QUE PENSER DE LA TARIFICATION SOLIDAIRE ET

Transcription

QUE PENSER DE LA TARIFICATION SOLIDAIRE ET
QUE PENSER DE LA TARIFICATION SOLIDAIRE ET PROGRESSIVE DE L'EAU ?
Introduction
Le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale est l'autorité compétente en matière de
politique et de gestion de l'eau.
Les opérateurs de l'eau sont :
Bruxelles Environnement – IBGE : organisme d'intérêt public en charge de la gestion de
l'environnement dont l'eau en Région de Bruxelles-Capitale.
VIVAQUA (ancienne CIBE) : Intercommunale de l'eau en charge de :
-la production de l'eau qu'elle fournit essentiellement aux autres intercommunales et communes ;
-l'exploitation des réseaux de distribution et de la gestion du service aux abonnés, ainsi que de la
gestion des réseaux d’égouttage, collecteurs et bassins d'orage, pour le compte des sociétés
intercommunales (dont Hydrobru) et des communes de la région ;
-l'exploitation de la station d'épuration de Bruxelles-Sud.
HYDROBRU (ancienne IBDE) : aujourd'hui Intercommunale Bruxelloise de Distribution et
d'Assainissement en charge de la distribution d'eau aux habitants et aux entreprises des 19
communes de la Région et de la gestion des réseaux d’égouttage des 19 communes bruxelloises
(ainsi que des mesures à prendre pour éviter les inondations des quartiers à risque).
La SBGE Société Bruxelloise de Gestion de l'Eau, organisme public en charge de la gestion et de
l'épuration des eaux usées de la Région et de la mise en place de mesures contre les inondations.
Aquiris : un consortium industriel privé (Véolia) en charge de la conception, la construction et
l'exploitation de la station d'épuration de Bruxelles-Nord pour 20 ans.
A part Aquiris, l'ensemble du secteur de l'eau est dans les mains du secteur public à Bruxelles. 1
Pour ce qui est du coût global de l’ensemble des services hydriques et la couverture de son
financement, la Région de Bruxelles-Capitale applique selon la Directive Cadre européenne sur
l’Eau de 2000 le principe de la fixation « du prix de l'eau » sur base du critère de la récupération
totale des coûts de production avec toutefois des spécificités et des modalités propres car elle
maintient l'importance d'une couverture partielle directe par les finances publiques.
Vu son statut public et ne devant rétribuer aucun actionnaire privé, le tarif appliqué par VIVAQUA
est, à conditions comparables, inférieur aux tarifs appliqués ailleurs en Europe par les opérateurs
privés sans que ses performances soient moindres dans les domaines clés comme la gestion, la
productivité, la qualité au contraire. Ce système permet à VIVAQUA de réinvestir son résultat
financier positif dans l'amélioration de l'outil (production, transport, stockage). C'est d'ailleurs tout
à fait logique puisqu'il est dans une situation de monopole en tant qu'opérateur principal sur
Bruxelles pour l'ensemble des activités du cycle de l'eau.2
Cette situation particulière de Bruxelles fait en sorte qu'en 2009 la facture s'élève en moyenne par
ménage à 204,48 Euros alors qu'elle est en Région flamande de 322,07 Euros et en Région wallonne
de 324,53 Euros. Toutefois, plus que dans les deux autres Régions, la facture risque de fort
augmenter les prochaines années compte tenu du besoin croissant d’investissement pour les réseaux
d'égouttage.3
La diminution de la facture d'eau à Bruxelles s'explique également par le système de facturation mis
en place à Bruxelles en ce qui concerne le prix de l'eau pour les ménages.
1 « Bruxelles Eau, mon Amour » sous la direction de Riccardo Petrella, Bruxelles, 2010 p. 52
2 Ibidem, p. 55
3 Lutte contre la pauvreté Rapport 2008-2009, Bruxelles, 2009 p. 171
2
Le prix de l'eau à Bruxelles ou la tarification solidaire et progressive
Le prix au mètre cube payé par le consommateur bruxellois est une addition de nombreux éléments.
Il est en effet calcule´ sur la base du prix de l’eau fournie selon son tarif propre par Hydrobru, de la
redevance forfaitaire pour l´épuration de l’eau fixée par la Société Bruxelloise de Gestion de l’Eau
(SBGE), de la redevance sur l’égouttage fixée par Hydrobru et du montant de l’abonnement fixé par
les communes.4
De plus par les principes de tarification existant depuis 2005 et confortés dans l’ordonnance du 20
octobre 2006, le Gouvernement bruxellois a voulu soutenir financièrement une utilisation
rationnelle et économe de l’eau et par là même éviter de faire peser sur les petits consommateurs
une application stricte du principe du coût vérité. Ainsi, l’ordonnance prévoit une tarification
solidaire et progressive. Les prix au mètre cube varient en fonction de la quantité consommée et on
tient compte du nombre de personnes dans le ménage.5
L'ensemble des prix est facturé selon 4 tranches : une tranche vitale (de 0 à 15m³/hab /an), une
tranche sociale (de 15 à 30 m³/hab/an), une tranche normale (de 30 à 60 m³/hab/an) et une tranche
de confort (de 60 m³/hab/an et plus) et à cela s'ajoute le prix de l'abonnement fixé par les communes
et qui varie de 11,80 Euros à 23,83 Euros par an par logement.6
Cela diminue le coût de la facture selon la plupart des intervenants pour 70% des ménages voire
plus dans les logements sociaux mais il s’agit de moyennes et cela n'est pas aussi simple que cela à
appliquer et ce système pose de nombreux problèmes qui soulèvent la polémique.
Le prix de l’eau et les augmentations de celui-ci restent soumis à l’approbation du Ministre fédéral
compétent.
Difficultés d'appliquer la tarification solidaire et progressive
Pour appliquer le nouveau prix de l’eau, il faut désormais connaître la consommation individuelle
des ménages et la composition précise de ceux-ci. Hydrobru a accès à ces données via le registre
national et cela est aisé quant à un compteur Hydrobru correspond un seul logement alimenté
exclusivement en eau froide ou sans système collectif d’alimentation en eau chaude.
Or 270.000 logements à appartements multiples à Bruxelles sont desservis par un compteur unique
agréé par Hydrobru. Même lorsque des compteurs de passage existent, il faut savoir qu'Hydrobru
ne connaît que ses propres compteurs. Cette attitude est d’ailleurs cohérente avec la politique de
rationalisation des compteurs menée précédemment par Hydrobru afin de limiter la charge de
travail liée au relevé des compteurs. Dans le cas où un seul compteur dessert un immeuble
comportant plusieurs logements, il sera procédé comme si l’immeuble était occupé par une seule
famille avec une facture que l’on ne divise plus par appartement mais par nombre de personnes
connues via le registre national. Cela signifie que c'est le gestionnaire de l'immeuble qui devra faire
la répartition entre les logements d'après la composition de ceux-ci et leur consommation pour
autant qu'il la connaisse s'il y a des compteurs de passage.
Et il ne suffit pas de placer des compteurs individuels à cause de la réalité du bâti bruxellois. Très
souvent, dans les grands immeubles, la gestion des conduites d’eau n’a pas été prévue pour qu’un
logement soit considéré comme une entité autonome de consommation. Souvent, le système
d’alimentation est conçu avec une colonne qui alimente l’ensemble des cuisines situées en façade,
une autre conduite alimentant toutes les salles de bain situées à l’arrière du bâtiment et peut-être
encore une troisième conduite pour les sanitaires. Dans ce cas de figure qui est fréquent, il faudrait
placer des compteurs individuels sur chaque conduite dans chaque logement. Si on est dans un
4 Lutte contre la pauvreté Rapport 2008-2009, Bruxelles, 2009 p. 171
5 Déclaration de la Ministre Hytebroeck du 17 octobre 2006 http//evelyne.huytebroeck.be
6 Site d'Hydrobru http:// www.hydrobru.be
3
immeuble à 20 appartements conçus sur base de trois colonnes d’eau verticales, on devrait placer 60
compteurs individuels et chaque appartement devrait faire le relevé de trois compteurs. Bref, cela
entraînerait un coût et une gestion de relevé des compteurs absolument inacceptables. Modifier les
conduites entraînerait également des coûts disproportionnés.
Les immeubles publics à appartements multiples avec un compteur unique posent également
problème. Personne ne contestera que les logements sociaux accueillent les familles les plus
précarisées. Or le gouvernement bruxellois n’a pas mis en place un système pour permettre aux
plus démunis de bénéficier de cette tarification sociale. Il existe en effet un arrêté du
Gouvernement bruxellois du 26 septembre 1996 (modifié en février 2004) organisant la location des
habitations gérées par la SLRB et par les SISP. Cet arrêté impose aux gestionnaires publics
d’immeubles à appartements multiples munis d’un seul compteur de répartir les frais relatifs à la
consommation d’eau comme suit (article 29 § 2) : 80% sont répartis sur base de la superficie des
logements et 20% sont répartis de manière égale entre le nombre de logement.
Il existe donc une réglementation qui impose une répartition des coûts. Donc, pas de tarification
solidaire... Cet arrêté est toujours d’application et le Gouvernement n’a pas l’intention de le
modifier. Mais si cet arrêté empêche une répartition réelle de coûts entre les locataires, il n’empêche
pas le calcul de la facture...
On constate en 2005 selon Didier GOSSUIN s'exprimant au Parlement bruxellois que dans le tiers
des communes de la Région bruxelloise, on est confronté à des augmentations ponctuelles des
factures d’eau pour certains immeubles. Ainsi, sur les communes d’Auderghem, d’Etterbeek, de
Watermael-Boitsfort, d’Uccle et des deux Woluwe, plus de 1500 locataires sociaux ont vu leur
facture augmenter de 0,4 à 34%. Dans certains cas, l’existence de compteurs individuels (non
agréés) permettra de répartir correctement ces augmentations (sauf si on applique l’arrêté de
répartition). Naturellement, certains immeubles de logements sociaux dans ces mêmes communes
verront leur facture diminuer. Mais, les gens ne paient jamais une moyenne et il est injuste qu’une
mesure qui se veut sociale revient à pénaliser des personnes à faibles revenus ! Dans le même
temps, une famille disposant d’une seconde résidence à la mer ou dans les Ardennes et y résidant 2
ou 3 mois par an verra sa facture inévitablement diminuer...
Un autre exemple des effets pervers : une mère ou un père divorcé, résidant dans un logement social
et jouissant d’une garde alternée verra sa facture inévitablement augmenter ou diminuer en fonction
de l’adresse de domiciliation des enfants. Or, ces enfants ne peuvent être domiciliés à deux endroits
différents.
Une autre difficulté provient de ce que beaucoup d’immeubles sont souvent d’une qualité moyenne
et les conduites et équipements sanitaires sont vétustes et donc sujets à des déperditions entrant en
ligne de compte dans la consommation. 7
Les indications du site Hydrobru montrent que les fuites occasionnées par ces équipements peuvent
entraîner des coûts importants sur la facture d'eau.8
Ce que vous coûte un robinet qui fuit !
Fuite
Goutte à goutte
Mince filet d'eau
Filet d'eau
Quantité
gaspillée
4 litres/heures
35 m³/an
16 litres/heures
140 m³/an
63 litres/heures
552 m³/an
Coût au prix moyen de 2,41euros/m³ (tout
compris)
84,35 euros / an
337,4 euros / an
1.330,32 euros / an
7 Didier GOSSUIN, Prix de l'eau en Région bruxelloise, les effets pervers de la tarification solidaire, Bruxelles, 20
mars 2005 in Courrier électronique des FDF http//www.fdf.be
8 Site d'Hydrobru http : // www.hydrobru.be
4
Forte fuite au WC (flotteur bloqué) jusque
170l/heure
1 460 m³/an
Soupape de sécurité de boiler
défectueuse
Fuite à la chasse du WC
jusque
170l/heure
1 460 m³/an
25 litres/heure
219 m³/an
3.518,60 euros/an
3.518,60 euros/an
527,79 euros/an
Il faut donc impérativement installer des compteurs individuels par logement là où c'est possible et
certainement dans les nouveaux immeubles en construction et améliorer les installations.
Il faut aussi harmoniser les législations concernant les logements sociaux et les AIS afin de mettre
fin aux effets pervers dénoncés plus haut.
Ces constats ne doivent pas nous conduire à abandonner cette tarification solidaire et progressive
pour les ménages à Bruxelles qui était une revendication de la CGEE depuis longtemps mais il faut
l'évaluer sérieusement et voir comment en corriger les effets pervers pour les ménages et
spécialement les plus précarisés.
Cela démontre d'autant plus l'intérêt des autres mesures sociales à Bruxelles comme le fonds social
de l'eau et le recours au juge avant toute interruption d'eau pour les ménages ainsi que l’utilisation
rationnelle de l’eau.
Le fonds social de l'eau
De nombreux problèmes de payement se posent. Le rapport de lutte contre la pauvreté a montré sur
base des chiffres reçus des sociétés distributrices incomplets pour la Wallonie et la Flandre qu’il y
avait en 2008 : 32504 mises en demeure en Région bruxelloise contre 217416 en Région wallonne
et 174822 en Région flamande ainsi que 12342 plans de paiement en Région bruxelloise contre
53396 en Région wallonne et 32335 en Région flamande.9
En Région bruxelloise, le propriétaire de l'immeuble peut être tenu responsable et obligé de payer
les factures si l'occupant du logement ne paye pas ses factures même si celui-ci est l'abonné du
compteur.
En cas de problème pour payer sa facture d'eau, on a deux solutions : demander à Hydrobru un
paiement étalé sur plusieurs mois ou demander une intervention du fonds social.
Ce fonds social créé en 1998 a été consolidé par l'ordonnance d'octobre 2006.
Il est géré par les CPAS des 19 communes. Il est destiné à venir en aide à toute personne physique
qui éprouve des difficultés à régler sa facture d'eau.
Si on éprouve des difficultés de paiement, on s'adresse au CPAS de sa commune même si on n’est
pas minimexé.
Cette aide se traduit :
1. soit par le règlement de la facture adressée par Hydrobru;
2. soit, dans le cas où la provision pour la consommation d'eau est incluse dans le prix du loyer, par
la prise en charge d'un montant calculé sur une base forfaitaire de 80 l/j/pers.
Ces 80 litres permettent de couvrir les besoins vitaux, ce qui représente environ 8,5 litres pour la
cuisine, 54 litres pour l'hygiène corporelle et le WC, et 17,5 litres pour le nettoyage et la lessive ;
3. soit par l'utilisation d'une partie du fonds social à la charge salariale d'un ouvrier chargé
9 Lutte contre la pauvreté Rapport 2008-2009, Bruxelles, 2009, p.173.
5
d'effectuer des réparations de fuites aux chasses d'eau, robinetteries ou d'émettre des conseils en
consommation.
Ce fonds social est une initiative d’Hydrobru. Il est alimenté par une contribution prélevée sur
chaque m³ d'eau facturé, et attribué aux CPAS de chaque commune associée au prorata du nombre
de minimexés et équivalents minimexés domiciliés dans la commune.
Le budget du fonds social s'est élevé, pour l'exercice 2006, à 603.121,48 Euros. C’est le
Gouvernement bruxellois qui fixe annuellement la part des recettes engendrées par la tarification de
l’eau qui doit être affectée à ce fonds.
Les CPAS des 19 communes de la région bruxelloise ont tous adhéré par convention à ce système10.
Le fonds social a été utilisé à 95,49 % par les communes bruxelloises selon le rapport 2007 de
l'IBDE.11
Recours au juge avant toute interruption de fourniture d'eau
L'article 5 de l'ordonnance du 8 septembre 1994 prévoit une procédure avant d'interrompre la
fourniture d'eau et est ainsi rédigé :
« La société distributrice dispose du pouvoir d'interrompre les fournitures convenues, sans autres
formes que celles prescrites par les conditions générales et particulières lorsque la distribution d'eau
s'effectue au bénéfice d'une personne morale ou du titulaire d'une profession libérale, d'une activité
commerciale, artisanale, industrielle, de services ou administrative, sans que cette liste soit
limitative.
Lorsque la distribution s'effectue à des fins domestiques au bénéfice d'une personne physique
résidant ou étant domiciliée dans l'immeuble à usage d'habitation pour lequel le raccordement ou
l'abonnement a été réalisé, la société distributrice ne peut interrompre unilatéralement la fourniture.
Le cas échéant, la société distributrice poursuit devant la juridiction compétente l'interruption des
fournitures, un mois après avoir sollicité l'avis du bourgmestre ou du président du C.P.A.S. de la
commune de l'usager. L'usager peut demander par lettre recommandée à la société distributrice,
dans un délai de dix jours après la réception de la mise en demeure prévue dans les conditions du
distributeur, que l'avis des autorités susvisées ne soit pas sollicité.
Dans ce cas, la société distributrice saisit la juridiction compétente sans autre formalité.
Avant que ne soit mis en œuvre l'interruption des fournitures, la décision judiciaire autorisant celleci est notifiée par la société distributrice au bourgmestre ou au président du C.P.A.S.
Cette mesure ne pourra toutefois avoir pour effet de priver d'eau le nouveau locataire d'un immeuble
unifamilial, ni le(s) usager(s) d'un immeuble à appartements équipé d'un compteur unique dans la
mesure où la preuve de ce qu'il(s) s'est (se sont) acquitté(s) de leur consommation entre les mains de
l'abonné est rapportée.
Par dérogation au premier alinéa, lorsque la distribution s'effectue au bénéfice d'hôpitaux, de
crèches, de homes ou d'établissements scolaires, organisés ou subventionnés par les pouvoirs
publics, et pour autant que la distribution soit réalisée au profit de personnes physiques qui jouissent
des services dispensés par ces établissements, la société distributrice ne peut interrompre
unilatéralement la fourniture. Le cas échéant, la société distributrice poursuit devant la juridiction
compétente l'interruption des fournitures. ».12
L'article 38 de l'ordonnance du 20 octobre 2006 prévoit en outre : « ... Aucune interruption de la
distribution d’eau à des fins domestiques ne peut s’effectuer pendant la période des vacances
annuelles (du 1er juillet au 31 août) ainsi que pendant la période hivernale (entre le 1er novembre et
le 31 mars), sauf pour des raisons techniques ou des raisons de sécurité.... ».13
10
11
12
13
Site d'Hydrobru http : // www.hydrobru.be
Lutte contre la pauvreté Rapport 2008-2009, Bruxelles, 2009 p. 176
Ordonnance bruxelloise du 8 septembre 1994 publiée au Moniteur Belge du 29 septembre 1994.
Ordonnance bruxelloise du 20 octobre 2006 publiée au Moniteur Belge du 3 novembre 2006.
6
La situation semble maîtrisée puisque l'on compte en 2008 : 99 coupures pour la Région bruxelloise
contre 649 en Région wallonne et 467 en Région flamande selon les chiffres partiels pour la
Wallonie et la Flandre donnés par le rapport de lutte contre la pauvreté.14
Il faut également légiférer pour empêcher le propriétaire de procéder lui-même à la coupure d’eau
du logement d’un locataire qui ne s’acquitte pas du payement de son loyer ou de ses charges.
Une utilisation rationnelle de l'eau
On peut utiliser l'eau rationnellement mais pour cela, il faut disposer d'un compteur individuel pour
identifier sa consommation et profiter des efforts consentis. On peut aussi pratiquer de petits gestes
au quotidien : prendre une douche au lieu d'un bain, prendre un gobelet pour rincer ses dents,
vérifier son compteur pour déceler les fuites éventuelles.
On peut économiser l'eau en adaptant l'installation intérieure (mousseur ou économiseur d'eau
installé sur le robinet d’eau, pommeau économique, diminution du volume des chasses d'eau,...).
On économise beaucoup en utilisant de l'eau de pluie mais ça suppose des frais d'installation
importants.
Il faut aussi remplacer toutes les installations intérieures qui ont vieilli et entraînent des coûts
importants (comme les fuites).
Mais toutes ces solutions entraînent des coûts qui ne peuvent être supportés par les ménages
notamment précaires pour qui elles seraient les plus utiles.
Des dispositifs comparables à ce qui existe pour l'énergie comme les primes, les prêts verts, …
devraient être mis en place par les autorités bruxelloises mais en veillant à ce qu'elles servent
prioritairement aux plus démunis et soient accessibles effectivement aux locataires et en privilégiant
les solutions collectives plutôt qu'individuelles.15
En conclusion
On aura compris que l'essentiel pour le moment en Région Bruxelloise est d'améliorer le système
mis en place de la tarification solidaire et progressive de l'eau pour les ménages.
Avec le Syndicat des Propriétaires, il nous paraît que pour faire œuvre constructive, il faut en
revenir au principe voulu par la réforme et qui est en réalité : lutter contre le gaspillage de l’eau en
favorisant personnellement le consommateur le plus économe en eau, grâce à la tarification
progressive pour chaque ménage. Le système mis en place de tarification progressive globale
concerne un groupe indifférencié – et imprécis ! - de personnes dont les unes peuvent être très
économes en eau et les autres très laxistes !
En outre, la mise en œuvre de ce système non conforme aux principes officiels a débouché
inévitablement sur des conflits. Il faut donc en revenir au point de départ, qui implique que le
décompte soit opéré par ménage, d’une manière ou d’une autre !
Là où les compteurs individuels IBDE sont impossibles à placer pour des raisons techniques
diverses, il faut mettre au point un ou, s’il le faut, deux ou plusieurs systèmes réglementaires,
rendus obligatoires de façon à éviter les contestations et adaptés à ces cas.
Ces systèmes doivent : favoriser une consommation économe, être d’une application simple,
incontestable, compréhensible et peu coûteuse pour toutes les personnes concernées et éviter de
faire appel uniquement à des données irréelles telles que les inscriptions au Registre national et
domiciliations au 1er janvier, qui sont très souvent en contradiction avec les situations concrètes.
Bref, l’application actuelle de la réglementation est à revoir d’urgence.
Il n’est pas acceptable que l’on continue à facturer et répartir « comme on peut » la consommation
14 Lutte contre la pauvreté Rapport 2008-2009, Bruxelles, 2009, p.173.
15 Ibidem, p. 177
7
d’eau des bruxellois, pour cause d’inapplicabilité de la réglementation officielle !16
Nous ne pouvons donc que nous inquiéter lorsque nous lisons dans le projet de plan bruxellois sur
l'eau que celui-ci prévoit sans plus le maintien des principes actuels pour la tarification solidaire et
progressive de l'eau pour les ménages en tenant compte de la taille des ménages sans évoquer un
instant le problème posé par les logements sans compteur d'eau individuel d'Hydrobu pour répartir
les coûts entre les différents logements même s'ils disposent d'un compteur de passage. La question
posée par l'existence de 2 législations contradictoires dans les logements sociaux n'est également
pas abordée.17
Nous demandons avec insistance que l'on étudie ce problème avec sérieux et que l'on mette en place
un système qui garantisse à tous un accès effectif à une quantité d'eau sans effet pervers pour les
usagers y compris locataires d'un logement sans compteur individuel d'Hydrobru.
Les autres mesures comme le fonds de l'eau, le passage obligé devant le juge avant toute coupure
d'eau, l'utilisation rationnelle de l'eau ainsi que le maintien de l'ensemble de la politique de l'eau
dans le secteur public sont essentielles et doivent être maintenues à tout prix.
Nous insistons particulièrement sur 'une harmonisation vers le haut des pratiques des CPAS et des
communes ainsi que sur une concertation entre tous les acteurs. Cela pourrait se faire par la
création d’une concertation régionale réunissant les CPAS, les communes, tous les services sociaux
et les acteurs concernés sur le modèle des coordinations locales organisées et subsidiées par la
COCOM. Elle pourrait par exemple rechercher des solutions pour l’application de la tarification
solidaire dans les logements sans compteurs individuels d’Hydrobru, étudier comment mieux tenir
compte de la composition réelle des ménages, améliorer les relations avec Hydrobru, fixer des
règles concernant la facturation, les plans de payement, … Elle pourrait chercher comment
améliorer les relations entre propriétaires et locataires en matière d’eau et négocier des règles à
intégrer dans les législations concernant les relations entre propriétaires et locataires tant des
logements privés que publics.
Il faut sans doute réfléchir également à des tarifs sociaux pour l'eau en veillant qu'ils soient basés
principalement sur des critères de revenus, les mêmes pour tous sur l'ensemble de la Belgique (le
tarif de la société qui pratique le prix le plus bas) et dont la différence de prix serait payée au
distributeur par un fonds national alimenté par les cotisations de l'ensemble des sociétés de
distribution de façon équitable tenant compte de leurs recettes et de leurs dépenses justifiées et
contrôlées. Cela suppose que l’on ait réglé la question des logements sans compteur individuel
spécifique d’Hydrobru. Il faudrait réfléchir aux différences de prix pratiquées entre communes en
ce qui concerne les abonnements qu’on intègre ou non dans le tarif social pratiqué.
C'est en réfléchissant et en cherchant ensemble que nous trouverons des solutions permettant de
mieux en mieux de garantir à chacun, indépendamment de ses revenus un accès effectif à une
quantité d'eau suffisante pour la satisfaction de ses besoins vitaux et la vie en société.
C'est des efforts dans ce sens que s'engage à mener la Coordination Gaz-Electricité-Eau Bruxelles
(CGEE) dans les mois qui viennent selon ses moyens.
Claude ADRIAENSSENS
Coordination Gaz-Electricité-Eau Bruxelles (CGEE)
04.05.11
Renseignements utiles
Claude ADRIAENSSENS
GSM : 0473/56.72.30
E-mail : [email protected]
16 Pierre DE BREMAECKER, La distribution d'eau à Bruxelles. Mises au point du SNP suite aux
polémiques et pétitions.in le Cri, n° 297, Bruxelles, 2005, p.4 http://www.aes-snp.be
17 Région de Bruxelles-Capitale Plan de gestion de l'eau – questions importantes, p.14
http : //documentation.bruxellesenvironnement.be/documents/Plan question Eau

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