Jacques Hamel, martyr du fanatisme et des lâchetés politiques

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Jacques Hamel, martyr du fanatisme et des lâchetés politiques
Jacques Hamel, martyr du fanatisme et
des lâchetés politiques
FIGAROVOX/TRIBUNE – Le père Jacques Hamel a été égorgé par deux dijhadistes,
dont l’un avait déjà été arrêté pour terrorisme. Pour Héloïse Lenesley, cet
événement révèle le poids tragique des lâchetés politiques qui minent la
nation.
Héloïse Lenesley est journaliste. Elle collabore notamment à Causeur.
Aujourd’hui, nous sommes des millions de Français hébétés, révoltés,
poignardés en plein cœur par l’assassinat barbare de Jacques Hamel, prêtre,
84 ans. Il était réputé bienveillant, discret et serviable. Ordonné en 1958,
il officiait à Saint-Étienne-du-Rouvray où, bien que retraité, il secondait
le curé de la paroisse et célébrait la messe quand celui-ci était absent,
comme ce mardi 26 juillet. Ce jour-là, deux endoctrinés islamiques ont surgi
et l’ont égorgé. Quelle belle proie, quel trophée de rêve pour exacerber
l’émotion et attiser les rancœurs bellicistes. Après avoir éviscéré la fête
nationale de la France avec un camion fou, on saigne ses églises à blanc. Ses
symboles sont écorchés, broyés, calcinés un à un, au nom d’une haine
vengeresse que Daech est parvenu à merveille à exporter et à franchiser.
Désormais, n’importe quel abruti désœuvré, mu par un héroïsme de
Le père Jacques Hamel a été sacrifié sur l’autel de la bêtise du fanatisme
mais aussi de la lâcheté politique.
branquignol pour donner un sens à une vie trop ordinaire, peut se procurer la
pochette surprise du parfait petit djihadiste via les réseaux salafistes qui
sévissent en banlieue ou sur Internet. Le narcissisme du sauvage. Le père
Jacques Hamel a été sacrifié sur l’autel de l’insondable bêtise du fanatisme
mais aussi de la répulsive lâcheté politique qui, pour ne pas froisser les
susceptibilités communautaristes ou pour enrayer la fragmentation sismique de
l’unité nationale, a pris le parti de baisser les yeux, de ménager la chèvre
et le chou, en espérant naïvement que le soleil radieux du vivre-ensemble
succèderait à la tempête du survivre-malgré. Il est aisé de se réfugier
derrière la crainte d’une guerre civile fantasmagorique pour légitimer
l’inertie, le clientélisme, et excuser l’absence de courage politique.
Pendant quatre ans, messieurs Hollande, Valls, Cazeneuve, Ayrault et
consorts, mesdames Taubira, Vallaud-Belkacem, Cosse, Duflot, sans oublier la
maire de Paris Anne Hidalgo, nous ont confinés jusqu’à la suffocation dans la
honte d’être Français. Ils ont déclaré la guerre non pas aux racailles mais à
l’islamophobie, ils se sont mis en tête de traquer le racisme dans les
moindres recoins des réseaux sociaux, de pratiquer la mixité sociale à grande
échelle au risque de mieux disséminer le prosélytisme, de diaboliser la
«France rance» en distillant des rimes subliminales entre gaullisme avec
fascisme. Comment l’ennemi peut-il
Ils ont déclaré la guerre non pas aux racailles mais à l’islamophobie, ils
se sont mis en tête de de diaboliser la « France rance ».
avoir une once de respect pour un pays émasculé par les perpétuelles
jérémiades expiatoires, amputé de son récit national, mutilé par sa peur
délirante d’un retour aux heures sombres? Il est plus facile d’équarrir une
nation qui a déjà un genou à terre. Le sang versé par Jacques Hamel ne l’aura
pas été en pure perte. Il a sorti de leur torpeur des médias qui ne se
hasardent plus, pour l’heure, à des diagnostics de Diafoirus de l’info,
invoquant les actes d’un «déséquilibré», «forcené» ou «dépressif». Soit dit
en passant, on prend le pari que les millions de catholiques rendus
dépressifs par cette tragédie n’iront pas se défouler en crucifiant un imam.
Pas plus qu’ils n’iront vider des Kalash’ sur des musulmans en terrasse au
prétexte que le christianisme est la religion la plus persécutée dans le
monde. Lesdits catholiques ont d’ailleurs reçu la compassion et la solidarité
de François Hollande. Le président estime-t-il que ce crime sauvage
n’endeuille que la communauté catholique? C’est, plus que jamais, la France
entière, qu’elle soit croyante, agnostique ou athée,
On prend le pari que les millions de catholiques n’iront vider des Kalash’
sur des musulmans en terrasse au prétexte que le christianisme est la
religion la plus persécutée dans le monde.
qui est meurtrie par ce nouvel attentat. Cette France-là veut comprendre
pourquoi la sécurité nationale n’est pas assurée. Pourquoi une majorité
d’élus de gauche vote contre une proposition d’amendement visant à renforcer
les fermetures administratives de mosquées salafistes. Pourquoi l’un des
terroristes, qui avait tenté de partir en Syrie et passé un an en prison, a
été libéré en mars, dans l’attente de son procès pour «association de
malfaiteurs en vue d’une entreprise terroriste». Pourquoi les propositions du
rapport Fenech ont été snobées par les dirigeants. Pourquoi des experts aussi
précieux que le juge Trévidic sont écartés par des lois idiotes. Pourquoi on
se perd dans des mesurettes comme les centres de déradicalisation, ce patch
antifanatisme à un million et demi d’euros par an. Pourquoi il est de mauvais
goût d’évoquer les failles du Renseignement et de critiquer la fusion des RG
et de la DST. Les Français ne veulent plus d’un François Hollande qui leur
entonne jusqu’à la nausée «aux larmes citoyens». Ils veulent gagner la guerre
civilisationnelle que l’obscurantisme leur a déclarée. Répliquer à l’attaque
ne relève pas de la basse vengeance mais du simple bon sens, à moins d’être
suicidaire. Si le gouvernement redoute à ce point les dérives
insurrectionnelles, il serait bien inspiré de changer enfin de langage et de
méthode.
Eloïse Lenesley
Source :© Le Figaro Premium – Jacques Hamel, martyr du fanatisme et des
lâchetés politiques