les cas des tiges et des
feuilles et de 40 minutes dans le cas des fleurs. Dans le cas des racines de vétiver, la
durée d’extraction requise se situe dans la vingtaine d’heures.
3
Huile (mL)
Fleurs
2
Tiges + feuilles
1
0
0
20
40
60
80
Temps d’hydrodiffusion (min)
Figure 6. Production d’huile essentielle de tanaisie vulgaire en fonction du temps
d’extraction (hydrodiffusion) (15).
L’exemple de la distillation du bois de Thuja occidentalis (Fig. 7) est intéressant. En
effet, en portant la quantité d’huile recueillie en fonction de l’inverse du temps de
distillation, on obtient une droite. En extrapolant de cette droite vers zéro, donc vers un
temps de distillation infini, on obtient la quantité théorique maximale d’huile contenue
dans la matière végétale (Fig. 7 et 8).
68 Corporation LASEVE
Chapitre 3. Le matériel végétal et l’extraction
Quantité d’huile (g)
300
200
100
0
0
2
4
6
Temps de distillation (heures)
Figure 7. Production d’huile à partir de 22 kg de bois de Thuja occidentalis L. (16).
325
Quantité (g)
275
225
175
125
75
0,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2
1/(temps de distillation) 1/(heure)
Figure 8. Production d’huile en fonction de l’inverse du temps de distillation
(Voir la figure précédente); y = 310 − 192 x; r2 = 0,998.
Une autre façon d’apprécier la quantité maximum a été utilisée. Dans ce cas, sur un
graphe on porte la quantité ou le volume extrait en fonction du logarithme de [1 – (Xt –
X)], soit donc,
Xt ⎞
⎛
Volume d’huile essentielle récupérée = Ln ⎜1 − X ⎟ (A)
⎝
⎠
Dans cette expression, la constante X est la quantité maximale d’huile essentielle
extractible par unité de masse végétale dans des conditions opérationnelles données et Xt
est la quantité d’huile extraite après un temps t. Les différents travaux réalisés dans ce
domaine ont montré qu’effectivement, les courbes obtenues pour l’équation (A) peuvent
être assimilées à des droites avec de très bons coefficients de corrélation mais l’ordonnée
à l’origine n’est pas toujours nulle. Autrement dit, l’équation (A) s’écrirait plutôt :
Xt ⎞
⎛
Y = Ln ⎜1 − X ⎟ =
⎝
⎠
kt+B
(B)
B et k sont des constantes.
69
Huiles essentielles : de la plante à la commercialisation – Manuel pratique
Cette dernière forme de représentation de la cinétique d’extraction semble être
généralisable à toutes les espèces végétales soumises à l’extraction des huiles essentielles
par entraînement à la vapeur d’eau.
Les figures qui suivent pour l’Eucalyptus camaldulensis (Fig. 9) et la tanaisie annuelle
(Tanacetum annuum) (Fig. 10) montrent la bonne linéarité. On a superposé sur les
graphiques la droite optimisée sur les valeurs expérimentales. L’extrapolation à zéro
donne la quantité théorique maximum d’huiles que l’on peut extraire.
En fait, l’épuisement total de la masse végétale traitée est pratiquement impossible ; elle
demanderait une durée trop longue. Logiquement, on ne distille jamais une plante jusqu’à
ce qu’on ne récupère plus aucune trace d’huile essentielle, mais on distille jusqu’à ce que
les résultats obtenus ne justifient plus les coûts de la poursuite de l’opération de
distillation. En effet, la quantité d’huile essentielle récupérée par unité de temps
commence à baisser très rapidement, après la phase exponentielle de départ alors que les
coûts restent constants (consommation de vapeur par unité de temps constante, charges
constantes de main d’œuvre, …).
Figure 9. Cinétique d’extraction des huiles essentielles des feuilles
d’E. camaldulensis par entraînement à la vapeur d’eau.
(X= Volume d’huile récupérée après 110 min de distillation, soit 62,5 mL).
70 Corporation LASEVE
Chapitre 3. Le matériel végétal et l’extraction
Figure 10. Cinétique d’extraction des huiles essentielles par entraînement à la vapeur
d’eau, à partir de la tanaisie annuelle (T. annuum L.).
(X = Volume d’HE extraite après 6 h de distillation soit 15,05 mL).
La méthode illustrée ci-dessus permet de fixer, avec une bonne précision, la durée
pratique de distillation, par exemple la durée nécessaire pour récupérer 90 %, 80 % ou 70
% de la totalité de l’huile essentielle extractible dans les conditions opératoires retenues
(90 %, 80 % ou 70 % de X). Pour le cas de l’eucalyptus, on obtient 70 % de l’huile
essentielle totale (huile essentielle totale récupérable en 3 h) en 31 min, 80 % en 41 min,
90 % en 64 min et 100 % en 3 h.
4.2.
La durée et la qualité
Par ailleurs, la composition de l’huile obtenue n’est pas nécessairement constante pendant
toute la durée de la distillation. En effet, la diffusion à travers les membranes ou les tissus
où est stockée l’huile dans le végétal varie d’une molécule à l’autre. En première
approximation, on peut imaginer que les monoterpènes, molécules plus petites et plus
légères que les sesquiterpènes, diffuseront plus vite que ces dernières et donc distilleront
plus vite. Par ailleurs, il est des cas où les constituants de l’huile ne sont pas tous situés
dans les mêmes organes. Ainsi, dans le cas de l’achillée millefeuille (Achillea millefolium
L.), si les terpènes sont extraits dans les premières 30 min, le chamazulène demande
plusieurs heures de distillation. La conduite de l’extraction dépend donc de ce que l’on
cherche.
Ce dernier exemple montre que si l’on cherche une huile composée surtout de sabinène,
de camphre et de β-thujone, la distillation doit s’arrêter après 30 minutes. Par contre, si
on cherche spécifiquement le chamazulène, la distillation devient intéressante après 30
minutes (Fig. 11).
71
Huiles essentielles : de la plante à la commercialisation – Manuel pratique
Figure 11. Variation de la composition (%) de l’huile d’achillée millefeuille
en fonction du temps de distillation (18).
Note : La composition est celle de l’huile recueillie entre 0 et 15 minutes,
puis entre 15 et 30 minutes et ainsi de suite.
Ce dernier exemple montre que si l’on cherche une huile composée surtout de sabinène,
de camphre et de β-thujone, la distillation doit s’arrêter après 30 minutes. Par contre, si
on cherche spécifiquement le chamazulène, la distillation devient intéressante après 30
minutes…
Un autre exemple tiré de l’extraction de l’huile de bois de cèdre de l’est du Canada,
Thuya occidentalis L., montre que la composition instantanée de l’huile essentielle
recueillie en fonction du temps d’extraction (Fig. 12). Si la concentration de
l’occidentalol et celle de l’alpha-thujaplicine décroissent avec le temps, les
concentrations de plusieurs autres constituants augmentent avec le temps (12). On a pu
montrer indirectement que les trois isomères que sont l’occidol, l’occidol #1 et l’occidol
#2 sont des composés d’oxydation, probablement absents de l’huile essentielle
préexistante dans la plante, mais apparaissant au cours de l’extraction.
72 Corporation LASEVE
Chapitre 3. Le matériel végétal et l’extraction
Figure 12. Variation observée de la composition instantanée de l'huile essentielle
de bois de cèdre au cours de l’extraction à la vapeur.
CH3
O
CH3
OH
OH
H
CH3
CH3
occidentalol
occidénol
OH
OH
H
α-eudesmol
γ-eudesmol
OH
OH
occidol
O
α-tujaplicine
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Huiles essentielles : de la plante à la commercialisation – Manuel pratique
OH
occidol #1
OH
occidol #2
Un autre exemple mérite d’être rapporté : c’est celui de l’Eucalyptus globulus. L’huile du
feuillage de cet arbre contient principalement du 1,8-cinéole. Certains exploitants
distillent pendant plusieurs heures pour récolter le maximum d’huile. Dans ces cas, l’huile
contient entre 60 et 70 % de 1,8-cinéole, en dessous du minimum requis par les normes
internationales. En arrêtant la distillation après 90 minutes, la concentration en cinéole
dépasse alors 80 %, bien au-dessus de ce minimum. Dans le premier cas, il faut ajouter
une étape d’enrichissement (distillation sur colonne) pour atteindre la norme, d’où des
coûts supplémentaires. Dans le second cas, en ayant écourté le temps d’extraction, on a
diminué les coûts d’exploitation.
Une approche théorique et pratique beaucoup plus élaborée relative aux débits de vapeur
requis, au tassement du matériel végétal dans la cuve, à la hauteur de la charge, ainsi qu’au
coefficient d’humidité de la vapeur a été publiée. Le professionnel ou mieux l’ingénieur
de procédé y trouvera une information extrêmement pertinente quant au design de
l’appareillage d’extraction tout particulièrement en fonction des qualités intrinsèques de la
matière végétale à traiter (18).
5. LE STOCKAGE DE L’HUILE ESSENTIELLE
En production industrielle, l’huile essentielle doit être stockée à l’abri de la lumière dans
des conteneurs inertes vis-à-vis des constituants de l’huile essentielle. Les conteneurs en
plastiques ou matériaux similaires sont à proscrire. Au Maroc, et ailleurs, on utilise
essentiellement des fûts de 200 litres en acier ordinaire galvanisé à l’intérieur. Ce type de
conteneur a l’avantage d’être toujours disponible, facile à manipuler, relativement bon
marché et ne semble pas poser de problèmes quant à la qualité de l’huile essentielle.
Le stockage de l’huile essentielle à l’échelle industrielle pose un autre problème, celui de
la standardisation de la qualité de la production annuelle. Les professionnels bien
informés n’écoulent jamais leur stock, fût par fût, au hasard ou suivant un ordre
quelconque (ordre de date de production par exemple).
En effet, une campagne de distillation d’une espèce végétale donnée, surtout s’il s’agit
d’une espèce spontanée (romarin, thym, armoise, …), peut prendre plusieurs mois par an
et peut s’étendre sur des milliers d’hectares. Or, en règle générale, la qualité de l’huile
essentielle (composition chimique, qualités olfactives et organoleptiques) change avec la
période de production, le stade végétatif de la plante à la cueillette ainsi qu’avec le milieu
74 Corporation LASEVE
Chapitre 3. Le matériel végétal et l’extraction
de production. Ainsi, lorsqu’un producteur a élaboré 20 t d’huile essentielle de romarin
durant l’année, représentant plus de 100 fûts de 200 litres chacun, les caractéristiques
intrinsèques des huiles essentielles de ces 100 fûts sont pratiquement toutes plus ou moins
différentes les unes des autres.
Dans ces conditions, quand on propose un échantillon commercial à un client éventuel, on
ne peut pas lui proposer 100 échantillons différents (un par fût), comme on ne peut pas
courir le risque de considérer un fût comme représentatif de l’ensemble ; sinon, on risque
de décevoir le client le jour de la livraison (livraison non conforme à l’échantillon
commercial). Pour résoudre ce problème, les professionnels avertis fournissent les
échantillons sous forme de "communnelle" de l'année. Il s’agit d’un échantillon moyen
de toute la production de l’année. On prélève un même volume de chaque fût pour
constituer la "communnelle" de laquelle seront prélevés tous les échantillons
commerciaux. Le client sera ainsi assuré qu’à la livraison, il recevra un produit
parfaitement conforme à l’échantillon commercial et non pas à un fût.
À moins de disposer d’un énorme réservoir pouvant contenir la production annuelle (20 t
dans cet exemple), la meilleure démarche pour mettre ce système en pratique consiste à
stocker la production de l’année dans différents fûts fixés en lignes (en un ou plusieurs
niveaux), en hauteur sur une charpente métallique par exemple. Chaque fût est muni à sa
partie inférieure d’une conduite permettant de le vider au travers d’un système de mesure
des volumes. Ces conduites sont ensuite réunies dans un collecteur commun qui permet
de remplir les fûts d’expédition. Ainsi lorsque l’on veut préparer un fût de 200 litres de
la communnelle de l’année, il suffit de prélever 2 litres de chacun des 100 fûts de
stockage. L’opération est simple et précise : il suffit d’ouvrir, pour chaque fût, le robinet
qui alimente le système de mesure de volume puis on évacue vers le collecteur commun et
le fût d’expédition.
Cette forme d’organisation de l’aire de stockage, permet d’écouler toute la production de
l’année de manière standardisée quant à la qualité du produit. Malheureusement, tous les
professionnels ne peuvent pas toujours être organisés de la sorte. Certes, cette forme
d’organisation a un coût, mais elle permet de rationaliser le travail et de fidéliser la
clientèle.
6. TRAITEMENTS DES SOUS-PRODUITS : LA MOUKA
6.1. Le problème environnemental potentiel
Le rendement en huile essentielle à partir d’un matériel végétal varie de zéro (pas d’huile
essentielle) à tout au plus 2 % (en poids). Bien souvent, les rendements se situent plutôt
en dessous de 1 %. C’est donc dire qu’après le procédé d’extraction, on dispose d’un
résidu extrait, que l’on appelle parfois la mouka, qui à toutes fins pratiques a la même
masse que le matériel introduit dans le procédé. Si l’on a l’intention de produire
annuellement une tonne d’huile, on disposera de quelque 100 tonnes de résidus. Si
l’entreprise fonctionne bien, ce que l’on souhaite, après 10 ans d’opération, c’est environ
75
Huiles essentielles : de la plante à la commercialisation – Manuel pratique
1000 tonnes de résidus dont il faudra disposer. On peut ainsi imaginer l’ampleur du
problème environnemental.
En effet, l’amoncellement en un lieu donné de matière épuisée va laisser s’infiltrer dans le
sol des constituants organiques qui seront emportés par le lessivage des eaux de pluie, ou
encore simplement, par l’humidité contenue dans la matière au sortir du procédé
d’extraction. La contamination de la nappe phréatique n’est pas impossible, avec les
conséquences à long terme que cela peut avoir sur les utilisations éventuelles de cette
nappe.
Dans au moins un cas, on a vu des protestations des riverains qui se plaignaient de l’aspect
visuel (tas de déchets brun foncé) peu esthétique et des émanations olfactives pas
nécessairement agréables.
On a aussi rencontré un cas où l’entrepreneur n’avait pas pensé à ce problème et son
installation était tout simplement encombrée par ces résidus.
6.2. L’enrichissement des sols
Le matériel résiduel est une matière organique. Une première possibilité de « recyclage »
de ces résidus est l’enrichissement des sols. Son enfouissement dans un sol pauvre en
matière organique peut corriger une partie de cette lacune. Ce retour à la terre est pratiqué
par exemple sur le plateau de Valensole dans le sud-est de la France où les résidus de
l’extraction du lavandin sont ainsi ensevelis par labour.
Cette disposition n’est cependant pas toujours possible à cause de la nature des sols
(Forêts) ou simplement à cause de la nature même du résidu.
6.3. La fabrication de compost
Les résidus peuvent également être utilisés pour la fabrication de compost. Cette
possibilité peut prendre différentes variantes. La première, la plus simple, est celle qui est
utilisée par une entreprise de la région d’Ottawa (Canada). Cette entreprise extrait l’huile
du feuillage de cèdre (Thuja occidentalis). Elle s’approvisionne auprès des nombreux
particuliers qui disposent de haies de cèdre et qui régulièrement procèdent à une coupe
d’entretien. Ces mêmes particuliers (et leurs voisins sans doute) récupèrent les résidus de
distillation pour en faire une sorte de paillis qui a la propriété de limiter la pousse de
mauvaises herbes dans les parterres de fleurs.
Une autre possibilité, plus évoluée de fabrication de compost, consiste à ajouter des
éléments azotés provenant de lisiers d’exploitations agricoles. L’industrialisation de la
production de volailles, de porcs, etc. génère dans certains pays développés de grandes
quantités de telles matières. On voit donc l’intérêt d’une telle approche. Elle n’est
cependant pas simple. En général, la granulométrie du résidu doit être convenable. Il faut
pouvoir ensuite doser convenablement la formulation du produit. Le problème des odeurs
liées à l’utilisation de lisiers se trouve exacerbé…
76 Corporation LASEVE
Chapitre 3. Le matériel végétal et l’extraction
Un cas particulier doit être rapporté ici. Une entreprise française de fabrication d’huile
essentielle avait réussi à intéresser des entreprises serricoles à l’utilisation de sa
« mouka ». Après quelques années de fonctionnement, le marché de son huile essentielle
s'est trouvé réduit à peu de chose, mais par contre, le résidu végétal était en forte demande.
Ce qui, initialement, était un sous-produit était devenu la production principale de
l’entreprise.
Cet exemple montre bien que le résidu, pourvu que l’on trouve un créneau d’application,
est un produit potentiel susceptible de participer aux revenus de l’entreprise.
6.4. Le séchage et la récupération d’énergie
Les résidus sont formés de matière organique combustible : ils peuvent donc être utilisés
comme source d’énergie, en particulier pour la production de la vapeur nécessaire à
l’extraction de l’huile essentielle. Le procédé demande quelques transformations du
résidu.
Au sortir de l’alambic, la mouka est à une température de 60 à 80 °C et elle contient
une quantité d’humidité appréciable. Lorsqu'elle est exposée à l’air libre, la plupart de
l’humidité s’échappe rapidement. Ce séchage se complète d’autant plus rapidement que
la température externe est élevée et que le degré d’humidité est faible. L’exposition à
l’air sous abri protège évidemment des risques inhérents à la pluie et, a fortiori, à la
neige.
Il faut ajouter que la manipulation de cette matière séchée n’est pas toujours simple.
Dans les pays où la main d’œuvre ne constitue pas un problème économique important,
la manipulation de cette matière est relativement aisée. Dans les autres cas, la
mécanisation du recyclage de ces matières dans les fournaises demande des
investissements parfois importants. Il faut amener la matière à une granulométrie
convenable et disposer de brûleurs spécifiques dont la caractéristique est de n’être pas
bon marché.
6.5. La fabrication d’aliments pour bétail
Cette dernière possibilité d’utilisation des résidus comme nourriture pour bétail ne
semble pas avoir été envisagée à grande échelle même si, théoriquement du moins,
certains des résidus ont des propriétés qui s’apparentent à certains fourrages. L’auteur
n’a pas connaissance d’un usage significatif de la mouka dans ce domaine. Certains
exploitants ont déjà observé que certaines moukas (feuillages de sapin baumier – Abies
balsamea et de l’épinette noire – Picea mariana au Québec) ont des propriétés
gustatives, semble-t-il, très appréciées des bovins. Il est possible que la cuisson ait
transformé, au moins partiellement (peut-être par hydrolyse), la matière végétale en
libérant des sucres. Rappelons que ces animaux ont la particularité de digérer la lignine.
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Huiles essentielles : de la plante à la commercialisation – Manuel pratique
7. LA DISPOSITION DES EAUX RÉSIDUELLES
On a vu au chapitre 2 que l’eau de refroidissement consomme de 120 à 170 litres pour
100 kg de matière végétale traitée. Pour une entreprise qui traite 100 tonnes de matière
végétale annuellement, cela demande donc 120 000 à 170 000 litres d’eau. C’est
beaucoup, à moins que l’entreprise ne soit située près d'une source d'eau abondante en
période de distillation. C’est là une raison majeure pour bien situer l’usine. Notons
cependant que cette eau de refroidissement ne subit en principe aucune contamination
sauf, éventuellement, la pollution thermique. Sa disposition dans la nature est donc
normalement simple. Évidemment, si cette eau a un coût appréciable ou si le débit
disponible de cette eau n'est pas suffisant et/ou si l’évacuation de sa charge thermique
pose problème, sa re-circulation et son refroidissement s’imposent.
Par ailleurs, les quantités demandées pour la génération de vapeur dépendent de
différents facteurs, tels que l’installation, la taille de l’alambic et la durée de l’extraction.
En retenant pour fixer les idées (Cf. chapitre précédent) une quantité de 14 litres d’eau
pour 100 kg de matières végétales à traiter, la même usine a besoin de 14 000 litres
d’eau pour générer la vapeur nécessaire au traitement de 100 t de végétal. Après
séparation de l’huile, au sortir du vase florentin, cette eau est probablement contaminée
par des molécules organiques.
Dans certains cas, cette eau à une valeur commerciale. Elle peut être utilisée comme
arôme alimentaire comme les eaux blanches des fleurs de bigaradier. Ce produit est
largement utilisé au Maroc et dans tous les pays arabes comme aromatisant des
pâtisseries, desserts et certains plats cuisinés. Certains hydrolats (eaux blanches) sont
également utilisés pour le traitement de certaines affections bénignes ou pour se
parfumer. L’eau de fleur de bigaradier et l’eau de rose sont deux exemples les plus
connus pour ces types d’utilisation.
Cependant, dans le cas le plus général, cette eau n’a pas de valeur commerciale. Son
rejet dans l’environnement rejoint alors le problème environnemental déjà soulevé pour
la mouka au point 6.1. Le recyclage de cette eau en circuit fermé doit être envisagé. On
a vu, au chapitre 2, que dans certains cas, ces eaux de distillation contiennent des
produits d’intérêt et qu’un système de cohabation permet de réinjecter cette eau et les
produits qu’elle contient, dans le système d’extraction.
8. RÉFÉRENCES
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78 Corporation LASEVE
Chapitre 3. Le matériel végétal et l’extraction
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